- Anapanasati
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Anapanasati (ana-pana-sati, mot pali) signifie attention sur le souffle.
Dans le bouddhisme theravada, le souffle est l'objet de méditation le plus courant quand il s'agit de calmer l'esprit, par la pratique de la méditation "Samatha bhavana". Le souffle est toujours présent chez tout être vivant, et ce phénomène se fait parfois de manière consciente, parfois non, ce qui semble les deux raisons de sa popularité.
L'attention sur le souffle est également populaire dans la pratique de la méditation "Vipassana". Mahasi Sayadaw utilise par exemple une attention aux mouvements de l'abdomen dus à la respiration comme point de départ de la méditation vipassana, sans rechercher une concentration (Dhyāna) particulière.
Cependant, Anapanasati est la technique pour accéder aux états de conscience altérés que sont les Dhyanas.
Sommaire
Anapanasati sutta
Le sutta anapanasati, 118e sutta du Majjhima-Nikâya du Canon pali, est l'un des plus populaires chez les theravadins. Il décrit la pratique de l'attention tout au long de la journée, ainsi qu'une pratique, en 16 points, de anapanasati, mélangeant la pratique de la concentration et de vipassana et menant à l' obtention du nirvāna.
Les seize étapes - ou contemplations - de ānāpānasati sont divisées en quatre tétrades (groupes de quatre).
Les quatre premières étapes concentrent l'esprit sur la respiration, qui est le "conditionnement du corps" (pâli: kāya-sankhāra).
La deuxième tétrade est une concentration sur les sensations (vedanā), qui sont le "conditionnement de l'esprit" (pâli: citta-sankhāra).
La troisième tétrade est dirigée sur l'esprit lui-même (pali: citta), et la quatrième sur "la vérité" (pâli: dhamma).
Une session de méditation anāpānasati devrait progresser à travers les étapes dans l'ordre, en commençant par la première, que le praticien ait effectué toutes les étapes dans une session précédente ou non.
Satipatthana Anapanasati Tétrades 1. Contemplation du corps 1. Respiration longue Première tétrade 2. Respiration courte 3. Ressentant tout le corps 4. Tranquillisant les activités corporelles 2. Contemplation des sensations 5. Ressentant la joie Deuxième tétrade 6. Ressentant la félicité 7. Ressentant les formations mentales 8. Tranquillisant les formations mentales 3. Contemplation de l'esprit 9. Ressentant l'esprit Troisième tétrade 10. Réjouissant l'esprit 11. Concentrant l'esprit 12. Libérant l'esprit 4. Contemplation des dharmas 13. Contemplant l'impermanence Quatrième tétrade 14. Contemplant l'absence de passion 15. Contemplant l'extinction 16. Contemplant l'abandon Table 1. Les quatre Satipatthanas et les seize phases d'Anapanasati. Exégèse
Selon le moine theravadin Ajahn Brahmavamso[1], les 12 premières étapes sont des instructions en vue du jhana et les 4 dernières des instructions sur ce qu'il faut faire ensuite. Dans les 2 premières étapes, il s'agit d'observer la respiration (et non pas de la contrôler), en comparant par exemple la longueur de l'inspiration et de l'expiration. Dans la troisième étape, il s'agit de ressentir tout le "corps de respiration" : l'attention est exclusivement portée sur la respiration, dans toutes ses nuances et ses modalités. Dans la quatrième étape, la respiration devient calme, plus subtile, l'attention se porte sur elle à chaque instant sans chercher à reconnaître si c'est une inspiration ou une expiration. Dans les cinquième et sixième étapes, joie et bonheur apparaissent naturellement et graduellement : l'énergie mentale passe totalement dans l'observation plutôt que dans l'action. A la septième étape, la respiration semble disparaître, elle n'est plus connue que comme un objet mental (citta-sankhara), les 5 bases des sens sont abandonnées. La huitième étape est destinée à contrer la peur ou l'excitation qui peuvent survenir à ce stade. A la neuvième étape, l'esprit est ressenti au travers du nimitta (un signe caractéristique, tel qu'une lumière très brillante ou une autre sensation). Les étapes 10 et 11 permettent d'augmenter la brillance et la stabilité du nimitta : on peut pour cela se concentrer sur le centre du nimitta pour augmenter sa luminosité, ou au contraire l'ignorer temporairement pour revenir à la respiration. La onzième étape permet de soutenir l'attention sur le nimitta, pour le rendre stable. La douzième étape ("vimocayam cittam" : "libérant l'esprit") est l'entrée en jhana, par absorption dans le nimitta : ce n'est pas le résultat d'une action, cela survient comme le résultat naturel de l'abandon de toute action. L'esprit est à présent libre, libre du corps et des cinq sens : on ne ressent plus du tout ce qui a trait au corps. Les 4 dernières étapes font suite au "lâcher-prise" du jhana, par examen de l'expérience de non-soi qui a eu lieu.
L'interprétation de Prajñānanda[2] est assez différente, car elle est davantage orientée vers la Prajnaparamita (ce qui peut sembler paradoxal pour un texte qu'on rattache habituellement au Theravada) : les 4 tétrades sont indépendantes les unes des autres, et la douzième étape doit conduire à la Vue pénétrante, vipassana. L'objectif n'est pas nécessairement jhana ("pour arriver au sans-condition, il n'y a pas besoin de conditions", vipassana ne requiert donc pas jhana), mais davantage une "vigilance remémoratrice" qui s'exerce sur les trois modes psychiques, subconscient, conscient et surconscient, et l'accès à la connaissance transcendante (prajñā). La première tétrade réalise la tranquillisation du corps (ou des corps). La deuxième tétrade mène à dhyāna, tranquillisation de la psyché, accès au "phénoménal subtil". Lors de la 3e tétrade la psyché est sans activité, complètement tranquille, la connaissance transcendante se manifeste, se développe ; la libération dont il est question à l'étape 12 est libération des purulences subconscientes (asravas). La 4e tétrade, une fois la psyché immobile et vigilante, mène à la connaissance transcendante et donne accès à l'Absolu. Cette tétrade ne doit pas être interprétée comme "attention aux objets mentaux", "dharma" désignant tout ce qui est supporté, tous les phénomènes (pas seulement les objets mentaux).
Citations
« Sur la trame de la vigilance, je tisse le va-et-vient du souffle. (Prajñānanda) »
« Le souffle est la passerelle entre le monde des cinq sens et le monde de l’esprit. (Ajahn Brahm) »
Traduction en langue française
Thich Nhat Hanh, "La respiration essentielle (Notre rendez-vous avec la vie)", éd. Albin Michel, Paris, 1990. Traduction de l'Anapana Sati Sutta à partir de la version pâlie ainsi qu'une autre à partir du canon chinois.
Notes et références
- Manuel de méditation selon le bouddhisme Theravada, Ajahn Brahm, éd. Almora, 2011
- Manuel à l'usage des pratiquants d'Anapanasati, 1985
Liens externes
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