Périurbanisation

Périurbanisation
La périurbanisation accélérée des capitales (ici Stockholm, banlieue de Viksjö) se fait au détriment des espaces naturels et agricoles périphériques, février 2007
La ville de Londres a connu un phénomène d'étalement urbain particulièrement important, qui explique l'empreinte écologique élevée de cette conurbation
Périurbanisation de Melbourne, avec espace vert insularisé dans la ville

La périurbanisation, phénomène lié à celui de rurbanisation (néologisme apparu en France en 1976[1], mot-valise créé à partir de rural et d'urbain), désigne le processus de « retour » ou « fuite » des citadins vers les campagnes, à partir de la fin des années 1960 et du début des années 1970, dans des espaces périurbains qualifiés de ruraux.

C'est la conséquence à la fois d'un « désir de campagne » et de la disponibilité de l'automobile conjuguée à l'amélioration des moyens et des voies de communication c’est-à-dire des facteurs de localisation. La périurbanisation peut parfois, être accompagnée d'une « dédensification » de la ville-centre (phénomène des « shrinking cities » pour les anglophones), quand il y a fuite des habitants du centre vers les communes périphériques (moindre coût du foncier et des locations, cadre de vie, ou sécurité jugée plus élevée parfois).

Au final, c'est surtout un processus d'extension spatiale de la ville et donc de perte de milieux naturels et/ou ruraux ; Par exemple, en France en 2011 selon la ministre de l'Écologie (N. Kosciusko-Morizet), en moyenne 165 hectares, soit 1 650 000 m2) de milieux naturels et terrains agricoles sont détruits chaque jour ; remplacés par des routes, des habitations, des zones d'activité[2]. Cette surface correspond à un plus de 6 hectares par heure ; soit 68 750 m2/heure ou 19 m2/seconde.

Sommaire

Éléments de définition

En France, l'INSEE appréhende le processus de périurbanisation au travers de la notion statistique d’aire urbaine et de « couronne périurbaine » (Somme des communes d'une aire urbaine, à l’exclusion de son pôle urbain).

La périurbanisation a pour conséquences :

  • un apport très important de population active en milieu rural.
  • l'implantation d'un nouveau mode de vie en milieu initialement rural.
  • la modification des paysages.
  • mise en déséquilibre par imperméabilisation des sols[3] des dispositifs régulateurs naturels d'intempéries pour la fonte rapide de neige, la pluie abondante[4].
  • des conflits entre les activités agricoles et les rurbains.
  • des conflits de type sociologique entre les anciens ruraux et les rurbains.
  • la dynamisation d'espaces ruraux accessibles en durée de trajet depuis les villes.
  • la redynamisation d'espaces ruraux très éloignés et restés campagnards traditionnels.
  • l'intensification du phénomène de déplacement pendulaire.

Elle peut par ailleurs contribuer à la paupérisation de certains quartiers urbains - départ des classes moyennes - et participer ainsi au renforcement des disparités spatiales et sociales au sein des agglomérations.

Périurbanisation en Europe

L'Europe est ainsi un des continents les plus urbanisés au monde. Plus du quart de la surface de l'Union européenne est en 2007 affecté par l'expansion urbaine[5].

Périurbanisation en France

Éléments statistiques

  • D'après l'IFEN, vers 2006, environ 60 000 hectares de terres naturelles ou agricoles disparaissent chaque année en France sous l'effet de l'urbanisation[6].
  • C'est en France l'espace périurbain (dans un foncier moins cher qu'en ville, mais plus cher qu'en milieu rural éloigné) qui accueille l'essentiel de la croissance démographique [7].
  • Selon le CREDOC le dynamisme migratoire périurbainn (et des pôles ruraux) se fait au détriment des grands pôles urbains[8]. En moins de 10 ans, de 1990 à 1999, la population française a grandi de 2,5 % dans les villes, 8 % dans l’espace périurbain et de 0,6 % dans les espaces ruraux avec un fort impact sur le paysage périurbain[9].
  • Dans le même temps, en 2007, il faut 507 logements pour loger 1 000 habitants, alors que 323 suffisaient en 1968[10]. Environ 50 % des urbains de sont concentrés dans les zones périurbaines[11], contribuant à l'artificialisation des sols.
  • Les espaces ruraux présentent des spécificités
- Les zones proches de grands centres urbains et de bassins d'emplois importants, facilement accessibles par des autoroutes ou voies rapides et en transports en commun sont les zones les plus concernées par la périurbanisation. Exemple: Saint-Gély-du-Fesc, Les Fourgs. Les villages sont alors privilégiés par les jeunes couples, qui y trouvent un coût du foncier plus accessible que dans le centre.
- Les zones rurales isolées ne sont pas concernées par la périurbanisation. Elles souffrent d'un isolement géographique ou topologique associé à une rentabilité économique des sols faible : dans les Baronnies, depuis la chute de l'activité agricole, les difficultés de communication ont empêché le renouveau des villages. Ces zones sont largement délaissées et gagnées par une importante déprise agricole et un vieillissement des infrastructures.
- Les zones rurales dynamiques et éloignées des grands centres urbains sont souvent directement touchés par la périurbanisation: elles tirent leurs ressources du tourisme, des résidences secondaires, du retour des retraités, d'une agriculture dynamique et d'une présence de l'industrie agro-alimentaire. C'est par exemple le cas de la vallée de la Durance dans les Hautes-Alpes. L'arrivée de l'irrigation a permis de développer les cultures fruitières. La population des villages concernés (Lazer, Ventavon, Le Poët) a doublé en trente ans.

Mécanisme

Facteur politique

Quatre facteurs au moins semblent avoir favorisé la périurbanisation :

  • les politiques souvent concurrentielles d'attractivité engagées par les villes et les agglomérations (qui cherchent ainsi à augmenter leurs rentrées financières via les taxes), encouragées par des subventions régionales et nationales,
  • les politiques agricoles qui ont encouragé l'intensification et donc l'exode rural,
  • les politiques routières qui ont favorisé le « tout-voiture » et l'accès aux villes et la construction d'un tissu urbain lâche, desservi par les routes,
  • les politiques du logement : par exemple, en France, les politiques d'après-guerre (banlieues et HLM urbaines), puis le changement dans la politique du logement opéré sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, au milieu des années 1970 ont contribué à ce phénomène ;la politique de construction de logements collectifs par l’état menée jusque là a été remplacée par une politique d’aide à l’accession à la propriété, notamment par la bonification des taux d’intérêt pour les particuliers. Malgré la mise en évidence des les années 1970 des dérives possibles, cette aide restera non zonée, attribuable partout en France et non typée, ne dépendant pas du type de construction. En augmentant la solvabilité des ménages les plus modestes, l’État subventionne directement la périurbanisation.

Facteur économique

Lotissement périurbain, San José (Californie)

Face au prix de l’immobilier dans les centres urbains, il est communément admis qu’une maison individuelle en zone périurbaine est moins chère à l’achat. En effet, lors de la construction les dépenses sont de deux ordres : les coûts de construction, qui restent stables voire diminuent dans le temps et dans l’espace, et les coûts d’acquisition du terrain, qui en parallèle à la hausse des prix du marché immobilier ont connu une forte hausse dans les vingt dernières années. Cette hausse du prix des terrains n’est bien sûr pas uniformément répartie géographiquement. C’est donc sur ce poste que s’effectue l’arbitrage financier entre coûts et distance : si dans un premier temps les terrains situés dans une première couronne autour des agglomérations étaient attractifs, c’est désormais dans une deuxième, voire une troisième, couronne que se situent les secteurs encore abordables. Pour Lyon, cet impact est aujourd’hui de l’ordre de 50 km.

Néanmoins, cette logique relève d’une analyse économique à court terme : on ne prend pas en compte le coût dans la durée d’une telle localisation : la mobilité peut ainsi représenter jusqu’à 30% des revenus du ménage, à travers l’achat et l’entretien impératif de deux voitures notamment[12]. La périurbanisation peut ainsi s'expliquer par la conjecture de Zahavi.

Logique d'acteurs

Les limites urbain/rural se déplacent régulièrement, toujours au détriment du rural, peut-on toujours parler de limites ?. (Colline de Voméro, Naples, Italie)

Ce phénomène se trouve par ailleurs renforcé par les politiques de différents acteurs. En effet, les municipalités, compétentes dans l’attribution des permis de construire, ont le rôle principal pour ce qui est de la dispersion des logements :

  • Dans un premier temps, l’ouverture à la construction permet l’arrivée de nouveaux habitants et donc le maintien dans les communes rurales proches des villes de l’école, des commerces, ... De plus dans un contexte de crise agricole, la vente de terrains nouvellement constructibles par les agriculteurs leur permet de financer leur retraite.
  • Dans un deuxième temps, on observe une collusion entre anciens et nouveaux habitants qui ne souhaitent pas se retrouver à terme en milieu urbain : c’est la fermeture des autorisations de construction qui, en diminuant l’offre, contribue à la hausse des prix. Le phénomène se reporte ainsi de proche en proche mais de plus en plus loin des centres urbains.

Impact environnemental

Insularisation (par encerclement) de la forêt de Kabacki par la banlieue de Varsovie (Pologne, Février 2007)
Même si la forme urbaine, le relief, le climat et la planification urbaine et des transports jouent un rôle modérateur ou aggravant, l'étalement urbain favorise un usage plus intense de l'automobile, avec parmi ses effets connexe la pollution automobile

La périurbanisation se traduit par une augmentation des prix du foncier et des pressions accrues sur l'environnement et les paysages (artificialisation, au détriment de la naturalité), voire par des conflits pour la ressource en eau.

La périurbanisation contribue à augmenter l'empreinte écologique d'une ville, de même que ses émissions de gaz à effet de serre et la pollution globale de l'air notamment en entraînant d'importantes migrations pendulaires (déplacement quotidien entre l'habitat du citadin et son lieu de travail, s'effectuant toujours aux mêmes horaires) ; comme plus généralement toute séparation du lieu de travail et du lieu d'habitation. Quand seule la circulation routière a été favorisée ou soutenue, la périurbanisation est source d'une importante augmentation de la consommation d'espace, de fragmentation éco-paysagère du territoire, d'énergie et de gaz à effet de serre. Elle contribue fortement à l'augmentation de l'empreinte écologique des zones concernées. Bien que plus riches en espaces verts privés, les zones périurbanisées pâtissent des pics d'ozone, parfois plus qu'en centre-ville d'où viennent les précurseurs photochimiques de l'ozone.
La périurbanisation se fait souvent au détriment des reliques de milieux naturels périurbains et de l'agriculture (par exemple, autour de Paris, de 1979 à 2000, l'espace agricole a reculé de 18,4 %, et 50 % des exploitations agricoles et les 2/3 des exploitations spécialisées ont disparu, ce qui a motivé en 2008 un budget de 11 millions d’€ de la région Ile-de-France pour ralentir la consommation d’espaces agricoles).

Lutte contre la périurbanisation

Certaines ceintures vertes urbaines visent à limiter l'étalement urbain. Un projet Interreg IVC intitulé « Periurban parks[13] » porte aussi sur ces questions et vise « L'intégeration d'espaces naturels et ruraux dans nos villes » C'est aussi en France l'un des nombreux objectifs de la Trame verte et bleue française (TVB / SRCE)[2]. Parallèlement à sa TVB, la Région Nord-Pas-de-Calais expérimente une directive régionale d'aménagement visant à lutter contre l'artificialisation du territoire par la périurbanisation[14].

Notes et références

  1. G. Bauer et J.-M. Roux. La rurbanisation ou la ville éparpillée, Edition du Seuil, Paris 1976. Cet ouvrage reprend pour une part un rapport établi en 1973 pour la DATAR par l'AREA
  2. a et b Communiqué AFP, [Trame verte et bleue: ne pas réduire le projet à des crapauducs ; Paris - Le comité national Trame verte et bleue], Romandie News, 18 octobre 2011
  3. Revêtement de voies, de parcelles bâties dans des bassins anciennement inondables (de friches et de prairies) provoquant l'effet chasse d'eau par drains puis canalisation des affluents. Voir Inondation
  4. Exemple : Vallée de l'Orge
  5. Étalement urbain en Europe, EEA Briefing/2006/04 (ISSN 1830-2289)
  6. Alexandra Schwartzbrod, « La France plutôt moyenne en environnement », dans Libération du 17/10/2006, [lire en ligne]
  7. Brunet R., Ferras R. et Théry H., 1992, Les mots de la géographie. dictionnaire critique, Reclus - La Documentation Française, Paris, 518 p
  8. Bigot R., Hatchuel G. et Berard I., 2001, Les Français et l'espace rural, CREDOC, Paris, 139 p.
  9. Boismenu, 2004, La fin des paysage, Livre blanc pour une gestion ménagère de nos espaces ruraux, Fédération nationale des SAFER, Paris, 49 p.
  10. IFEN, 2007, Ménages, la consommation d'espace par habitants
  11. Donadieu P., 1998, Campagnes urbaines, actes sud, Arles, 219 p.
  12. Étalement urbain en Europe, EEA Briefing/2006/04 (ISSN 1830-2289 page 3/4)
  13. Portail du Projet Periurban parks
  14. Directive régionale d'aménagement « Maîtrise de la périurbanisation », Avant-projet détaillé validé par le Comité de pilotage, le 16 novembre 2009, PDF, 161 pages

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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