Meso-Amerindiens

Meso-Amerindiens

Mésoamérique

Situation géographique de la Mésoamérique à l'échelle du continent américain.

Le terme de Mésoamérique (également couramment orthographié Méso-Amérique et plus rarement remplacé par l'expression Amérique moyenne) est employé en archéologie précolombienne pour désigner la partie du continent américain que connaissaient les Aztèques au moment de l'arrivée des Espagnols en 1519.

Sommaire

Définition

Le terme Mésoamérique a été défini par l'anthropologue allemand Paul Kirchhoff dans les années 1940[1], sur la base d’une liste de traits culturels communs aux civilisations de cette zone géographique.

Au niveau géographique, la Mésoamérique s'étend du tiers méridional du Mexique à la péninsule de Nicoya, au Costa Rica (voire jusqu'au sud du pays), en incluant le Belize, le Guatemala, l'ouest du Honduras, le Salvador et le versant pacifique du Nicaragua. La Mésoamérique est à différencier de l'Amérique centrale qui, dans son acception géographique, va du Guatemala au Panama.

Cette aire se caractérise par une uniformité exclusivement culturelle qui se manifeste sur plusieurs plans. La frontière nord de la Mésoamérique sépare les sociétés de chasseurs-cueilleurs (au nord) des sociétés agricoles (au sud) ; elle s'est déplacée au cours du temps. Au sud, la frontière est culturelle et linguistique.

Caractéristiques de la civilisation mésoaméricaine

Diversité

La Mésoamérique présente une grande diversité linguistique et géographique.

  • linguistique : on distingue quatre catégories:
    • le groupe oto-mangue, qui occupe principalement le Mexique central. En son sein, on distingue les Otomi, un peuple sans histoire, ainsi que les Zapotèques et les Mixtèques. Ce groupe est sans doute le plus ancien de la Mésoamérique.
    • le groupe macromaya, qui comprend le mixe-zoque, le totonaque, le huaxtèque et le maya (qui se subdivise lui-même en plusieurs groupes).
    • le groupe uto-aztèque, qui comprend le nahuatl, dont les locuteurs sont répandus dans pratiquement toute la Mésoamérique (dont faisaient partie les Toltèques et les Aztèques). Les Chichimèques, au nord de la Mésoamérique, faisaient également partie du groupe uto-aztèque.
    • des isolats linguistiques, parmi lesquels les Tarasques forment le groupe le plus important.
  • géographique : les différents milieux qui vont de la zone tropicale à la sierra en passant par les hauts-plateaux du centre ne correspondent pas à une aire culturelle.

Unité

Toutes les civilisations précolombiennes de cette zone présentent des caractéristiques culturelles communes, qu'il s'agisse des Olmèques, des Aztèques, des Zapotèques, des Toltèques, des Mayas ou de la civilisation de Teotihuacán. Ces caractéristiques les distinguent d'autres civilisations précolombiennes, comme les civilisations andines, par exemple :

  • une architecture rituelle : des ensembles de constructions pyramidales et de cours forment un «interface» qui relie le monde humain au monde surnaturel;
  • des religions polythéistes, avec des archétypes, comme le «Vieux Dieu du feu» ou le serpent à plumes, Quetzalcoatl, qu'on retrouve sous une forme ou l'autre dans toute la Mésoamérique.
Un des Danzantes de Monte Alban
  • le sacrifice humain, dont les archéologues n'ont reconnu l'omniprésence que petit à petit. Par exemple, les «Danzantes» de Monte Alban, qu'on prenait jadis pour des danseurs, sont maintenant considérés comme des victimes sacrificielles[2].
  • un jeu de balle rituel, dont les règles sont mal connues et ont varié avec le temps, mais qui est également omniprésent sous l'une ou l'autre forme.
  • un calcul du temps combinant deux calendriers, l'un de 260 jours, l'autre de 365 jours (Les Mayas ont la particularité d'en posséder un troisième : le compte long);
  • l'une ou l'autre forme d'écriture pictographique (l'écriture maya étant la plus sophistiquée);
  • un système de numération vigésimal;
  • une agriculture basée sur le maïs et surtout son traitement : le bouillir dans de l'eau mélangée à de la chaux augmente sa valeur nutritionnelle. On en fait ensuite une pâte appelée «nixtamal» en aztèque;
  • l'absence d'animaux domestiques (si l'on excepte le chien et le dindon).

Contexte écologique

Paysage des terres de haute altitudes mésoaméricaines

Le territoire mésoaméricain se situe entre le 10° et le 22° de latitude nord. Il comprend la zone centrale du Mexique, l'isthme de Tehuantepec, la péninsule du Yucatán; le Guatemala, le Belize, le Salvador et la côte pacifique du Honduras, Nicaragua et du Costa Rica jusqu'au golfe de Nicoya. Il forme une association complexe de différents écosystèmes. Michael D. Coe distingue les hautes terres (qui regroupent les différentes zones dont l'altitude est comprise entre 1000 à 2000 m) qui sont aussi connues comme l'Altiplano mexicain et les basses terres avec des altitudes plus proches du niveau de la mer et qui ne dépassent pas les 1000 m. Le premier groupe présente une grande diversité climatique, qui va du climat froid de montagne au climat tropical aride. Toutefois les climats subtropicaux ou tropicaux prédominent, comme sur la côte du golfe du Mexique et la mer des Caraïbes.

Certaines des vallées des hautes terres de Mésoamérique possèdent un sol fertile à vocation agricole. C'est le cas des vallées du Oaxaca, celle de Puebla-Tlaxcala et de Mexico. Toutefois, leur situation encaissée ne favorise pas les précipitations. Cette situation est particulièrement critique dans les terres chaudes des vallées mixtèques qui sont sans doute les plus arides des hautes terres. Outre le manque de pluie, il existe peu de cours d'eau et ils ont un débit réduit. Les premières recherches archéologiques présupposaient que le climat devait être plus favorable par le passé. Pourtant, avec les années et la profusion de connaissance sur la région, on sait que le climat ne devait pas être si différent de celui d'aujourd'hui, bien que les écosystèmes présentent un degré de dégradation provoquée par l'activité humaine. Une bonne partie des hautes terres présentent des preuves d'une déforestation ancienne, et diverses espèces ont disparu de leur habitat d'origine.

Le dindon, une des rares espèces domestiquées par les Mésoaméricains

Par conséquent, bien que les conditions des hautes terres de Mésoamérique n'aient pas été extraordinairement favorables, elles n'ont pas non plus été suffisamment défavorables pour empêcher le développement des hautes civilisations agricoles mésoaméricaines. De fait, leur situation est similaire à celles d'autres régions du monde où se sont produits des processus civilisateurs précoces, comme dans le nord du Pérou, ou dans la vallée de l'Indus, en Asie. Dans ces sites, comme en Mésoamérique l'être humain a dû apprendre à tirer profit au maximum des ressources dont il disposait dans son milieu. Les mésoaméricains des hautes terres, en tant que peuples agricoles, ont appris à stocker l'eau et à l'acheminer depuis les sources jusqu'à leur champ. Parmi les techniques agricoles de Mésoamérique la plus caractéristique fut peut-être la culture en chinampas, développée dans les lacs du plateau Tarasque et plus particulièrement dans la vallée de Mexico, où subsistent un certain nombre de zones de chinampería à Xochimilco.

Par ailleurs, les agriculteurs mésoaméricains ont dû apprendre à compter le temps puisque la période durant laquelle ils pouvaient semer restait comprise entre deux saisons qui menaçaient le résultat des récoltes de la culture principale, le maïs: la saison chaude et sèche du début du printemps et des gelées hivernales.

Il en était tout autrement pour les basses terres, particulièrement dans le sud-est de la côte du Golfe du Mexique où les pluies sont assez abondantes. Les forêts tropicales à végétation dense couvraient une bonne partie des plaines côtières et ceci représentait un obstacle pour le développement de l'agriculture. Dans ces sites, autant la végétation comme l'excès d'eau constituaient un problème, les mésoaméricains conçurent des systèmes de drainage, dont on peut aujourd'hui observer les restes dans la sous-région de Chontalpa dans l'état de Tabasco, où il subsiste ce que l'on appelle les camellones chontales.

Le jaguar était un animal très apprécié en Mésoamérique. Il vivait dans les terre basses du Oaxaca jusqu'en Amérique du Sud.

Par ailleurs, la faune dont disposaient les peuples mésoaméricains n'était pas facilement domesticable. Plusieurs millénaires avant le début de la civilisation d'Amérique moyenne, les espèces majeures de mammifères qui auraient pu être domestiquées avaient disparu à cause d'une chasse excessive. Tel fut le cas du cheval et de diverses espèces de bovins. Ceci explique pourquoi les peuples de la région manquaient d'animaux de trait et pourquoi la civilisation mésoaméricaine fut exclusivement agricole. Les seules espèces domestiquées furent le xoloitzcuintle et le dindon, mais ils n'ont jamais constitué une partie importante du régime ou de l'économie de la plupart des mésoaméricains.

En dépit de ce qui précède, les sociétés de la région pratiquaient la chasse d'autre espèces, en complément de leur régime (cerf, lapins, oiseaux, et de nombreux insectes), ou comme articles somptuaires (peaux de félins, plumages).

Étant donné que la Mésoamérique se présente fragmentée en niches écologiques très réduites et diverses, aucune des sociétés qui la peuplaient durant les temps préhispaniques n'était autosuffisante. Pour cette raison, à partir des derniers siècles de la période archaïque, antérieure à la préclassique, les peuples de la région se spécialisèrent dans l'exploitation de certaines ressources naturelles abondantes. Puis ils ont établi des réseaux d'échange commercial pour corriger les manques dus à l'environnement. Les peuples de l'Ouest, par exemple, se sont spécialisés dans la production agricole et la céramique; les habitants de l'Oaxaca produisaient du coton et la cochenille; de la côte arrivaient le sel, le poisson séché, les coquillages marins et le pigment comme la pourpre; des terres basses de la zone Maya et du golfe provenait le cacao, la vanille, les peaux de jaguar, des oiseaux précieux comme le quetzal ou la guacamaya; du Mexique central provenait la majeure partie de l'obsidienne servant à la fabrication des armes et des outils.

Chronologie

Chronologie classique

Le cadre chronologique des civilisations mésoaméricaines est le même. On distingue traditionnellement :

Ces trois dernières périodes se divisent elles-mêmes en trois périodes, à savoir : "ancien", "moyen", "récent". Il existe des divisions supplémentaires, telles que "protoclassique" ou "classique terminal". Les auteurs anglo-saxons emploient le terme «formatif» pour désigner le «préclassique». Le début du «classique» pose particulièrement problème. Nikolai Grube admet que «cette convention (il fixe le début du «classique» à 250) a pour but de donner un cadre chronologique». Linda Schele, quant à elle, date le début du «classique» à l'aide de la première stèle datée 199.

Chronologie alternative

Certains auteurs, comme Christian Duverger, reprochent à cette classification d'impliquer un jugement de valeur : pré impliquant que la civilisation en question n'est qu'en gestation, et post qu'elle est entrée en décadence. À cette division tripartite, Christian Duverger préfère une division en cinq époques, basée sur la notion d'horizon (olmèque, toltèque et aztèque) :

La chronologie de C. Duverger s'appuie sur la date de 1200 av. J.-C., même si des fouilles sur le site d’El Manatí, près de San Lorenzo, ont mis au jour certains objets datés d'environ 1500 av. J.-C. et qui pourraient être d'origine olmèque[3]. Cette exception n'a cependant été confirmée par aucune autre recherche archéologique.

La chronologie de Christian Duverger est adoptée par des spécialistes français et quelques spécialistes mexicains même si la majorité des spécialistes anglo-saxons s'en tiennent à la chronologie classique.

Aires culturelles

Carte des aires culturelles de la mésoamérique

Les aires culturelles représentent les régions habitées par des peuples qui comptent de nombreux éléments en commun. Toutefois, cela ne veut pas dire que tous les peuples font partie d'une seule et même ethnie, ni même qu'ils parlent nécessairement la même langue, mais cela n'empêche pas non plus une forme d'interaction entre eux (relations de pouvoir, d'alliance, commerciales, etc.)

Panorama des cultures mésoméricaines

Ce panorama s'inscrit dans le cadre de la chronologie classique et des grandes aires culturelles

Époque préclassique

L'Epoque préclassique fait suite à l'époque archaïque (- 8000 à - 2500 ). Elle marque véritablement les débuts de la Mésoamérique comme aire culturelle. Allant traditionnellement de -2500 à 300, le préclassique est marqué par les débuts de l'agriculture mésoaméricaine (basée sur le maïs) et la sédentarisation. On ignore les noms des peuples de cette époque : les noms actuels leur ont été donnés plus tard. Des vagues de nouveaux arrivants continuent après la sédentarisation. Les peuples de langue nahuatl seraient les derniers arrivés. La taille des villages augmente progressivement, avec une différentiation des activités, comme à San José Mogote en Oaxaca, et le début d'échanges interrégionaux, surtout des produits de prestige.

Au préclassique moyen apparaissent des communautés plus importantes, comme Tlatilco au Mexique central et Monte Alban I en Oaxaca. Dans les basses-terres de la côte du Golfe du Mexique apparaît vers -1200 une culture, celle des Olmèques, qui, par sa sophistication, se distingue de toutes les autres : centres cérémoniels monumentaux, apparition d'une élite sociale... Plusieurs centres olmèques se succèdent : San Lorenzo, La Venta, Tres Zapotes. Les traits culturels se répandent dans le restant de la Mésoamérique, du Guerrero au Honduras, au point que l'on parle de «culture-mère», un concept qui fait encore l'objet d'âpres débats parmi les spécialistes[4]. Certains préfèrent parler de «cultures-soeurs», dont l'apparition simultanée s'explique par l'existence de surplus agricoles, qui permettent partout l'émergence d'élites locales. La diffusion des traits culturels s'explique alors par les échanges commerciaux de produits de luxe recherchés par ces élites, tels que le jade, la turquoise, l'hématite, le cacao, les plumes d'oiseaux..

Site Cuicuilco, actuellement dans les faubourgs de Mexico-city

Au préclassique récent, les sites olmèques se sont éteints, à l'exception de Tres Zapotes. Des cultures locales se dégagent. En Oaxaca, Monte Alban II, centre de la civilisation zapotèque, et au Mexique central, le site de Cuicuilco. La disparition, suite à une éruption volcanique, de ce dernier site coïncide avec l'émergence de Teotihuacan, qui dominera l'époque suivante dans toute la Mésoamérique.

Des développements importants ont lieu à cette époque dans l'isthme de Tehuantepec, où apparaissent un type d'écriture original appelé épi-olmèque et les premières inscriptions en Compte long. Un peu plus au sud, dans le piémont pacifique et les Hautes-Terres mayas, des sites tels que Kaminaljuyu, El Baul, Takalik Abaj et Izapa constituent un chaînon entre les Olmèques et la civilisation maya. Le développement des Basses-Terres pose le problème des influences qu'elles ont subies, soit par contact direct avec les olmèques, soit par le biais des cités des Hautes-Terres citées plus haut. Dans l'est des Basses-Terres du sud apparaissent les premières cités mayas, notamment Cerros au Belize. Le bouleversements les plus profonds concernent le Bassin d'El Mirador dans le Petén. Au cours des dernières décennies, l'exploration du site de Nakbé, où des plates-formes monumentales apparaissent au Préclassique moyen (vers 600), et surtout du site d'El Mirador lui-même, dont la floraison date du Préclassique récent et qui compte la structure pyramidale la plus importante jamais construite dans le monde maya[5], a bouleversé l'idée que les spécialistes se faisaient du développement de la civilisation maya. Le gigantisme des constructions d'El Mirador à une époque aussi précoce implique une main d'oeuvre extrèmement importante et un degré d'organisation politique considéré il y a peu comme inconnu avant l'Époque classique. Vers 150, le bassin d'El Mirador se dépeuple. Cette période semble correspondre à un premier[6] «effondrement» de la civilisation maya.

A l'autre extrémité du monde mésoaméricain, dans la région que les archéologues mexicains appellent «Occidente», dans les états actuels de Colima, Nayarit et Jalisco, ainsi qu'au long du fleuve Mezcala, fleurissent les cultures dites des «tombes à fosse», dont la datation est incertaine.

Époque classique (300 à 900 )

Site de Teotihuacan

Le Classique ancien est, comme nous l'avons dit, dominé par la mégalopole de Teotihuacán, dont l'influence se fait sentir jusque dans la zone maya[7], où le centre de gravité s'est déplacé vers les Basses-Terres du sud : de nombreuses cités-états développent un système politique basé sur la «royauté divine».

Monte Alban

En Oaxaca, le passage du Préclassique (Monte Albán II) au Classique (Monte Albán III) s'opère sans solution de continuité. À son apogée (Monte Albán IIIb) la capitale zapotèque compte 30 000 habitants[8]. La plupart des bâtiments visibles actuellement datent de cette époque. Monte Albán III est contemporain de Teotihuacán avec laquelle il entretient des rapports diplomatiques[9]. Il existe par ailleurs un quartier («barrio») zapotèque à Teotihuacán. A l'extrémité est de la Mésoamérique se développe la culture de Cotzumalhuapa.

Au Classique récent, l'écroulement de Teotihuacan au VIIe siècle, dans des circonstances mal définies - invasion ou rébellion ? - aura pour conséquence la perturbation des routes commerciales et l'irruption de groupes chichimèques venus du nord, comme ce sera d'ailleurs encore souvent le cas dans l'histoire de la Mésoamérique.

Peintures murales Cacaxtla

Certains développements continuent à laisser les archéologies perplexes, notamment la présence de guerriers mayas sur des peintures murales de Cacaxtla au Mexique central. Des cités plus petites prennent le relais de Teotihuacan., notamment Xochicalco et Cholula. En Oaxaca, Monte Alban décline également et est progressivement abandonné vers 700. Dans la région de la Côte du Golfe du Mexique fleurit la culture d'El Tajin, qui se distingue par l'importance accordée au jeu de balle. En témoignent les nombreux «jougs», «hachas» et «palmas» associés à cette activité que l'on a retrouvés dans la région. Dans les Basses-Terres centrales maya, les archéologues, se basant sur l'absence d'inscriptions à Tikal au milieu du VIe siècle, ont cru voir jadis un «hiatus»[10], qui aurait marqué la frontière entre le Classique ancien et le Classique récent. Actuellement on considère qu'il s'agit d'un phénomène local, à situer dans le cadre de la compétition féroce que se livraient les principales cités maya de l'époque, Calakmul et Tikal, cette dernière ayant eu le dessous. Tikal se relèvera de sa défaite et le Classique récent se caractérise à la fois par l'extraordinaire épanouissement artistique d'un grand nombre de cités maya et des conflits d'un intensité toujours plus forte. Dans les Basses-Terres centrales maya, on assiste littéralement à un «effondrement» à partir du IXe siècle : les unes après les autres, les cités cessent d'ériger des stèles datées en Compte Long. Les basses-Terres du sud se dépeuplent progressivement. Toutes les cultures mexicaines déclinent également vers 900.

Époque postclassique

Zone archéologique de Tula

L'Époque postclassique va de 900 à la conquête espagnole.

Dans la zone maya, le Yucatan prend le relais des Basses-Terres centrales. On peut penser qu'il bénéficie d'un apport de population en provenance des Basses-Terres du sud. Des cités comme Uxmal, Labna ... développent un style régional appelé «puuc». Au Xe siècle, la cité de Chichen Itza domine la région. Les ressemblances frappantes entre les monuments de Chichen Itza et ceux de Tula ont donné naissance à la fameuse théorie de l'«invasion toltèque» au Yucatan. Si les contacts entre le Mexique central et la zone maya ne font aucun doute, de plus en plus de spécialistes remettent en question cette invasion, admettant simplement qu'on ne dispose pas de réponse à la question pour le moment[11]. Le déclin de Chichen Itza s'amorce au XIe sècle. Après sa défaite vers 1220 par la cité de Mayapan, cette dernière prend la tête d'une confédération qui domine la péninsule du Yucatan[12]. Les Livres de Chilam Balam relatent la chute de Mayapan au XVe siècle. Cet événement marque le début d'un émiettement politique qui dure jusqu'à la conquête espagnole. Dans les Hautes-Terres mayas, des élites se réclamant des «Toltèques»[13] fondent des royaumes conquérants, dotés d'une direction collégiale, où l'influence culturelle mexicaine est sensible. Le principal de ces royaumes est celui des Quichés, auxquels nous devons notre principale source écrite sur la religion maya, le Popol Vuh. Au XVe sièlce, les Cakchiquels leur disputent l'hégémonie sur les hautes-Terres.

La partie occidentale de l'Oaxaca est le territoire des Mixtèques, un peuple apprenté linguistiquement à leurs voisins zapotèques. Relativement mal connus à l'Époque classique, ils s'affirment au Postclassique. Leur histoire nous est connue par des documents ethnohistoriqus, la série des codex dits «mixtèques». Ils étaient divisés en cités-état militaristes qui se faisaient la guerre et pénétrèrent le territoire des Zapotèques, dont ils réutilisèrent les tombes à Monte Albán (phase V). Ils apportèrent une contribution important à l'histoire des arts mésoaméricains dans le domaine de la céramique, des mosaïques en turquoise, et surtout de l'orfèvrerie, dont la technique leur serait parvenue du Pérou[14].

Dans le Mexique central, du chaos de la fin du Classique émergent les Toltèques, venus du nord comme tous les envahisseurs. Ils établissent leur capitale à Tula. Selon la tradition, ils auraient été menés par un chef appelé Mixcoatl, dont le fils, Topiltzin, aurait donné naissance aux légendes de Quetzalcoatl. Au Postclassique récent, Tula s'écroule au XIIe siècle sous les coups de nouvelles vagues chichimèques venues du nord. Cette situation engendre un nouvel émiettement politique. Des groupes toltèques émigrent vers la vallée de Mexico, où ils fondent de petits Etats, tels que que Xochimilco ou Azcapotzalco. Ils sont suivis par des bandes de Chichimèques, auxquels on doit la fondation de Texcoco. A partir du XVe siècle, la scène est dominée par l'émergence des Aztèques ou Mexicas, les derniers arrivés des Chichimèques, dont les origines se perdent dans les brumes légendaires et que ses pérégrinations ont amené dans la vallée de Mexico. Après des débuts pénibles, en un peu moins d'un siècle, ils bâtissent un empire qui s'étend du Golfe du Mexique jusqu'à l'Océan Pacifique. Ils se veulent les héritiers de Teotihuacan et surtout des Toltèques. Le royaume tarasque au Michoacán est la seule puissance à résister aux Aztèques, et même à rivaliser avec eux. L'irruption des conquistadors espagnols sur la côte du Golfe du Mexique en 1519 mit brutalement fin au développement des sociétés mésoaméricaines. Après la destruction de Tenochtitlan par Hernan Cortés et ses alliés indiens tlaxcaltèques, les Espagnols étendirent rapidement leur domination sur l'ensemble de la Mésoamérique. Seuls les Mayas du Yucatan leur opposèrent un résistance farouche jusqu'en 1546. A la place des sociétés indigènes s'installa ensuite une société métisse, la société coloniale espagnole. Curieusement, le petit royaume maya de Tayasal, protégé par les jungles du Petén perpétua la culture indigène jusqu'à sa destruction par les Espagnols en 1696.

Notes et références

  1. (en) Michael Ernest Smith et Frances Berdan, The Postclassic Mesoamerican World, University of Utah Press, 2003 (ISBN 0874807344).
    « Paul Kirchhoff [...] was the first scholar to provide a systematic definition of "Mesoamerica" as a meaningful spatial unit. » (p.21)
     
  2. Michal D. Coe, Mexico from the Olmecs to the Aztecs (2è éd.), Thames & Hudson, p. 93
  3. Richard A. Diehl
  4. David Carrasco (Ed.), The Oxford Encycopedia of Mesoamerican Cultures (3 volumes), Oford University Press, 2001, volume 2, p. 239
  5. Richard D. Hansen, Early Social complexity and Kingship in the Mirador Basin, in: Virginia M. Fields & Dorie Reens-Budet (Éd.), Lords of Creation, The origins of Sacred Maya Kingship, Scala Publishers Ltd., p. 60
  6. par rapport à l'effondrement de la fin de l'Époque classique
  7. Robert J. Sharer & Simon Martin, Strangers in the Maya Area,:Early Classic Interaction with Teotihuacan, in : Virignia M. Fields & Dorie Reents-Budet, Lords of Creation: The Origins of Sacred Maya Kingship, Scala Publishers Ltd., p. 80-90
  8. Ernesto Gonzalez Licon, Les cultures préhispaniques de l'Oaxaca, in Dossiers de l'archéologie, n° 245, p. 17
  9. Joyce Marcus & Kent V. Flannery, Zapotec civilization, Thames & Hudson, p. 233
  10. Simon Martin & Nikolai Grube, Chronicle of the Maya Kings and Queens, Thames & Hudson (2e édition), 2008, p. 40
  11. David Carrasco (Ed.), The Oxford Encycopedia of Mesoamerican Cultures (3 volumes), Oford University Press, 2001, volume 2, p. 250
  12. David Drew, The Lost Chronicles of the Maya Kings, Phoenix, p. 379
  13. Arthur Demarest, Les Mayas, Tallandier, p. 280
  14. Henri Stierlin, L'art aztèque et ses origines, Seuil, 1986, p. 111

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

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