Jean Daniel Bensaïd

Jean Daniel Bensaïd

Jean Daniel

Jean Daniel ( Jean Daniel Bensaïd) est un écrivain et un journaliste français, éditorialiste dans l'hebdomadaire Nouvel Observateur qu'il a fondé en 1964. Il est le 21 juillet 1920 à Blida (Algérie).

Sommaire

Biographie

Son enfance pendant l'entre-deux-guerres

Jean Daniel est à Blida, une petite ville de garnison proche dAlger. Élevé dans une famille algérienne de confession juive[1], il est le onzième et dernier enfant de Jules Bensaïd, qui s'était élevé socialement de la condition de modeste ouvrier, à celle de négociant aisé en minoterie. Si son père préside le consistoire local, il apparaît très tôt comme agnostique, moins attaché à son identité juive quà la culture méditerranéenne et à la citoyenneté française.

Élève au collège colonial de Blida, il devient, dès lâge de quinze ans, un lecteur assidu de lhebdomadaire Vendredi, journal dune gauche intellectuelle, indépendante et favorable au Front populaire. Passionné par la littérature, son enthousiasme pour lœuvre dAndré Gide lamène à voir en lURSS. le paradis socialiste. Pendant deux ans, il se plonge dans le marxisme sous linfluence des livres que lui prête un ami, Vicente Pérez. Mais en 1936, la lecture du Retour dURSS. dAndré Gide lui fait perdre ses illusions communistes. Il se retrouve alors dans cette génération de gauche non communiste marquée par lépisode du Front populaire et le socialisme de Léon Blum. Inscrit en philosophie à la faculté dAlger, il y fréquente les « Amis de la revue Esprit ».

Seconde guerre mondiale

Mais labrogation du décret Crémieux (1941) obstrue ses perspectives. Passionné par les appels du Général de Gaulle, il se détourne d'une tentation vaguement sioniste pour préparer son engagement dans la France libre. Un ami, José Aboulker, l'en empêche et le conduit à fréquenter un groupe de résistants qui contribue, le 8 novembre 1942, à la libération dAlger et à laccueil des Américains. Incorporé dans larmée de Giraud, il déserte aussitôt pour rejoindre à Zabrata (Tripolitaine) la division Leclerc il sera affecté aux transports dexplosifs dans le 13ème bataillon du Génie. Il retrouve avec la 2ème DB son ami Charles Guetta au Maroc, qui devait lui sauver la vie plus tard lors des événements de Bizerte en 1960. Il participe à la campagne de France jusquà sa démobilisation à Paris en 1945.

Les années d'après-guerre

Il s'inscrit en philosophie à la Sorbonne mais un de ses anciens professeurs de Blida le recommande alors au directeur du cabinet du président du Conseil. Durant huit mois (1946), il devient donc attaché au cabinet de Félix Gouin, un socialiste proche de Blum et dont il va, à vingt-six ans, rédiger les discours. Parallèlement, il publie quelques articles dans Combat mais, devoir de réserve oblige, sous le nom de Daniel (son deuxième prénom). Le spectacle des phénomènes de cour, la servilité et la corruption des milieux quil y côtoie le guérissent de toute tentation politique au point quil refuse un poste de sous-préfet quon lui propose. Comme il refusera plus tard les deux postes d'ambassadeur que François Mitterrand lui proposera.

En février 1947, interrompant la préparation de l'Agrégation, il fonde avec Daniel Bernstein la revue Caliban qui se veut « une revue de vulgarisation intellectuelle de haute tenue, à la fois explicitement marquée à gauche, indépendante financièrement et accueillante par toutes les sensibilités idéologiques. Il obtient surtout le parrainage retentissant d'Albert Camus dont il fait pour la première fois la connaissance et qui va devenir son protecteur [2] ». Simposant au poste de rédacteur en chef en novembre 1947, il y fait collaborer des écrivains comme André Chamson, Louis Guilloux, Étiemble, Jules Roy ou Emmanuel Roblès. Il sollicite aussi des proches comme son cousin Norbert Bensaïd, sa compagne Marie Susini, son compagnon de la Faculté dAlger Albert Paul-Lentin et le peintre Maurice Adrey. Mais c'est surtout sa rencontre avec Albert Camus qui le marque profondément.

En décembre 1947, il publie ainsi le manifeste neutraliste que ce dernier a signé avec Jean-Paul Sartre, Claude Bourdet, Jean-Marie Domenach, Emmanuel Mounier et Merleau-Ponty en faveur de lunité économique dune Europe indépendante des deux blocs. Partageant lopposition camusienne au modèle soviétique, il est alors partisan du non-alignement à la tête dune revue située « quelque part entre le Parti communiste et la SFIO[3] ». Mais en dehors de son influence intellectuelle, Albert Camus lui apporte un financement public grâce à son ami Jeanne Sicard, directrice du cabinet de René Pleven, et de ses liens avec le directeur des Relations culturelles, Louis Joxe[4]. Ses soutiens savèrent toutefois insuffisants et, en 1952, la revue cesse de paraître.

À la recherche dun emploi, il trouve une place denseignant aux cours Descartes, une école privée dOran dirigée par André Bénichou. Il écrit alors son premier roman, LErreur, que son ami Albert Camus publie dans la collection quil dirige chez Gallimard. Mais le journalisme lui semble être le lieu idéal conjuguer tout ce qui l'attire : la littérature, l'engagement politique et le grand reportage. En 1953, il entre donc à la Société générale de presse il prend en charge les affaires coloniales. Il sy lie alors avec K.S. Karol, Léone Georges-Picot et surtout Pierre Viansson-Ponté qui lui permet, en novembre 1954, de publier son premier article dans L'Express.

Ses années de journaliste-reporter

Au bout de deux piges, il est engagé par Jean-Jacques Servan-Schreiber avec la charge de couvrir les évènements dAlgérie. Il se sent idéologiquement et affectivement très proche de Pierre Mendès Francedont il soutiendra les campagnes de "L'Express" de la seconde moitié des années 1950.

Très vite, il se fait remarquer par ses reportages sur la Guerre d'Algérie dans lesquels il dénonce notamment la torture. Favorable à la cause algérienne, il défend les négociations avec le FLN, ce qui entraîne l'éloignement d'Albert Camus. Inculpé à deux reprises pour atteinte à la sûreté de lÉtat, menacé de mort par les militants extrémistes de l'Algérie française, il est à lorigine, par ses articles, de presque toutes les saisies de L'Express. En juillet 1961, il est grièvement blessé lors des événements de Bizerte. Il passe de longs mois à l'hôpital, à l'issue desquels il exprimera son refus de signer le manifeste des 121 et son approbation de la politique de De Gaulle. À son retour à L'Express, la Guerre d'Algérie étant terminée, il perd de son aura et ses rapports se dégradent avec Jean-Jacques Servan-Schreiber.

Mais il acquiert la stature dun journaliste de réputation internationale en obtenant un entretien de John F. Kennedy qui le charge d'un message pour Fidel Castro. C'est au cours d'un déjeuner avec le leader cubain qu'il apprendra lassassinat de John Fitzgerald Kennedy le 22 novembre 1963. Mais lors de son retour à Paris à la fin 1963, l'auréole de sa réputation ne facilite pas ses rapports avec Jean-Jacques Servan-Schreiber. De plus, il refuse de sassocier à la mise sur pied dun journal aussi impersonnel que dépolitisé. Ainsi, alors quil refuse de venir à France Observateur comme le lui propose Gilles Martinet, il rompt avec L'Express durant lhiver 1963-1964, emportant toute laile gauche du journal (K.S. Karol, Serge Lafaurie, Michel Bosquet, Michel Cournot, Michèle Manceaux, Michel Vianey, Jean Cau, Jeanne Baraduc, Pascale Lentillon, Anne-Marie Devilaine, Jacques-Laurent Bost, Jean Moreau).

Contacté par Hubert Beuve-Méry pour entrer au journal Le Monde, il préfère réfléchir et se limiter à lui offrir lexclusivité de ses articles sur la crise cubaine. Retiré à Sidi Bou Saïd, il est relancé par son ami Claude Perdriel pour participer à un nouveau journal ou à la relance de France Observateur. Finalement, c'est cette option quil choisit et entreprend, à partir du printemps, les négociations avec Gilles Martinet et ses amis. À la fin de lété, elles aboutissent au principe suivant : il prendra la direction de la rédaction alors quHector de Galard assurera avec Serge Lafaurie la rédaction en chef. Bientôt il deviendra un des acteurs majeur du Nouvel Observateur, journal de centre gauche dont il rédige chaque semaine l'éditorial. Il collabore, depuis sa création en 2007, au journal Service littéraire.

Il a été un temps membre du Conseil supérieur de l'Agence France-Presse (AFP), membre du Conseil d'administration du Grand Louvre, et membre du Comité consultatif national d'éthique.

Distinctions

Décorations

Œuvres

  • 1952 : l'Erreur ou la Seconde Vie de Sylvain Regard.
  • 1973 : le Temps qui reste, essai d'autobiographie professionnelle
  • 1977 : le Refuge et la source, carnets autobiographiques
  • 1979 : l'Ère des ruptures (Grasset)
  • 1986 : De Gaulle et l'Algérie : la tragédie, le héros et le témoin (Le Seuil)
  • 1988 : les Religions d'un président : regards sur les aventures du mitterrandisme
  • 1989 : Cette grande lueur à l'Est
  • 1992 : la Blessure suivi de le Temps qui vient, carnets autobiographiques (Grasset)
  • 1994 : l'Ami anglais (Grasset)
  • 1995 : Voyage au bout de la nation (Le Seuil)
  • 1996 : Dieu est-il fanatique ? Essai sur une religieuse incapacité de croire (Arléa)
  • 1998 : Avec le temps : carnets 1970-1998, carnets autobiographiques (Grasset)
  • 2000 : Soleils d'hiver : carnets 1998-2000, carnets autobiographiques (Grasset)
  • 2002 : Lettres de France : après le 11 septembre (Saint-Simon)
  • 2002 : Œuvres autobiographiques (Grasset), (réunit le Refuge et la source, le Temps qui reste, la Blessure, Avec le temps, Soleils d'hiver, le tout augmenté d'un Index)
  • 2003 : la Guerre et la paix : Israël-Palestine : chroniques, 1956-2003 (Odile Jacob)
  • 2003 : la Prison juive : humeurs et méditations d'un témoin (Odile Jacob)
  • 2004 : Cet étranger qui me ressemble (Grasset)
  • 2006 : Avec Camus : Comment résister à l'air du temps (Gallimard NRF)
  • 2008 : Israël, les Arabes, la Palestine : chroniques 1956-2008, Galaade (ISBN 978-2-35176-044-4) 
  • 2009 : Les miens (Grasset) (ISBN 9782246746515)

Lien externe

Notes

  1. Jean Daniel est issu d'une famille berbère judaïsée de Blida, Jean-Claude Barreau et Guillaume Bigot, Toute l'histoire du monde, p. 381, Éd.Fayard, 2005, ISBN 2213622965
  2. Corinne Rennou, « Caliban, une revue de vulgarisation intellectuelle », Vingtième Siècle, no 40, octobre - novembre 1993, p. 75.
  3. Corinne Rennou, idem, p. 83.
  4. Qui achète plus dun millier dexemplaires tout en prenant un millier dabonnements pour lÉtat.
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