Obusite

Obusite
Image de la Première Guerre mondiale prise près d'Ypres (Belgique) en 1917. La soldat à gauche de la photo photo est atteint d'un syndrome fréquent d'obusite.

L'obusite (du français obus, le suffixe -ite ne désignant pas ici une inflammation) en anglais « Shell-Shock » (« choc de l'obus »), est un terme décrivant une association de troubles psychiques et physique observés chez certains soldats de la Première Guerre mondiale, essentiellement dans le contexte de la guerre de tranchées ; c'est un syndrome classé comme étant l'une des formes de stress post-traumatique.

Sommaire

Étymologie

Le terme d' obusite a été inventé et utilisé lors de la Première Guerre mondiale, lorsque sont apparus de nouveaux patients atteints de pathologies nouvelles (ils sont également dénommé pithiatiques[1]). Les maladies nerveuses étaient peu connues à l'époque, il est donc question de « commotion », de « choc émotionnel », de « syndrome des éboulés [2]», de « plicaturés » ou de victime de l' « obusite ». D'autres noms ont aussi été donnés à l'obusite, comme traumatophobie ou névrose de guerre.

Au XXIe siècle, le terme « obusite » n'est plus utilisé et fait automatiquement référence aux soldats de la Grande Guerre. L'obusite est un « trouble de stress post-traumatique » (TSPT), des cauchemars persistent longtemps après un évènement, faisant constamment revivre une expérience terrorisante. Les soldats sont les plus touchés par un TSPT.

Causes

Il était supposé que l'obusite résultait de plusieurs facteurs impliquant le stress et l'anxiété, ce qui inclut : excès de stress et de peur dus aux bombardements incessants, peur d'être déchiqueté, peur d'être enseveli, peur répétée d'être violemment tué. Selon un médecin militaire psychiatre allemand[3] (nom inconnu) « L'instinct de conservation se rebelle contre la guerre ».

Symptômes

Les symptômes, divers et inconnus des médecins militaires des périodes antérieures, apparaissaient chez des soldats des tranchées choqués par l'onde de choc d'une explosion (obus, bombe, mine, grenade...), voire ensevelis sous les retombées de l'explosion et qui après avoir été dégagés, étaient retrouvés dans une attitude et position mutique (parfois sourds ou muets, ou aveugles), parfois pliés en deux ou en position accroupie avec incapacité de se relever (c'est l'abasie des « plicaturés vertébraux » selon une dénomination des médecins militaires), parfois totalement paralysés ou hémiplégiques ou paraplégiques... alors même que l'examen clinique ne montrait aucune lésion capable d'expliquer ces attitudes. Il s'agigirait d'affections psychosomatiques, que certains psychiatres décrivent sous de nouveaux noms, tels les « myocoloniques rythmiques », « météoriques abdominaux », « spondylitiques » ou « éructants avec régurgitation alimentaire» du Dr Sicard, chef du service de neurologie de la 15e région militaire, basé à Marseille, [4].
L'obusite pouvait encore se caractériser par des tremblements incontrôlés plus ou moins intenses, avec des malades atteints de vomissements incontrolables (les vomisseurs), de «chorée rythmique» (se tordant en tous sens), atteint de violentes «contractures» leur tordant les mains et/ou pieds (varus équin) ou encore atteint de syndromes de folies inconnus qui donnèrent le nom de « psychose des barbelés ».

Cette absence d'apparente relation de cause a effet a fait accuser de nombreux soldats de simulation ; ces soldats «suggestionnés» ou supposés simulateurs étaient classés dans une catégorie de troubles relevant du « pithiatisme », qui seraient une nouvelle forme d'hystérie, associée à des « troubles nerveux d'ordre réflexe » (selon Babinsky en 1917[5]). De nombreux médecins, tels le Dr Sicard (Neurologue) jugent que les malades mentent. Des noms paradoxaux de nouveaux syndromes sont inventé : « simulation inconsciente », « simulation de création» ou de «simulation de fixation »[6]. Une hypothèse posée à l'époque par le Médecin chef Porot (neuropsychiatre) est qu'il s'agirait d'une maladie commençant avec une « attitude réflexe antalgique » qui se fixe ensuite lors d'un stade hystérique avec ensuite des « complications articulaires qui incitent le sujet à persévérer »[7]. Les malades sont même anesthésié au chloroforme, non pas pour les soulager, mais pour dépister les simulateurs, sous la menace du conseil de guerre pour ceux qui refuseraient. Certains des malades perdent leurs rigidité et contractures, provisoirement durant l'anesthésie. parfois la menace de l'anesthésie ou du conseil de guerre fait disparaître la contracture, ce qui renforce le point de vue de la Société de neurologie qui « depuis le 21 octobre 1915, elle recommande que les sujets atteints de troubles fonctionnels ne soient ni réformés ni pensionnés ni évacués mais traités sur place et renvoyés au front »[1] tout en émettant le voeu que les « simulateurs, exagérateurs et persévérateurs » soient envoyés « vers des services spéciaux et soumis à une direction médicale compétente et à une discipline militaire sévère »[8].

Traitements

Les médecins militaires avaient mission de renvoyer le plus possible de ces soldats au front, et de détecter ceux qui pourraient simuler pour éviter les combats[1].

Certains neuro-psychiatres militaires de l'époque jugent que les pithiatiques étant des hystériques, ils sont « fonctionnels » et curables par contre-suggestion[5]. Ces neuro-psychiatres ont rapidement mis au point de nouveaux traitements et inventions consistant par exemple à emprisonner les personnes recourbées dans des carcans redresseurs ou à soumettre les pithiatiques à un « traitement faradique » ou « torpillage électriques » (impulsions électriques)[1]. Ce traitement était en France par exemple appliqué créé par le Service de Santé des armées dans le fort de Saint-André à Salins au dessus de la vallée du Doubs dans le Jura, avec un « centre d'entraînement » pouvant accueillir jusqu'à environ 200 pithiatiques guéris[9]. Aucun effet positif n'a été démontré à moyen terme ; les soldats ayant momentanément surmonté leurs symptômes voyaient leurs contractures revenir[1]. Plusieurs des malades de ce centre ayant refusé ce traitement (qui pourrait aujourd'hui être qualifié de « torture »), qualifés d'« hystériques invétérés » ont été dénoncés par le Dr Gustave Roussy, et passés en conseil de guerre.

Références

  1. a, b, c, d et e Darmon, Pierre., Des suppliciés oubliés de la Grande Guerre : les pithiatiques, Histoire, économie et société ; 2001 ; Vol.20 ; N° 20-1 ; pp. 49-64 ; doi:10.3406/hes.2001.2253
  2. Dr Lortat- Jacob, «Le syndrome des éboulés», Revue neurologique, nov.-déc. 1915, n° 23-24, p. 1173 et suiv.
  3. Arte, 1914-1918, la Guerre Moderne. Propos ayant été censuré par l'administration militaire.
  4. Rapport de juillet 1915, ASSA, carton A 67, «Neurologie et neuropsychiatrie, rapports des 14e et 15e régions»
  5. a et b Babinsky et Froment, Hystérie, pithiatisme et troubles nerveux d'ordre réflexe, Paris, 1917
  6. Rapport d'août 1915, du Dr Sicard, Service de neurologie de l'hôpital militaire Michel Lévy, Marseille, ASSA, carton A 67.
  7. source : Rapport du Médecin chef Porot (du centre neuropsychiatrique d'Alger), présenté à la réunion trimestrielle des médecins chefs le 3 août 1916, conservé aux ASSA, carton С 223 « Neurospychiatrie, conférences, réunions ».
  8. «Voeux émis par la Société de Neurologie de Paris dans sa séance tenue le 21 octobre 1915», ASSA, carton A 223.
  9. Courrier du général Brochin, commandant de la 7e région militaire, envoyé au Ministre de la Guerre, ASSA (Archives du Service de Santé de l'armée) carton A 229, Neuro-psychiatrie, correspondance conservée au Val-de-Grâce, les Archives du Service de Santé de l'armée constituent une mine de renseignements sur l'histoire de la Grande Guerre

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes


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