Paul-Émile Borduas

Paul-Émile Borduas
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Paul-Émile Borduas.

Paul-Émile Borduas (1er novembre 1905, Saint-Hilaire, Québec22 février 1960, Paris) est un peintre, sculpteur et professeur québécois connu pour ses œuvres abstraites. Il a rédigé le Refus global[1], un manifeste artistique publié en 1948, avec l'appui de quinze cosignataires dont les peintres Jean-Paul Riopelle, Claude Gauvreau, Pierre Gauvreau, Marcel Barbeau, Fernand Leduc et Marcelle Ferron[2],[3],[4].

Sommaire

Biographie

Une base religieuse

Paul-Émile Borduas nait le 1er novembre 1905 dans le village de Saint-Hilaire près de Montréal. Il est le quatrième d’une famille de sept enfants, fils de Magloire Borduas, voiturier, et d’Éva Perrault.

En fréquentant l’église du village, le jeune Borduas découvre l’art par les travaux de restauration du réputé peintre décorateur Ozias Leduc, qui accepte de le prendre comme apprenti. Celui-ci lui fit faire son premier apprentissage de peintre en l'emmenant avec lui à Sherbrooke, à Halifax et à Montréal (baptistère de l'église Notre-Dame et église des Saints-Anges à Lachine) et en l'initiant à la décoration d'église. Ozias Leduc l'encourage à s'inscrire à l'École des beaux-arts de Montréal (1923-1927) et obtient de Mgr Olivier Maurault, alors curé de Notre-Dame à Montréal, les crédits nécessaires pour l'envoyer ensuite étudier en France (1928-1930), aux Ateliers d'art sacré, dirigés par Maurice Denis et Georges Desvallières à Paris.Ce séjour en France lui permet de découvrir les grandes œuvres des peintres européens dont Cézanne, qui aura une influence déterminante sur ses œuvres de jeunesse. Sous l’influence d'Ozias Leduc, partisan de l’art nabi, il entreprend également auprès d’artistes nabis français des recherches sur l’intégration de l’art abstrait dans l’art religieux. — Le mouvement nabi s’attache à retrouver le caractère sacré de l’art et se caractérise par l’utilisation de grands aplats de couleurs ayant comme thématique principale l’étude de la lumière. Le nabi est un mouvement à la fois artistique, intellectuel et spirituel.

Au moment de son retour, le Canada plonge dans la Crise économique des années 1930. Sans travail, Paul-Émile Borduas pense alors devoir bientôt s’exiler en Amérique du Sud, ou aux Nouvelles-Hébrides, aux îles Tuamotu, quand il reçoit une offre d’emploi : professeur de dessin dans les écoles primaires de Montréal. À Granby, en 1935, il épouse Gabrielle Goyette, fille d'un médecin. Ils s’installent rue Napoléon, à Montréal, où leur naissent trois enfants : Janine, Renée et Paul. En 1937, Paul-Émile Borduas accepte un poste qu'il juge plus intéressant, à l'École du Meuble de Montréal. Dès lors, il évolue vers une conception plus radicale de l’art.

La folle aventure

En lisant « L’Amour fou » du surréaliste André Breton, il découvre le fameux conseil de Léonard de Vinci enjoignant ses élèves à regarder longuement un vieux mur pour y voir apparaître dans ses craquelures et ses taches des formes que le peintre n’a qu’à copier par la suite. Borduas recrée le « vieux mur » de Léonard en traçant spontanément sans idée préconçue quelques traits qui serviront de canevas à l’application de l’huile ou de la gouache. Il commence à réaliser des œuvres abstraites, devenant davantage intéressé par l’acte de peindre que par les thèmes. Dans ce cas, l'artiste doit rejeter toute forme de préparation, comme le choix du sujet ou les esquisses, pour se concentrer uniquement sur les émotions du moment et les pulsions inconscientes. De ces gestes automatiques, surgit le concept de l’automatisme pictural. Son tableau « Abstraction verte » (1941) est la première œuvre automatiste de Borduas.

Il fonde la Société d'art contemporain avec John Lyman et Robert Élie, afin de promouvoir l'art abstrait au Canada. Son influence va grandissant auprès de jeunes peintres étudiants qui allaient former le groupe appelé les Automatistes. C'est ainsi que Borduas devient chef de file du mouvement automatiste et songe même à faire de Montréal la plaque tournante d'une École picturale aussi prestigieuse et influente que l'École de Paris ou celle de New-York.

En février 1948, se tient la première exposition de Prisme d'yeux, où le peintre Alfred Pellan lance un manifeste portant ce titre. En août de la même année, en réponse à Pellan, Borduas publie le manifeste Refus global, une critique sévère de la culture canadienne-française comprenant dix textes d'auteurs et signé par les 15 cosignataires suivants : Magdeleine Arbour, Marcel Barbeau, Bruno Cormier, Claude Gauvreau, Pierre Gauvreau, Muriel Guilbault, Marcelle Ferron-Hamelin, Fernand Leduc, Thérèse Leduc, Jean-Paul Mousseau, Maurice Perron, Louise Renaud, Françoise Riopelle, Jean-Paul Riopelle, Françoise Sullivan.

Le manifeste de Borduas dénonce la vieille idéologie conservatrice et proclame la nécessité d’une plus grande ouverture aux courants de la pensée universelle. À l'époque, l’Église catholique au Québec contrôle tout le système éducatif, avec une influence considérable sur le monde politique et judiciaire. Dans « Refus global », Borduas remet en question l’autorité de l’Église, accuse le gouvernement du Québec de garder le Québec dans la « grande noirceur » et exhorte les Québécois à rejeter cette existence rétrograde : à refuser d’obéir comme des moutons à l’autorité établie. Dans ce climat, les idées de Borduas apparaissent révolutionnaires et elles contribuent à la Révolution tranquille. Selon lui, les Canadiens-français doivent abandonner leur vieille culture et en créer une nouvelle, fondée sur les émotions, les sensations et, sur ce qu’il appelle « la magie ». Les termes sont clairs :

« Rompre définitivement avec toutes les habitudes de la société, se désolidariser de son esprit utilitaire. Refus d’être sciemment au-dessous de nos possibilités psychiques. Refus de fermer les yeux sur les vices, les duperies perpétrées sous le couvert du savoir, du service rendu, de la reconnaissance due. […] Place à la magie ! Place aux mystères objectifs ! Place à l’amour ! Place aux nécessités ! » (Borduas, Refus global, 1948)

À New York

Ces attaques contre le clergé et la classe politique de droite sous l’emprise du Premier ministre Maurice Duplessis lui valent son congédiement de l’École du meuble. Il tente, en vain, de justifier son action dans un pamphlet intitulé « Projections libérantes » (1949). Les conditions financières difficiles, suite à son renvoi, le forcent à accroître sa production artistique. Il réussit l’exploit de participer à trente-deux expositions en vingt-cinq mois. Ces années pénibles se terminent par la séparation du couple. Accablé, rejeté par ses propres concitoyens, il vend sa maison et se prépare à partir pour les USA. En arrivant aux USA, en avril 1953, il loue un atelier à Provincetown (au 190 Bradford St.), avant de s’installer à New York, où son expérimentation artistique peut se faire en toute liberté.

Ses œuvres circulent davantage, tant localement qu’à l’étranger. Ainsi en janvier 1954, il présente une exposition éponyme à la galerie Passedoit de New York, une autre en avril à la galerie Hendler de Philadelphie, tandis qu’à l’été, il participa à la XXVIIe biennale de Venise. En octobre de la même année, il revint à Montréal présenter l’exposition « En route ». Dix-sept huiles et six encres y prennent place sur les cimaises de la galerie Agnès Lefort. Les critiques remarquent une évolution de son style au contact de l’expressionnisme abstrait américain, dont il visite régulièrement les expositions. Il fréquente « The Club », lieu de rencontre de la bohème new-yorkaise et assiste aux conférences données par les artistes, mais sans intervenir, maîtrisant mal l’anglais. Il y rencontre quelques expressionnistes abstraits.

Dans une lettre à son ami et poète Claude Gauvreau, il écrit connaître « Pollock, Kline et dix autres peintres expressionnistes ». Le tableau intitulé « Les signes s’envolent » annonce une évolution picturale axée sur une épuration des signes jusqu’à leur disparition. L’influence spirituelle nabi se fait à nouveau sentir dans sa peinture. Celle-ci présente des aplats de pâte plus prononcés et une tendance chromatique vers le noir et blanc. Le style de Borduas subit des transformations radicales : influencé par le néo-plasticien hollandais Piet Mondrian, mais également par le « suprématisme » (carré blanc sur fond blanc) du Russe Kasimir Malevitch, avec qui on remarque une forte parenté esthétique, parenté aussi avec « l’œuvre en noir » du Français Pierre Soulages et de l’Américain Franz Kline. Borduas s’inscrit donc comme un représentant du Canada (Québec) dans l’histoire de l’art international.

À Paris

Plaque apposée au n° 19 de la rue Rousselet, Paris 7e, où habitait Borduas.

Malgré ses succès sur la scène new-yorkaise, Borduas décide de quitter l’Amérique pour s’installer à Paris, en 1955, où il espère être mieux reconnu. Mal lui en prend. Il ne rencontre jamais le succès espéré, n’obtenant sa première exposition solo qu’en 1959, à la galerie Saint-Germain, donc quatre ans après son arrivée. Pourtant sa carrière internationale se portait bien. En 1957, la galerie Martha Jackson de New York organise l’événement « Paul-Émile Borduas Paintings 1953-1956 ». Il participe aussi à « 35 peintres dans l’actualité », présentée par le Musée des beaux-arts de Montréal, ainsi qu’à « Contemporary Canadian Painters », exposition qui circule en Australie, et finalement en vedette à la « Recent Developments in Painting » tenue à Londres, ainsi que de nombreuses expositions présentées à Dusseldorf, Genève et Cologne, pour ne nommer que celles-ci.

Mais Borduas s’ennuie à Paris et sa santé décline. C’est pourtant à ce moment dans un sursaut de créativité qu’il peint « L’Étoile noire », probablement son chef d’œuvre. Borduas s’est soudainement libéré complètement du surréalisme, n’ayant gardé de l’automatisme que la manière spontanée d’appliquer la peinture sur la toile. Typiquement une icône de l’expressionnisme abstrait, « L’Étoile noire » reflète bien les angoisses existentielles de la première génération post-atomique. Pendant les années 1940, alors qu’il élaborait le concept de la peinture automatiste, il envisageait l’avenir avec un certain optimisme. Quinze ans plus tard, la population mondiale décimée par les quelques millions de morts de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre de Corée, sans oublier les corps disparus dans les camps de concentration nazis et les corps calcinés de Hiroshima et Nagasaki, Borduas doit se rendre à l’évidence : il ne verra jamais de son vivant cette nouvelle culture qu'il espérait. Il devient de plus en plus désabusé ; « L’Étoile noire » le montre bien.

Il adopte un style de plus en plus calligraphique, en accord avec son projet d’un nouvel exil, cette fois-ci au Japon. Malheureusement ce projet ne verra jamais le jour. La recherche artistique de Borduas se termine prématurément avec « Composition 69 », tableau où la quasi totalité de la toile est recouverte par des empâtements noirs imposants qui s’imbriquent jusqu’à constituer un quasi monochrome noir mortuaire. En haut du tableau, quelques fissures laissent filtrer un peu de blanc comme une sorte d’appel cosmique.

Le 22 février 1960, le peintre s’éteint à Paris, dans son atelier, victime d’un malaise cardiaque. A côté du lit, sur un chevalet trône « Composition 69 »... Son testament ? En 1989, les cendres de Borduas sont rapatriées à Saint-Hilaire, son lieu de naissance.

Œuvre picturale

Paul-Émile Borduas n'est pas le seul peintre canadien qui soit innovateur à son époque (le furent aussi : Alfred Pellan, Jean-Paul Lemieux, et plusieurs autres) mais, à sa manière, il a contribué, lui aussi, à la modernité artistique au pays.

Peintre, il aimait l'effet du relief, obtenu à la spatule, et travaillait les couleurs en considérant la matérialité de la peinture.

Son œuvre la plus célèbre serait l'Étoile noire, gagnante d'un Prix (posthume) de la Fondation Guggenheim.

Écrits

Murale, place Paul-Émile-Borduas à Montréal
  • Paul-Émile Borduas, Écrits I (textes publics), édition critique par André-G. Bourassa, Jean Fisette et Gilles Lapointe, Les Presses de l'Université de Montréal, collection Bibliothèque du Nouveau Monde, 1987, 700 p. (ISBN 2-7606-0761-5)[5]
  • Paul-Émile Borduas, Écrits II (écrits intimes), édition critique par André-G. Bourassa, Jean Fisette et Gilles Lapointe, Les Presses de l'Université de Montréal, collection Bibliothèque du Nouveau Monde :

Honneurs

Notes et références

Liens externes


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Paul-Émile Borduas de Wikipédia en français (auteurs)

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