Expédition de Moka

Expédition de Moka

L'Expédition de Moka, qui eut lieu sous trois formes différentes à plusieurs années d'intervalles, visait les richesses caféières de Moka (ou Mocha), qui était une ville portuaire du Yémen, connue pour la qualité de ses cafés arabica.

Sommaire

Historique

Le nom de Mokka devint célèbre en Europe au XVIe et au XVIIe siècle. Le premier café ouvrit en 1554 à Constantinople. La passion pour le moka gagna Venise en 1615 et le premier café n'ouvrit à Vienne (Autriche) qu'en 1640.

Récolté au Yémen, le café était transporté par de petits bâtiments jusqu'à Djeddah où des navires turcs l'embarquaient pour Suez et l'Égypte. La majorité des achats de café pour les pays européens se faisait par l'intermédiaire des marchands vénitiens et marseillais. Cependant les Hollandais avaient réussi à établir un comptoir à Moka, et, chaque année, un vaisseau hollandais venait y charger du café à destination de Batavia d'où il était réexpédié en Europe[1].

Première expédition

C'est vers cette destination que fut organisée en 1708 une expédition de la compagnie des Indes orientales, au cours de la période où les corsaires malouins, alors au sommet de leur puissance[2], se prévalurent de ses attributions, pour ramener du café.

Parmi eux, le corsaire jacobite Phillip Walsh[3], dont les fils ont fondé la dynastie Walsh des irlandais de Nantes. Le Curieux, dirigé par Phillip Walsh[3] et le Diligent appareillèrent de Brest le 6 janvier 1708[1]. Leur première escale devait être Cadix où ils arrivèrent le 1er mars. Au cours de cette traversée, ils capturèrent deux navires britanniques qu'ils relâchèrent après leur avoir imposé une lourde rançon. L'escale de Cadix fut mise à profit par les bâtiments français pour compléter leurs approvisionnements et pour se procurer des pièces d'or espagnoles frappées au Mexique.

La longue route pour Moka obligeait à contourner l'Afrique. Quittant Cadix le 30 mars 1708, les vaisseaux français passèrent à la vue des îles Canaries et ne s'arrêtèrent que quelques jours à Saint-Vincent (îles du Cap-Vert) pour faire de l'eau[1].

Ils rentrèrent à Saint-Malo le 8 mai 1710 avec 1.300 milliers de café. En cours de route, ils avaient rançonné deux navires anglais à la hauteur de Lisbonne, pris un hollandais de 36 canons, le Grand-Vainqueur-de-Middelelbourg, près de l'île de l'Ascension, et, au retour, un autre hollandais de 40 canons, l'Esquivic, dans les parages des îles Maldives.

Deuxième expédition

La deuxième expédition de Moka fut fut organisée trois ans plus tard par la "société Crozat", d'Antoine Crozat, qui fit de son côté partir de Saint-Malo en janvier 1711 deux vaisseaux, La Paix' et Le Diligent.

Chargés de 1.600 milliers de café, ils rentrèrent à Saint-Malo en juin et juillet 1711, avec en plus une prise hollandaise, le Beau-Parterre et une anglaise, le Princesse. Une autre prise anglaise, la Reine-Anne, avait été vendue aux Indes. Les Malouins partaient à deux navires, ils revenaient à quatre et bien chargés.

Cette expédition fit connaître à la cour, où Antoine Crozat était apprécié, le goût du café et son potentiel de culture à grande échelle. Il fut décidé que les pentes de l'île de la Réunion, alors appelée l'île Bourbon et peuplée de seulement 734 habitants, étaient adaptées pour répliquer les cultures de Moka existantes dans les montagnes du Yemen. Le roi demanda donc à la troisième expédition de Moka, qui était déjà partie, de s'occuper de l'île Bourbon en y implantant la culture du café.

Troisième expédition

Les deux navires de cette troisième expédition, le Chasseur et la Paix étaient partis de Saint-Malo le 21 mars 1714, il y a déjà neuf mois, sous le commandement de Guillaume Dufresne d'Arsel. On lui envoya l'ordre royal par un autre bateau, L'Auguste de M. de la Boissière, qui partit de Saint Malo pour le Yemen le 27 juin 1715[4], le Secrétaire d'État à la Marine, Jérôme Phélypeaux de Pontchartrain[5], souhaitant ainsi prouver au roi Louis XIV l'efficacité de la Marine. Entre-temps, le roi décède.

Au retour de Moka, Guillaume Dufresne d'Arsel prit possession au nom du Roi, de l'île Maurice appelée alors l'île de France, le 20 septembre 1715. Fin septembre 1715, il est à la Réunion : six plants de café Moka, offerts par le sultan du Yemen à la France, sont ensemencés à Saint-Paul. La compagnie des Indes organise la production, facilite l'achat de graines, construit des greniers et des routes, offre des concessions gratuites à tout colon de 15 à 60 ans. à condition de planter et d'entretenir 100 plants de café. La troisième expédition est de retour à Saint-Malo en février 1716.

Le gouverneur de Bourbon Pierre-Benoît Dumas intensifie la culture du café et s'enthousiasme : "On ne peut rien voir de plus beau, écrit-il au ministre le 27 avril 1728, que les plantations de café qui se multiplient à l'infini. Cette île sera dans peu capable d'en fournir au-delà de la consommation du royaume".

Le café fit la fortune de l'île de la Réunion : la "variété Bourbon" ou Bourbon pointu fut jugée la meilleure. Il est cultivé en quantités commerciales à partir de 1721, lorsque commence l'importation massive d'esclaves: 1.500 supplémentaires par an. En 1704, l'île de la Réunion ne comptait que 734 habitants, en 1754, c'est 17.000. En 1735, l'exportation annuelle de café atteint 100.000 livres, puis elle passe à 2,5 millions de livres en 1744. L'île Bourbon est encore première productrice mondiale, malgré la concurrence de la Martinique à partir de 1721. Après 1755, elle est balayée par la révolution du café de Saint-Domingue, la partie française de de l'île contrôlant en 1789 la moitié de l'offre mondiale à elle seule, avec 77 millions de livres exportés dans l'année.

Notes et références

Sources

Voir aussi

Articles connexes


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