- Samādhi
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Samadhi
Samâdhi (sanskrit: समाधि) est un terme du yoga hindou et du bouddhisme. Il signifie complet (sam-) établissement, maintien, « reposition » (-ādhi) de la conscience, de l'attention. Son usage généralisé a entraîné un important élargissement sémantique: ce substantif masculin signifie « union, totalité, accomplissement, achèvement, mise en ordre, rangement, concentration totale de l’esprit, contemplation, absorption [1] ».
- Dans l'hindouisme, c'est le nom de la huitième et dernière étape de l'ashtânga-yoga (signifiant huit membres) qui est exposée dans les Yoga-Sûtra de Patañjali, durant laquelle l’esprit du yogi réalise la « réalité ultime » (l'Atman qui n'est pas différent de Brahman).
- Dans le bouddhisme, ce terme a deux acceptions : concentration et établissement dans l'éveil.
Sommaire
Le samâdhi dans la tradition bouddhique
Le samâdhi en tant que concentration
En tant que concentration, le samâdhi est associé à la pratique de méditation appelée samatha bhavana, le développement de la tranquillité. La concentration mentionnée ici est donc un état d'esprit particulier : il ne s'agit pas de la concentration ordinaire, utilisée pour effectuer des tâches intellectuelles.
Plusieurs niveaux de concentrations sont distingués :
- Concentration grossière, ou préliminaire (parikamma samadhi)
- Il s'agit des premières expériences d'un méditant. Il est capable de maintenir son esprit sur un signe appris pendant quelques secondes seulement, voire quelques minutes.
- Concentration d'approche (upacara samadhi)
- Ou concentration de proximité. Le méditant ne considère plus l'objet initial mais se concentre sur le signe réfléchi, une image embellie de l'objet initial. Par exemple, dans la pratique de Anapanasati, le souffle sera perçu comme soyeux, lisse ou délicieux. La concentration peut être maintenue beaucoup plus longtemps.
- Concentration d'insertion (appana samadhi)
- Il y a unification avec l'objet de concentration et développement d'un état de conscience altéré. Voir dhyana, arupajhana.
La méditation vipassana développe également un type de samâdhi appelé khanika samadhi (concentration momentanée), dirigée non pas vers un objet fixe comme avec samatha, mais sur des phénomènes changeants du corps et de l'esprit.
Le samâdhi en tant qu'établissement dans l'éveil
À ce titre, le samâdhi est le huitième membre du noble sentier octuple.
Cette double signification du mot samâdhi a entraîné chez les premiers interprètes occidentaux du bouddhisme nombre d'incompréhensions : pour eux, la culmination du noble sentier octuple représentée par le samâdhi était une "simple" concentration, ce qui rabaissait tant le but du bouddhisme, l'éveil, que la voie y menant, le noble sentier octuple.
Le samâdhi dans la triple pratique de dhyâna
Les traditions chinoise et japonaise du boudhhisme ont beaucoup insisté sur la notion de triple pratique du dhyâna qui est éveil (chan en chinois et zen en japonais):
- Sila
- le sens traditionnel est respect des préceptes et action vertueuse, mais le terme désigne ultimement l'action dépourvue de toute contamination egotique ;
- Prajnâ
- vision et compréhension hors de toute projection personnelle ;
- Samâdhi
- désigne traditionnellement les différentes formes de la concentration, mais la portée du terme sera élargie ici, notamment dans l'esprit des enseignements de certains patriarches chinois du chan (Huineng (japonais Eno, 638-713), Shenhui (668-760), Xiyun (Obaku, ?-850):
Ultimement, dans le Bouddhisme, le samâdhi est non-demeure et absence de tout point d'appui. De là, ce qui est non attachement est samâdhi. Ce n'est donc ni se détourner délibérément des pensées et des images ni chercher à y demeurer, ni encore chercher à se concentrer sur un seul point ou objet. Cependant, les différentes formes de concentration visant à pacifier progressivement l'esprit peuvent être des moyens utiles menant au samâdhi ultime.
Celui-ci est renoncement à toute production de la conscience et jusqu'au renoncement à l'idée même de renoncer. Cette non demeure est à concevoir comme non production de déterminé. Sans aucun souvenir, sans aucune attache, c'est la condition propice pour que la conscience propre (skandhas) fonctionne en harmonie avec la conscience unitaire (dharmadhatu). Comme le mentionne Huineng dans le Sūtra de l’Estrade : « Il suffit que samâdhi soit là pour que prajnâ soit là et vice versa... ». Les trois aspects de la triple pratique du dhyana fonctionnent comme un tout organique dont on ne peut isoler un élément ; c'est pour des raisons pédagogiques que cette distinction a été introduite.
Dans la tradition zen, zazen est le prototype de l'union du sila, du samâdhi et du prajnâ. En effet, il combine l'absence d'action egotique (sila), l'absence de production délibérée de pensée et d'opinion personnelle (samâdhi) et l'absence d'appropriation d'un point de vue particulier (prajna). Aussi zazen y est-il considéré comme équivalent au dhyana, mais sans que le dhyana se limite à la sphère du zazen.
Les samâdhi dans la tradition yogique
Le mot samâdhi, dans l'hindouisme a les significations suivantes :
- « 1) le huitième et dernier membre du Râja-Yoga et du Hatha-Yoga ;
- 2) état d'union avec le Dieu personnel ou d'absorption dans l'Absolu ;
- 3) état de supraconscience, passage sur l'un des plans de conscience supérieurs à l'état de veille ;
- 4) monument funéraire d'un sage ou d'un saint »[2].
En Inde, ce que l’on appelle samâdhi représente des paliers de réalisation, chacun d’eux étant un samâdhi particulier. Patañjali, dans les Yoga-Sûtra (IIe s. av. J.C. ?), distingue tout d’abord deux grandes subdivisions de samâdhi :
- avec ou sans support (Y.S. 1-17 & 1-18)
- selon la nature de l'objet (Y.S. 1-42, 1-43 & 1-47)
Avec ou sans support
Samprajnâta-samâdhi
Samprajñāta ( संप्रज्ञात en devanāgarī) ce terme sanskrit signifie : contemplation avec conscience, avec activité de la pensée.
Samprâjnata-samâdhi, que l’on désigne aussi sous le nom de sabîja[3] samâdhi, est caractérisé par l'activité mentale vrittis encore active ; la notion d’égo est encore présente. L’état supérieur du samprajnâta est désigné par le terme de vivekakhyâti ou prasamkhyâna samâdhi, discrimination entre le Soi et le non-Soi, aboutissant à l’asamprajnâta samâdhi détaillé dans le paragraphe suivant.Asamprajnâta-samâdhi
Asamprajnāta (असंप्रज्ञात en devanāgarī) ce terme sanskrit signifie : contemplation sans conscience, sans activité de la pensée, sans support.
Asamprajnâta-samâdhi que l’on nomme aussi nirbîja[4] samâdhi[5].Selon la nature de l'objet
Objets grossiers (tarka)
- Savitarkâ, de (savi = avec)
- Nirvitarkâ, de (nir = sans)
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- Le nirvitarkâ-samâdhi (contemplation sans raisonnement) est une contemplation sur des objets grossiers, mais le mental est en relation directe avec l'objet sans (nir) raisonnement (tarka), comparaison ou accès à la mémoire.
Objets subtils (cara)
- Savicara, de (savi = avec)
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- Le savichâra-samâdhi (contemplation avec délibération) est accompagné de d'activité du mental (vritti), centré sur des objets subtils : temps, espace et causalité.
- Nirvichâra, de (nir = sans)
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- Le nirvichâra-samâdhi (contemplation sans discrimination) est une contemplation sans (nir) activité du mental (vritti), où temps, espace, causalité se sont résorbés, de sorte qu'il n'y a que vacuité.
Ânanda
Lorsque le nirvichâra-samâdhi débouche sur la paix du Soi, on l’appelle ânanda-samâdhi (contemplation en béatitude) (ânanda = "béatitude, félicité"). L’appellation asmitâ-samâdhi (contemplation en conscience) est une appellation à éviter, car asmitā ( अस्मिता en devanāgarī) signifie "sentiment du moi, confusion issue de l'égoïsme".
Notes et références
- ↑ N. Shtoupak, L. Nitti et L. Renou, Dictionnaire Sanskrit-français, Maisonneuve, 1980, p.794. Voir aussi : Samadhi.
- ↑ Jean Herbert et Jean Varenne, "Vocabulaire de l'hindouisme", Dervy, 1985, p. 88.
- ↑ sabīja, सबीज en devanāgarī) ce terme sanskrit signifie "contenant des germes"
- ↑ sans graine
- ↑ Pour les bouddhistes, la personne accédant à ce samâdhi échappe à la roue du samsara, ce qui signifie que dans cet état, on n’est plus obligé de se réincarner pour poursuivre son évolution. On peut donc assimiler l’entrée dans ce samâdhi à l’atteinte de la première terre de Bodhisattva du bouddhisme.
Voir aussi
Liens internes
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