Tueries du Brabant

Tueries du Brabant

« Les tueries du Brabant » désigne une série de crimes et plus spécialement de braquages sanglants qui eurent lieu principalement dans la province de Brabant en Belgique, de 1982 à 1985.

Sommaire


Description générale

Les expressions « tueries du Brabant », « tueurs du Brabant », « tueurs fous », « tueurs fous du Brabant », ou encore, en langue néerlandaise, « bende van Nijvel » (« bande de Nivelles »), évoquent, dans le langage de certaines personnes, un certain nombre de braquages sanglants, d'assassinats et de vols qui seraient liés entre eux et seraient le fait d'un certain nombre de bandes organisées. Au cours de ces actions criminelles, 28 personnes furent tuées, sans que jamais les auteurs ne soient identifiés par les personnes du pouvoir judiciaire belge. Ces faits se produisirent en deux vagues : une première de 1982 à fin 1983 et une seconde à l'automne 1985, caractérisée par trois attaques particulièrement meurtrières contre des supermarchés Delhaize.

Origine des expressions

La presse belge a rapidement parlé de cette bande comme étant « les tueurs du Brabant », la majorité de ces faits ayant eu lieu dans la province de Brabant. La presse flamande, elle, a généralement opté pour l'appellation « bende van Nijvel » (bande de Nivelles), se référant à l'arrondissement administratif et judiciaire de Nivelles qui couvrait toute la partie francophone de la province de Brabant (correspondant depuis 1995 à la province du Brabant wallon) hormis Bruxelles. D'autres faits ont été commis en dehors de la province de Brabant : l'un en France à Maubeuge, les autres en Belgique dans les provinces de Flandre-orientale, de Namur et de Hainaut.

Les affaires criminelles imputées aux tueurs du Brabant

Les indices reliant les affaires entre elles sont les éléments balistiques, le véhicule utilisé, le mode opératoire et la région où les attaques eurent lieu. Mais ce sont les analyses balistiques faites à partir des armes découvertes en novembre 1986 à Ronquières, dans le canal Bruxelles-Charleroi, qui, selon certaines personnes, permettraient d'établir un lien sûr(sources et références?) entre certains faits.

1982

  1. Armurerie à Dinant, province de Namur, Belgique, 13 mars 1982 : vol d'un fusil.
  2. Épicerie Piot à Maubeuge, région Nord-Pas-de-Calais, France, 13 août 1982 : 1 policier blessé.
  3. Armurerie de Daniel Dekaise à Wavre, province de Brabant, Belgique, 30 septembre 1982 : 1 mort, plusieurs blessés ; vol d'une quinzaine de pistolets automatiques.
  4. L'auberge du Chevalier à Beersel, province de Brabant, Belgique, 23 décembre 1982 : 1 mort.

1983

  1. Assassinat d'un chauffeur de taxi, retrouvé à Mons, province de Hainaut, Belgique, 12 janvier 1983 : 1 mort.
  2. Supermarché Delhaize à Genval, province de Brabant, Belgique, 11 février 1983 : vol de 692.384 BEF.
  3. Supermarché Delhaize à Uccle, province de Brabant, Belgique, 25 février 1983 : 1 blessé ; vol de 600.000 BEF.
  4. Supermarché Colruyt à Hal, province de Brabant, Belgique, 3 mars 1983 : 1 mort ; vol de 704.077 BEF.
  5. Une usine textile à Tamise, province de Flandre-Orientale, Belgique, 10 septembre 1983 : 1 mort, 1 blessé.
  6. Supermarché GB à Houdeng-Gœgnies, 7 mai 1983 : vol de 800.000 BEF.
  7. L'auberge des Trois Canards à Ohain, province de Brabant, Belgique, 2 octobre 1983 : 1 mort.
  8. Supermarché Delhaize à Beersel, province de Brabant, Belgique, 7 octobre 1983 : 1 mort.
  9. Usine textile Wittock-Van Landeghem à Temse, province de Flandre-Orientale, 10 septembre 1983 : 1 mort, 1 blessé ; vol de 7 vestes pare-balles.
  10. Supermarché Colruyt à Nivelles, province de Brabant, Belgique, 17 septembre 1983 : 3 morts (le gendarme Marcel Morue et le couple Fourez-Dewit), 1 blessé (le gendarme Jean-Marie Lacroix).
  11. Une bijouterie à Anderlues, province de Hainaut, Belgique, 1er décembre 1983 : 2 morts.

1985

  1. Supermarché Delhaize à Braine-l'Alleud, province de Brabant, Belgique, 27 septembre 1985 : 3 morts (MM. Roger Engelbienne, Ghislain Platanne et Bozidar Djuroski senior), 1 blessé (Bozidar Djuroski junior) (Erronément, le journal Le Soir citait aussi Bozidar Djuroski junior parmi les personnes tuées.)[1] ; vol de 200.000 BEF.
  2. Supermarché Delhaize à Overijse, province de Brabant, Belgique, 27 septembre 1985 : 5 morts, 1 blessé (Jean-Paul Macau, avocat) ; vol de 991.103 BEF.
  3. Supermarché Delhaize à Alost, province de Flandre-Orientale, Belgique, 9 novembre 1985 : 8 morts, 9 blessés ; vol de 937.777 BEF[2].


Total : 28 morts et un butin de 6 à 7 millions de francs belges (= 150 000 à) 175 000 €).

(Voir aussi pages 21 et 22 du rapport Enquête parlementaire sur les adaptations nécessaires en matière d'organisation et de fonctionnement de l'appareil policier et judiciaire, en fonction des difficultés surgies lors de l'enquête sur « les tueurs du Brabant ».)

Suspects

Trois portraits robots ont été établis des tueurs principaux et constants, apparaissant dans la totalité des grandes attaques : « le Tueur », « le Géant » et « le Vieux ».

De nombreuses personnes ont été suspectées dans cette affaire, en tant qu'auteurs, que commanditaires potentiels ou que complices.


David Van de Steen évoque dans son livre[3], page 161, avoir reconnu sur une photo de l'hebdomadaire Humo, en présence de son grand-père qui avait laissé le magazine sur la table de la cuisine, Patrick Haemers, un célèbre criminel belge encore vivant à l'époque. Une vérification (page 179) aurait eu lieu et aurait déterminé qu'au moment des faits du Delhaize d'Alost (le 9 novembre 1985, vers 19h37), Patrick Haemers se serait trouvé en prison. Vérifications contestées par l'auteur du livre.
Extrait :
Mijn blik valt op de cover. Er staat een man, ik ken de man niet, maar één ding weet ik zeker : dit is het gezicht dat mij al die jaren doodsangsten bezorgt.
- Wie is die kerel ?
- Och, dat is Patrick Haemers, een ganster die geldtransporten overvalt.
- Dat is de reus uit de Delhaize die op mij schoot.
Traduction :
Mon regard tombe sur la couverture. Il y a un homme, je ne connais pas cet homme, mais je sais certainement une chose : c'est le visage qui me cause toutes ces années des angoisses de mort.
- Qui est ce type ?
- Oh, c'est Patrick Haemers, un gangster qui attaque des transports de fonds.
- C'est le géant du Delhaize qui a tiré sur moi.

Fin des braquages

Les enquêteurs estiment qu'il est possible que la bande ait cessé ses attaques après le braquage d'Alost parce que l'un de ses membres (« le Tueur ») aurait été mortellement blessé. En effet, lors de cette attaque, le policier Eddy Nevens, instructeur de tir à la police d'Alost, certifie avoir touché un des truands. Des témoins, entendus par la cellule d'enquête en avril et mai 2003, disent avoir vu quelque part dans un bois une voiture de type VW Golf et deux individus dont la description pourrait correspondre « au Vieux » et « au Géant », près d'un corps couché[4].

Des fouilles ont été effectuées pour retrouver le corps mais elles n'ont rien donné.

En janvier 2009 à Élouges, d'autres fouilles visant à retrouver des armes ont permis de découvrir, par hasard, des ossements humains qui dataient en fait de l'époque mérovingienne. Aucun rapport dès lors avec les tueurs du Brabant[5].

Différentes pistes et thèses

Plusieurs pistes ont été suivies, mais sans permettre jusqu'à présent d'élucider l'affaire. Un des éléments les plus troublants est que la violence des attaques (surtout les faits de l'automne 1985) est sans commune mesure avec la relative modestie du butin.

Le Procureur du Roi de Nivelles était à l'époque convaincu que les auteurs étaient une bande de « prédateurs », des braqueurs tuant quiconque se mettait en travers de leur passage, sans aucune autre raison particulière.

D'innombrables pistes ont été envisagées :

  • Une bande influencée et menée par un psychopathe ("le tueur") dissimulant des massacres gratuits en braquages.
  • Le grand banditisme (simples braquages), thèse adoptée par les enquêteurs de la PJ de l'époque.
  • La filière boraine, thèse écartée malgré les aveux de certains de ses membres (par la suite rétractés). Leur motivation aurait dans ce cas été l'argent. Ils ont bénéficié d'un non-lieu par manque de preuves.
  • Un chantage en rapport avec le crime organisé et un racket qu'aurait subi la société Delhaize.
  • La théorie des « cadavres exquis » (crimes ciblés, visant des personnes biens précises, mais dissimulés dans un carnage général) en rapport avec l'affaire des ballets roses ou d'autres affaires politiques compromettantes, ou encore des règlements de compte et assassinats en rapport avec le milieu du banditisme, du secteur financier, etc. Cette piste concerne surtout les faits de 1983 et Léon Finné, une des victimes des attaques de 1985.
  • Le practical shooting : des amateurs de tirs sur cible auraient voulu passer à de véritables meurtres en tirant sur des personnes vivantes.

Il y a également eu de nombreuses thèses de liens avec d'autres affaires belges, comme le "vol d'armes à l'E.S.I.", l'affaire "Mendez", l'affaire "Goffinon", l'affaire "Vernaillen", le "Meurtre de la champignonnière", l'affaire "Ertrijckx", les affaires "Souleïman", l'"incendie du Pour", l'affaire "WNP" (Westland New Post), etc.

Une thèse se base sur le modus operandi des braquages qui ferait davantage penser, par certains côtés, à des opérations de commando camouflées qu'à des attaques à main armée classiques. Certains éléments donnent également à penser que les tueurs ont dû profiter d'informations privilégiées ou de complicités au sein des forces de l'ordre. Cette thèse est davantage alimentée par le mode opératoire professionnel des tueurs pouvant s'apparenter aux tactiques enseignées dans les milieux militaires. Certains se basent donc sur ces éléments pour défendre la thèse d'un complot qui aurait visé à déstabiliser l'État belge, voire d'autres pays d'Europe occidentale. Ils voient dans ces tueries l'action de groupements extrémistes cherchant à créer un climat de terreur auprès de la population et à favoriser l'instauration d'un régime fort. On a notamment accusé le groupe néo-nazi Westland New Post (alias W.N.P.), infiltré par un inspecteur de la Sûreté de l'État et manipulant des services de sécurité officiels belges ou étant manipulé par ces derniers, selon les versions. Des complicités au sein de la Gendarmerie ont également été suspectées (sans doute aussi parce que les auteurs n'ont jamais été arrêtés) de même que de (ex)-gendarmes liés de près ou de loin à l'extrême-droite cherchant par ces tueries à un renforcement de l'État mais aussi de la Gendarmerie et des moyens qui lui sont accordés. D'autres font même un lien avec l'organisation Gladio et les réseaux stay-behind, des structures clandestines de l'OTAN chargées de résister à une éventuelle invasion soviétique.

Durant cette même période se produisirent aussi en Belgique des attentats menés par un nouveau mouvement d'extrême gauche, inconnu jusque là, les Cellules communistes combattantes (CCC), dont les membres, parfois, eux aussi, ont été suspectés d'être les auteurs de certaines de ces tueries, et qui seront finalement arrêtés. L'hypothèse qu'ils aient aussi été manipulés pour accentuer le climat de peur a été évoquée, sans avoir été davantage démontrée.

Cellule d'enquête

Il existe toujours à l'heure actuelle une cellule d'enquête de la Police Judiciaire Fédérale basée à Jumet, la "Cellule Brabant Wallon". Cette cellule continue à enquêter sur l'affaire plus de 20 ans après. La société Delhaize offre une prime de 247 894 € et la justice une garantie de l'anonymat à quiconque fournira des informations conduisant à l'identification et l'arrestation des auteurs.

Organisation politique armée

Les séries de faits de Braine-l'Alleud, Overijse et Alost, ainsi que beaucoup d'autres, sont reprises dans la liste des séries de faits d'une ou de plusieurs "Organisations politiques armées des années 1970 et 1980".

Voir bandeau ci-dessous (liens internes à dérouler).

Notes et références

Voir aussi

Liens internes

Bibliographie

Liens externes


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