Norbulingka

Norbulingka
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Le « nouveau palais d'été » au Norbulingka.

Norbulingka ou Norbu Lingka (en tibétain: ནོར་འུ་གླིང་ཀ་; wylie: Nor-bu-gling-ka), le « parc aux joyaux »[1], est une enclave de 40 ha, comprise dans les faubourgs ouest de Lhassa, capitale de la région autonome du Tibet, et remplie de jardins, de bassins, de pavillons et de palais. Avant la construction de la ville nouvelle à partir de 1959, le site était à l'extérieur de Lhassa[2].

Le parc, qui se divise en deux parties : le Norbulingka proprement dit, à l'est, et le Chensel Lingka ou Jianselingka, à l'ouest[3], servit de résidence d'été aux dalaï-lamas depuis le milieu du XVIIIe siècle jusqu'au 17 mars 1959, date où le 14e dalaï-lama s'exila en Inde[4]. Hormis le palais du 7e dalaï-lama (le Kelsang Phodrang), construit en 1755, les grands palais et leurs bâtiments ancillaires (le Chensel Phodrang et le Takten Migyür Phodrang) furent édifiés au XXe siècle respectivement par le 13e dalaï-lama et le 14e dalaï-lama[5].

Le site fut un deuxième centre religieux, politique et culturel du Tibet, après le Potala[6].

En 2001, l'UNESCO inscrivit le Norbulingka sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité en tant que partie de l'ensemble historique du Palais du Potala.

La fête du Shoton, « fête du yaourt », se tient chaque année au Norbulingka durant une semaine de juillet-août. Elle est marquée par des agapes et des libations sur les pelouses du parc ainsi que par un festival de danses traditionnelles et d'opéras tibétains.

Sommaire

Historique

Porche d'entrée du Norbulingka en 1938

Origines et création

Avant la création du complexe, le site était un bois où coulait une source ayant des vertus curatives. Le 7e dalaï-lama, Kelsang Gyatso (1708-1757), qui était de santé fragile, venait s'y reposer et s'y baigner l'été[7].

La création du parc démarra en 1751 avec la construction, par le 7e dalaï-lama, d'un palais (le « palais Kelsang »), financé en partie par le gouvernement central, et où il vint résider chaque été, inaugurant une pratique reprise par tous ses successeurs.

Le 8e dalaï-lama, Jampel Gyatso (1758-1804), fit agrandir le périmètre initial en y ajoutant trois temples ainsi qu'un mur d'enceinte autour de la partie sud-est[8]. Le caractère de parc s'affirma dès cette époque avec la plantation de jardins fleuris et de tonnelles, ainsi que d'arbres fruitiers et d'arbres à feuillage persistant venant de toutes les régions du Tibet. Une armée de jardiniers était nécessaire pour entretenir espaces et allées[9]. Visitant le parc dans les années 1930, les membres d'une délégation britannique furent étonnés de trouver des roses et des pétunias en fleur à 3 650 m d'altitude ainsi que des roses trémières, des soucis, des chrysanthèmes et des rangées d'herbes médicinales ou de plantes rares en pot. Il y avait en outre des pommiers, des pêchers et des abricotiers (bien que les fruits n'en mûrissent pas à Lhassa) et des bosquets de peupliers et de bambous[10].

Sous le 13e dalaï-lama, Thubten Gyatso (1876–1933), l'ensemble vit de nouvelles constructions ainsi que l'amélioration des jardins. Le 13e fit bâtir le complexe du Chensel Linka au nord-ouest, dont trois palais (en fait, comme tous les palais du parc, guère plus que des maisons richement décorées)[11].

À l'époque de Lhamo Dondup (le futur 14e dalaï-lama), le terme de Norbulingka en était venu à englober à la fois le Norbulingka et le Chensel Lingka. La zone orientale comportait trois parties : les palais (au nombre de deux), l'opéra (avec scène en plein air et jardins) et les bureaux du gouvernement. La zone occidentale comportait trois parties : le palais, la forêt et les champs. L'ensemble du parc avait deux murs d'enceinte, un mur intérieur délimitant l'espace réservé au dalaï-lama et sa suite, un mur extérieur délimitant avec le premier l'espace réservé aux hauts responsables et à la famille du dalaï-lama[12].

Le parc à l'époque de Heinrich Harrer (1946-1951)

L'autrichien Heinrich Harrer indique que, lors de son séjour à Lhassa entre 1946 et 1951, le parc, entouré d'un mur, est ouvert aux visiteurs et aux pèlerins pendant la journée, pourvu qu'ils portent tenue tibétaine. Deux gardes à l'entrée y veillent. L'enceinte abritant le nouveau palais d'été et son jardin derrière de hauts murs jaunes est lourdement gardée par des soldats. Seuls le 14e dalaï-lama et ses tuteurs y ont accès. Même les ministres du gouvernement n'y sont pas autorisés. L'enceinte est gardée par des chiens[13].

Lorsqu'il quittait sa résidence d'hiver, le palais du Potala, pour passer l'été au parc, le 14e dalaï-lama se déplaçait dans un palanquin jaune, tapissé de soie, porté par trente-six porteurs et abrité du soleil par un moine portant une vaste ombrelle en plumes de paon[14]. Cette chaise à porteurs est conservée aujourd'hui dans le nouveau palais d'été construit de 1954 à 1956.

En 1948, Heinrich Harrer doit intervenir afin de renforcer une digue qui protège le Norbulingka des inondations du Kyi chu, un fleuve large de 2 kilomètres après la mousson. Pour effectuer cette tâche, Harrer dirige 500 soldats et 1 000 terrassiers. De plus, Harrer dirige une flotille de 40 barques en peau de Yak. Les bateliers transportent des blocs de granit qui sont extraits d'une carrière située en amont du Norbulingka. Il indique par ailleurs que le chantier destiné à protéger le palais reçoit souvent la visite de membres du gouvernement tibétain. Avant de quitter le chantier, ils remettent des écharpes de soie et font distribuer des récompenses aux ouvriers[15].

Le parc lors du soulèvement de mars 1959

Article détaillé : Soulèvement tibétain de 1959.

L'universitaire Christine Sedraine[16] indique que le 10 mars 1959, des Tibétains se rassemblèrent devant une porte de Norbulingka, afin de protéger le dalaï-lama à la suite d'une rumeur qui prêtait aux Chinois l'objectif d'enlever celui-ci. Le 11 mars, les manifestants, rejoints par la garde de Norbulingka, interdisaient l'accès à la résidence du dalaï-lama[17]. Le tibétologue Charles Ramble précise que quelque 30 000 Tibétains entourèrent le Norboulingha afin de protéger le Dalaï-lama [18].

Selon les sources officielles chinoises, le 10 mars au matin, plus de 2 000 habitants de Lhassa et des centaines de rebelles provenant du Kham accourent au palais de Norbulingka pour dissuader le dalaï-lama d'aller au spectacle[19]. Selon Qingying Chen, la Conférence du peuple, créée dans l'après-midi par les insurgés et la plupart des ministres du gouvernement tibétain, décide l'envoi, au palais, de moines armés depuis les monastères de Séra et de Drepung pour protéger le dalaï-lama. Le soir, un millier de moines gagnent Lhassa tandis que les troupes tibétaines se préparent au combat. Dans le même temps, les rebelles du Kham se répandent autour de la ville. Le gouvernement tibétain fait ouvrir le dépôt d'armes et distribuer armes et munitions aux insurgés[citation nécessaire][20].

Selon le gouvernement tibétain en exil et divers auteurs[21],[22],[23],[24], le 17 mars 1959, les Chinois envoyèrent deux obus de mortier sur Norbulingka. Ils atterrirent dans un étang, près du mur d'enceinte du nouveau palais, ce qui poussa le 14e dalaï-lama à quitter le pays[25]. Charles Ramble indique que 2 jours plus tard les bombardements du Norbulingha reprirent. Selon le Gouvernement tibétain en exil, le Norbulingka fut frappé par 800 obus environ, tuant des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants autour de l'enceinte du palais, et détruisant les demeures de 300 dignitaires à l'intérieur de l'enceinte[26]. L'Indien Ranesh Chandra Dhussa affirme que des obus détruisirent le bâtiment [le nouveau palais d'été], y tuant la plupart des Tibétains. Quand les Chinois inspectèrent les cadavres, ils s'aperçurent que le dalaï-lama s'était échappé[27]. Des informateurs apprendront au dalaï-lama en fuite, le bombardement du Norbulingka le 20 mars[28].

Un moine interviewé par Claude B. Levenson, rapporte que « L'enfer se déchaîna soudain au cours de la nuit, quand le premier assaut chinois fut lancé et que quelques tirs sporadiques répliquèrent du Potala et du Chakpori, la Colline-de-fer juste en face de la Colline-des-dieux. Un déluge de bruit, de fer, d'obus, de fumée, de hurlements de terreur et une odeur de sang. Le vacarme s'apaisa vers l'aube, quand un jour blafard couleur de poussière se leva sur un paysage de mort : des corps enchevêtrés montaient des plaintes, des râles et des gargouillis, des blessés suppliaient qu'on les achève, des gamins aux yeux agrandis d'étonnement fixaient à jamais un ciel infini, des femmes sanglotaient sans larmes, un vieillard au regard vide égrenait un rosaire de ses doigts décharnés, un moinillon gisait à la renverse un filet de sang séché à la commissure des lèvres. »[29].

Dans un article intitulé Mythos Tibet, publié en 1999 dans une revue allemande et traduit en anglais sous le titre The Myth of Tibet. How a dictatorial regime of monks is romantically transfigured, Colin Goldner écrit que l’on ne saurait se fier, par principe, aux affirmations des partisans des exilés tibétains. Quand elles ne sont pas entièrement fabriquées, ces assertions sont en général exagérées ou renvoient à des événements qui ne sont plus d’actualité[30].

Visitant le palais en 1962, Stuart et Roma Gelder, deux Américains autorisés par les autorités chinoises dans les années 1960 à visiter le Tibet, alors fermé aux voyageurs étrangers, le trouvèrent intact avec tout son contenu soigneusement conservé contrairement aux affirmations que le bâtiment avait été réduit à l'état de ruine ainsi que d'autres édifices[31].

Jean Dif qui visita le palais en 2004 signale que « les traces des combats sont totalement effacées » et le visiteur « imagine difficilement que de sanglants affrontements opposèrent ici les troupes chinoises aux révoltés tibétains...Ils firent pourtant des dizaines de victimes. »[32].

Le parc lors de la révolution culturelle

Article détaillé : Révolution culturelle au Tibet.

Tsering Woeser indique que pendant la révolution culturelle les fresques du « pavillon du lac » furent détériorées lors de la campagne de destruction des quatre vieilleries[33].

Les complexes palatiaux

Le Norbu Lingka comprend en fait deux parcs : le Norbu Lingka et le Chensel Lingka, chacun avec ses propres palais et jardins. Le Norbu Lingka occupe la moitié orientale du parc tandis que le Chensel Lingka en occupe la moitié occidentale. Le Chensel Phodrang est la pièce maîtresse du Chensel Lingka[34].

Le Kelsang Phodrang (« ancien palais d'été »)

Entrée du palais du 7e dalaï-lama.

Dans la partie est du site, se dresse le Kelsang Potrang ou Phodrang, un ensemble de bâtiments ainsi baptisé d'après le nom du 7e dalaï-lama, Kelsang Gyatso, qui le fit construire en 1755. Il est aussi connu sous le nom d'« ancien palais d'été ». C'est une construction à deux étages sur rez-de-chaussée comportant des salles pour l'adoration du Bouddha, des chambres, des salles de lecture, etc. Le 8e dalaï-lama, Jamphel Gyatso (1758-1804), agrandit de façon considérable le palais en lui ajoutant trois temples ainsi que le mur d'enceinte dans la partie sud-est. Le parc gagna pour sa part des arbres fruitiers et des arbes à feuillage persistant provenant des diverses régions du Tibet.

Le Khamsum Zilnon, un pavillon à un étage sur rez-de-chaussée, fait face au porche d'entrée. Les dalaï-lamas y regardaient des opéras tibétains.

Le Tsokyil Phodrang

Le Tsokyil Phodrang, ou « palais du lac », est un pavillon construit sur une île au milieu d'un petit lac de la partie orientale du site. Une deuxième île accueille le Lukhang Nub, le « palais du dragon d'eau occidental ». Deux ponts relient l'île centrale aux berges nord et est. Au sud du lac, des bâtimenrs abritent les dons des empereurs chinois[35].

Le Takten Migyür Phodrang (« nouveau palais d'été »)

De 1954 à 1956, le 14e dalaï-lama fit construire, dans la partie orientale du parc, un nouveau palais d'été (appelé Takten migyür potrang ou phodrang en tibétain, c'est-à-dire « palais à jamais indestructible »), mélange de temple et de villa dont l'architecture dépasse en magnificence les autres palais présents sur le site, ce fut la dernière construction majeure du Norbulingka[36],[37].

Édifié avec l'aide du gouvernement central[38], le Takten migyür phodrang se dresse au nord du Tsokyil phodrang et regarde vers le sud. L'entrée est surmontée d'une tenture blanche sur laquelle figure une roue de dharma bleue. Les deux animaux de part et d'autre de la roue sont dès chèvres tibétaines, reconnaissables à leur corne unique au milieu du front[3].

Le nouveau palais d'été est un édifice à un étage, au toit plat à la tibétaine et au plan complexe. Toutes les pièces, salle de réunion, salle d'assemblée, salle de repos, salle de bain, salle de prédication, chambre des soutras, chambre de méditation, etc., sont richement décorées et modernes pour l'époque. La salle d'assemblée (au premier étage) est ornée de 301 peintures représentant l'histoire du Tibet jusqu'à la rencontre entre le président Mao Zedong et les dalaï-lama et panchen lama en 1954[39]. L'auteur des peintures murales est Jampa Tseten ou Amdo Jampa, dont le style réaliste en matière de portraits, appliqué aux deux chefs religieux, causa la sensation à l'époque[40].

Les quartiers privés du dalaï-lama comprenaient une salle extérieure, où il étudia sous la direction de ses deux tuteurs, et une salle intérieure qui servait de chambre à coucher[41]. Dans un livre publié en 1989, Bernard Jensen rapporte que la chambre du dalaï-lama était conservée apparemment telle qu'il l'avait laissée le jour de sa fuite. Le couvre-lit de brocard jaune du dieu-roi était resté défait car personne n'avait osé y toucher[42]. Victor Chan note la présence, dans les deux pièces, d'un gramophone Philips et de piles de 78-tours, d'une vieille radio russe, d'un lit art déco et d'une plomberie britannique[43]. Jean Dif, quant à lui, dit qu'« on s'attend presque à voir [le dalaï-lama] réapparaître ».

Le Chensel Phodrang

Le Chensel Phodrang était à l'usage exclusif du 13e dalaï-lama. Il fut édifié en 1928 dans la partie orientale du site à l'emplacement d'un bâtiment que celui-ci n'aimait pas et fit démolir. Il s'agit d'un édifice de pierre blanche, à deux étages sur rez-de-chaussée. Un cloître d'entrée, soutenu par six colonnes, servait de lieu d'attente. Au rez-de-chaussée, se trouvent un hall d'assemblée pour les examens du diplôme de Geshé (docteur en théologie) et les cérémonies des moines de Séra et de Drépung, ainsi que la salle du trône. Des peintures murales représentent les cent actions du Bouddha dans ses vies passées. Au premier étage, il y a une chambre à coucher et salle d'étude, les chambres des serviteurs, et une deuxième chambre. Au deuxième étage, se trouve un hall d'assemblée pour les initiations tantriques et les ordinations de hauts lamas. Des peintures murales représentent les dalaï-lamas, du premier au treizième, et les principaux monastères gélougpas; aussi une salle de méditation et de prière[44].

Selon le journaliste Thomas Laird, le rez-de-chaussée du Chensel Phodrang est devenu un musée, tandis que les étages, fermés au public, ont été vidés de leur contenu. Les tapis anciens ont été pillés et emportés en Chine. Les statues qui ornaient les autels ont disparu. Les documents du 13e, qui y étaient archivés, ont disparu. Il reste le plancher, et de belles fresques[45].

Autres structures

Pavillon au milieu du lac au Norbulingka

Zoo

Heinrich Harrer indique qu'il existait dans un zoo miniature à Norbulingka pour garder les animaux offerts au dalaï-lama, essentiellement des animaux blessés; « dans le jardin des pierres précieuses ils seront bien traités, chacun le sait » .

Ce zoo est toujours en activité. En 2004, Jean Dif y vit des ours[46]. En 2009, le zoo accueillit un nouveau pensionnaire, un jeune léopard des neiges[47].

Ancienne salle de projection

Le 14e dalaï-lama, à l'âge de 14 ans, fit construire une salle de projection dans l'enceinte de son palais pendant l'hiver 1949-1950[48],[49]. L'Autrichien Heinrich Harrer, chargé de l'opération, transforma un bâtiment existant. La longueur de cette salle de projection était de 20 mètres avec une plateforme au fond de celle-ci qui supportait les appareils de projection. Un peu à l'écart, pour éviter le bruit, un autre bâtiment abritait la dynamo et le moteur à essence. Harrer précise que le fonctionnement de cette salle de projection serait probablement confié à l'employé de la mission commerciale hindoue qui y organisait déjà les séances cinématographique mensuelles. Les Tibétains appréciaient les documentaires et les dessins animés de Walt Disney[50].

Inscription sur la liste du patrimoine mondial et restauration

En 2001, l'UNESCO inscrivit Norbulingka sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité en tant que partie de l'ensemble historique du Palais du Potala.

Écuries au Norbulingka en 1986

La même année, le comité central du gouvernement chinois, lors de sa 4e session, décida de rendre au complexe palatial son éclat premier. Des subventions se montant à 67,4 millions de yuan (8,14 millions de dollars) furent allouées en 2002 par le gouvernement central aux travaux de restauration. Ceux-ci, entrepris à partir de 2003, concernèrent principalement le Kelsang Phodrang, les bureux du cabinet ministériel et nombre d'autres structures[51].

De 2002 à 2005, le parc de Norbulingka fut rénové dans le cadre d'un programme concernant aussi le palais du Potala à Lhassa et la lamaserie Sagya près de Xigaze. La rénovation à elle seule coûta dans les 40 millions de dollars[52].

L'année 2007 vit commencer la construction d'un réseau d'égouts[53].

Le guide China (2007) de Lonely Planet juge trop élevé le droit d'entrée perçu pour visiter le site[54].

La fête du yaourt ou shoton au Norbulingka

Danses lors de la fête du yaourt au Norbulingka en 1993
Article détaillé : Shoton.

La fête du Shoton, en français « fête du yaourt »[55], se tient chaque année au Norbulingka (mais aussi dans d'autres endroits de Lhassa). La date en est fixée en fonction du calendrier tibétain, un calendrier de type lunaire. La fête se déroule pendant le 7e mois, lors des sept premiers jours de la période de la pleine lune, ce qui correspond à une période à cheval sur juillet-août selon le calendrier grégorien. Les festivités, qui durent une semaine, sont marquées par des agapes et des libations sur les pelouses du Norbulingka.

La fête du yoghourt est marquée également par un festival de danses traditionnelles tibétaines et d'opéras tibétains Heinrich Harrer indique que chaque année, pendant une semaine, des représentations théâtrales ont lieu dans le parc. Au début du XXe siècle, les troupes de théatre prises en charge par l'état tibétain se devaient de jouer pendant les fêtes du Norbulingka[56]. Harrer indique que les acteurs, qui appartiennent à toutes les classes de la société, jouent de l'aube au crépuscule. L'ensemble des interprètes sont des Tibétains. Les pièces sont identiques d'une année sur l'autre, les acteurs récitent leur texte accompagnés par des cymbales et des tambours, des danses parsèment ces représentations théâtrales. Harrer précise qu'il appréciait la troupe des « Gyumalungma », spécialisée dans la parodie. La satire n'épargne pas les cérémonies religieuses et les rites les plus sacrés. Le dalaï-lama assiste à ces représentations depuis le premier étage d'un pavillon, les membres du gouvernement tibétain sont situés sur un des côtés de la scène, abrités par des tentes. L'ensemble des spectateurs déjeunent sur place, des serviteurs leur offrent de la tsampa (farine d’orge grillé), du beurre et du thé fournis par les cuisines du dalaï-lama. Chaque jour, matin et soir, les troupes militaires de Lhassa, précédées de leurs fanfares, défilent dans le jardin d'été et rendent les honneurs au dalaï-lama [57]. Harrer précise que « des milliers de Tibétains » participaient aux fêtes dans le parc[58]. Lors de la dernière représentation de la journée, des récompenses étaient offertes aux acteurs, un représentant du dalaï-lama leur remettait une écharpe et une somme d'argent.

Concernant ces festivités, Jean Dif précise « Durant ce temps, on mange, on boit, on fait les fous, on oublie les soucis »[32].

Notes et références

  1. À proprement parler, lingka désigne un jardin horticole. Cf (en) 安才旦, Tibet China: travel guide, 五洲传播出版社, 2003, (ISBN 7508503740 et 9787508503745), 203 p., p. 92 : : « In Tibetan language, horticultural gardens are called "Lingka". »
  2. Jean Dif, Carnet de route d'un voyage au Tibet, septembre - octobre 2004 : « Autrefois à l’extérieur de Lhassa, le site est maintenant englobé dans la ville nouvelle, construite depuis 1959 [...]. »
  3. a et b Jean Dif, op. cit.
  4. Roland Barraux, Histoire des Dalaï-Lama, Quatorze reflets sur le Lac des Visions, Éditions Albin Michel, 1993. Réédité en 2002 chez Albin Michel (ISBN 2-226-13317-8), p. 341.
  5. Victor Chan, TIBET. Le guide du pèlerin, Éditions Olizane, 1998, (ISBN 2-88086-217-5 et 9782880862176), p. 194.
  6. (en) Historic Ensemble of the Potala Palace, Lhasa, sur le site World Heritage Convention.
  7. 安才旦, Tibet China: travel guide, op. cit., p. 93 : « According to Tibetan records, there used to be a spring here that could cure disease. Kalsang Gyatso, the 7th Dalai Lama, often fell ill and came here to take bath every summer ».
  8. (en) Patricia Cronin Marcello, The Dalai Lama: a biography, Greenwood Publishing Group, 2003, (ISBN 0313322074 et 9780313322075), 173 p., p. 35  : « The Eighth Dalai Lama, Jampel Gyatso (1758-1804), was responsible for significantly expanding the Norbulingka's area by adding three temples and perimeter walls around the southeast section. »
  9. Patricia Cronin Marcello, op. cit., p. 36 : « The park-like atmosphere took shape then with the planting of blossoming gardens and arbors, which included both fruit trees and evergreens brought to Lhasa from all parts of Tibet. A host of gardeners was needed to keep the grounds and the paths within the Norbulingka in order. »
  10. (en) Michael Buckley, Tibet, Bradt Travel Guide, Édition 2, illustrée, Éditeur Bradt Travel Guides, 2006, 336 p. (ISBN 1841621641 et 9781841621647) : « Visiting in the 1930s, members of a British delegation were astonished to find roses and petunias flourishing at 3,650 m, as well as hollyhocks, marigolds, chrysanthemums, and rows of potted herbs or rare plants. In addition there were apple, peach and apricot trees – though the fruits did not ripen in Lhasa – and stands of poplar trees and bamboo. »
  11. Patricia Cronin Marcello, op. cit., p. 35-36 : « Major additions to the Norbulingka took place under the Thirteenth Dalai Lama, who also improved the gardens. In 1930, he had the Chensel Lingka area in the northwest built, which included three additional palaces. However, palaces in all parts of the parks were little more than ornately decorated houses. »
  12. Patricia Cronin Marcello, op. cit., p. 36.
  13. (en) Heinrich Harrer, Seven years in Tibet, translated from the German by Richard Graves; with an introduction by Peter Fleming; foreword by the Dalai Lama, E. P. Dutton, 1954, (ISBN 0-87477-888-3) : « The park is surrounded by a high wall, but it is accessible to visitors wearing Tibetan dress. Two men of the bodyguard inspect arrivals at the gate and see to it that no European hats or shoes find their way into the park.[...] In the middle of the park is the private garden of the Living Buddha, surrounded by a high, yellow wall. It has two gates strongly guarded by soldiers through which, apart from His Holiness, only the abbots appointed as his guardians may pass. Not even cabinet ministers are admitted. [...]. At short intervals there are dog kennels built into the wall, whose savage, long-haired tenants bark when anyone comes too near. »
  14. Heinrich Harrer, Seven Years in Tibet, op. cit. : « And now approached the yellow, silk-lined palanquin of the Living Buddha, gleaming like gold in the sunlight. The bearers were six-and-thirty men in green silk cloaks, wearing red plate-shaped caps. A monk was holding a huge iridescent sunshade made of peacock's feathers over the palanquin. »
  15. Heinrich Harrer Sept ans d'aventures au Tibet, p. 209 et suivantes, traduction de Henry Daussy Arthaud, 1954 (ISBN 2-7003-0427-6).
  16. Christine Sedraine de l'Université Toulouse 1 Capitole.
  17. Christine Sedraine, Trois tibétains en exil: des oies sauvages en larmes, L'Harmattan, 1998, pp. 273-274.
  18. Tibétains, 1959-1999, quarante ans de colonisation, Ouvrage collectif dirigé par Katia Buffetrille et Charles Ramble avec Robbie Barnett, Georges Dreyfus, Samten G. Karmay, Per Kvaerne et Jigmé Namgyèl; Ed Autrement, coll. Monde (ISBN 286260822X).
  19. (en) Tell you a True Tibet - How Does the 1959 Armed Rebellion Occur?, People's Daily Online, April 17, 2008 (Excerpts from Tibet - Its Ownership And Human Rights Situation, published by the Information Office of the State Council of The People's Republic of China) : « The next morning, the rebels coerced more than 2,000 people to mass at Norbu Lingka, spreading the rumor that "the Military Area Command is planning to poison the Dalai Lama" and shouting slogans such as "Tibetan Independence" and "Away with the Hans." »
  20. (en) Qingying Chen, Tibetan History, Series of basic information of Tibet of China, 2003, 181 pages, pp. 172-173 (ISBN 7508502345), (ISBN 9787508502342).
  21. Charles Ramble, Tibétains 1959 - 1999 : 40 ans de colonisation, en collaboration avec Katia Buffetrille, Éditions Autrement, p. 7.
  22. Frédéric Lenoir et Laurent Deshayes, L’Epopée des Tibétains entre mythe et réalité (essai), Fayard, 2002, p. 284.
  23. Claude B. Levenson, La Chine envahit le Tibet: 1949-1959, Éditions Complexe, p. 59.
  24. Pierre Macaire, Encre de Chine: (Transsibérien, Mongolie, Chine, Tibet), p. 103.
  25. (en) The Government of Tibet in Exile, History leading up to March 10th, 1959, sur l'ancien site tibet.com : « March 17, 1959 4 pm. The Chinese fired two mortar-shells at the Norbulingka. They landed short of the palace walls in a marsh. This event triggered His Holiness the Dalai Lama to finally decide to leave his homeland. »
  26. (en) History Leading up to March 10th 1959, site du gouvernement tibétain en exil, 7 septembre 1998 : « The Norbulinka was bombarded by 800 shells on March 21. Thousands of men, women and children camped around the palace wall were slaughtered and the homes of about 300 officials within the walls destroyed. »
  27. (en) Ranesh Chandra Dhussa, Tibet: A Nation in Exile, in Focus on Geography, American Geographical Society, vol. 52, No 2, 22 septembre 2009, pages 1-6, en part. p. 5, légende de la photo de la salle d'audience du palais d'été : « Artillery shells fired by the Chinese destroyed the building, killing most of the Tibetans. When the Chinese marched through the corpses, they realized that the Dalai Lama had escaped. »
  28. Gilles Van Grasdorff, La nouvelle histoire du Tibet, Perrin, octobre 2006 (ISBN 2-262-02139-2), p. 371.
  29. Claude B. Levenson, La Chine envahit le Tibet: 1949-1959, p. 57.
  30. (en) Colin Goldner, The Myth of Tibet. How a dictatorial regime of monks is romantically transfigured, traduction publiée sur le site eunacom.net d’un article en allemand paru dans la revue diesseits sous le titre Mythos Tibet [# 49/1999, pp. 14-15] : « one cannot trust, in principle, the pronouncements of the exiled Tibet supporters-scenario: These are, if not totally invented out of thin air, as a rule hopelessly exaggerated and/or refer to no longer actual happenings. »
  31. (en) Stuart and Roma Gelder, Timely Rain: Travels in New Tibet, Monthly Review Press, New York, 1964 : « He [the dalai-lama] was told this building with other palaces in the Jewel Park was reduced to ruin by Chinese gunfire soon after he left. We found its contents meticulously preserved. »
  32. a et b Jean Dif Carnet de route d'un voyage au Tibet, septembre-octobre 2004.
  33. Tsering Woeser, Mémoire interdite. Témoignages sur la Révolution culturelle au Tibet, traduit par Li Zhang & Bernard Bourrit, éd. Gallimard, 2010, p. 448.
  34. Victor Chan, op. cit., p. 195.
  35. Victor Chan, op. cit., p. 196.
  36. Victor Chan, op. cit., p. 195 : « De 1954 à 1956, le quatorzième Dalaï-Lama fit construire au nord du Chensel Potrang un nouveau palais qu'il baptisa Takten Migyûr Potrang, nom signifiant que le bouddhisme est éternel et immuable. Ce fut la dernière construction majeure du Norbu Lingka », pp. 201-204, chap. Norbu Lingka : Le complexe du Takten Migyür Potrang : « Construit par le quatorzième Dalaï-Lama entre 1954 et 1956, le nouveau palais (Potrang Sarpa, également connu sous le nom de Takten Migyür Potrang (« palais à jamais indestructible ») ».
  37. (en) China Travel Agency, Norbulingka (the Summer Palace), sur le site Travel China Guide : « In 1954, the Fourteenth Dalai Lama built Takten Migyur Potrang, which is also called the New Summer Palace, means 'Eternal Palace' in Tibetan. The architecture has combined the characteristics of temple and villa and is more magnificent than other palaces. »
  38. (en) Historic Ensemble of the Potala Palace, Lhasa, sur le site World Heritage Convention : « The Tagtan Migyur Palace was built in 1954-56 with support from the Central People's Government ».
  39. 安才旦, Tibet China: Travel Guide, op. cit., pp. 93-94.
  40. (en) Obituary of the painter Amdo Jampa, TIN, 22 mai 2002, p. 3 (ISSN 1355-3313) : « Amdo Jampa was commissioned to paint inside a new palace (Tagtu Mingyur Podrang), which was completed within the Norbulingka, the official summer residence of the Dalai Lama, in 1956. His murals in the summer palace merged a traditional Tibetan style of painting with that of modern portrait painting. While the general style of the paintings was clearly traditional, the figures of the Dalai Lama and others were easily recognisable, which at that time constituted a revolutionary innovation. Later, the 10th Panchen Lama asked Amdo Jampa to paint his portrait, which he carried out in a similarly realist style. »
  41. Victor Chan, op. cit., p. 202.
  42. (en) Bernard Jensen, In search of Shangri-La: a personal journey to Tibet, Penguin, 1989, 144 p., p. 15 : « Officially, everything has been preserved exactly as the Dalai Lama left it on the day of his flight. The same yellow brocade cover remains in disarray on the god-king's bed, for no one has dared to touch it. »
  43. Victor Chan, op. cit, p. 202.
  44. Victor Chan, op. cit., pp. 206-207?.
  45. Thomas Laird, Dalaï-Lama, Christophe Mercier, Une histoire du Tibet : Conversations avec le Dalaï Lama, Plon, 2007, (ISBN 2-259-19891-0), pp. 257-258.
  46. Jean Dif, op. cit. : « Quelques animaux, des ours, par exemple, y sont également élevés. »
  47. (en) Tibet's Norbulingka Zoo adopts snow leopard, sur le site TibetCulture.net (source : Xinhua, 17 juillet 2009).
  48. Sept ans d'aventures au Tibet, p. 245, traduction de Henry Daussy Arthaud, 1954 (ISBN 2-7003-0427-6).
  49. Le bouddhisme vs le christianisme, sur le site PaLungJit : « le 14e Dalaï Lama s'est fait construire une salle de cinéma. »
  50. Heinrich Harrer, Seven years in Tibet, op. cit. : « Lobsang Samten surprised me one day by asking me if I would undertake to build a room for showing films. His brother had expressed the wish that I should do so. [...] I started the job in the winter of 1949—50, after the young king had already returned to the Potala. After looking at all the buildings, I chose an unused house adjacent to the inner side of the garden wall, which I thought I could transform into a motion-picture theater. »
  51. 安才旦, Tibet China: travel guide, op. cit., p. 94.
  52. (en) Norbulingka Park repairs after renovation, sur le site Tibet.cn, 21-06-2005.
  53. (en) Norbulingka: eco-garden on snox covered plateau, sur le site Tibet.cn, 01-09-2011.
  54. (en) Damian Harper, Andrew Burke, China, Lonely Planet, 2007, (ISBN 1-74059-915-2 et 9781740599153), p. 921 : « The pleasant park contains several palaces and chapels, the highlight of which is the New Summer Palace (Takten Migyü Potrang), but it's hard to justify the high Norbulingka entry fee ».
  55. Une autre dénomination est « fête du lait caillé ».
  56. Mireille Helffer, Musiques du toit du monde: L'univers sonore des populations de culture tibétaine.
  57. Heinrich Harrer, Sept ans d'aventures au Tibet, Arthaud, 1953, p. 212.
  58. Heinrich Harrer, Retour au Tibet, Arthaud, 1985, p. 28.

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