Charles Porée

Charles Porée
Charles Porée
Gravure de Charles Devrits
Gravure de Charles Devrits

Activités Orateur, poète, homme de lettres
Naissance 4 septembre 1675
Vendes
Décès 11 janvier 1741
Paris
Langue d'écriture Français

Charles Porée, le 4 septembre 1675 à Vendes et mort le 11 janvier 1741 à Paris, est un éducateur, orateur, poète et homme de lettres français.

Sommaire

Biographie

Charles Porée est le fils de Thomas Porée et de Madeleine Richer, de la Ferté-Macé. Son frère Charles-Gabriel était également écrivain.

Charles Porée, après avoir fait au collège du Mont, à Caen, de brillantes études dans lesquelles ses succès lui valurent, de la part de ses condisciples, le titre de « dictator perpetuus », entra chez les jésuites, le 8 septembre 1692, alors quil nétait âgé que de dix-sept ans. Il fit ensuite deux années de noviciat, une troisième année quil employa à repasser les humanités, et il fut envoyé, à peine âgé de vingt ans, à Rennes, en 1695, pour y commencer son cours de régence. La manière dont il sacquitta de cet emploi engagea ses supérieurs à le charger immédiatement de la rhétorique, et le succès quil obtint dans cette classe fut tel, quon le regarda dès lors comme un homme qui égalerait un jour ceux qui avaient parcouru la carrière du professorat avec le plus déclat.

Appelé lannée suivante à Paris pour se disposer à entrer dans les ordres sacrés, le jeune Porée prit la direction dun grand nombre de pensionnaires. Les progrès rapides des élèves justifièrent le choix quon avait fait de lui. Cette occupation ne lempêcha pas dapprofondir la théologie assez pour y briller. Il sessaya aussi à la prédication de façon à donner une idée assez avantageuse de ses talents pour faire hésiter les jésuites sur la destination quils devaient lui donner. Peu sen fallut néanmoins que, cédant à ses vives sollicitations, ils ne le consacrent aux missions étrangères.

À la fin du carême de 1708, le père Porée fut nommé à la chaire de rhétorique du collège Louis-le-Grand, il se montra à la hauteur de ses devanciers[1], peut-être même les dépassa-t-il dans lart de former les jeunes gens. Il se fit aimer de ses élèves en leur montrant quil les aimait lui-même, sappliquant à connaître leurs penchants, à démêler leurs dispositions et à développer simultanément chez eux lamour du bien et du beau, et le goût pour les lettres. Quand ses leçons publiques ne suffisaient pas, il les prenait en particulier, les rappelait à leurs devoirs, et les exhortait avec tant de douceur et de dignité, dun ton si touchant et si pathétique, que, persuadés dailleurs quil ne leur disait rien dont il ne soit lui-même pénétré, il sattira leur vénération et leur estime de telle sorte quil eut rarement besoin duser avec eux de sévérité.

Tous demeurèrent ses amis, se faisant un devoir de le consulter dans les occasions importantes de leur vie, et se dirigeant daprès ses conseils. Le plus célèbre dentre eux est, sans contredit, Voltaire, dont il avait deviné le talent et encouragé les premiers essais dès le collège, il le chargeait de faire des compliments détrennes quon demandait pour les princes et dautres grands personnages. Voltaire resta en correspondance avec le père Porée et lui envoyait ses ouvrages. On a conservé deux lettres que le philosophe écrivit à son ancien professeur en lui adressant les tragédies dŒdipe et de Mérope, les 7 janvier 1729 et 15 janvier 1759, dans lesquelles le premier montre pour le père Porée la plus vive reconnaissance, et la plus sincère déférence pour ses avis : « Vous mavez appris, dit-il en envoyant son Œdipe, à fuir les bassesses, à savoir vivre, comme, à savoir écrire. » Dans une autre, au père de La Tour, en date du 7 février 1746, il sexprime encore dune façon plus explicite :

« Rien neffacera dans mon cœur la mémoire du père Porée, qui est également cher à tous ceux qui ont étudié sous lui. Jamais homme ne rendit létude et la vertu plus aimables. Les heures de ses leçons étaient pour nous des heures délicieuses ; et jaurais voulu quil eût été établi dans Paris, comme dans Athènes, quon pût assister à de telles leçons ; je serais revenu souvent les entendre. »

Fuyant le monde, le père Porée consacrait tout son temps à ses élèves, ne sortant presque jamais, et seulement lorsquil ne pouvait sen dispenser. Létude et la prière étaient ses seules distractions aux devoirs de son poste. Ses études étaient, sauf une dizaine de poésies proprement dites et quelques harangues dapparat, presque toutes dirigées vers des matières dinstruction et la plupart des ouvrages quil a laissés sont destinés aux collèges, dans lesquels ils furent si bien reçus que ses collègues se plaignirent bientôt de ce que leurs élèves négligeaient les classiques pour ses écrits et ceux de ses imitateurs.

Le discours le plus anciennement prononcé que lon connaisse de lui le fut à Rennes, sur la fin de lannée 1699 : De usu ingenii, sive in eos qui non utuntur ingenia, vel ingenia abutuntur. Qaæ debeant esse vota Galliæ, pro sœculo proxime futuro. À partir de cette époque, il en composa un grand nombre dautres ; mais il sopposa toujours à ce quils fussent publiés, et sa modestie a privé la postérité de la plupart dentre eux. Dix seulement, qui avaient été imprimés à part, furent recueillis en 1755, malgré leur auteur, par le père Griffet, et publiés à Paris en deux volumes in-12 ; le neuvième et le dixième (1731 et 1733) sont consacrés aux critiques et aux spectacles. Le père Porée na pourtant pas eu que des panégyristes ; plusieurs critiques lont traité avec une grande sévérité. Son oraison funèbre de Louis XIV donna lieu à une polémique grave, qui dégénéra presque en querelle, entre lui et Grénan, professeur de rhétorique au collège d'Harcourt. Plus tard, les rédacteurs de lEncyclopédie lont rudement attaqué dans leur article « collège ». Tout en rendant hommage à ses qualités personnelles, ils appellent son latin « un jargon », et écrivent que ses successeurs ne sauraient trop séloigner de ses traces.

Vers la fin de lannée 1740, sentant ses forces faiblir, le père Porée avait demandé un successeur à ses supérieurs ; il voulait quitter Paris pour se livrer tout entier aux exercices de la piété. Les Mémoires de Trévoux rapportent quune fièvre violente lavait obligé à quitter sa classe pendant un jour. Il lutta contre la maladie, et trois jours avant sa mort il avait repris, au grand étonnement de tous, ses cours et célébré la messe. Le 10 janvier 1741, on lui administra les sacrements, et le lendemain, il avait cessé de vivre. Sa mort, survenue alors quil venait datteindre lâge de soixante-six ans, dont trente-trois passés dans la carrière du professorat, permit de faire un nouveau recueil de ses ouvrages, auquel il navait jamais voulu consentir.

Le père Griffet mit au jour, en 1747, sous le titre de Caroli Porée e societate Jesu sacerdotis orationes, une nouvelle édition des harangues de son confrère, qui forme trois volumes in-12, et est augmentée dun certain nombre de morceaux inédits, dont la traduction en français, par le père Brumoy, du Discours sur les spectacles, qui a été très fréquemment cité par tous les ennemis du théâtre voulant y trouver, pour servir à leur cause, des arguments dautant plus péremptoires, que le père Porée fut lui-même un auteur dramatique fort en vogue, et que ses pièces fournirent presque seules aux représentations scéniques qui eurent lieu de son temps dans les collèges. En réalité, le père Porée blâme les spectacles, dont on a fait lécole du vice « quand on aurait en faire une école de vertu. »

Les seules pièces de théâtre de Charles Porée quon ait pu retrouver sont au nombre de onze, six tragédies et cinq comédies néo-latines destinées à être jouées par les élèves des collèges jésuites. Les tragédies, qui furent imprimées en 1745, sont : Brutus, le Martyre de saint Hermenigilde, la Mort de lempereur Maurice, Sennachérib, roi dAssyrie, Séphy-Myrsa, fils dAbbas, roi de Perse, et le Martyre de saint Agapit. Ces deux dernières tragédies sont en trois actes, avec des intermèdes en vers français qui furent mis en musique par Campra, maître de musique de la maison professe des jésuites. Ses contemporains ont aussi fait léloge de sa perspicacité dans le choix des jeunes acteurs et de la manière dont il savait les former.

La perte du père Porée fut vivement sentie du public ; Louis XV et toute la cour y prirent part. Des obsèques magnifiques lui furent faites, et il fut inhumé dans léglise des Jésuites. On rapporte que, lors de la suppression de lordre en 1763-1764, les commissaires du Parlement recherchèrent son corps dans le caveau il était déposé, et que, layant trouvé sain et entier, ils y firent jeter de la chaux vive.

Œuvres

Liste non exhaustive :

  • De Libris qui vulgo dicuntur romanenses, Discours prononcé le 25 février 1736 au collège Louis-le-Grand, Paris : Bordelet, 1736. (Une analyse de cet ouvrage se trouve dans l'article Réflexions sur le roman au XVIIIe siècle.)
  • La Mandarinade, ou, Histoire comique du mandarinat de M. labbé de Saint-Martin, marquis de Miskou, À Siam [i.e. Caen] ; & se trouve à Caen, Chez Manoury fils, laîné, 1769 ;
  • Caecus Amor ou LAmour aveugle ;
  • Agapitus martyr ;
  • Mauritius imperator ;
  • Regulus ;
  • Brutus primus Romanorum consul ;
  • Discours sur la satire ;
  • De theatro, Discours sur les spectacles, 1733 ;
  • De criticis oratio ;
  • LHomme instruit par le spectacle, ou le Théâtre changé en école de vertu.

Éditions modernes

  • Théâtre jésuite néo-latin et antiquité : sur le Brutus de Charles Porée (1708), Éd. Édith Flamarion, Rome, École française de Rome, 2002 (ISBN 2728306001)
  • Discours sur la satire, Éd. Luís dos Santos, Paris, Champion, 2005 (ISBN 2745309935)
  • Discours sur les spectacles, Éd. Édith Flamarion, Pierre Brumoy, Toulouse, Société de Littératures Classiques, 2000 (ISBN 2908728206)

Notes

  1. Le père Jouvency, héritier lui-même des traditions dautres jésuites célèbres, les pères Perpinien, Petau, Cossart, La Rue.

Bibliographie

  • Joseph de La Servière, Un professeur d'Ancien Régime: Le père Charles Porée, S. J., 1676-1741, Oudin, 1899
  • Georges Mancel, « Notice sur Charles Porée », Poètes normands, Éd. Louis Henri Baratte, Paris, Amédée Bedelet, Martinon, Dutertre et Pilout, 1846

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