Skutterudite

Skutterudite

Skutterudite

Skutterudite
Catégorie II : sulfures et sulfosels
Skutterudite.jpg

Skutterudite avec nickelite – Bou Azzer – Maroc (11x11cm)
Général
Catégorie Minéral
Formule brute (Co,Ni)As3-x
Identification
Masse moléculaire 246.18gm g/mol
Couleur Gris acier à blanc d’étain
Classe cristalline et groupe d'espace Paramorphie cubique / 2/m -3
Système cristallin CUBIQUE
Réseau de Bravais Centré I
Macle possible
Clivage [100] Distinct , [111] Distinct
Habitus Massif, cubique, octaédrique, dodécaédrique
Fracture Irrégulière; conchoïdale
Échelle de Mohs 5.5-6
Éclat métallique
Propriétés optiques
Trait Noir
Transparence opaque
Autres propriétés
Densité 6.1 - 6.9
Fusibilité Assez facile
Solubilité dans l'acide nitirque chaud
Caractères distinctifs
Magnétisme aucun
Radioactivité aucune
Principales variétés
Smaltite Bismuthosmaltite

Les skutterudites sont une famille de composés cristallins dérivés du minéral CoAs3 (alliage de cobalt et d'arsenic) présent à l’état d’impureté dans les gisements de cobalt de la ville norvégienne de Skutterud. Ce sont des composés très étudiés pour leur propriétés thermoélectriques prometteuses et pour leurs propriétés magnétiques exotiques. Leur structure possède une cage volumineuse dans laquelle peut être inséré un atome lourd. Elles peuvent donc être de type vide, ou binaires, ou de type remplies. Elles se présentent sous forme de poudre très friable, de couleur brune ou métallique suivant la composition.

Sommaire

Inventeur et étymologie

Décrit par Wilhelm Karl Ritter von Haidinger en 1845. Inspiré du nom de sa localité-type.

Galerie : famille de la skutterudite

Les skutterudites binaires

Structure cristalline

Skutterudite MX3 (M = sombre, X = clair)

Les skutterudites binaires de la forme MX3 (avec M un métal de transition de la colonne du cobalt, et X un pnictogène : phosphore, arsenic ou antimoine) dérivent directement du minéral naturel CoAs3. Leur structure cristallographique, définissant un nouveau type, a été établie en 1928 par Oftedal. Elles cristallisent dans le groupe d'espace Im3 (groupe n°204). La structure cristalline est constituée d’un sous réseau cubique simple d’atomes M occupant les positions cristallographiques 8c de la maille élémentaire (1/4, 1/4, 1/4), les atomes X occupant les positions cristallographiques 24g (0, y, z). La maille cubique centrée contient 32 atomes comme le montre la figure ci-contre.

Connaissant le groupe d'espace, la structure cristallographique est complètement déterminée par la connaissance des trois paramètres y, z (positions des atomes X dans la maille élémentaire) et a (paramètre de maille). Elle peut alors être décrite de deux manières complémentaires :

Skutterudite MX3 avec M à l'origine
  • La figure de gauche montre la structure skutterudite en plaçant un atome M (site 8c) à l’origine de la maille élémentaire. Dans cette représentation, l’ensemble des positions prises par le métal de transition M constitue un réseau cubique simple. Au centre de six cubes sur huit se trouve un anneau rectangulaire de pnictogènes. Ces anneaux sont perpendiculaires aux trois directions cristallographiques (100), (010) et (001). Les deux derniers cubes sont inoccupés et correspondent au site cristallographique 2a. Cette représentation permet de mettre en évidence les liaisons chimiques X-X.
Skutterudite MX3 avec le site 2a à l'origine
  • La figure de droite montre la structure skutterudite en plaçant le site 2a (inoccupé) à l’origine de la maille. Cette représentation peut être décrite comme un réseau cubique simple de métaux de transitions, chacun étant situé au centre d’un octaèdre déformé de pnictogène. Elle met donc en évidence les liaisons chimiques M-X, et on voit alors clairement apparaître une cage volumineuse entre les huit octaèdres MX6, centrée en 2a.

Cette seconde représentation permet d’obtenir une « généalogie » de la structure skutterudite qui peut se concevoir comme résultante d’une perte de symétrie de la structure perovskite ReO3 (groupe d’espace Pm3m, n°221). Celle-ci est constituée d’atomes de rhénium situés au centre d’octaèdres réguliers, deux octaèdres proches voisins partageant un sommet avec un angle Re-O-Re de 180° (figure ci-dessous). Le passage de la structure cubique lacunaire ReO3 à la structure cubique lacunaire de CoX3 se fait en "tiltant" les octaèdres MX6, avec au passage un doublement dans chaque direction de la taille de la maille élémentaire. De la même manière que la structure perovskite, la structure skutterudite fait alors apparaître des cages volumineuses correspondant aux sites 2a de la structure cristallographique.

Structure Perovskite (le dessin montre 4 mailles élémentaires)

Propriétés électriques et magnétiques

Les skutterudites binaires non dopées, en l’absence de sur-stoechiométrie ou de sous-stœchiométrie en antimoine, sont des semi-conducteurs de type p (conduction par des trous). Leur gap (ou bande interdite) est très faible, de l'ordre de 0.05 eV à 0.2 eV suivant la composition. La propriété la plus remarquable des skutterudites binaires, qui a été à l’origine de l’intérêt qui leur est porté dans le domaine de la thermoélectricité, est la valeur exceptionnellement élevée de la mobilité des porteurs de charges qui atteint 2000 cm².V-1.s-1 dans CoSb3 et même 1.104 cm².V-1.s-1 dans RhSb3. Cette très grande mobilité des porteurs de charges à pour corollaire une conductivité électrique σ très élevée pour des semi-conducteurs (résistivité inférieure à 1 mΩ.cm). Les skutterudites binaires possèdent en outre des valeurs de pouvoir thermoélectrique S (ou coefficient Seebeck) élevées, supérieurs à 100 µV.K-1, en accord avec leur état semi-conducteur. Elles possèdent donc des facteurs de puissance thermoélectrique σS² très élevés. Les skutterudites binaires sont des composés diamagnétiques (absence de moment magnétique). Il est possible d’effectuer des dopages sur le site du métal de transition par des éléments de la colonne du fer ou du nickel ou sur le site du pnictogène par des éléments de la colonne de l’étain ou du tellure afin de modifier les propriétés électroniques et d’obtenir des composés de type n (conduction par des électrons) comme de type p (conduction par des trous). Par exemple dans le cas de CoSb3, il est possible d’obtenir un dopage de type p en substituant Co par Fe. Le dopage de type n peut être obtenu par substitution de Co par Ni, Pd ou Pt ou de Sb par Te ou Se. Le dopage tend à diminuer à la fois la résistivité électrique et le coefficient Seebeck.

Propriétés thermiques

Les composés de la famille des skutterudites binaires possèdent des conductivités thermiques relativement faibles. Ceci est dû au grand nombre d’atomes dans la maille élémentaire ainsi qu’au fait que celle-ci soit constituée en grande partie d’atomes lourds, notamment pour les skutterudites à base d’antimoine. Elle est de l'ordre de 100 mW.cm-1.K-1, soit environ 40 fois inférieure à celle du cuivre. La plus grande part de cette conductivité thermique est due aux vibrations du réseau cristallin (phonons), pour environ 90%, et pour 10% environ aux porteurs de charge (électrons et trous). Elle est très nettement réduite dans les solutions solides comme par exemple Ir0.5Rh0.5Sb3.

Les skutterudites remplies

Les chimistes Jeitschko et Braun ont montré en 1977 qu’il est possible d’insérer une terre-rare dans la cage du site 2a de la skutterudite binaire (entre les octaèdres MX6) pour former une skutterudite ternaire de type "skutterudite remplie" ou "filled skutterudite". Ce remplissage de la cage vide est rendu possible par la substitution concomitante du métal de transition par un élément possédant un électron de moins (fer, ruthénium ou osmium) pour compenser les électrons apportés par l’ion électropositif. Depuis lors, il a été montré que de nombreux autres éléments peuvent être insérés dans la structure : alcalino-terreux, thorium, uranium, sodium ou potassium, thallium, etc.

Structure cristalline

Skutterudite remplie (noir=R, gris foncé=M, gris clair=X

Les skutterudites remplies ont une structure cristallographique analogue à celle des skutterudites binaires (voir figure) : elles cristallisent dans le groupe d’espace Im3, avec l’ion électropositif en site 2a (0, 0, 0) du groupe d’espace, le métal de transition en site 8c (1/4, 1/4, 1/4) et le pnictogène en site 24g (0, y, z). La formule générale d’une skutterudite remplie est donc R2M8X24, ou de manière plus commune RM4X12 en considérant la maille unitaire rhombohédrique. La taille de la cage est grande par rapport aux rayons des ions électropositifs pouvant être insérés, et ce tout particulièrement dans les skutterudites à base d’antimoine. Il n’y a donc pas de variation brutale du paramètre de maille avec le remplissage (il passe de 9,035 Å dans CoSb3 à 9,135 Å dans CeFe4Sb12, soit une augmentation de l’ordre du pour cent), et l’ion électropositif est faiblement lié à son environnement. Ceci se traduit par une amplitude de vibration importante de l'ion autour de sa position d'équilibre. Il n'est donc pas possible d'insérer des ions trop petits, ils ne seraient pas assez liés à la cage. Bien qu’il n’y ait qu’un seul site cristallographique pour l’atome de terre-rare, le taux de remplissage de la cage n’est jamais égal à un, et la structure devrait plutôt être décrite par la formule générale RyM4X12. La cause de ce remplissage fractionnaire n'est pas connue à l'heure actuelle. Le taux de remplissage y dépend de la composition chimique et de la technique de synthèse du cristal.

Propriétés électriques

Nous avons vu que les skutterudites binaires sont des composés semi-conducteurs. Toute variation du nombre d'électrons dans le système entraînera donc une évolution vers un état plus métallique. Prenons l'exemple d'une skutterudite remplie RFe4Sb12. Le fer possédant un électron de valence de moins que le cobalt, le passage de CoSb3 (ou Co4Sb12) à [Fe4Sb12] correspond à la perte de quatre électrons. L’ion électropositif inséré dans la cage étant dans un état de valence n+, n électrons sont fournis au système pour compenser les trous électroniques. Ainsi dans le cas d’une terre-rare trivalente (3+), il restera un trou électronique par formule unité dans le système, qui sera donc métallique. C'est en fait le cas de la plupart des skutterudites remplies, les atomes pouvant être insérés dans la cage étant pour la plupart divalent (2+) ou trivalent (3+). Certaines skutterudites remplies présentent même un état supraconducteur à basse température.

Propriétés magnétiques

Les skutterudites remplies possèdent une très grande variété de propriétés magnétiques suivant la composition chimique. Leur magnétisme est constitué de la somme de deux contributions : une contribution du réseau [M4X12], et une contribution de l'ion électropositif. Ces deux contributions peuvent être indépendantes ou couplées suivant la composition. Il existe ainsi des skutterudites remplies :

Propriétés thermiques

Les skutterudites remplies possèdent une conductivité thermique sensiblement plus faible que les skutterudites binaires. En effet, l'ion électropositif étant inséré dans une cage beaucoup plus grande que lui, il peut vibrer de manière incohérente avec une grande amplitude autour de sa position d'équilibre. Ces vibrations empêchent la propagation des phonons, par un mécanisme qui n'est pas compris à l'heure actuelle.

Propriétés thermoélectriques

Les skutterudites remplies sont des composés prometteurs pour des applications de génération d'électricité par effet thermoélectrique. Elles possèdent en effet des facteurs de mérite thermoélectrique élevés. Ceux-ci peuvent par ailleurs être très nettement augmenter en effectuant des substitutions (dopage) sur les sites M et X, ce qui permet d'optimiser les propriétés électriques (conductivité électrique et coefficient Seebeck. Il est également possible de diminuer le taux de remplissage de la cage, ce qui permet d'augmenter le désordre de la structure et de diminuer la conductivite électrique. Ces skutterudites, dites alors partiellement remplies, figurent parmi les matériaux les plus prometteurs étudiés actuellement en laboratoires pour des applications dans un domaine de température de l'ordre de 300 à 500 °C.

Synonymie [2]

  • arsenkobaltkies
  • modumite

Voir aussi

Notes et références

  1. Dana 7:I:300.
  2. « Index alphabétique de nomenclature minéralogique » BRGM

Pour plus d'information, il est possible de consulter la thèse de doctorat "Etude de skutterudites de terres-rares (R) et de métaux d (M) du type RM4Sb12 : de nouveaux matériaux thermoélectriques pour la génération d’électricité.", disponible en ligne sur http://tel.ccsd.cnrs.fr/

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