- Époque des beylicats
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Un beylicat (en turc : beylik) désigne le territoire sous la juridiction d’un bey.
L’époque des beylicats[1], ou des principautés d’Anatolie se divise en deux périodes. La première période se situe au XIe siècle lorsque de petits émirats turcs dirigés par un bey s’installent en Anatolie, jusqu’à la domination de la région par le sultanat seldjoukide de Roum. La seconde période débute pendant la deuxième moitié du XIIIe siècle lors du déclin du sultanat de Roum. Les beylicats les plus puissants ne disparaissent qu’à la fin du XVe siècle avec l’avènement de l’empire ottoman.
Sommaire
Histoire
Première période, après la bataille de Manzikert (26 aout 1071)
Après la victoire des Seldjoukides sur l’empire byzantin lors de la bataille de Manzikert en 1071, des clans de Turcs Oghouzes pénètrent en Anatolie. Les Seldjoukides établissent un sultanat à Konya, le sultanat de Roum. Il a eu pour capitale Nicée (İznik, 1081-1097) puis Iconium (Konya, 1097-1302). Il fut établi suite à un accord entre l’Empire byzantin et le chef seldjoukide Süleyman Ier Shah. Les seldjoukides installent des clans dirigés par des beys appelés « uç[2] bey », ceux-ci servent de tampons entre l’empire seldjoukide et l’empire byzantin. Ils reçoivent une aide militaire et financière des Seldjoukides contre leur complète allégeance. En 1176, le sultan Kılıç Arslan II défait l'Empire byzantin, qui lui cède encore du terrain, à Myrioképhalon. En 1207, le sultan Kay Khusraw Ier prend Antalya aux Vénitiens.
Deuxième période, après la bataille du Köse Dağ (26 juin 1243)
En 1242, Baïdju, nouvellement nommé commandant des armées mongoles par le grand khan Ögödei, se met immédiatement en mouvement vers le sultanat seldjoukide de Roum sur lequel règne le sultan Kay Khusraw II et qui semble à son apogée. Baïdju, après avoir pris et pillé Erzeroum (1242), assure la domination mongole à la bataille de Köse Dağ en juin 1243[3]. Après cette bataille, Kay Khusraw II recherche l’aide de son ennemi l’empereur de Nicée Jean Vatatzès avec lequel il signe un traité d’alliance[4]. Baïdju occupe ensuite Sivas qui se rend à temps et est seulement pillée. Les villes de Tokat et de Kayseri qui tentent de résister sont dévastées. Cette campagne étend l’empire mongol jusqu’aux portes de l’empire de Nicée[5]. Dès les premiers revers son allié et vassal l’empereur de Trébizonde préfère se déclarer vassal des Mongols et leur payer un tribut. Kay Khusraw est alors contraint d’en faire autant[4]. Le roi de Petite-Arménie Héthoum Ier se soumet lui aussi à l’Ilkhanat, assurant ainsi la sécurité des Arméniens vivant hors de Cilicie. Cette politique est poursuivie par ses successeurs ce qui protègera la Cilicie aussi bien des Seldjoukides que des Mamelouks[5]. Les beys en profitent pour se déclarer indépendants des Seldjoukides. Néanmoins, le sultanat de Roum survit sous la tutelle mongole jusqu'en 1307.
L’affaiblissement de la puissance byzantine, permet aux beys de pénétrer de plus en plus à l’ouest de l’Anatolie. Vers 1300, les Turcs atteignent les rives de la mer Égée. Au début de cette occupation, les états les plus puissants sont les Karamanides et les Germiyanides. Les Ottomans possèdent un petit beylicat au nord-ouest de l’Anatolie, au contact avec l’empire byzantin, mais sans réelle puissance. Le long de la mer Egée, du nord au sud il y a les beylicats de Karesi, des Saruhanides, des Aydınides, des Mentecheïdes et des beys de Tekke. Le long de la mer Noire, les Ottomans[6], les Çobanoğulları à Kastamonu qui sont absorbés en 1309 par les Jandarides (Isfendiyarides) dont le territoire va s’étendre jusqu’à la frontière avec l’Empire de Trébizonde[7].
La montée des Ottomans
Les Ottomans commencent par s’étendre aux dépens des Byzantins. Ils continuent en annexant le beylicat voisin de Karesi. Ils parviennent à suffisamment de puissance pour pouvoir affronter leurs principaux concurrents les Karamanides. Les Ottomans poursuivent leur extension en Anatolie en acquérant des villes soit en les achetant soit par des mariages. Les Karamanides attaquent les Ottomans en faisant alliance avec d’autres beylicats, avec les Mamelouks, avec les Aq Qoyunlu (Moutons blancs turcomans), avec les Byzantins, avec les empereurs de Trébizonde ou avec les Magyars en risquant chaque fois de perdre leur pouvoir. A la fin du siècle les Ottomans ont conquis une bonne partie du territoire des Karamanides et d’autres beylicats moins importants. Ils vont avoir une période de répits grâce à la défaite du sultan ottoman Bayezid Ier contre les Tamerlan en 1402 lors de la bataille d'Ankara.
Les Ottomans reprennent le dessus pendant les règnes de Mehmed Ier Çelebi et de son fils Murad II. Pendant les années de leurs règnes, ils incorporent au domaine ottoman la majorité des beylicats. Ensuite Mehmed II conquiert l’émirat de Karaman en mai et juin 1451. Selim Ier Yavuz conquiert le territoire des Ramazanides et des Dulkadirides en 1515 lors de sa campagne contre les Mamelouks. Son fils Soliman le Magnifique achève l’unité de l’Anatolie et au-delà en 1534.
Un bon nombre des beylicats ont servi de base aux divisions administratives de l’empire ottoman.
Les beylicats de la première période
Nom du beylicat Nom turc Région(s) d'implantation Durée Artukides[8] Artuklu Beyliği Diyarbakır, Hasankeyf, Silvan, Harput, Mardin 811-1408 Danichmendides[9] Danişmendliler Sivas, Malatya, Kayseri, Tokat, Amasya 1071-1178 Dilmaçoğlu Dilmaçoğulları Bitlis, Erzurum 1085-1192 Zachas Çaka Beyliği İzmir 1081-1098 Shah Arman[10] Ermenşahlar ou Ahlatşahlar Ahlat 1085-1192 Inalides[11] İnaloğulları Diyarbakir brève existence Mengüjekides[12] Mengüçlü Beyliği ou Sökmenliler Beyliği Erzincan, puis Divriği 1118-1252 Saltukides[13] Saltuklu Beyliği Erzurum 1092-1202 Les beylicats de la seconde période
Nom du beylicat Nom turc Région(s) d'implantation Durée Taceddinoğulları[14] Taceddinoğulları Niksar 1348-1428 Aydınides[15] Aydınoğulları Birgi, puis Ayasluğ (Selçuk) 1308-1425 Çobanoğulları[16] Çobanoğulları Kastamonu 1227-1292 sous tutelle des Jandarides jusque ~1320 Isfendiyarides ou Jandarides[17] İsfendiyaroğulları ou Candaroğulları Kastamonu 1292-1462 Dulkadirides[18] Dulkadıroğulları Maraş, Elbistan 1337-1522 Eretnides[19] Eratnaoğulları Sivas, puis Kayseri 1326-1380 Qadi Burhân al-Dîn Ahmad[20] Kadi Burhaneddin Ahmed Kayseri 1381-1398 Remplace les Eretnides Eşrefoğulları[21] Eşrefoğulları Beyşehir moitié du XIIIe siècle-1322 Germiyanides[22] Germiyanoğulları Kütahya 1239-1428 Hamidides[23] Hamidoğulları Eğirdir 1300-1391 Karamanides[24] Karamanoğulları Larende (Karaman) 1256-1487 Alaya[25] Alanya 1293-1471 Vassaux des Karamanides Karesioğulları[26] Karesioğulları Balıkesir 1303-1345 Beylicat de Ladik[27] İnançoğulları Denizli 1276-1368 Mentecheïdes[28] Menteşeoğulları Milas 1261-1424 Ottomans puis Empire ottoman[29] Osmanoğulları Söğüt, Bursa, Dimetoka, Edirne et İstanbul 1302-1924 Pervâneoğulları[30] Pervâneoğulları Sinop 1277-1322 Ramazanides[31] Ramazanoğulları Adana 1379-1510 Sâhipataoğullari[32] Sâhipataoğulları Afyonkarahisar 1265-1341 Saruhanides[33] Saruhanoğulları Manisa 1313-1410 Beylicat de Tekke[23] Tekeoğulları Antalya 1321-1423 c’est une branche des Hamidides Régions d’Anatolie restées non-turques et non-musulmanes jusqu’à l’hégémonie ottomane
Ces régions sont restées majoritairement chrétiennes jusqu’à leur conquête par les Ottomans.
Nom de l’état Nom turc Région(s) d'implantation Durée Royaume arménien de Cilicie Kilikya Tarse et Sis (actuelle Kozan) -1375 Empire de Trébizonde[34] Trabzon İmparatorluğu Trébizonde 1204-1461 Philadelphie Alaşehir Philadelphie tenu par les chevaliers de Malte jusqu’en 1390 Notes et références
- En turc : Anadolu Beylikleri, Les beylicats d’Anatolie
- Uç : en turc : extrémité, frontière
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Kösedağ (bataille de) », p. 486
- Donald MacGillivray Nicol (trad. Hugues Defrance), Les derniers siècles de Byzance, Tallandier, coll. « TEXTO », 2008 (ISBN 9782847-345278), p. 43
- René Grousset, op. cit., Payot, 1938, quatrième édition, 1965 [lire en ligne], p. 332
- Ibn Battûta parcourt cette région en 1333, il rencontre Orhan : « Ce sultan est le plus puissant des rois turcomans, le plus riche en trésors, en villes et en soldats. » Orhan avait déjà agrandi son territoire ayant conquis Brousse (Bursa) (1326), Nicée (Iznik) (1330) et Nicomédie (İzmit) (1331) Ibn Battûta, op.cit., (version .pdf) 393 p. (version papier) 480 p. [lire en ligne], « Du sultan de Bousa », p. 148-149 (version .pdf)
- (en) Kate Fleet, op. cit. [lire en ligne], p. 5
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Artiqides, Artukides ou Ortokides », p. 107,
(en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « The Atuqids », p. 194-196 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Danichmendides », p. 235-236,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Danishmendids », p. 215 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Ahlat », p. 46,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Shah-i Armanids », p. 197 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Diyarbakir ou Diyarbekir », p. 249
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Mengüjekides ou Mengütchekides », p. 566,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Mengüjekids », p. 217 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Erzurum », p. 276-277,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Saltuqids », p. 218 - (en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « The Taj al-din Oghulları », p. 236
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Aydınides ou Aydınoğulları », p. 121,
(en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « The Aydin Oghulları », p. 221 - (en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Choban Oghulları », p. 231
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Isfendiyarides ou İsfendiyaroğulları ou encore Jandarides », p. 406,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Jandar Oghulları or Isfandiyar (Isfendiyar) Oghulları », p. 229 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Dulkadirides ou Dhû l-Qâdirides », p. 254,
(en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « The Dulghadir Oghulları or Dhu’l-Qadrids », p. 238 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Eretnides », p. 269,
(en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « The Eretna Oghulları », p. 234 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Burhân al-Dîn, le cadi Aḥmad », p. 170,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Qadı Burhan al-Din », p. 235 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Beyşehir », p. 157,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Ashraf (Eshref) Oghulları », p. 228 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Germiyanides ou Germiyanoğulları », p. 310,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Germiyan Oghulları », p. 224 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Hamidides ou Hamidoğulları », p. 333,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Hamid Oghulları and the Tekke Oghulları », p. 226 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Karamanides, Qaramanides ou Karamanoğulları », p. 458-459,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Qaraman Oghulları or Qaramanids », p. 232-233 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Alanya », p. 54,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Beys of Alanya », p. 227 - (en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « Qarasi (Karasi) Oghulları », p. 219
- (en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Inanj Oghulları », p. 223
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Mentecheïdes ou Menteşeoğulları », p. 566,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Menteshe Oghulları », p. 222 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Ottomans ou Osmanoğulları », p. 640-644,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Ottomans or Osmanlis », p. 239 - (en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Parwana Oghulları », p. 230
- Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Ramazanides ou Ramazanoğulları », p. 701-702,
(en) C. E. Bosworth, op. cit. [lire en ligne], « The Ramaḍān oghullari », p. 237 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Sahib Ata, Sâḥib `Atâ’ Fakhr al-dîn `Ali ibn al-Ḥusayn », p. 720-721,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Sahib Ata Oghulları », p. 225 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Saruhanides ou Saruhanoğulları », p. 735,
(en) C. E. Bosworth, op. cit., « The Sarukhan Oghulları », p. 220 - Janine et Dominique Sourdel, op. cit., « Trabzon ou Trébizonde », p. 813-814
Annexes
Articles connexes
Liens externes
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Anatolian Turkish Beyliks » (voir la liste des auteurs)
- (en) Anatolian Bey Principalities sur Öztürkler
Bibliographie
- Janine et Dominique Sourdel, Dictionnaire historique de l’islam, PUF, coll. « Quadrige », 2004, 1056 p. (ISBN 978-2-130-54536-1), « Principautés (époque des) ou Beyliks », p. 677
- René Grousset, L’empire des steppes, Attila, Gengis-Khan, Tamerlan, Paris, Payot, 1938, quatrième édition, 1965, (.pdf) 669 p. [lire en ligne] [présentation en ligne]
- Ibn Battûta, Voyages (3 volumes), De la Mecque aux steppes russes, vol. II, (format .pdf) 392 p. (ISBN 2-7071-1303-4) [lire en ligne] [présentation en ligne]
- (en) Nagendra Kr. Singh, International encyclopaedia of Islamic dynasties, Anmol Publications PVT. LTD. (ISBN 9788126104031) [présentation en ligne]
- (en) Clifford Edmund Bosworth, The New Islamic Dynasties : A Chronological and Genealogical Manual, Edinburgh University Press, 2004, 400 p. (ISBN 978-074862137-8) [présentation en ligne]
- (en) Kate Fleet, European and Islamic Trade in the Early Ottoman State: The Merchants of Genoa and Turkey, Cambridge University Press, 1999, 204 p. (ISBN 978-052164221-7) [présentation en ligne]
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