Bombarde (instrument)

Bombarde (instrument)
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Bombarde
Bombarde chromatique en ébène
Bombarde chromatique en ébène

Classification Instrument à vent
Famille Bois
Instruments voisins Hautbois
Œuvres principales folk, celtique : An Dro, Bal fisel, Bal d’Erquy, Bal de Jugon, Laridé, Pilé menu, Rond de Saint-Vincent ...
Instrumentistes célèbres David Pasquet
Principaux facteurs Hervieux et Glet, Le Coant, Léhart, Botuha, Ollivier
Articles connexes biniou

La bombarde est un instrument de musique à vent à anche double de la famille des hautbois, employé dans la musique bretonne. Le mot « bombarde » provient du latin bombus, signifiant « bruit sourd ». En breton l'instrument s'appelle ar vombard (mutation de bombard)[1] ou an talabard. Un joueur de bombarde s'appelle un talabarder[2]. Aucun autre pays celtique ne possède ce type d'instrument soliste accompagné par la cornemuse (biniou). Il en existe toutefois une version nord-italienne (piffero), une sud-italienne (ciaramella) et une catalane.

L'instrument requiert du musicien un véritable effort physique qui l'astreint à des pauses fréquentes, aussi est-il rare que la bombarde joue seule. Elle est le plus souvent utilisé en couple avec le biniou kozh, ou bien forme un des pupitres des bagadoù bretons.

À noter : l'un des jeux de l'orgue à tuyaux porte le nom de bombarde, c'est un jeu à anches, et c'est le plus puissant de l'orgue.

Sommaire

Histoire

La bombarde fait partie d'une vaste famille d'instruments à vent, celle des hautbois, qui a un ancêtre commun : la chalemie, elle-même originaire de l'Espagne musulmane. Comme il s'agit d'un instrument non tempéré, afin d'accorder une bombarde et un biniou ou deux bombardes entre elles, on considérait autrefois qu'il était nécessaire de les tailler dans le bois d'un même arbre, sinon leurs harmoniques différaient et l'ensemble ne sonnait pas juste[3].

Deux chalémies de la Renaissance

À partir de la Renaissance, fut standardisée la gamme du solfège en cherchant à obtenir des instruments respectant un compromis acceptable entre la capacité à transposer (écart régulier entre les notes), la justesse (par rapport à la gamme physique) et la jouabilité (pas trop de manières différentes de jouer une même note solfégique selon les différents contextes harmoniques). Le hautbois est l'instrument issu de la correction progressive des instruments à vent traditionnels afin d'obtenir un instrument tempéré (c’est-à-dire respectant le compromis entre les trois critères pré-cités). Les instruments à vent traditionnels furent encore utilisés parallèlement au hautbois avant de disparaître, à l'exception notable de la bombarde qui a survécu en Bretagne.

Dans la première partie du XXe siècle, le nombre de sonneurs de bombarde et de biniou kozh a diminué de façon importante. La pratique de ces duos d'instruments a connu une nouvelle vigueur dans les années 1970 lors du réveil culturel breton, grâce à l'action conjuguée du succès d'Alan Stivell et au développement de la pratique des festoù-noz et des concours de musique traditionnelle. Vers cette même époque, une intense activité de collectage d'airs, de mélodies, de marches et de danses a été engagée à l'initiative des associations SKV (Sonerien ha Kanerien Vreizh)[4] et Dastum[5], qui collecte et met en valeur la musique et le patrimoine culturel de Bretagne depuis 1972[6].

Facture

Une bombarde, ébène incrustée étain, facture Dorig Le Voyer (Ca.1969
Une bombarde, ébène incrustée étain, facture Dorig Le Voyer (Ca.1969)

L'instrument se compose de trois parties :

  • le fût ou corps, légèrement conique, est percé de 6 ou 7 trous (ou plus avec l'ajout de clefs) en façade. Il est tourné dans un bois dur, le buis, le poirier, le gaïac, le palissandre ou l'ébène, et peut être ornementé de cerclages en étain, de corne, de bois différents, ou même d'ivoire.
  • le pavillon, taillé dans une autre pièce généralement du même bois, est de forme évasée, et reçoit l'extrémité inférieure du fût.
  • l'embouchure reçoit l'anche double (aujourd'hui en roseau, elle a pu être en buis, en écorce de ronce, voire en os bouilli), qui sera pincée par les lèvres du talabarder[7].

Elle se décline en plusieurs tonalités différentes :

  • Les bombardes soprano (ré, do, si\flat, si, la, sol, fa)
  • Les bombardes alto (ré, mi\flat)
  • La bombarde ténor (si\flat)

La tonalité la plus répandue est le soprano en si\flat, la même tonalité que la cornemuse écossaise (binioù bras) telle qu'elle existe en Bretagne[8]. La bombarde est à la base un instrument diatonique mais est utilisée de plus en plus de manière chromatique avec l'application de clés pour jouer les demi-tons. On en joue sur deux octaves.

Pratique de la bombarde

Jeu

Comme presque tous les instruments à vent, la bombarde se tient avec la main gauche en haut du corps (plus près de la bouche) et la main droite en bas du corps. La bombarde est tenue en bouche et les bras avec un angle de 85° à 90° avec le corps du musicien.

Comme tous les instruments à trous, la note jouée est d'autant plus aiguë que le nombre de trous ouverts est grand et la note la plus grave est obtenue lorsque tous les trous sont bouchés. Pour un même registre, les doigtés des autres notes, s'obtiennent en ouvrant progressivement les trous de la main droite puis ceux de la main gauche.

L'anche double de roseau, sur laquelle viennent se poser directement les lèvres, est fragile et se "pratique". Une anche dite "dure" (c'est-à-dire demandant un effort plus considérable pour émettre le son) peut s'adoucir avec l'usage ; une anche déjà douce, bien que plus facile au premier abord, deviendra rapidement inutilisable si elle est malmenée par un sonneur peu consciencieux.

La bombarde exige beaucoup de souffle et un talabarder peut rarement jouer longtemps. C'est pourquoi les phrases musicales sont courtes et répétées : la bombarde joue une phrase musicale, puis l'instrumentiste se tait (temps de récupération) pendant que d'autres instruments répètent la phrase musicale. La bombarde a un son clair et puissant, qui porte loin.

Le son de la bombarde, très caractéristique, est particulièrement puissant : le nombre de décibel pour un seul exécutant pouvant atteindre 105 à 110 dB à l'embouchure, et 95 à 100 dB entre 2 et 4 mètres ; un ensemble (un Bagad par exemple) contenant bombardes, cornemuses et caisses claires, peut dépasser les 110 dB (soit au dessus de la limite légale pour une discothèque en France).

Formations musicales

L'instrument est à l'origine joué en couple (en duo avec le biniou kozh ou le biniou bras) pour accompagner les danses bretonnes[9].

Des anches de bombarde

C'est aussi un des principaux instruments d'un ensemble appelé bagad, composé de trois pupitres (bombardes / biniou bras / caisses claires et percussions) ; plus rarement on le trouve aussi accompagné par un orgue dans des représentations plus concertantes voire liturgique. Le duo traditionnel "biniou kozh / bombarde" inspire son jeu de la manière des chanteurs de kan ha diskan (chant à répons) dans lequel le chanteur principal (kaner) lance une phrase qui est répétée par le ou les autres chanteurs (diskaner). Dans ce type de morceau, la bombarde tient le rôle du chanteur principal alors que le biniou joue en permanence en accompagnant la bombarde. Le biniou kozh sonne une octave plus haut que la bombarde[10]. Dans le duo "biniou bras / bombarde", apparu plus récemment sous l'influence des bagadoù, les deux instruments jouent dans la même tessiture.

La pratique des concours est très enracinée dans l'activité des sonneurs de couple. Chaque pays a instauré son propre concours, où les sonneurs se confrontent en trois épreuves: mélodie, marche et danse. Les meilleurs sonneurs de couple se retrouvent le premier dimanche de septembre à Gourin pour participer au Championnat de Bretagne. La première édition s'est tenue en 1955 à l'initiative de l'abbé Le Poulichet de Gourin, qui a pris contact avec l'association Bodadeg Ar Sonerion pour ajouter au traditionnel pardon de la Saint-Hervé une procession de sonneurs[11]. En 1957, Polig Montjarret[12] propose au maire de Gourin d'organiser chaque année autour du pardon un concours de sonneurs, auquel Bodadeg Ar Sonerion fournit un règlement et un jury. Depuis 1993, le championnat se déroule à Gourin sur le site de Tronjoly devant un public de plusieurs milliers de connaisseurs.

Deux sonneurs, talabarder (à gauche) et biniaouer (à droite).


Quelques facteurs :

  • Hervieux & Glet
  • Jorj Botuha
  • Youenn Le Bihan
  • Dorig Le Voyer
  • Yvon Le Coant
  • Jil Lehart
  • Christian Besrechel
  • Jean Capitaine
  • Jean-Luc Ollivier
  • Rudy Le Doyen
  • Paul Larivain

Voir aussi

Liste de talabarderien.

Notes et références

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  1. A l'instar de la cornemuse, le nom " bombart " apparaît dans l'ouvrage " le Catholicon breton " de Jehan Lagadeuc (1464).
  2. Prononcez "talabardeur".
  3. D'ailleurs, pour un musicien classique, même accordés, ces instruments ne sonnent pas juste (la distribution de leurs notes n'est pas tempérée mais juste dans leur tonalité).
  4. Musiciens et Chanteurs de Bretagne, fondée à Saint-Brieuc par Georges Epinette en 1979
  5. En breton dastum signifie « recueillir », « rassembler », « compiler ».
  6. De SKV à Dastum, revue Musique Bretonne, n°200, Janvier/Février 2007
  7. Roland Becker & Laure Le Gurun, La musique bretonne, Coop Breizh, 1994 ISBN 2-909924-19-X
  8. La tonalité de la cornemuse en Écosse est considérée comme étant en la, soit un demi-ton en dessous, et les partitions de musique traditionnelle y sont écrites pour cette tonalité. En réalité la différence vient surtout de l'époque à laquelle ces tonalités ont été nommées, la hauteur de la gamme standard ayant sensiblement évolué au cours de l'histoire. Dans la pratique les deux cornemuses jouent à peu près à l'unisson.
  9. Musique Bretonne: Histoire des sonneurs de tradition, ouvrage collectif rédigé sous l'égide de la revue ArMen, Le Chasse-Marée / Armen, 1996, ISBN 2-903708-67-3
  10. Yves Castel, Sonerien daou ha daou (Méthode de biniou et de bombarde), Ed. Breizh Hor Bro, 1980
  11. Gourin, un demi-siècle de championnat, Revue Ar Soner, n°382, 4e trimestre 2006
  12. Polig Monjarret 1920-2003, numéro spécial de la revue Ar Soner, n°372, Janvier/Février 2004

Liens externes


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