Investissement direct à l'étranger

Investissement direct à l'étranger
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Les investissements directs à l'étranger, ou investissements directs étrangers[1] (IDE en abrégé, traduction de l'acronyme anglais FDI pour Foreign Direct Investment), également appelés investissements directs internationaux (IDI) par l'OCDE[2], sont les mouvements internationaux de capitaux réalisés en vue de créer, développer ou maintenir une filiale à létranger et/ou dexercer le contrôle (ou une influence significative) sur la gestion d'une entreprise étrangère.

Sommaire

Définition des IDE

Selon la Banque de France[3], « les investissements directs sont des investissements internationaux par lesquels des entités résidentes d'une économie acquièrent ou ont acquis un intérêt durable dans une entité résidente d'une économie autre que celle de l'investisseur. La notion d'intérêt durable implique l'existence d'une relation à long terme entre l'investisseur direct et la société investie et l'exercice d'une influence notable du premier sur la gestion de la seconde. L'investissement direct comprend à la fois l'opération initiale entre les deux entités et toutes les opérations financières ultérieures entre elles et entre les entreprises du même groupe international ».

La notion dintérêt durable permet de différencier, parmi les mouvements internationaux de capitaux, les IDE des investissements de portefeuille. Ces derniers sont considérés comme des placements internationaux, alors que les IDE impliquent un pouvoir de décision de linvestisseur sur lentreprise rachetée ou construite à létranger. La distinction fondamentale entre IDE et investissement de portefeuille a été introduite en 1960 par S. Hymer[4]. Dans une thèse qui ne sera publiée qu'en 1976, il met en évidence que ces deux types dinvestissements internationaux répondent à des déterminants différents.

LIDE se traduit non seulement par un transfert de fonds financiers, mais aussi en général par un transfert de technologie et de capital humain (par lintermédiaire des personnels expatriés simpliquant dans la production à létranger).

LIDE est à lorigine de la création des firmes multinationales ou sociétés transnationales. Une fois créé un réseau de filiales à létranger, lactivité de la firme multinationale ne se réduit cependant pas aux seuls IDE. Progressivement, la firme internationale va organiser au niveau international ses activités de conception, de production et de commercialisation de ses produits. Les relations entre les filiales étrangères et la maison-mère donnent alors lieu à un commerce international intra-firme de biens et de services, qui ne relève pas des IDE.


Typologie des IDE

Par forme des IDE

LOCDE[5] reprend fréquemment dans ses analyses une distinction selon la forme des IDE.

Pour développer un réseau de filiales à létranger, linvestisseur peut intervenir par :

  • la création d'une filiale entièrement nouvelle. Dans ce cas, l'investissement direct se matérialise par linstallation de nouveaux moyens de production et le recrutement de nouveaux employés. Cet « IDE de création » est aussi connu sous le nom anglais de greenfield investment;
  • l'acquisition d'une entité étrangère déjà existante. Cet IDE se matérialise par un transfert de propriété des titres de la filiale acquise. Cette catégorie est également connue sous le terme anglais de brownfield investment. Les fusions-acquisitions transfrontalières appartiennent à cette forme des IDE;
  • laccroissement des capacités de production de filiales déjà existantes par apport de fonds. On parle dIDE dextension;
  • l'injection de fonds pour soutenir lactivité dune filiale en difficultés financières. C'est lIDE de restructuration financière.

Par logique des IDE

Markusen[6] (1995) introduit une typologie des IDE basée sur la logique qui sous-tend la décision de créer des filiales à létranger. Il distingue :

  • LIDE horizontal. Il consiste à créer des filiales qui produisent toutes des biens identiques. Il vise à faciliter laccès de linvestisseur à un marché étranger dans l'espoir de développements futurs. Certains facteurs (obstacles tarifaires ou non aux échanges, coûts de transport) affectant la compétitivité des exportations, linvestisseur préfère implanter à létranger des entités reproduisant, comme dans son pays dorigine, toutes les étapes du processus de production afin de servir le marché local.
  • LIDE vertical. Par celui-ci, linvestisseur fragmente les différentes étapes de conception, de production et de commercialisation des produits en implantant dans des pays différents des filiales qui produisent des biens finis ou semi finis différents. Il sagit ici pour linvestisseur de tirer parti des différences de coût des facteurs entre pays. Dans ce cas, lactivité à létranger est un complément de lactivité de la maison-mère. LIDE vertical relève de la délocalisation, mais il nen constitue que lune des modalités (aux côtés de la sous-traitance internationale par exemple).

Toutefois, la distinction entre IDE horizontal et vertical nest pas aussi claire dans les faits : les firmes multinationales sengagent souvent dans des stratégies dintégration complexe, qui englobent à la fois des formes dintégration verticale dans certains pays et horizontale dans dautres (Yeaple[7], 2003).

Par type dinstruments financiers des IDE

Selon lOCDE[5], les IDE peuvent être effectués sous forme de :

  • Titres de participation : ils regroupent les actions ordinaires et les actions privilégiées, les réserves, les apports au capital et les bénéfices réinvestis (ces derniers correspondant à la fraction du résultat de la filiale non distribuée sous forme de dividende à sa maison-mère, et réinvestie de fait dans la filiale)
  • Titres de créance : ils regroupent les valeurs mobilières négociables telles que les obligations (garanties ou non), les billets de trésorerie, billets à ordre, actions privilégiées à dividende fixe et autres valeurs mobilières négociables non représentatives de capital. Font également partie des titres de créance les prêts, dépôts, crédits commerciaux et autres comptes à recevoir ou à payer.


Déterminants des IDE

Malgré limportance croissante prise par les investissements internationaux dans les économies, il nexiste aucun cadre théorique unifié permettant de comprendre les déterminants des IDE. Les analyses théoriques sur la multinationalisation des firmes sont récentes, leur apparition datant de la fin des années 1950. En outre, lanalyse des déterminants de lIDE se situe à lintersection de léconomie internationale et de l'économie industrielle. La première permet dappréhender ces comportements dans leur dimension darbitrage géographique et dans la perspective dune articulation entre commerce de produits et mouvements des capitaux. La seconde met plus laccent sur les stratégies de développement des firmes et larbitrage entre divers modes dorganisation de leurs activités.

Lapproche éclectique et le paradigme OLI

Une première tentative a été effectuée par Dunning[8],[9] qui propose une approche globale des facteurs explicatifs de linvestissement direct (paradigme OLI) dans laquelle apparaissent des éléments comme la concurrence imparfaite, les avantages comparatifs ou linternalisation des coûts de transaction. Cette approche, dite « éclectique », se réfère au paradigme OLI (pour Ownership, Localisation, Internalisation). Celui-ci fait de la multinationalisation le résultat d'une combinaison de trois éléments interdépendants:

  • Le premier (avantage spécifique ou ownership advantage en anglais) est la possession par l'entreprise d'actifs susceptibles d'être exploités de manière rentable à une échelle relativement large. Parmi les actifs dont la détention joue un rôle moteur dans l'internationalisation des opérations de sociétés multinationales, la technologie ou plus encore, la capacité d'innover régulièrement du point de vue technologique, est reconnue comme un élément de première importance. Plus généralement, on souligne souvent le fait que les sociétés multinationales possèdent de nombreux actifs incorporels qu'elles peuvent exploiter à l'échelle mondiale (brevets, droits d'auteur, compétences, noms de marque, réseaux de commercialisation...).
  • Le deuxième (avantage à la localisation) est l'existence d'un avantage à utiliser ces actifs pour produire dans plusieurs pays plutôt que d'exporter à partir d'une production dans le seul pays d'origine. De multiples facteurs peuvent être associés à cet élément : une présence physique sur les marchés étrangers est parfois nécessaire pour y être compétitif. C'est souvent le cas dans les industries de services. L'implantation à l'étranger peut aussi s'inscrire dans le cadre d'une division internationale du processus productif dans laquelle les différences des prix et des salaires jouent un rôle important. La délocalisation peut également répondre à une volonté de s'affranchir d'entraves au commerce (frais de transport des produits, protectionnisme commercial du pays d'accueil) ou permettre une meilleure adaptation au marché (proximité des consommateurs, ajustement aux normes locales, meilleure connaissance des concurrents locaux).
  • Le troisième (avantage à l'internalisation) réside dans les avantages potentiels d'une « internalisation » de l'exploitation des actifs en raison de certaines formes de défaillance de marché. L'internalisation de l'exploitation des actifs permet d'éviter les coûts associés aux transactions entre sociétés indépendantes, coûts liés à la passation des contrats et à la garantie de la qualité. Elle assure un meilleur contrôle sur l'utilisation des technologies, notamment si l'environnement juridique dans le pays d'accueil n'offre pas des garanties jugées suffisantes en matière de protection de la propriété intellectuelle en cas d'octroi de licences pour l'exploitation d'une technologie mise au point par l'entreprise. Par ailleurs, il peut y avoir une sous-évaluation par le marché d'une telle technologie si, pour l'exploiter pleinement, on doit faire appel à des technologies complémentaires, à des connaissances et compétences qu'il n'est pas facile de trouver en dehors de l'entreprise.

LIDE, comme mode de pénétration du marché étranger, est choisi lorsque la firme réunit simultanément les trois types davantages (spécifique, à la localisation et à linternalisation). Sil ny a pas davantage à la localisation mais un avantage spécifique et un avantage à linternalisation, la firme garde la maîtrise de la pénétration du marché étranger en y exportant et en établissant son propre réseau de vente. Pour Dunning enfin, si la firme ne possède quun avantage spécifique, elle effectue alors une vente de licence auprès dune entreprise locale et lui laisse le soin dexploiter le marché de son pays.

Les apports de la Nouvelle Théorie du Commerce International (NTCI)

Le cadre défini par Dunning constitue le point de départ des nouveaux éléments théoriques apportés par les modèles dinvestissement stratégique et la Nouvelle Théorie du Commerce International (NTCI) qui mettent en avant un arbitrage des firmes multinationales entre proximité et concentration :

  • Selon Brainard[10] (1993), des firmes multinationales de type horizontal apparaissent lorsque les avantages à simplanter à proximité des consommateurs sont élevés relativement aux avantages liés à la concentration des activités. La firme préfère donc implanter plusieurs sites de production pour servir les marchés locaux si elle peut réaliser des économies déchelle entre ces différents sites du fait de la présence dactifs intangibles, si les coûts dimplantation sont relativement faibles, si les coûts de transport sont plutôt élevés et si la demande sur le marché daccueil est forte. Ces premiers modèles mettent laccent sur les IDE de type horizontaux qui correspondent à des stratégies de conquête de marchés locaux principalement dans les pays développés.
  • Markusen et al.[11] (1996) complètent les résultats du modèle de Brainard sur larbitrage proximité-concentration en mettant en évidence les IDE verticaux lorsque les firmes s'intègrent dans une perspective traditionnelle de division internationale des processus de production. Les firmes multinationales répartissent leurs activités entre les pays en fonction des différents avantages comparatifs. Les firmes multinationales de type vertical apparaissent entre pays différents en taille et en dotations factorielles et établissent les étapes de la production les plus intensives en travail dans les pays les coûts de la main d'œuvre sont peu élevés.

Le modèle avec entreprises hétérogènes de Helpman, Melitz et Yeaple[12] (2004) met en évidence que seules les entreprises les plus efficaces dans leur branche dactivité peuvent simplanter à létranger. En effet, toutes les entreprises ne sont pas dun même niveau defficacité dans une branche dactivité donnée : seules les plus efficaces exportent, et parmi celles-ci, seule une fraction dentre elles, capable de supporter les coûts dentrée, pourra simplanter à létranger. M. Mrazova et J.P. Neary (2010)[13] complètent ce modèle en mettant en évidence le rôle des plates-formes à lexportation : en effet, parmi les entreprises à même de se développer à linternational, seules les entreprises les plus performantes seront à même de créer des filiales dans tous les pays, tandis que celles qui le sont moins se limiteront aux exportations pour pénétrer les marchés étrangers. Les entreprises intermédiaires auront quant à elles intérêt à établir une filiale dans un seul pays et pourront lui confier le rôle de plate-forme à lexportation.

Dautres analyses sattachent à introduire les concepts dincertitude et dacquisition de connaissance sur les marchés étrangers afin danalyser dans quelle mesure une entreprise peut évoluer dun mode de pénétration des marchés étrangers vers un autre. Ainsi, F. Albornoz et al.[14] développent un modèle basé sur lapprentissage et lexpérimentation dans lequel les entreprises ne découvrent leur profitabilité sur les marchés étrangers quaprès avoir commencé à exporter. Plus précisément, une entreprise commencerait à exporter un produit vers un seul pays avant de sorienter vers dautres pays si les exportations vers le pays initial savèrent profitables. Dans le même ordre didée, P. Conconi, A. Sapir et M. Zanardi[15] étudient comment une entreprise qui a commencé à exporter vers un pays peut décider de maintenir sa présence dans ce pays en y effectuant des IDE. Ils montrent en particulier que la probabilité de créer des filiales à létranger est dautant plus forte que lentreprise a acquis, via lexportation, des connaissances sur les structures et le marché du pays daccueil.

Lopinion des chefs dentreprise français de lindustrie

LINSEE, en collaboration avec le Comité National des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CNCCEF), a publié en 2008 les résultats dune enquête réalisée auprès de 4000 entreprises industrielles de plus de vingt salariés[16].

Les industriels sont un tiers à estimer que le développement des implantations à létranger est très important pour léconomie française dans son ensemble, mais ils sont moins nombreux (un peu plus dun industriel sur dix) à exprimer ce jugement sagissant de leur propre entreprise. Le développement de leurs implantations à létranger est en particulier considéré comme très important par les entreprises de lindustrie automobile, les entreprises de plus de 250 salariés, et les entreprises fortement exportatrices.

Entre 2002 et 2007, 12 % des entreprises industrielles déclarent avoir développé de nouvelles activités de production à létranger, et autant dentreprises disent avoir déplacé à létranger des activités de production auparavant réalisées en France. Les entreprises de plus de 250 salariés ou fortement exportatrices sont plus particulièrement concernées.

Selon les chefs dentreprise, le développement à létranger devrait se poursuivre au cours des prochaines années, via notamment linstallation de nouvelles capacités de production. Un peu plus de 20 % des entreprises industrielles prévoient de créer de nouvelles activités à létranger. Le transfert à létranger dactivités de production existantes se poursuivrait également au cours des prochaines années. Il concernerait près de 16 % des entreprises industrielles contre 12 % sur la période 2002-2007. Dans les deux cas, le phénomène dexternalisation demeure toujours plus marqué pour les entreprises de plus de 250 salariés ou fortement exportatrices. Les secteurs des biens déquipement et de lautomobile sont également davantage concernés.

Parmi les entreprises industrielles qui ont développé des activités de production à l'étranger ou qui envisagent de le faire dans les prochaines années, deux tiers dentre elles jugent très importante la possibilité de réduire les coûts salariaux. Près de la moitié évoque le fait de se rapprocher des clients. Suit, pour un peu plus de deux entreprises industrielles sur cinq, laccès à une réglementation plus souple et à une imposition plus avantageuse. Pour les entreprises de plus de 250 salariés, la proximité des clients devient le critère principal, avant même la possibilité de réduire les coûts salariaux.

Les autres facteurs sont jugés de moindre importance, à lexclusion toutefois de laccès à des ressources supplémentaires (matières premières...) pour les entreprises du secteur agroalimentaire ou de la possibilité dopérer dans une autre devise que leuro pour les entreprises du secteur des biens déquipement.

Au vu de leurs perceptions, limportance de ces déterminants devrait assez généralement se renforcer au cours des prochaines années, notamment en ce qui concerne la possibilité daccéder à une réglementation plus souple, opinion davantage exprimée par les entreprises de moins de 100 salariés, ou encore à des ressources supplémentaires.


Impact des IDE

Sur le commerce international

Les IDE comme substituts aux échanges

R.A. Mundell[17] (1957) est lun des premiers à avoir étudié les investissements internationaux dans le cadre de la théorie de léchange international. Son analyse reste dans la logique du modèle dHeckscher et Ohlin déchanges liés aux différences dabondances relatives des facteurs.

Si les pays échangent des produits, cest parce que, initialement, les facteurs de production sont immobiles. A linverse, si les facteurs sont mobiles internationalement (en particulier le capital) et le commerce des produits fortement limité (sinon empêché) par des obstacles tarifaires ou par des coûts de transport élevés (conditions de lIDE horizontal), les IDE apparaissent comme des substituts au commerce de marchandises.

La rémunération du capital étant plus élevée dans le pays qui est le moins bien doté en capital, il sopère un mouvement de capitaux du pays qui en détient relativement le plus vers celui il est rare. Ce dernier va alors produire davantage de biens intensifs en capital, biens quil importait auparavant. Les IDE se substituent ainsi aux importations et les dotations relatives en facteurs de production se rapprochent les unes des autres. Avec ce transfert de capital, les avantages comparatifs peuvent être amenés à disparaître, entraînant larrêt du commerce. LIDE horizontal est alors destructeur du commerce international.

La complémentarité entre IDE et échanges

K. Kojima[18] (1978) prend appui sur les IDE japonais dans les pays en développement pour souligner laspect complémentaire entre IDE et commerce international de marchandises, en introduisant une différence de technologie entre les pays.

Largument de Kojima peut se résumer de la façon suivante : il considère deux pays, un pays développé, abondant en capital et ayant un avantage comparatif dans la production de machines, et un pays en développement, intensif en travail et ayant un avantage comparatif dans la production de textile. Compte tenu dune faible demande internationale de textile, le prix international du textile se trouve être égal à celui qui prévaut dans le pays en développement : ce dernier na donc aucun intérêt à exporter et il ny a pas de commerce international.

Cependant, le capital et la technologie étant spécifiques à chaque secteur, les firmes du textile dans le pays développé auront un avantage à se délocaliser dans le pays en développement la main dœuvre est moins chère. Le transfert du capital et de la technologie améliore alors la productivité de lindustrie textile dans le pays en développement, abaisse ses coûts de production qui deviennent inférieurs au prix international. Le pays en développement a alors intérêt à exporter du textile et à importer des machines. LIDE est ainsi créateur déchange.

Plus généralement, il apparaît que, dans le cas des IDE verticaux les firmes multinationales répartissent leurs activités entre les pays en fonction des différents avantages comparatifs, IDE et commerce international peuvent être complémentaires, notamment en accroissant les échanges intra-firmes.

Vérifications empiriques

A la suite de R.E. Lipsey et M.Y. Weiss[19] (1981) sur les États-Unis ou R. Svensson[20] (1996) sur la Suède, S. Chédor et J.L. Mucchielli[21] (1998) ont étudié les relations entre IDE et commerce international pour les entreprises françaises.

Globalement et toutes zones confondues, la création de filiales dans le pays vers lequel les entreprises exportent, a un effet positif sur les exportations. Leffet de complémentarité entre IDE et commerce international serait donc plus important que leffet de substitution. Néanmoins, ce phénomène apparaît variable dun pays à lautre, la complémentarité la plus forte étant constatée pour les pays industrialisés.

L. Fontagné et M. Pajot[22] (1999) ont également établi que, sur la période 1984-1994, chaque fois que la France investissait un dollar à létranger, cet IDE entraînait près de 55 centimes dexportation et 24 centimes dimportation dans lindustrie considérée et vis-à-vis du partenaire considéré. Ainsi, lIDE sortant se traduit par une amélioration du solde commercial de la France. A linverse, lIDE entrant entraîne une dégradation du solde commercial dans la mesure il augmente davantage les importations que les exportations.

N. Madariaga[23] (2010) a actualisé ces résultats en étudiant la relation entre IDE et commerce extérieur de la France sur la période 2002-2008. Elle met en évidence que :

  • le lien de complémentarité entre IDE sortant et importation se vérifie mais est très fortement atténué par rapport à celui identifié par Fontagné et Pajot sur la période 1984-1994. Quant au lien entre IDE sortant et exportation, il a pratiquement disparu ;
  • la complémentarité entre IDE entrant et flux de commerce est nettement plus marqué, ce lien positif étant légèrement plus important pour les importations que pour les exportations.

Létude de K. Head et J. Ries[24] (2001), réalisée à partir dun panel de plus de 900 entreprises japonaises sur 25 ans, confirme par ailleurs que la complémentarité entre IDE et exportations est avérée pour les entreprises simplantant sur un mode vertical alors quelle ne lest pas pour celles simplantant sur un mode horizontal.

Sur la croissance et lemploi

Du pays daccueil des IDE

Au-delà de son impulsion macro-économique initiale sur le stock de capital, lIDE influence positivement la croissance du pays daccueil en améliorant la productivité totale des facteurs, grâce au transfert de technologie accompagnant lIDE. P. Romer[25] (1993) souligne que lIDE entrant peut faciliter les transferts de technologie et de savoir-faire en gestion dans le pays daccueil, non seulement dans les filiales investies, mais aussi dans lensemble des entreprises du pays daccueil par des phénomènes de diffusion. LIDE entrant doit également faciliter laccès au marché dexportation et contribuer à une amélioration de la compétitivité des entreprises locales.

Un grand nombre détudes empiriques a tenté de mettre en évidence cet effet positif. Comme le souligne P.R. Agenor[26] (2003), elles nont guère fourni de résultats concluants sur ces éventuels effets de diffusion. D. Rodrik[27] (1999) sinterroge sur les politiques mises en place pour attirer les IDE alors même que les résultats concrets de leur impact positif sur la croissance manquent.

Pour quun effet positif existe, il semble nécessaire quun certain nombre de conditions soit réuni. Ainsi, Borensztein, de Gregorio et Lee[28] (1998) précisent que lIDE entrant a un effet positif sur la croissance du pays daccueil à condition que la population de ce dernier ait un niveau déducation suffisamment élevé pour pouvoir diffuser les transferts de technologie à lensemble de léconomie. Si Blomström, Lipsey et Zejan[29] (1994) ne confirment pas le rôle essentiel de léducation, ils mettent en avant que lIDE entrant naura un effet positif sur la croissance que si le pays daccueil est déjà suffisamment riche. Alfaro et al.[30] (2003) soulignent quant à eux la nécessité de marchés financiers suffisamment développés, tandis que Balasubramanyam, Salisu et Spasford[31] (1996) insistent sur louverture du pays daccueil aux échanges commerciaux. Étudiant limpact des IDE sur la croissance économique dans les pays du Moyen-Orient et dAfrique du nord, Sadni Jallab et al.[32] mettent en avant limportance de la stabilité macroéconomique (mesurée par le taux dinflation) comme condition à lexistence dun impact positif des IDE entrants sur la croissance économique du pays daccueil. Alfaro[33] (2003) met en évidence des effets différenciés selon le secteur dactivité de la filiale investie : ainsi, lIDE entrant dans le secteur primaire (agriculture et industries extractives) tend à avoir un impact négatif sur la croissance alors que leffet est positif dans lindustrie manufacturière (et ambigu dans les services). Leffet négatif constaté pour le secteur primaire est attribué au fait que les bénéfices liés à la diffusion des transferts technologiques sont limités pour lagriculture et les industries extractives.

Étudiant les IDE entrants en France, L. Fontagné et F. Toubal[34] (2010) mettent en évidence que :

  • Les filiales françaises de groupes étrangers sont plus efficaces que les autres entreprises françaises. Ces auteurs observent cependant que, si tel est le cas, cest en particulier parce que les groupes étrangers acquièrent des entreprises françaises plus performantes que la moyenne ;
  • Globalement cependant, limpact de lacquisition étrangère semble bien être positif sur les entreprises françaises acquises, quil sagisse de leur effectif, de leur productivité ou de leur activité. Seule leur propension à exporter sinscrit en baisse, sans doute parce quune fois acquise par un groupe étranger, lentreprise française perd son autonomie dexportation, au profit dautres filiales du groupe dans le cadre dun redéploiement de lactivité dexportation.

Du pays investisseur

L. Fontagné et F. Toubal[34] (2010) distinguent deux effets de lIDE pour le pays investisseur :

  • un effet substitution : si lIDE réplique lactivité domestique (IDE horizontal), il diminue la croissance et lemploi dans le pays investisseur. Une baisse des salaires dans le pays investi incitera la firme multinationale à substituer du travail étranger au travail domestique, lentreprise multinationale élargissant son activité à létranger aux dépens de lactivité domestique
  • un effet revenu, permettant de compenser (en totalité ou non) limpact négatif de leffet substitution : limplantation à létranger donne accès à de nouveaux marchés ou à de nouveaux facteurs, et ceci aura tendance à accroître les ventes de la firme multinationale, y compris des unités localisées dans le pays de la maison-mère.

Aux effets quantitatifs constatés sur la croissance et lemploi, lIDE sortant est également supposé favoriser un accroissement du niveau de qualification des postes de travail dans le pays investisseur.

LIDE sortant est enfin susceptible daccroître la volatilité de lemploi dans les entreprises sétant implantées à létranger. Les firmes multinationales peuvent en effet arbitrer entre leurs différentes implantations (locales et à létranger) et faire évoluer (plus facilement que les entreprises ne sétant pas internationalisées) leurs effectifs employés localement pour sadapter aux chocs conjoncturels.

De nombreuses études empiriques ont mis en évidence lexistence dun effet substitution : A. Harrison et M. McMillan[35] (2009) estiment quune baisse de 0,1 % des salaires dans les pays à bas coûts réduit lemploi de 1 % dans la maison-mère aux États-Unis. S.O. Becker et al.[36] (2005) évaluent que limpact dune baisse de 1 % des salaires en Europe de lOuest détruit 2600 emplois en Allemagne et crée 5000 emplois en Europe de lOuest, au sein des filiales des multinationales allemandes. Limpact semble plus faible pour les pays à bas salaires : ainsi, la réduction de 1 % des salaires en Europe de lEst détruit 950 emplois en Allemagne. Une réduction similaire des salaires dans les autres pays en développement ne détruit que 170 emplois en Allemagne.

Exploitant un panel dentreprises françaises sur la période 1994-2000, G. Barba Navaretti et al.[37] (2006) montrent que les entreprises ayant effectué des IDE sortants enregistrent de meilleures performances en termes demploi en France que pour les entreprises ne sétant pas multinationalisées, à condition que limplantation ne se soit pas faite dans un pays à bas salaires ; dans ce dernier cas en effet, leffet de substitution annule leffet revenu. Toujours pour les entreprises françaises, A. Hijzen et al.[38] (2009) arrivent à la conclusion selon laquelle leffet revenu lemporte sur leffet substitution dès que lIDE sortant renforce les avantages compétitifs initiaux : les deux effets se compensent dans le cas lIDE est réalisé vers des pays à bas salaires par des entreprises françaises appartenant à des secteurs peu ou pas compétitifs. Enfin, L. Fontagné et F. Toubal[34] (2010) montrent que :

  • Seules les entreprises françaises les plus productives réalisent des IDE sortants (et parmi celles-ci, les filiales françaises de groupes étrangers qui effectuent un IDE à létranger sont encore plus performantes que les autres).
  • Suite à un IDE, lemploi, les ventes et la propension à exporter de linvestisseur français augmentent, leffet revenu lemportant sur leffet substitution. Par contre, la productivité en France naugmente pas, ce qui suggère que lIDE sortant ne permet pas de bénéficier dun effet dapprentissage. Ces effets positifs napparaissent cependant pas lorsque linvestisseur français est lui-même une filiale dun groupe étranger.
  • Lemploi des groupes en France augmente avec leur activité à létranger, en particulier dans les pays à haut et à moyen revenu. Cet effet positif caractérise surtout les IDE effectués dans les industries manufacturières.

Sur les conditions de travail dans les pays daccueil

Une partie des IDE ayant pour objet de tirer parti de lexistence de bas salaires ou de conditions de travail moins favorables aux salariés dans certains pays étrangers, les firmes multinationales sont parfois accusées de concurrence déloyale. On leur reproche également de fermer les yeux sur les violations des droits de lhomme et des droits des travailleurs dans les pays en développement les autorités ne font pas véritablement respecter ces droits. Certains pays, désireux dattirer le plus possible dIDE, sont parfois accusés de recourir au dumping social. Dans le même temps, les IDE peuvent exercer des effets à la fois sur les salaires du pays daccueil et sur les conditions de travail non salariales. Dans chaque cas, on peut distinguer des effets directs (sexerçant dans les filiales détenues par des investisseurs étrangers) et des effets indirects (qui touchent les salariés des entreprises locales).

Impact sur les salaires

Effets directs

Pendant plusieurs années, des études ont semblé montrer que les filiales appartenant à des groupes étrangers versaient des salaires plus élevés à leurs employés que leurs homologues locales, en particulier dans les pays en développement. Ainsi, dans une étude consacrée au Mexique, aux États-Unis et au Venezuela, B. Aitken et al.[39] (1996) mettent en évidence que le salaire moyen dans les entreprises étrangères tend à être supérieur denviron 30 % à celui des entreprises locales. La limite de cette étude consiste cependant à comparer des salaires demployés qui peuvent appartenir à des catégories différentes. Ainsi, si les filiales étrangères emploient moins douvriers (traditionnellement moins bien payés que les autres catégories de travailleurs) que les filiales locales, il est normal de constater des salaires moyens plus élevés chez les premières. R.E. Lipsey et F. Sjöholm[40] (2004) ont essayé de neutraliser lécart salarial relatif à la différence de composition de la main dœuvre. Ils constatent que dans les filiales de groupes étrangers, les salaires moyens ne sont plus supérieurs que de 12 % pour les ouvriers et de 20 % pour les autres catégories de travailleurs. Des résultats similaires ont été présentés pour cinq pays dAfrique sub-saharienne par O. Morrissey et D.W. Te Velde[41] (2003). Cet écart entre salaire moyen dans les filiales de groupes étrangers et entreprises locales semble cependant amoindri lorsque la filiale est le résultat dune fusion-acquisition (lentreprise faisant partie dun groupe étranger à la suite dun rachat et non à la suite de la création dune société entièrement nouvelle), ce phénomène étant plus particulièrement marqué dans les pays développés (cf. les études de F. Heyman et al.[42] (2007) sur la Suède ou S. Girma et H. Görg[43] (2007) sur le Royaume-Uni). Un dernier élément à prendre en compte dans ce type de comparaison consiste à neutraliser la potentielle amélioration des qualifications des travailleurs (quelle que soit la catégorie à laquelle ils appartiennent) que peut entraîner lappartenance à un groupe étranger, amélioration qui se traduirait par une surestimation de lécart des salaires qui doit être mesuré à qualification équivalente. De fait, il semblerait que, si on compare des salaires individuels de personnes ayant un même niveau de qualification, les fusions-acquisitions dans les pays développés ont au mieux un effet faiblement positif sur le salaire individuel, voire un effet négatif. M. Andrews et al.[44] (2007) pour lAllemagne, N. Malchow-Moller et al.[45] (2007) pour le Danemark ou R. Balsvik[46] (2006) pour la Norvège, calculent que lécart de salaire entre les employés de filiales de groupes étrangers et ceux dentreprises locales est compris entre 1 % et 3 %. P. Martins[47] (2004) et Heyman et al.[42] (2007) mettent en évidence des écarts négatifs de salaires dans les filiales de groupes étrangers au Portugal et en Suède respectivement.

Dans une étude consacrée à limpact social de lIDE dans les pays daccueil, lOCDE[48] (2008) a analysé les effets des prises de contrôle étrangères sur les salaires moyens pour deux économies émergentes (Brésil et Indonésie) et trois pays de lOCDE (Allemagne, Portugal et Royaume-Uni). Il apparaît que les acquisitions par létranger dentreprises locales permettent daugmenter les salaires moyens dans les entreprises concernées, laugmentation étant plus marquée les économies émergentes (11 % au Brésil, 19 % en Indonésie) que dans les pays développés ( il est compris entre 3 % et 8 %). Les résultats obtenus au niveau des salaires individuels à la suite de fusions-acquisitions montrent en outre que leffet positif des IDE consiste davantage à offrir de meilleures possibilités demploi aux nouveaux recrutés quà offrir un meilleur salaire aux travailleurs restant en place dans des entreprises qui changent de propriétaire. Enfin, les entrées dIDE sont susceptibles daggraver les inégalités de rémunération dans le pays daccueil (notamment lorsquil sagit dun pays en développement), en poussant à la hausse les salaires relatifs des travailleurs qualifiés.

Effets indirects

Les effets indirects des IDE sur les salaires consistent en la répercussion des IDE sur les conditions salariales des entreprises locales, qui ne sont pas détenues par des actionnaires étrangers. Ils empruntent deux canaux de transmission différents :

  • le premier est lié à la diffusion des progrès de productivité introduits par les multinationales vers les entreprises locales. En effet, selon H. Görg et D. Greenaway (2004)[49]
    • les entreprises locales peuvent décider daméliorer leur productivité en appliquant les processus de production et les méthodes de gestion des filiales étrangères
    • les travailleurs qui passent dune filiale de groupe étranger vers une entreprise locale peuvent faire bénéficier leur nouvel employeur de leur expérience accumulée dans la filiale de la multinationale étrangère
    • les filiales étrangères peuvent demander à leurs fournisseurs locaux dadopter leurs pratiques en termes de production ou de gestion (respect de normes de qualité par exemple)
    • lintensification de la concurrence consécutive à larrivée des filiales de groupes étrangers peut contraindre les entreprises locales à sadapter le plus possible aux méthodes de production introduites par les multinationales
  • le second tient aux effets de larrivée de filiales étrangères sur le marché du travail local :
    • en premier lieu, les filiales de groupes étrangers vont mécaniquement augmenter la demande de travail, ce qui devrait exercer une pression à la hausse des salaires locaux
    • en outre, si les filiales de groupes étrangers paient des salaires plus élevés que les entreprises locales, les travailleurs locaux vont préférer travailler dans filiales de multinationales, ce qui tendra à réduire loffre de travail à lattention des entreprises locales qui se verront contraintes de relever leurs salaires afin de rester attractives

Les études empiriques fournissent des résultats contrastés : si Aitken et al.[39] (1996) ne mettent pas évidence de retombées salariales positives de lIDE sur les entreprises locales au Mexique et au Venezuela, il nen est pas de même pour N. Driffield et S. Girma[50] (2003) pour le Royaume-Uni ou J.P. Poole[51] pour le Brésil. Selon létude de lOCDE[48] (2008) menée sur lAllemagne, le Royaume-Uni, le Portugal, le Brésil et lIndonésie, il semble bien quil existe un effet indirect positif des IDE sur les salaires des entreprises locales, mais cet effet est dune ampleur beaucoup plus limitée que leffet direct sur les salaires dans les filiales des multinationales. En outre, cet effet direct découlerait bien plus des répercussions des IDE sur le marché du travail du pays daccueil que de la diffusion aux entreprises locales de progrès de productivité.

Impact sur les conditions non salariales

Selon l'OCDE[52], « les conditions de travail non salariales ne saméliorent pas nécessairement après une prise de contrôle étrangère ». Ainsi, les firmes multinationales ne semblent pas avoir tendance à exporter leurs conditions de travail autres que le salaire (telles que la formation, le temps de travail ou la stabilité de lemploi) à létranger.

Au contraire, elles ont tendance à adopter les pratiques locales[53]. N. Bloom et al.[54] (2008) analysent, sur la base de données denquête sur les méthodes de management et de conciliation vie professionnelle-vie privée pour plus de 700 entreprises de taille moyenne en Allemagne, aux États-Unis, en France et au Royaume-Uni, dans quelle mesure les multinationales américaines exportent certaines pratiques vers leurs filiales en Europe. Ils établissent que si les multinationales américaines exportent leurs pratiques de management, elles nexportent pas leurs pratiques en matière de conciliation vie professionnelle-vie privée. R. Freeman et al.[55] (2007) comparent les pratiques de travail dans les filiales locales et étrangères dune entreprise américaine donnée dans différents pays et constatent eux aussi que les entreprises américaines adaptent dans une large mesure leurs pratiques à ce qui se fait dans le pays daccueil. Cette faible propension des multinationales américaines à exporter leurs pratiques de travail serait au fait que:

  • Premièrement, les conditions de travail sont soumises à des règles et normes sociales nationales. Limportante réglementation du marché du travail qui existe dans beaucoup de pays européens et le rôle majeur des syndicats dissuaderaient les multinationales américaines dexporter en Europe leurs pratiques sociales.
  • Deuxièmement, la faible propension des multinationales américaines à exporter leurs pratiques de travail pourrait être due à des considérations stratégiques. Ainsi, les filiales locales tournées vers le marché intérieur tendent à être beaucoup plus discrètes sur la gestion de leurs ressources humaines que les entreprises plus orientées vers lexportation.
  • Enfin, la faible propension des multinationales américaines à exporter leurs pratiques de travail pourrait tenir à un style de management qui leur est propre et ne serait donc pas représentative des multinationales dautres pays. Néanmoins, dans un rapport publié en 2010[56], l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch dénonce « les campagnes agressives menées par certaines firmes multinationales européennes pour empêcher leurs employés aux États-Unis de s'organiser et de négocier, en violation des normes internationales, voire souvent du droit du travail américain ». Parmi les pratiques identifiées comme autant de violations à la liberté d'association, le rapport cite le fait de contraindre les salariés à assister à des réunions pour écouter des harangues anti-syndicalistes tout en interdisant toute prise de parole en faveur des syndicats, de menacer les salariés de conséquences néfastes s'ils se constituent en syndicats, de menacer de remplacer définitivement les salariés qui exercent leur droit de grève, d'espionner les militants syndicaux, et même de licencier les salariés qui tentent de s'organiser au sein des entreprises. Ainsi, quelles soient dorigine américaine ou européenne, les multinationales ne semblent pas particulièrement désireuses daméliorer les conditions de travail dans leurs filiales étrangères et préfèrent sadapter, dans le meilleur des cas, aux législations du pays daccueil.

Peu d'études sont disponibles sur la propension des multinationales à exporter leurs pratiques de travail vers les pays en développement. Dun côté, elles pourraient être dautant moins incitées à le faire que la mise en application de la réglementation du travail et le rôle des syndicats tendent à être plus faibles dans les pays en développement. De lautre, les consommateurs et les investisseurs des pays développés pourraient trouver inacceptables les pratiques sociales appliquées dans les filiales implantées dans les pays en développement, et exerceraient alors une pression sur les multinationales pour que celles-ci exportent leurs pratiques en matière de ressources humaines.


Sur lenvironnement

M. Hübler et A. Keller (2010)[57] établissent que les effets des IDE sur la consommation dénergie et la pollution peuvent être décomposés en 3 éléments :

  • un effet déchelle : dans la mesure les IDE tendent à augmenter lactivité économique, la consommation dénergie et la pollution qui lui sont liées tendent également à sélever
  • un effet de composition : les IDE auront un effet différent selon que les secteurs vers lesquels ils sorientent sont plus ou moins polluants ou consommateurs dénergie
  • un effet technologique : les filiales créées par les IDE peuvent être plus ou moins polluantes ou consommatrices dénergie que les entreprises locales du pays daccueil des IDE

Les aspects les plus importants et les plus controversés des effets des IDE sur lenvironnement sont relatifs à leffet technologique. Deux théories saffrontent en effet :

Les IDE comme vecteurs de diffusion de technologies plus propres

Les IDE peuvent permettre une diffusion efficace et plus rapide de technologies propres permettant ainsi une meilleure protection de lenvironnement. LOCDE[58] (2002) met en avant que les technologies qui sont transférées par les IDE sont généralement plus modernes et « plus propres » du point de vue environnemental, que celles qui sont localement disponibles. K. Gallagher et L. Zarsky (2007)[59] soutiennent que les IDE sont susceptibles davoir des effets positifs sur lenvironnement du pays daccueil pour 3 raisons. Ils permettent :

  • un transfert de technologies plus propres (moins polluantes ou plus économes en ressources) comparées à celles disponibles initialement dans le pays daccueil
  • un bond technologique permettant au pays daccueil daccéder immédiatement aux technologies les plus propres
  • une diffusion de ces technologies plus propres aux entreprises locales, que ces dernières soient des fournisseurs, des concurrents ou des clients des filiales créées par lIDE.

Tous ces effets positifs sont possibles parce que :

  • les firmes multinationales sont généralement plus avancées et dynamiques sur le plan technologique que les entreprises locales
  • les firmes multinationales sont soumises à des normes environnementales plus strictes dans leur pays dorigine, en raison de la législation et de la pression des consommateurs ou dorganisations non gouvernementales comme lont montré B.S. Gentry (1999)[60] ou C. Kauffmann et C. Tebar Less (2010)[61]
  • les firmes multinationales ont tendance à homogénéiser les normes environnementales pour lensemble de leurs processus productifs, quils soient localisés. L. Zarsky et K. Gallagher (2008)[62] mettent en avant quil serait en effet coûteux pour les multinationales de gérer des processus de production répondant à des normes environnementales différentes selon les pays
  • enfin, N. Johnstone (2007)[63] établit que plus une entreprise est de grande taille et plus elle accorde dattention à son empreinte environnementale, et les firmes multinationales ont justement tendance à être de grande taille

Des études empiriques semblent avoir mis en évidence cet effet positif des IDE sur lenvironnement en Chine[64], ou dans différents pays du Sud dans le secteur de l'extraction minière[65]. Cet effet technologique est positif pour l'environnement local, surtout s'il s'accompagne de transferts durables de savoir-faire.

Les délocalisations des industries polluantes

Néanmoins, on peut citer des cas les entreprises multinationales ont déplacé des installations polluantes de leur pays dorigine vers leurs filiales implantées à létranger (et notamment dans des pays en développement). Il semble ainsi que la disparité des réglementations environnementales entre les États-Unis et le Mexique ait favorisé certaines délocalisations. N. Mabey et R. McNally[66] (1999) estiment par exemple que l'absence de réglementation relative à la qualité de l'air a fortement encouragé la production de solvants au Mexique. H.J. Léonard[67] (1988) a montré que la production de produits chimiques dangereux, interdits ou fortement réglementés aux États-Unis, tels les pesticides, s'était fortement accrue au Mexique. Le même auteur indique que les travailleurs mexicains sont exposés à certaines substances chimiques nocives, telles les fibres d'amiante, auxquelles les travailleurs américains ne sont plus exposés.

Les pays désireux dattirer les IDE sont également susceptibles de pratiquer un dumping environnemental en créant des « havres de pollution » (pollution havens en anglais). Jha et al.[68] (1999) notent qu'au Zimbabwe, le Mines and Minerals Act jouissait d'une force juridique supérieure à celle des autres lois, y compris les textes environnementaux, ce qui avait pour effet d'exempter le secteur minier du respect des normes environnementales de droit commun. Ils observent aussi qu'en Indonésie ou en Papouasie-Nouvelle-Guinée, l'exploitation minière n'était soumise à quasiment aucune réglementation. L'exploitation minière en Indonésie opérait sous le régime de contrats de concession, qui exemptaient généralement les entreprises du respect des normes environnementales existantes.

Dans ces conditions, les pays victimes des délocalisations seraient découragés de renforcer leurs normes environnementales, et pourraient même s'engager dans une « course au moins-disant » environnemental (race to the bottom en anglais) pour retrouver un avantage comparatif dans certaines productions industrielles. E. Neumayer (2001)[69] craint ainsi que les pays en développement nétablissent aucune norme environnementale, ou quils ne légifèrent que sur des normes limitées, ou quils ne veillent pas au respect de normes plus rigoureuses.

Études empiriques

Jusquà présent, les études empiriques ne fournissent guère de résultats permettant daffirmer que les pays développés délocalisent de façon significative leurs industries polluantes vers les pays en développement. Ainsi, R. Repetto[70] (1995) a analysé les IDE des États-Unis en 1992. Il constate que la part des pays en développement et en transition dans ces flux est de 45 %, mais que leur part des IDE dans des industries polluantes (pétrole et gaz, produits chimiques et connexes, métallurgie) est bien inférieure : seuls 5 % des IDE reçus par les pays en développement concernent ces secteurs, contre 24 % des IDE destinés aux pays développés. Il semble donc que les pays développés délocalisent leurs industries polluantes principalement vers d'autres pays développés.

Ce résultat a été confirmé par J. Albrecht[71] (1998), qui a examiné les IDE entrants et sortants des États-Unis. Il montre que la croissance des IDE sortants est plus forte pour les industries « propres » que pour les industries polluantes. Il obtient le résultat inverse pour les IDE entrants aux États-Unis. En d'autres termes, les États-Unis semblent accueillir davantage d'industries polluantes qu'ils n'en délocalisent.

De même, G.S. Eskeland et A.E. Harrison[72] (2003) ont examiné si lIDE dans les pays en développement était concentré sur des industries polluantes, analysant la situation du Mexique, du Venezuela, de la Côte-d'Ivoire et du Maroc durant les années 1980. Les deux premiers de ces pays reçoivent l'essentiel de leurs IDE des États-Unis, et les deux autres de la France. Ils n'ont trouvé aucun élément tendant à montrer que ces investissements privilégiaient les secteurs polluants. Ils ont vérifié leurs conclusions en estimant l'effet du coût de la réduction de la pollution sur les IDE des États-Unis à l'étranger de façon générale et ont constaté que les entreprises américaines, qui doivent engager les frais de lutte antipollution les plus élevés aux États-Unis, n'investissent pas plus à l'étranger que la moyenne.

Ces résultats sont justifiés par le fait que les coûts de mise en œuvre des normes environnementales apparaissent, le plus souvent, comme un déterminant assez secondaire des choix d'implantation des entreprises. Ainsi, A. Levinson[73] (1996) montre que les différences de normes environnementales entre pays naffectent pas les décisions dimplantation des firmes multinationales. Selon cet auteur, en plus de 20 ans de recherche empiriques sur cette question, il na pas été possible de démontrer de façon convaincante que des normes environnementales strictes étaient à lorigine de délocalisations ou que des normes laxistes attiraient les IDE.

Néanmoins, les craintes de délocalisations des industries polluantes semblent bien avoir conduit à une certaine « paralysie réglementaire » (cest-à-dire au refus des pouvoirs publics d'édicter des normes plus contraignantes, de crainte de nuire à la compétitivité nationale). Ainsi en 1992, la Commission européenne a présenté une proposition de taxation du dioxyde de carbone. Cette proposition était subordonnée à l'adoption de taxes similaires par les principaux partenaires commerciaux de l'Union européenne. Toutefois, les initiatives prises à cet effet, aux États-Unis, en Australie, ou au Japon, ont été combattues, avec succès, par les représentants des industriels qui ont soutenu que cette mesure nuirait à leur compétitivité par rapport aux pays ne prenant pas part à l'initiative (pays émergents notamment). En définitive, la proposition a été retirée.

En 1995, l'industrie britannique des peintures a obtenu l'abandon d'une loi qui l'aurait forcée à réduire ses émissions de composés organiques volatils, cause majeure du smog urbain et de problèmes respiratoires. encore, l'argument était que cette loi pénaliserait l'industrie par rapport à la concurrence internationale.

En mai 2003, la Commission européenne a déposé un premier projet visant à réglementer l'industrie chimique ; l'objectif de la réforme était de mettre en place un système complet d'enregistrement, d'évaluation et d'autorisation pour les substances chimiques, avec obligation pour les industriels de démontrer que leurs produits sont sûrs pour la santé humaine et pour l'environnement. Suite aux vives critiques des industriels allemands, français et britanniques, qui ont évoqué des surcoûts excessifs pour leur activité, et le risque de nombreuses suppressions d'emplois, le projet de la Commission a été profondément remanié. La Commission a également faire face à un lobbying intense des États-Unis, qui craignaient pour leurs exportations vers l'Union européenne. Un nouveau projet fut présenté à la fin de l'année 2003, avec un champ d'application et des objectifs plus restreints.

Léchec du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique qui sest tenu du 7 au 18 décembre 2009 peut être interprété comme une manifestation supplémentaire de cette paralysie règlementaire inspirée par la crainte des délocalisations dans les pays développés, mais aussi par la volonté des pays en développement de poursuivre leur développement (y compris en attirant des industries polluantes).


Recommandations de politique économique dans le domaine des IDE

Dans le pays daccueil

Comme le notent S. Globermann et V. Z. Chen[74] (2010), les mesures de politique économique ayant trait aux IDE sattachent à deux objectifs principaux pour les pays daccueil : le premier est de maximiser les bénéfices attendus des IDE tout en limitant le plus possible leurs inconvénients potentiels. Une fois créé cet environnement favorable, la question se pose de savoir comment attirer le plus possible dIDE dans le pays. LOCDE[58] (2002), souligne en effet que « les avantages nets de lIDE ne sont pas automatiques ». Afin de tirer profit au maximum de limplantation de filiales étrangères, cette organisation internationale recommande au pays daccueil de mettre en œuvre trois types de mesures :

  • améliorer le contexte macro-économique et institutionnel général
  • créer un cadre règlementaire propice aux entrées dIDE
  • améliorer les infrastructures, la technologie et les compétences humaines.

Créer les conditions pour que les IDE soient profitables

Favoriser la diffusion à l'ensemble de l'économie des progrès liés aux IDE

Afin de bénéficier au maximum des avantages des IDE, les autorités publiques du pays daccueil doivent avoir pour objectif daméliorer la capacité dabsorption des progrès technologiques par les entreprises locales. Au moins trois mesures de politique économique peuvent être recommandées dans ce cadre :

  • élever le niveau déducation et dexpertise technique de la population, et encourager les activités locales de recherche et de développement
  • accroître le degré de concurrence afin dinciter les entreprises locales à mettre en œuvre les innovations technologiques introduites par les filiales de groupes étrangers (même si une concurrence accrue conduit dans le même temps à réduire les bénéfices attendus de lintroduction de ces nouvelles techniques)
  • inciter (voire obliger) les filiales des groupes étrangers à partager avec les entreprises locales leurs techniques de production ou de gestion. Ainsi, certains pays daccueil nautorisent une fusion-acquisition que si le groupe acquéreur sengage à maintenir dans sa filiale le même niveau de dépenses de recherche et de développement. Les autorités doivent cependant veiller dans ce cas à ne pas dissuader les investisseurs potentiels par des mesures trop coercitives.
Mettre en place des restrictions aux IDE afin de préserver lindépendance nationale

Même sil est difficile de trouver dans la littérature économique beaucoup darguments permettant de défendre la mise en place de restrictions aux IDE entrants afin de préserver lindépendance nationale, force est de constater que ces mesures sont adoptées par un très grand nombre de pays. Ainsi, les attaques terroristes du 11 septembre 2001 ont modifié la perception de nombreux hommes politiques américains concernant le rôle et les risques des IDE entrants. Certains membres du Congrès ont alors demandé la révision des lois et des politiques sur les IDE entrants aux États-Unis afin daccroître la surveillance du gouvernement fédéral sur les IDE dans certains secteurs économiques considérés comme particulièrement sensibles pour la sécurité nationale. Ces secteurs sont les télécommunications, lénergie, les services financiers, leau, les activités de transport, ainsi que les services dinfrastructures physiques ou virtuelles indispensables à la préservation de la défense nationale, la continuité du gouvernement, la prospérité économique et la qualité de vie aux États-Unis. Afin de mesurer limportance des obstacles dressés par les pays daccueil devant les IDE, lOCDE[75],[76] (2003) (2010) calcule un indice mesurant louverture des pays aux IDE basé sur lidentification de quatre grands types de restrictions :

  • les limitations des prises de participation étrangères au capital
  • les filtrages et autorisations administratives obligatoires
  • les restrictions imposées à la gestion, à lexploitation et aux mouvements de personnel entre les pays
  • les autres restrictions aux opérations des filiales de groupes étrangers

Actualisé en 2010 et calculé sur près de cinquante pays, cet indice met en évidence que le pays le plus ouvert aux IDE entrants serait le Luxembourg, suivi des Pays-Bas et du Portugal. La France est classée au treizième rang, devant le Royaume-Uni (17e) ou les États-Unis (33e). Les pays qui dresseraient le plus dobstacles devant les IDE entrants (parmi ceux pour lesquels lindice a été calculé) seraient la Russie, lIslande et la Chine.

Attirer les IDE

Plusieurs mesures de politique économique peuvent être recommandées afin de maximiser le volume dIDE entrants :

  • Établir et maintenir des systèmes légaux et règlementaires de protection des droits de propriété, créer des règles de fonctionnement des marchés transparentes et justes et minimiser les charges et autres conséquences négatives de la réglementation
  • Mettre en œuvre des politiques macroéconomiques qui encouragent la croissance économique et réduisent linflation
  • Investir dans les infrastructures de transport et de communication afin de diminuer les coûts de coordination et de gestion des transactions commerciales internationales
  • Investir dans le système éducatif et les programmes de formation permanente afin daméliorer la qualité de la main dœuvre disponible
  • Mettre en place un système dincitations fiscales au bénéfice des investisseurs étrangers : il peut sagir de réduire le taux dimposition sur les bénéfices des sociétés ou de toute autre mesure permettant de procurer un avantage fiscal à linvestisseur. Ainsi, alors que le taux dimposition sur les bénéfices des sociétés est pratiquement le même (en 2010) entre la France et la Belgique, la Belgique a mis en place tout un ensemble de mesures qui lui permet dattirer un volume particulièrement important dIDE (régime des holdings, intérêts notionnels fictifs calculés sur le montant des capitaux propres investis et déductibles des bénéfices imposables, etc.)[77]. Il faut veiller néanmoins à ce que la réduction des recettes fiscales ne conduise pas à la dégradation des services publics (éducation, formation, infrastructures de transport, etc.) dont la qualité est considérée comme un facteur déterminant dimplantation de filiales pour les entreprises multinationales. En outre, P. Artus[78] met en garde contre les effets négatifs possibles de ce type de mesure. Prenant lexemple de lIrlande, il montre que cette politique fiscale avantageuse a effectivement attiré les IDE, mais sans que cela se traduise par un surcroît significatif de capital productif dans le pays. Les groupes étrangers ont créé principalement des entités non productives afin dy centraliser leurs profits (moins imposés quailleurs). Ce faisant, ils ont augmenté les revenus en Irlande, sans y créer réellement de croissance et demploi. En raison de cette déconnexion entre IDE et investissements productifs (et donc, entre revenu et croissance), lIrlande aurait alors souffert du « mal hollandais ». Le supplément de revenu aurait en effet augmenté la demande de services domestiques et de logements, ce qui se serait traduit par la hausse des prix relatifs des services et de limmobilier, les rendant plus rentables que lindustrie et accélérant de facto la désindustrialisation de lIrlande. En outre, il y aurait eu excès dendettement et création de bulles sur les prix des actifs. P. Artus souligne cependant quune telle évolution na été possible que parce que lIrlande était un petit pays (le supplément de recettes fiscales à limplantation de groupes étrangers a permis de compenser la perte due à la baisse globale du taux dimposition sur les bénéfices) en périphérie dune Union monétaire (cette position périphérique rendant plus coûteuse linstallation dactivités productives exportatrices)
  • Réduire (voire éliminer) les contraintes règlementaires sappliquant aux investisseurs étrangers
  • Offrir des subventions et autres aides financières aux investisseurs étrangers
  • Promouvoir de façon active limage du pays auprès des investisseurs potentiels en créant des agences de promotion des investissements. Dans certains cas, ces agences interviennent également pour faciliter les démarches administratives des investisseurs dans le pays daccueil. En France, l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) a pour mission la promotion, la prospection et laccueil des investissements internationaux en France.

Dans le pays investisseur

Les pouvoirs publics des pays investisseurs sont confrontés au dilemme suivant : comment éviter les délocalisations destructrices demplois sans entraver le nécessaire développement à linternational des groupes locaux ?

Encourager les IDE sortants

Même sil relève d'une démarche privée, l'IDE peut faire lobjet d'un accompagnement public. Au début des années 1980 (et même 1970 pour les États-Unis), les pouvoirs publics des grands pays investisseurs ont pris conscience du rôle déterminant de l'IDE dans une stratégie de conquête de parts de marché. Il est apparu comme le principal moteur du développement international des entreprises, qu'il s'agisse de grands groupes ou de PME. De véritables politiques d'encouragement à lIDE sortant ont alors été mises en place. Comme le mettent en évidence A.-M. Alcabas, E. Bourcieu et B. Valersteinas[79] (2000), le soutien public à l'investissement direct à l'étranger prend des formes diverses, à tous les stades de la démarche des entreprises.

  • Dans la phase de prospection pour identifier le meilleur projet dIDE, les pouvoirs publics peuvent fournir l'information sur toutes les facettes du risque-pays investissement (cadre économique, financier, juridique, fiscal, social et réglementaire dans le pays ciblé), l'aide à la recherche de partenaires locaux en vue d'une coopération industrielle, voire le financement d'études de faisabilité. Une assistance dans les démarches auprès des autorités du pays d'accueil est souvent offerte.
  • Dès que le projet est identifié, le pays d'origine peut contribuer au financement de l'IDE par une prise de participation dans la filiale, un prêt direct aux entreprises ou un refinancement de leurs banques, une garantie aux banques finançant l'investissement ou encore des mécanismes fiscaux soulageant la trésorerie des entreprises pendant l'apport en fonds.
  • Le dernier volet de cette politique d'appui est l'assurance de l'investissement. La garantie de l'investissement contre le risque politique reste le produit le plus couramment offert par les pays investisseurs, mais certaines entreprises ont également demandé à pouvoir bénéficier dune garantie contre le risque commercial ou contre le risque de retournement de conjoncture.

Répondre aux inquiétudes suscitées par les délocalisations

F. Benaroya[80] (2005) précise que les délocalisations (offshoring en anglais) recouvrent deux phénomènes distincts :

  • le premier est le transfert, par un IDE sortant, de tout ou partie de lappareil productif afin de réimporter sur le territoire national lessentiel des biens produits à moindre coût (la délocalisation a pour but de fournir les biens aux mêmes clients, et pas à de nouveaux clients)
  • le second est le recours à la sous-traitance internationale (offshore outsourcing en anglais), qui correspond à un transfert dune activité sans IDE : le donneur dordre confie à une entreprise située dans un autre pays la réalisation dune tâche de service ou de production industrielle effectuée précédemment sur le territoire national.

Le débat sur les délocalisations est souvent particulièrement vif et oppose les tenants dune politique conciliante avec les délocalisations à ceux qui envisagent de réprimer, voire de pénaliser, ce type de pratiques. Les autorités de la plupart des pays industrialisés soulignent cependant que les délocalisations sinscrivent dans la division internationale du travail et participent au développement des pays émergents, tout en contribuant à lessor dactivités à plus forte valeur ajoutée dans leur propre économie. Elles mettent en avant les effets potentiellement négatifs sur la compétitivité et laccueil des investissements étrangers des mesures qui pénaliseraient spécifiquement les délocalisations. En conséquence, la montée en gamme et laccompagnement social des restructurations constituent la réponse la plus fréquente aux délocalisations.


Mesure des IDE

Les données statistiques sur les IDE sont appréhendées au niveau de la balance des paiements et de la position extérieure dun pays. Elles sont établies selon la norme internationale fixée par la 4ème édition de la Définition de référence des investissements directs internationaux de lOCDE[5] (2008), cohérente avec les concepts et définitions de la 6ème édition (2009) du Manuel de la balance des paiements du FMI[81].

Principaux concepts des statistiques dIDE

Selon lOCDE, lIDE « est un type dinvestissement transnational effectué par le résident dune économie (« linvestisseur direct ») afin détablir un intérêt durable dans une entreprise (« lentreprise dinvestissement direct ») qui est résidente dune autre économie que celle de linvestisseur direct. ». Par convention, « lexistence dun « intérêt durable » est établie dès lors que linvestisseur direct détient au moins 10 % des droits de vote de lentreprise dinvestissement direct ». Ce seuil de 10 % est une convention statistique et est à ce titre discutable : dans certains cas, la détention de 10 % des droits de vote ne permet pas dexercer une influence sensible sur la gestion de lentreprise, et inversement, un investisseur direct peut détenir moins de 10 % des droits de vote tout en exerçant une influence importante sur la gestion. Il nen reste pas moins que lOCDE nautorise aucune souplesse dans lapplication du seuil de 10 %, cette stricte application étant recommandée par souci de cohérence statistique entre les pays.

Pour lOCDE, la notion dIDE recouvre à la fois lopération de prise de participation initiale permettant datteindre le seuil de 10 % et toutes les opérations financières et positions ultérieures entre linvestisseur direct et lentreprise dinvestissement direct ou entre entreprises sœurs (sociétés sans participation directe entre elles supérieure à 10 %, mais détenues, directement ou non, par une maison-mère commune), dotées ou non de la personnalité morale.

Les statistiques dIDE sont composées :

  • Des flux financiers dIDE qui retracent les entrées et sorties nettes dIDE pour une période donnée en présentant séparément les IDE sortants (acquisitions diminuées des cessions/remboursements) et les IDE entrants (acquisitions diminuées des cessions/remboursements) par instrument (titres de participation, prêts)
  • Des positions (ou stocks) dIDE qui fournissent des informations, ventilées par instrument (titres de participation, prêts) sur lencours total, à une date de référence donnée, des investissements réalisés à létranger ou reçus de létranger
  • Des revenus dIDE qui résultent:
    • 1) des titres de participation : il sagit essentiellement des bénéfices dégagés par lentreprise durant la période de référence et correspondant à des distributions (dividendes) ainsi quà des bénéfices non distribués qui sont traités comme des bénéfices réinvestis dans ladite entreprise ; et
    • 2) des prêts (intérêts de crédits interentreprises, de crédits commerciaux et autres formes de prêts).

Les revenus dIDE servent à analyser leur productivité et permettent de calculer le taux de rendement des fonds investis.

Les flux et les stocks dIDE regroupent essentiellement trois types de financement transfrontaliers :

  • Lacquisition ou la cession de titres de participation;
  • Le réinvestissement de bénéfices non distribués sous forme de dividendes (ou bénéfices réinvestis) ; et
  • Les prêts interentreprises (sommes à verser et à recevoir, crédits, titres demprunt).

La variation des stocks dIDE entre deux périodes successives correspond non seulement aux flux de transactions enregistrés durant lintervalle, mais aussi aux fluctuations des taux de change[82], des cours des titres[83] et des volumes[84].

Particularités des statistiques dIDE

Conventions de signe

Les statistiques dIDE étant issues des balances des paiements et de la position extérieure des pays, elles sont parfois diffusées selon les conventions de signe propres à ces comptes :

  • Les flux financiers dIDE sont un des éléments du compte financier de la balance des paiements. Dans ce cadre, les sorties de fonds sont signalées par un signe négatif et les entrées de fonds par un signe positif. En conséquence :
    • Une augmentation des IDE sortants est signée négativement alors que leur diminution est signée positivement
    • Une augmentation des IDE entrants est signée positivement alors que leur diminution est signée négativement
  • Les stocks dIDE proviennent de la position extérieure dun pays par convention, les avoirs à létranger (et donc les stocks dIDE sortants) sont signés positivement alors que les engagements vis-à-vis de létranger (et donc les stocks dIDE entrants) sont signés négativement
  • Les revenus dIDE sont inclus dans la rubrique Revenus du compte de transaction courante de la balance des paiements. Les revenus dIDE sortants y figurent en recettes (signe positif) alors que les revenus dIDE entrants correspondent à des dépenses (signe négatif).

Lanalyse des statistiques dIDE suppose donc davoir identifié au préalable la convention de signe utilisée pour leur présentation.

Valorisation des IDE

LOCDE[5] recommande dévaluer les flux et les positions dIDE en valeur de marché. Alors que cela peut être relativement simple pour les flux et pour les stocks dIDE dans des sociétés dont les actions sont cotées sur un marché boursier organisé, cest beaucoup moins le cas pour des actions non cotées. Dans ce cas, il convient destimer la valeur de marché à partir de données fournies par ces sociétés non cotées.

Tout en recommandant de recourir à la valeur de marché, lOCDE reconnaît que, dans la pratique, la valeur des positions (stocks) et opérations dIDE est souvent calculée sur la base de la valeur comptable inscrite au bilan des entreprises dinvestissement direct. « Cette situation sexplique par le fait que, dans beaucoup de pays, les valeurs inscrites au bilan des entreprises (…) peuvent représenter la seule source dinformation disponible à des fins dévaluation, en particulier pour le calcul de la valeur des actions non cotées. »

En conséquence, trois types de valorisation distincts sont possibles pour les stocks dIDE, et il convient de déterminer quel est celui qui est utilisé, notamment lors de comparaisons internationales des statistiques dIDE, compte tenu des différences parfois significatives qui peuvent exister entre ces différents modes de valorisation. Les stocks dIDE peuvent être exprimés en :

  • Valeur comptable : les encours dIDE en titres cotés et non cotés sont calculés à partir de la valeur comptable des fonds propres enregistrés au passif des bilans des filiales détenues
  • Valeur mixte : les encours dIDE en titres cotés sont calculés en valeur de marché alors que ceux en titres non cotés sont exprimés en valeur comptable
  • Valeur de marché : lensemble des encours dIDE (en titres cotés et non cotés) est estimé en valeur de marché.

Ventilation géographique

En application des recommandations de lOCDE et du FMI, les ventilations géographiques des statistiques dIDE sont établies sur la base du premier pays de contrepartie (ou pays de contrepartie immédiate). Comme le précise lOCDE[5] néanmoins, « les entreprises multinationales ont de plus en plus souvent recours à des structures complexes pour financer leurs investissements transnationaux. Il est désormais courant que les fonds transitent par des entités intermédiaires de nature diverse. Ces pratiques faussent lanalyse de lorigine et de la destination [de lIDE] et peuvent conduire à des résultats statistiques et analytiques erronés si les données sont exclusivement enregistrées sur la base de la contrepartie immédiate ». Cest pourquoi lOCDE introduit les concepts de pays daccueil et de pays investisseurs ultimes. Cependant, lOCDE, tenant compte de difficultés aussi bien conceptuelles que pratiques, recommande aux pays de fournir, de façon facultative, une ventilation géographique établie sur la base du pays investisseur ultime pour les seuls stocks dIDE entrants. La Banque de France diffuse cette ventilation complémentaire dans une note annuelle consacrée aux stocks dIDE étrangers en France[85].

Ventilation par activité économique

En théorie, les statistiques dIDE pourraient être ventilées selon lactivité économique de linvestisseur ou de la filiale investie. En pratique néanmoins, lOCDE recommande de toujours se référer à lactivité de la filiale investie (et non à celle de linvestisseur). Cette recommandation nest cependant pas toujours parfaitement respectée. En effet, linformation la plus aisément disponible est relative à lactivité des entités résidentes, cest-à-dire à celle de la filiale investie pour les IDE entrants et à celle de linvestisseur pour les IDE sortants. En outre, une partie croissante des IDE sont initiés, reçus ou transitent par des entités spécialisées dont lactivité économique correspond à celle de « management de holding ». Dans un grand nombre de pays, les holdings représentent près de la moitié du total des IDE aussi bien entrants que sortants.

Avantages et limites des statistiques dIDE

Une mesure standardisée permettant les comparaisons internationales

Avec sa Définition de référence des investissements directs internationaux, lOCDE établit :

  • Un standard unique pour les statisticiens internationaux et les utilisateurs de statistiques dIDE, parfaitement cohérent avec les concepts et définitions du Manuel de balance des paiements du FMI ainsi quavec les définitions générales et le cadre comptable du Système de Comptabilité Nationale
  • Une norme internationale qui sert de base pour effectuer des comparaisons internationales et pour mettre en évidence les dérogations nationales aux règles denregistrement des IDE susceptibles de fausser ces mêmes comparaisons.

Daprès lOCDE[5], « depuis la publication de la première version de la Définition de référence, les pays qui établissent des statistiques ont fait des progrès considérables sur le plan de la révision de leurs systèmes de mesure de lIDE pour les rendre plus conformes aux exigences et définitions de la Définition de référence. »

Des difficultés dinterprétation croissantes

La complexité accrue des circuits de financement et de règlement entre affiliés se traduit par des difficultés croissantes dans lenregistrement et linterprétation des statistiques dIDE. La création dentités à vocation spéciales (EVS ou SPE en anglais pour Special Purpose Entities), souvent constituées pour des motivations fiscales et spécialisées dans le financement ou la centralisation de trésorerie au sein des groupes, affectent à la fois :

  • le financement des opérations dIDE : des EVS sont créées par les firmes multinationales pour y loger les financements nécessaires aux autres entités du groupe, par lémission de titres sur les marchés internationaux ou demprunts auprès du système bancaire. Ces structures sont généralement implantées dans des pays se caractérisant par une fiscalité avantageuse, qui sont souvent différents de ceux dans lesquels seffectuent réellement les IDE. Les fonds passent alors des pays ils sont collectés vers les pays ils sont utilisés, en transitant par les pays de localisation des EVS. Tous ces transferts de fonds sont enregistrés en IDE ;
  • et le règlement des opérations dIDE : une acquisition effectuée entre deux pays donnés peut être à lorigine de règlements réalisés par et/ou au profit des centres de trésorerie implantés dans des pays tiers. Cette déconnexion entre la transaction effective et le flux de règlement est dautant plus importante que le degré dintégration économique et financière à léchelle régionale ou internationale est élevé.

Les conséquences de lexistence de ces EVS conduit à :

  • Multiplier de façon inopportune le nombre de transactions enregistrées dans les statistiques dIDE, et ce faisant, à surestimer leur montant, du fait de lenregistrement de tous les flux financiers transfrontaliers (de prêts et/ou de trésorerie) intra-groupes
  • Réduire la signification de la distinction des IDE par type dinstrument (titres de participation, prêts: lors dune opération de fusion-acquisition, il est devenu extrêmement commun que lacquéreur crée une société holding à létranger chargée dacheter les titres de la société cible. Pour ce faire, cette dernière reçoit de sa maison-mère le financement de la transaction sous forme de prêt. Ainsi, lopération de fusion-acquisition ne figure-t-elle pas dans les transactions en titres de participation, mais dans les prêts intra-groupes
  • Déformer les ventilations géographiques et par secteur dactivité économique des statistiques dIDE : dans la mesure leur ventilation est basée sur le premier pays de contrepartie, c'est-à-dire sur le pays de provenance ou de destination immédiate des fonds, limportance des pays sont localisées les EVS est surestimée au détriment de ceux dans lesquels les IDE ont réellement lieu. Dans un rapport paru en 2010[86], lorganisation non gouvernementale CCFD-Terre solidaire remarque que les IDE en provenance des Îles Vierges britanniques, des Îles Caïmans, du Luxembourg, de lÎle Maurice et des Pays-Bas sont 1,7 fois supérieurs à ceux des États-Unis et trois fois plus importants que le Japon, lAllemagne et la France réunis. Selon lauteur du rapport, il sagit dune « tromperie statistique » liée à la « localisation artificielle de lactivité économique loin de ses bases réelles », « à labri de limpôt ». De même, la ventilation par secteur dactivité est effectuée à partir de lactivité de la société (non résidente) directement investie. Cest pourquoi les activités des EVS, qui correspondent la plupart du temps aux activités de management de holdings ou de holdings financières, sont surreprésentées.

Selon L. Fontagné et F. Toubal[34] (2010), les statistiques dIDE « sont (…) de moins en moins le reflet dune réalité économique, en raison de limportance prise par les prêts intra-groupes et les entités spécifiques centralisant à létranger les opérations financières ». C. Chavagneux[87] (2009) dénonce quant à lui « les faux chiffres » des IDE, tout en soulignant que cette surestimation des statistiques d'IDE (de l'ordre de 40 % à 80 %) met en évidence le recours croissant aux paradis fiscaux par les multinationales.

De nouvelles règles denregistrement des IDE

Pour pallier toutes ces difficultés, lOCDE recommande, dans la dernière édition de sa Définition de référence des investissements directs internationaux[5] (2008), de nouvelles règles denregistrement des IDE. Elles consistent principalement :

  • À isoler les IDE effectués par ou dans des EVS locales
  • A réduire limportance des prêts entre sociétés sœurs (cest-à-dire sans participation entre elles supérieure à 10 %) en les reclassant selon le pays dimplantation de leur tête de groupe (ce qui revient à les netter). B. Terrien[88] (2009) précise que « lorsquune entité résidente envoie des fonds à une société sœur non résidente, et que cette dernière fait un prêt à une troisième société sœur résidente, les deux transactions [seront] classées, non plus respectivement en investissements directs à létranger et en provenance de létranger, mais soit en investissements directs à létranger (lorsquil sagit dun groupe résident), soit en investissements directs en provenance de létranger (sil sagit dun groupe non résident). Les prêts et emprunts entre sociétés sœurs se compenseraient alors en tout ou partie, plutôt que de venir augmenter artificiellement les investissements à létranger et les investissements en provenance de létranger. »
  • A fournir, dans la mesure du possible, des indications sur le pays de linvestisseur ultime (dans le cas des investissements entrants) et/ou sur les pays de destination ultime des IDE sortants.

Compte tenu du temps dadaptation des systèmes statistiques, ces nouvelles règles ne sont pas encore appliquées par tous les pays. La Banque de France fournit cependant, dans son Rapport annuel sur la balance des paiements et la position extérieure de la France[89] (2010), les éléments chiffrés suivants :

  • Dans leur présentation traditionnelle (non corrigée), les investissements directs français à létranger ne fléchissent que légèrement en 2009 par rapport à 2008, et les investissements étrangers en France sont stables. Par contre, selon les nouvelles règles de lOCDE, les investissements directs reculent fortement en 2009 : les investissements français à létranger diminuent de 26 % alors que les investissements étrangers en France, déjà faibles en 2008, deviennent légèrement négatifs. Selon la Banque de France, lévolution des flux dIDE selon la nouvelle norme de lOCDE « semble davantage en phase avec lensemble des autres phénomènes économiques observés en 2009 (fort ralentissement des échanges internationaux et de la croissance mondiale, repli marqué des opérations de fusion-acquisition transfrontières…) »
  • Après correction, les stocks dinvestissements directs français à létranger et étrangers en France à fin 2009 se trouvent réduits dun peu plus de 300 milliards deuros par rapport à la présentation traditionnelle. Les pays vis-à-vis desquels les corrections à la baisse sont les plus importantes, sont, par ordre décroissant, le Royaume-Uni, puis la Belgique et le Luxembourg, pays réputés accueillir un nombre important dEVS et autres centres de trésorerie. Selon la présentation traditionnelle, les 5 premiers pays investisseurs en France sont les Pays-Bas, le Royaume-Uni, le Luxembourg, la Belgique et les États-Unis ; selon la présentation corrigée (ventilée par pays de la tête de groupe), les 5 premiers pays investisseurs en France sont en fait les États-Unis, le Royaume-Uni, lAllemagne, la Suisse et le Luxembourg.

Éléments statistiques complémentaires sur les IDE

Les statistiques de fusions-acquisitions

Les fusions-acquisitions transfrontières sont une des composantes des IDE. Les fournisseurs dinformation financière à destination des gestionnaires, analystes financiers, directeurs financiers, etc., tels que Thomson-Reuters ou Dealogic, publient régulièrement des statistiques permettant de retracer les prises de contrôle dentreprises par des firmes étrangères et les montants financiers correspondants.

De nombreuses différences existent avec les statistiques dIDE : les statistiques de fusions-acquisitions recensent toutes les transactions sur titres, y compris celles portant sur moins de 10 % du capital de lentreprise acquise. Les cessions ne sont pas recensées en tant que telles. Les ventilations par pays et par branche dactivité sappuient uniquement sur lentreprise acquise et sur lacquéreur ultime.

Labsence de méthodologie unifiée rend les comparaisons entre les fournisseurs de ces données particulièrement difficiles.

Les statistiques des agences de promotion des IDE

Les agences de promotion de linvestissement et les consultants en implantation, comme IBM/PLI ou fDi Markets, ont mis au point un système de recensement, grâce à des outils de veille économique, des projets dinvestissement internationaux annoncés.

LAgence Française pour les Investissements Internationaux diffuse des statistiques sur les projets dinvestissements créateurs demplois effectués en France par des firmes multinationales étrangères. Parmi les projets dinvestissements visant à créer un nouveau site de production, à étendre un site déjà existant, à reprendre un site en difficulté ou à établir un partenariat, lAFII ne comptabilise que les opérations qui créent ou préservent (en cas de fermeture de lentreprise française rachetée) des emplois.

Des données du même type sont produites à létranger par certaines agences de promotion homologues de lAFII, comme UK Trade & Investment (UKTI) au Royaume-Uni, lAustrian Business Agency pour lAutriche, Tzechinvest en République tchèque ou NRW.INVEST Gmbh pour le land allemand de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie (NRW). Cependant, les différences de champs et de méthodes de comptabilisation rendent ces données difficilement comparables.

Les statistiques d'IDE de création (greenfield investment)

Le groupe de presse The Financial Times Ltd a créé une division (fDi Intelligence) spécialisée dans le recensement des IDE de création (ou greenfield investment), qui sont la composante des statistiques d'IDE consistant à implanter des filiales entièrement nouvelles à l'étranger, avec linstallation de nouveaux moyens de production et des créations d'emplois.


Évolution des IDE

Flux mondiaux d'IDE

Historique

Evolution des flux mondiaux d'IDE entrants depuis 1970
Evolution des flux mondiaux d'IDE entrants depuis 1970

L'essor véritable des IDE débute au milieu des années 1980. Dans les années 1950 et 1960, le taux de croissance des IDE est en effet inférieur à celui du commerce international ; l'exportation demeurant la modalité principale de la concurrence à l'échelle mondiale. Dans les années 1970, le taux de croissance des IDE rejoint celui du commerce mondial, mais dans un contexte de décélération du commerce mondial.

Une rupture apparaît en 1985 : les flux d'IDE entrants et sortants accélèrent sensiblement, passant d'un flux annuel de 50 milliards de dollars courants, à plus de 200 milliards en 1989-1990. La croissance des flux d'IDE s'est poursuivie dans les années 1990, pour culminer à 1400 milliards de dollars en 2000. Le montant des IDE s'est fortement contracté à la suite de léclatement de la bulle sur les nouvelles technologies : 825 milliards de dollars en 2001, et 566 milliards en 2003.

Malgré un redressement au milieu des années 2000, la crise financière mondiale de 2008-2009 se traduit par un nouveau repli des flux mondiaux dIDE : après une chute de 32% en 2009, les entrées mondiales dIDE ont légèrement progressé (de 5%) en 2010, pour sétablir à 1 244 milliards de dollars, soit un montant de 15% inférieur au niveau moyen davant la crise. Selon lédition 2011 du rapport de la CNUCED sur linvestissement dans le monde, les flux mondiaux dIDE devraient cependant retrouver leur niveau davant crise en 2011, pour sétablir dans une fourchette de 1 400 à 1 600 milliards de dollars et pourraient atteindre leur niveau record de 2007 en 2013. La CNUCED précise cependant que de telles prévisions supposent « labsence de toute crise économique mondiale inattendue qui pourrait découler dun certain nombre de facteurs de risque toujours présents »[90].

La CNUCED observe également que, « pour la première fois, les pays en développement et les pays en transition ont ensemble absorbé plus de la moitié des flux mondiaux dIDE. Les sorties dIDE de ces pays ont également atteint des niveaux records, la majeure partie de ces investissements concernant dautres pays du Sud. En revanche, les flux dIDE vers les pays développés ont continué de diminuer »[90].

Néanmoins, « quelques-unes des régions les plus pauvres ont continué daccuser un recul des flux dIDE. Les flux vers lAfrique, les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits états insulaires en développement ont ainsi diminué, tout comme les flux vers lAsie du Sud. Dans le même temps, les flux dIDE vers de grandes régions émergentes, telles que lAsie de lEst et du Sud-Est et lAmérique latine, ont enregistré une forte croissance »[90] en 2011.

Principaux pays investisseurs et d'accueil des IDE

Carte des principaux pays d'accueil des IDE à fin 2010
Principaux pays d'accueil des IDE à fin 2010 (données en milliards de dollars)
Carte des principaux pays investisseurs à fin 2010
Principaux pays investisseurs à fin 2010 (données en milliards de dollars)

L'évolution des flux d'IDE, qui dépend notamment de la stabilité de la terre d'accueil et des perspectives qu'elle semble offrir à terme, reflète en quelque sorte la confiance que portent les investisseurs étrangers dans un pays ou une région.

Les flux d'IDE entre l'Union européenne, les États-Unis et le Japon (flux Nord-Nord) sont les plus importants, même si leurs parts dans le total mondial est plutôt en baisse. Ainsi, on observe ces dernières années une forte augmentation des flux vers l'Asie du Sud-Est et tout particulièrement à destination de la Chine.

D'une manière générale, le continent africain attire peu d'IDE même si quelques pays comme l'Afrique du Sud, l'Algérie, le Maroc, la Tunisie ou l'Égypte constituent des exceptions. Pour les autres pays africains, l'IDE est essentiellement concentré dans l'industrie extractive.

Environ 65% des stocks dIDE entrants se concentrent en Amérique du Nord, en Europe et au Japon. Les Pays en développement et les pays en transition se partagent les 35% restants. Dix pays (par ordre décroissant: les États-Unis, Hong Kong, le Royaume-Uni, la France, lAllemagne, la Belgique, lEspagne, les Pays-Bas, la Chine et le Canada) accueillent 54 % du stock mondial d'IDE à fin 2010, et une quarantaine dÉtats reçoit 90 % du stock total dIDE. Les États-Unis recueillent à eux seuls plus de la moitié des IDE reçus par l'ensemble des pays en développement et des pays en transition. La seule véritable rupture de ces dernières années provient de l'émergence foudroyante de Hong Kong et de la Chine qui se hissent respectivement à la deuxième et à la neuvième place des pays daccueil avec des poids respectifs de 5,7 % et 3 % du stock mondial.

Les IDE sont le fait de très grandes firmes industrielles (multinationales) ou de services originaires des pays industrialisés.

Evolution des flux d'IDE de la France en pourcentage du PIB depuis 1960
Evolution des flux d'IDE de la France en pourcentage du PIB depuis 1960

Flux d'IDE de la France

J. Pécha et B. Terrien[91] (2005) ont étudié lévolution des IDE de la France sur la période 1960-2000. Ils observent que le poids relatif des flux dIDE rapportés au PIB na cessé de croître au cours de la période.

De 1960 à 1980, la France était structurellement un pays qui recevait plus dIDE quelle nen effectuait elle-même à létranger. Depuis 1980, la position du pays sest inversée, la France devenant un investisseur direct net au niveau international, tout en continuant à recevoir des montants importants dIDE en provenance de létranger. La plupart des IDE sortant de France ou y entrant se sont faits avec les pays développés dans lesquels lEurope joue un rôle dominant et se sont dirigés de plus en plus vers les activités de service.

Les causes de l'explosion des IDE depuis les années 80

  • Les flux internationaux de capitaux ont explosé depuis les années 1980 grâce à la déréglementation. Cette déréglementation des IDE consiste à supprimer un certain nombre de restrictions aux flux entrants d'IDE, tels les TRIMs (trade related investment measures : par exemple, règle d'équilibre du commerce extérieur, règle de contenu local). S'affirme ainsi un renouveau des fonctions de l'État : c'est le développement de l'État mondialisateur, qui s'efforce non seulement de participer à l'internationalisation des firmes nationales, mais qui tente aussi d'attirer les investisseurs étrangers en mettant en valeur l'attractivité du territoire (infrastructures de qualité, présence de districts industriels, qualité de la main d'œuvre, compétitivité-coût,etc.). C'est alors la fin d'une collusion entre les États et les firmes multinationales qui consistait en un certain protectionnisme qui profitait aux firmes (réduction du risque d'entrants potentiels, avantages du premier arrivé sur le marché (first mover: "winner takes it all"). Les autres aspects de la déréglementation tels que les privatisations avec le retrait de l'Etat de la sphère productive augmente les IDE entrants et sortants concernant les fusions-acquisitions.
  • Les flux d'IDE explosent également après 85 avec l'essor des IDE européens (notamment allemands) et japonais, en raison de l'appréciation relativement au dollar (il baisse de manière concertée après les accords du Plaza) du mark et du yen, ce qui est favorable à l'internationalisation des firmes allemandes et japonaises. Cela rompt avec la situation des années 60 caractérisées par l'importance des IDE américains en raison d'un écart technologique favorable (l'apogée du fordisme et dépenses élevées de recherche-développement).
  • Cette explosion est portée par l'essor des IDE dans le secteur des services, en raison de la tertiarisation et de la désindustrialisation des pays développés (qui est aussi le résultat en partie des flux d'IDE ayant pour finalité la délocalisation), de la déréglementation de ce secteur (à la suite des négociations commerciales multilatérales de l'OMC et de la déréglementation des services financiers).
  • Les flux d'IDE connaissent un essor considérable avec de nouvelles destinations: les pays émergents (et particulièrement l'extrême-orient) drainent de plus en plus de capitaux, dans le cadre d'une redistribution mondiale des activités productives. Les pays de l'Est deviennent également une nouvelle terre d'accueil attractive avec leur entrée dans l'union européenne, gage de stabilité macro-économique et politique, de réformes institutionnelles et d'une modification des politiques économiques.

Dynamique des IDE

Pour un pays donné, les IDE évolueraient au cours du temps selon un schéma précis, marqué par une succession détapes. En lien avec sa théorie du cycle du produit, R. Vernon[92] (1966) est le premier à expliquer le passage pour le pays qui bénéficie dun avantage technologique, de la production nationale à lexportation dun produit et ensuite à la localisation de la production à létranger en 5 étapes successives :

  • Innovation : lenvironnement macro-économique, comme la structure de la demande, les efforts en recherche et développement ou la structure du marché, permettent linnovation.
  • Lancement : les coûts de production nétant pas déterminants à ce stade, le pays fabrique le nouveau produit sur son territoire
  • Standardisation : lexportation est rendue possible par des économies déchelle.
  • Maturité : les coûts de production déterminent la localisation, et des IDE sortants de délocalisation surviennent dès que les coûts dexportation deviennent supérieurs aux coûts de production à létranger.
  • Déclin : le pays innovateur perd son avantage et peut même importer le produit du pays imitateur.

T. Ozawa[93] (1990) développe un modèle dynamique de spécialisation et de lIDE japonais à létranger lévolution des IDE japonais à létranger reflète, avec un temps de retard, lévolution de lindustrialisation japonaise. Il distingue 4 phases :

  • Expansion de lindustrie légère (début des années 1950 - milieu des années 1960: lindustrialisation japonaise est fondée sur des industries intensives en main dœuvre, et orientée vers lexportation, comme le textile, le petit électroménager ou les autres industries légères.
  • Expansion de lindustrie lourde (fin des années 1950début des années 1970: lindustrie lourde (sidérurgie, construction navale, pétrochimie, fibres synthétiques) se développe au Japon, principalement grâce à des ventes de licences, mais également suite à la création de joint ventures (IDE entrants au Japon). Au cours de cette phase, la hausse des salaires et le manque progressif de main dœuvre non qualifiée au Japon conduit les firmes spécialisées dans lindustrie légère à se délocaliser afin de rechercher une main dœuvre à bon marché.
  • Expansion des industries des biens de consommation (fin des années 1960fin des années 1980: au cours de cette phase, un deuxième type dIDE sortant apparaît afin de sécuriser lapprovisionnement en matières premières et de délocaliser la partie des industries lourdes dont la production est intensive en espace. Le Japon ne conserve plus quune spécialisation limitée à lassistance technique, la vente de brevets ou de contrats clé-en-main, plutôt que dans la fabrication des produits des industries lourdes. Le Japon tend alors à se spécialiser dans la production de masse de biens de consommation durables comme les automobiles, les biens électriques et électroniques.
  • Expansion des industries de biens hautement technologiques (fin des années 1980) tels que les nouveaux matériaux de la chimie fine (céramique), les nouvelles générations de microprocesseurs ou la télévision haute définition. Les excédents commerciaux sont alors recyclés dans le financement dIDE sortants visant à créer des usines de montage de biens de consommation dans les pays importateurs pour répondre aux mesures protectionnistes de ces derniers et accompagner lévolution de la spécialisation du Japon vers des biens à plus fort contenu technologique.

Plus généralement, J.H. Dunning[9] (1988) met en évidence que la position nette en IDE dun pays (égale à la différence entre stocks d'IDE sortants et stocks d'IDE entrants) est fonction de son niveau de développement économique. En effet, le niveau de développement dun pays a une influence sur chacun des avantages (spécifique, à la localisation et à linternalisation) identifiés par Dunning comme déterminants des IDE. Plus un pays est développé et plus ses firmes vont bénéficier davantages spécifiques et à linternalisation ; en outre, les pays étrangers les coûts de production sont plus faibles représentent des cibles idéales pour les délocalisations. Un pays développé aura donc tendance à exporter des IDE alors quà linverse, les pays moins développés attireront les IDE entrants. Dunning distingue 4 phases distinctes :

  • Pour les pays les moins avancés, il ny a ni IDE entrant, ni IDE sortant : du fait de la trop grande faiblesse de leur structure économique, ils ne présentent pas davantage à la localisation et ils ne possèdent aucune firme en mesure de simplanter à létranger. La position nette en IDE est nulle en raison de labsence dIDE.
  • Les pays en développement sont des pays daccueil des IDE. Ils présentent un avantage à la localisation attirant les IDE des pays étrangers sans avoir à ce stade de firmes susceptibles dinvestir à létranger. La position nette en IDE est négative, les IDE sortants du pays étant inférieurs à ceux y entrant.
  • Lors de la troisième phase, les firmes locales sont de plus en plus à même de développer simultanément les 3 types davantages, conditions de leur implantation à létranger. Les IDE sortants augmentent tandis que les IDE entrants demeurent à un niveau élevé, la position nette se rapprochant de zéro traduisant la concomitance dIDE entrants et sortants significatifs.
  • Enfin, la dernière phase correspond aux pays développés est basé un nombre important de multinationales. La position nette en IDE est alors positive, les IDE sortants excédant les IDE entrants.
Positions nettes et encours moyens entrants et sortants d'IDE à fin 2009
Positions nettes et encours moyens entrants et sortants d'IDE à fin 2009

Cette analyse peut être illustrée en représentant, à fin 2010, les encours moyens d'IDE entrants et sortants de chaque pays en fonction de la position nette en IDE (égale à la différence entre IDE sortant et IDE entrant). La majorité des pays peu développés sur le plan économique se caractérise par des IDE négligeables. Quant aux acteurs les plus significatifs au niveau mondial pour les IDE, ils peuvent être répartis selon 3 catégories:

  • les pays avec une position nette négative, c'est-à-dire qui accueillent plus d'IDE qu'ils n'en font eux-mêmes: il s'agit essentiellement de pays en voie de développement tels que la Chine, le Brésil ou le Mexique;
  • les pays avec une position nette équilibrée (ou proche de l'équilibre), c'est-à-dire qui investissent autant à l'étranger qu'ils n'accueillent d'IDE. On peut citer comme appartenant à cette catégorie la Russie, la Suède ou l'Espagne;
  • et enfin, les pays avec une position nette positive, c'est-à-dire qui effectuent plus d'IDE qu'ils n'en reçoivent eux-mêmes. Il s'agit ici essentiellement de pays développés tels que les États-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France, le Japon, la Suisse ou les Pays-Bas.

Selon cette analyse, la position naturelle des IDE (et plus généralement, de la balance des paiements) nest donc pas dêtre à léquilibre, ce qui relativise de facto les tentatives de lutter (par des politiques économiques plus ou moins restrictives) contre des déséquilibres qui reflètent (au moins en partie) le niveau de développement de chaque pays.


Les enjeux de l'IDE

  • Les IDE participent à la construction des avantages comparatifs d'une économie. Il est donc crucial pour les États d'éviter une "déconstruction" de ces avantages comparatifs en favorisant l'ancrage de ces investissements, c'est-à-dire leur durabilité. Cela est possible en incitant à créer des interdépendances entre la firme étrangère et les producteurs locaux (échanges, coopération technologique...).
  • L'IDE est vecteur de transfert de technologie, ce qui est crucial pour le décollage et la remontée des filières vers des productions à plus fort contenu technologique ou de haut de gamme.
  • IDE et emploi :
    • Sources de création d'emploi dans les pays receveurs
    • Sources de destruction d'emploi dans les pays émetteurs (à travers les délocalisations)


Quelques valeurs

La base de données sur les flux d'IDE gérée par la CNUCED (UNCTAD Stat) permet d'établir le palmarès des principaux pays d'accueil d'IDE et des principaux pays investisseurs :

Principaux pays d'accueil des flux d'IDE (montants en milliards de dollars)
Rang 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2008 2009 2010
1er Canada (1,8) Canada (3,4) Etats-Unis (16,9) Etats-Unis (20,5) Etats-Unis (48,4) Etats-Unis (58,8) Etats-Unis (314,0) Royaume-Uni (176,0) Etats-Unis (306,4) Etats-Unis (152,9) Etats-Unis (228,2)
2e Royaume-Uni (1,5) Royaume-Uni (3,3) Royaume-Uni (10,1) Royaume-Uni (5,7) Royaume-Uni (30,5) Chine (37,5) Allemagne (198,3) Etats-Unis (104,8) Belgique (142,0) Chine (95,0) Chine (105,7)
3e Etats-Unis (1,3) Etats-Unis (2,6) Canada (5,8) France (2,2) France (15,6) France (23,7) Royaume-Uni (118,8) France (84,9) Chine (108,3) Royaume-Uni (71,1) Hong Kong (68,9)
4e Australie (0,9) Arabie Saoudite (1,9) France (3,3) Australie (2,1) Espagne (13,3) Royaume-Uni (20,0) Luxembourg (88,7) Chine (72,4) Royaume-Uni (91,5) Hong Kong (52,4) Belgique (61,7)
5e Allemagne (0,8) France (1,5) Mexique (2,1) Mexique (2,0) Pays-Bas (10,5) Suède (14,4) Canada (66,8) Allemagne (47,4) Espagne (77,0) Iles Vierges britanniques (42,1) Brésil (48,4)
6e Pays-Bas (0,6) Indonésie (1,3) Pays-Bas (2,0) Espagne (2,0) Australie (8,5) Australie (13,4) Pays-Bas (63,9) Pays-Bas (39,0) Russie (75,0) Allemagne (37,6) Allemagne (46,1)
7e Italie (0,6) Pays-Bas (1,2) Brésil (1,9) Chine (2,0) Belgique (8,0) Pays-Bas (12,3) Hong Kong (61,9) Belgique (34,4) France (64,2) Russie (36,5) Royaume-Uni (45,9)
8e France (0,6) Brésil (1,2) Australie (1,9) Brésil (1,4) Canada (7,6) Allemagne (12,0) France (43,3) Hong Kong (33,6) Hong Kong (59,6) Inde (35,6) Russie (41,2)
9e Brésil (0,4) Belgique (1,0) Belgique (1,5) Pays-Bas (1,4) Italie (6,3) Singapour (11,5) Chine (40,7) Canada (25,7) Canada (57,2) Pays-Bas (34,5) Singapour (38,6)
10e Afrique du Sud (0,3) Espagne (0,7) Espagne (1,5) Canada (1,4) Singapour (5,6) Belgique (10,7) Espagne (39,6) Espagne (25,0) Iles Vierges britanniques (51,7) France (34,0) France (33,9)
Principaux pays investisseurs (montants en milliards de dollars)
Rang 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2008 2009 2010
1er Etats-Unis (7,6) Etats-Unis (14,2) Etats-Unis (19,2) Etats-Unis (13,4) Japon (50,8) Etats-Unis (92,1) Royaume-Uni (233,4) Pays-Bas (123,1) Etats-Unis (308,3) Etats-Unis (282,7) Etats-Unis (328,9)
2e Royaume-Uni (1,7) Royaume-Uni (3,0) Royaume-Uni (7,9) Royaume-Uni (11,1) France (36,2) Royaume-Uni (43,6) France (177,4) France (115,0) Belgique (164,3) France (102,9) Allemagne (104,9)
3e Pays-Bas (1,3) Pays-Bas (2,5) Allemagne (4,7) Japon (6,4) Etats-Unis (31,0) Allemagne (39,0) Etats-Unis (142,6) Royaume-Uni (80,8) Royaume-Uni (161,1) Allemagne (78,2) France (84,1)
4e Allemagne (1,1) Allemagne (2,2) Canada (4,1) Allemagne (5,7) Allemagne (24,2) Hong Kong (25,0) Belgique (86,4) Allemagne (75,9) France (155,0) Japon (74,7) Hong Kong (76,1)
5e Canada (0,9) Japon (1,8) Pays-Bas (3,8) Suisse (4,6) Royaume-Uni (17,9) Japon (22,6) Pays-Bas (75,6) Suisse (51,1) Japon (128,0) Hong Kong (64,0) Chine (68,0)
6e France (0,4) France (1,4) France (3,1) Canada (3,9) Suède (14,7) Pays-Bas (20,2) Hong Kong (59,4) Japon (45,8) Canada (79,8) Chine (56,5) Suisse (58,3)
7e Japon (0,4) Canada (1,3) Japon (2,4) Pays-Bas (2,7) Pays-Bas (13,7) France (15,8) Espagne (58,2) Espagne (41,8) Allemagne (77,1) Royaume-Uni (44,4) Japon (56,3)
8e Suède (0,2) Suède (0,4) Afrique du Sud (0,8) France (2,2) Italie (7,6) Suisse (12,2) Allemagne (56,6) Italie (41,8) Espagne (74,7) Russie (43,7) Russie (51,7)
9e Belgique (0,2) Italie (0,3) Italie (0,7) Australie (1,9) Suisse (7,2) Belgique (11,6) Canada (44,7) Belgique (32,7) Pays-Bas (67,5) Canada (41,7) Canada (38,6)
10e Italie (0,1) Belgique (0,2) Suède (0,6) Suède (1,8) Belgique (6,3) Canada (11,5) Suisse (44,7) Suède (27,7) Italie (67,0) Suisse (33,3) Belgique (37,7)

Au cours du premier semestre 2006, les firmes multinationales indiennes ont acheté 76 concurrents européens, asiatiques ou américains pour un total de 5,2 milliards de dollars au total[94]. En 2005, les IDE des pays émergents se sont élevés à 117 milliards de dollars soit 17 % du total mondial contre 10 % en 1982[95].


Notes et références

  1. On parle généralement d'« investissement direct à l'étranger » lorsqu'on se place du côté de l'investisseur (investissement sortant), et il est préférable de n'utiliser l'expression « investissement direct étranger » que lorsqu'on analyse le phénomène depuis le pays d'accueil de l'investissement (investissement entrant). Néanmoins, quand elle est utilisée comme traduction littérale du terme anglais Foreign Direct Investment (dénomination générique recouvrant à la fois les investissements directs entrants - inward FDI - et sortants - outward FDI), l'expression « investissement direct étranger » peut désigner aussi bien les investissements entrants que sortants.
  2. Si la terminologie est claire en anglais (on utilise l'acronyme FDI pour Foreign Direct Investment), il n'en est pas de même en français. L'acronyme IDE semble être de plus en plus généralement employé mais il désigne indifféremment « investissement direct étranger » ou « investissement direct à l'étranger ». Il est également fréquent d'utiliser la simple appellation « investissement direct ». Enfin, l'OCDE a introduit l'acronyme IDI pour « investissement direct international ». Toutes ces dénominations désignent cependant un seul et même concept, développé dans cet article.
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  82. Les fluctuations de change correspondent aux variations de la valeur en monnaie nationale des stocks libellés en devises consécutives aux évolutions de taux de change de ces devises par rapport à la monnaie nationale. Les IDE français aux Etats-Unis sont généralement libellés en dollars : lorsque le dollar sapprécie par rapport à leuro, la valeur en euro des stocks dIDE français aux Etats-Unis va augmenter, même sil ny a aucun flux dIDE de la France vers les Etats-Unis.
  83. Dans le cas les stocks dIDE sont exprimés en valeur de marché (cas des sociétés cotées notamment), les fluctuations de prix correspondent aux variations des stocks consécutives aux évolutions des cours des titres des filiales détenues.
  84. Les changements de volume correspondent aux variations de la valeur des stocks entre deux années successives qui ne correspondent ni à des flux de transactions, ni à des fluctuations de change ou de prix. Par exemple, si une filiale à létranger fait faillite, le stock dIDE va diminuer sans que cela soit enregistré comme un flux de désinvestissement ou une fluctuation négative de change ou de prix. Le franchissement (à la hausse ou à la baisse) du seuil de 10 % (qui permet de distinguer, sur le plan statistique, les IDEparticipations supérieures à 10 % - des investissements de portefeuilleparticipations inférieures à 10 %) peut également être à lorigine de changement de volume. Imaginons quun investisseur détienne 9 % du capital dune société étrangère. Si la valeur totale de cette dernière est de 1 milliard deuros, linvestisseur détiendra un stock initial (classé en investissement de portefeuille) de 90 millions. Si cet investisseur acquiert 2 % supplémentaires du capital de sa filiale (pour 20 millions deuros), il détient 11 % du capital avec un stock final de 110 millions deuros. Comme le seuil de 10 % a été franchi, on classe dans les flux dIDE la transaction qui a permis de franchir le seuil (et seulement elle), soit un flux dIDE de 20 millions, et dans les stocks dIDE la valeur (totale) du stock détenu, soit un stock final dIDE de 110 millions. Comme le stock initial dIDE était de zéro, le stock dIDE augmente de 110 millions alors que seul un flux dIDE de 20 millions a été enregistré ; la différence de 90 millions est alors considérée comme un changement de volume positif (cf. sur ce point le paragraphe 6.36 de la 6ème édition du Manuel de balance des paiements du FMI).
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  95. D'après le rapport annuel sur l'investissement de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement, chiffres cités dans « Le groupe indien Tata Steel prêt à racheter le sidérurgiste Corus », Le Monde, 17/10/2006, [lire en ligne]


Annexes

Bibliographie

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Liens externes

  • (fr) L'investissement étranger direct a atteint un nouveau record en 2007, Conférence des Nations Unis sur le Commerce et le Développement, 8 janvier 2008
  • (fr) UNCTAD Stat Base de données en ligne de la CNUCED incluant flux et stocks d'IDE, ainsi que flux commerciaux et informations sur les filiales dans le pays en développement
  • (en) site de lOCDE: en sélectionnant le thème « Globalisation », on accède à la base de données en ligne de lOCDE diffusant les flux dIDE entrants et sortants, ainsi que les stocks entrants et sortants des pays membres de lOCDE avec des ventilations géographiques et par activité économique pour chacun deux
  • (en) site du FMI: le Fonds Monétaire International a lancé en 2010 une enquête annuelle sur les stocks dIDE entrants et sortants de lensemble de ses pays membres. Les premiers résultats disponibles de cette Enquête Coordonnée sur les Investissements Directs (Coordinated Direct Investment Survey, ou CDIS en anglais) concernent les encours à fin 2009 pour un ensemble de 72 pays
  • (fr) site de la Banque de France Outre des études consacrées aux IDE de la France, on peut télécharger les flux dIDE de la France entrants et sortants, ainsi que les stocks entrants et sortants depuis 1960, avec des ventilations géographiques, par type dopérations et par activité économique

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Investissement direct à l'étranger de Wikipédia en français (auteurs)

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