Beothuck

Beothuck

Béothuks

Territoire tribal des Béothuks

Les Béothuks ([be.o.tuk], parfois orthographié Béothucks) étaient les habitants autochtones de Terre-Neuve au Canada, lors du contact européen au XVe siècle. Le peuple a été officiellement déclaré éteint en tant que groupe ethnique distinct en 1829 avec le décès de Shanawdithit, la dernière survivante répertoriée.

Sommaire

Étymologie

Béothuk

L'appellation du nom tribal, trouvé dans différents documents, peut varier : Béothucks, Béothik, Boeothuck, Behatook et Beathook. Le nom Béothuk apparaît dans la littérature vers la fin du XVIIIe siècle. Avant cette période, les explorateurs, les pêcheurs et les colonisateurs surnomment le peuple « Indiens Rouges » ou les « Peaux-Rouges » en raison de l'importante utilisation de l'ocre rouge dans les sphères de leur société. Ils teignaient les ustensiles, les habitations, les canots et même leur corps, expression de leur spiritualité[1].

Campement Béothuk
par le major John Cartwright

L'ethnologue Robert Gordon Latham croyait que Béothuk signifiait « bonne nuit » dans leur langue et que la tribu devait ainsi s'identifier « les indiens Bonne Nuit », puisque le vocabulaire de Demasduit utilisait béothuk pour « bonne nuit ». Cependant, les Indiens utilisaient d'autres formes de salutation, telles que le mot « betheoate », une forme du verbe « baetha » signifiant « s'en aller chez soi » et ainsi le sens du mot « Béothuk » devrait être « Je m'en vais chez moi »[2].

Beothuk signifie non seulement « Indien Rouge de Terre-Neuve », mais aussi l'expression générique du mot « Indien » ainsi que du mot composé « haddabothic », qui signifie « corps » ou « Homme »[2]. Comme plusieurs autres peuples se désignent par le mot « Homme », il est normal que les Amérindiens de Terre-Neuve aient fait de même[3].

Peau-Rouge

Les colonisateurs les appelèrent « Peaux-Rouges » parce qu'ils se peignaient d'ocre rouge. L'expression « Peaux-Rouges » a été employée plus tard en référence aux peuples premiers nord-américains en général et a pris une connotation plus négative. D'autres sources indiquent que la dénomination de peaux-rouges vient de l'habitude des amérindiens de se passer de la teinture de roucou pour lutter contre les moustiques. Cette plante a été longtemps cultivée en Guyane pour ses qualités tinctoriales

Histoire

Première colonisation de Terre-Neuve

Les premiers signes de présence humaine sur l’île de Terre-Neuve datent d’environ 8 000 ans et relèvent de la civilisation "archaïque maritime”, culture de pêcheurs et de chasseurs d’animaux marins. On note le développement du travail du bois, tumulus-tombeaux et usage abondant de l’ocre rouge, sur les côtes de Terre-Neuve. Cette civilisation se serait éteinte il y a 4 000 ans, probablement à la suite de la submersion du plateau continental.

Vers -850, arrivent les paléo-inuits qui occupent l’île durant environ 700 ans. D'origine asiatique (Sibérie), ces Inuits ont émigré il y a plusieurs milliers d'années en traversant le détroit de Béring et s'établissent en Amérique du Nord. Ils sont supplantés par les représentants de la culture Dorsets et simultanément par ceux de la culture « Recent Indian », ancêtres possibles des Béothuks. Le mot « Béothuk » signifie peuple dans la langue béothuque. Ces deux nations occupent l’île pendant le millénaire suivant.

Premier contact avec les Européens

Les côtes méridionales furent probablement explorées pour la première fois vers la fin du Xe siècle par Leif Erikson, fils d'Érik le Rouge, un Viking originaire d'Islande. Des colonies vikings s'installèrent sur la côte est du Groenland sous son règne. Toutefois, au début du XVe siècle, les colonies vikings au Groenland disparurent à la suite d'un refroidissement climatique, qui eut lieu progressivement à partir de 1650 jusqu’à 1850. Avant de disparaître, ces Vikings du Groenland avaient tenté une colonisation de l’île de Terre-Neuve, comme le prouvent des vestiges retrouvés à l'Anse aux Meadows. Cette colonisation finit par échouer, les sagas scandinaves relatant des dissensions entre les colonisateurs ainsi que des conflits avec les autochtones skrælings (Béothuks ? Dorsets ?). Selon les récits scandinaves, les dernières expéditions vers le Vinland (désignation scandinave de Terre-Neuve) auront lieu au XIIe siècle.

Selon un mémoire de 1710 des archives de St. Jean de Luz, les Basques découvrent Terre-Neuve en 1392[réf. nécessaire], vraisemblablement à la poursuite de la morue. Par la suite, une expédition revient dans la région en 1497 lorsque John Cabot explore la région pour le compte de l’Angleterre et découvre à son tour les Grands Bancs de morue de Terre-Neuve. Des Européens commencent à s'installer en 1505 alors que les Béothuks comptent à cette époque entre 1 000 et 5 000 individus.

En 1501, Gaspar Corte-Real explore la côte est de l’Amérique du Nord pour le compte du Portugal. Il capture 50 autochtones du Labrador ou de Terre-Neuve pour les ramener au Portugal, pays alors esclavagiste.

En 1502, des pêcheurs anglais commencent à fréquenter les Grands Bancs de Terre-Neuve, suivis par les Normands en 1506, les Bretons en 1510, puis des vaisseaux de nations ayant une façade sur l’Atlantique.

Les Béothuks passaient leurs étés à pêcher le long de la côte et leurs hivers à la chasse à l'intérieur des terres. En automne, ils installaient des barrières pour diriger les caribous en migration vers les chasseurs qui les attendaient. Ils conservaient toute la nourriture en surplus pour l'hiver.

Contrairement à d'autres groupes autochtones, les Béothuks essayèrent d'éviter tout contact avec les colonisateurs, surtout les Britanniques qui les ont repoussés vers l'intérieur quand le peuplement s'intensifia. En raison de la perte de leurs terres, des escarmouches et des maladies venues d'Europe, la tuberculose notamment, leur nombre diminua à 400 en 1768 et en 1829 ils étaient éteints.

Béothuks capturés par les Britanniques

On connaît deux histoires célèbres de Béothuks capturés par les Britanniques sur l'île de Terre-Neuve.

Demasduit (Mary March), 1819.

Selon le documentaire scientifique «L'enlèvement de Mary, la fin des Peaux-Rouges», en 1819, Demasduit (appelée par la suite Mary March (car capturée en mars), a été enlevée par des Britanniques, dont John Peyton, son père et une bande de pêcheur (en tuant son mari le chef des Béothuks et leur poupon qui est mort de faim) et amenée à Saint-Jean Terre-Neuve. Le gouverneur de la colonie avait espoir qu'elle puisse devenir interprète et intermédiaire entre les colons britanniques et les Béothuks. Elle est morte de la tuberculose et par la suite, déposée dans un cercueil près de son mari et de leur bébé au Lac Indien Rouge. La nièce de Demasduit, une adolescente appelée Shanawdithit, est la dernière Béothuque connue. Elle a été capturée en 1823 et était appelée « Nancy » par les colons britanniques. Elle a passé les six dernières années de sa vie à décrire la culture et la langue béothuque à l'explorateur écossais William Cormack. Elle lui a révélée comment fut assassiné le chef et un chasseur de la tribu. Son décès est également attribuable à la tuberculose. Après son étude sur ce peuple et de sa fin tragique, William Cormack amena les crânes du chef et de son épouse Demasduit en Écosse, où ils sont toujours exposés dans un musée.

En 1929, une vieille femme autochtone de 75 ans appelée Santu, fille d'une mère micmaque et d'un père béothuk, a chanté une chanson en langue béothuque. Cette chanson a été diffusée par la radio canadienne CBC le 13 septembre 2000.

Culture

Quelques uns des rares objets béothuks encore existants, ici exposés au British Museum. L'objet au fond faisait probablement partie d'un manteau tandis que l'objet courbé est un peigne en os, possiblement utilisé comme amulette.

Les Béothuks logeaient dans des tentes couvertes de peaux ou d'écorces pendant l'été et dans des maisons semi-souterraines en hiver. Leurs canots d'écorce, à proue et poupes relevées, pouvaient tenir la mer. Os sculptés, colliers en bois de cervidés et en ivoire, ornés de gravure aux dessins complexes sont les artefacs qui les distinguent le plus. Ils utilisaient abondemment la poudre d'hématite, ou ocre rouge, avec laquelle ils peignaient leurs canots.

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • (fr) Jacques Rousseau, Le dernier des peaux-rouges, Editions des dix, Montréal, 1963, 31 p. (OCLC 48442092) 
  • (en) Ingeborg Marshall, A history and ethnography of the Beothuk, McGill-Queen's University Press, Montréal, 1996, 640 p. (ISBN 0-7735-1390-6) 
  • (en) (en) James Patrick Howley, William Epps Cormack, The Beothucks or red Indians : the aboriginal inhabitants of Newfoundland, University Press, Cambridge, 1915 (ISBN 0404155898) (OCLC 15915962) 
  • (en) Diamond Jenness, « Notes on Beothuck Indians of Newfoundland », dans Canada Geographical Journal, no 56, 1927, p. 36-39 
  • (en) Arthur English, The vanished race, Montréal, 1927 (OCLC 25414843) 
  • (en) Diamond Jenness, The vanished Red Indians of Newfoundland, Canadian Geographical Society, Montréal, janvier 1934 (OCLC 61620626) 

Notes et références

  1. L'enlèvement de Mary, la fin des Peaux-Rouges, Windup Filmworks, Fire Crown Productions — Canada, 2005.
  2. a  et b James Patrick Howley, The Beothucks or red Indians : the aboriginal inhabitants of Newfoundland, AMS Press, New York, 1979 (ISBN 0404155898) (OCLC 4500147), p. 304-305 
  3. Michel Allard, Les Beothucks : La fin d'un peuple, Département des sciences de l'éducation, pour le groupe de recherche « The Exploits Valley », UQAM, Montréal, p. 8 

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