Henri Goetz

Henri Goetz
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Henri Bernard Goetz
Portait de Henri Bernard Goetz

Nom de naissance Harry Bernard Goetz
Naissance 29 septembre 1909
New York
Décès 12 août 1989
Nice
Nationalité Français Drapeau de la France États-Unis Drapeau des États-Unis
Activité(s) Peintre-graveur
Formation Grand Central Art School, New York ; Académie Julian et Académie Grande Chaumière, Paris ; Atelier d'Amédée Ozenfant, Paris
Mouvement artistique Surréalisme, abstraction

Henri (Harry) Bernard Goetz, le 29 septembre 1909 à New York et mort le 12 août 1989 à Nice, est un peintre et graveur franco-américain.

Sommaire

Biographie

Les origines

La famille de Henri Goetz est dorigine française. Vers 1850, son grand-père, Bernard Goetz, Alsacien de la région de Colmar, quitte la France pour les États-Unis. Bricoleur, il invente durant son long voyage une sorte de réflecteur afin de mieux éclairer sa lecture, son passe-temps principal, dans une cabine peu éclairée. Cette invention simple suscite ladmiration de ses compagnons de voyage et il reçoit rapidement la proposition dun voyageur de première classe dexploiter cette trouvaille dès leur arrivée à Philadelphie.

En 1855, Bernard Goetz ouvre une société de réflecteurs, The American Reflector Company, qui deviendra plus tard The B. Goetz Manufacturing Company. Il épouse une Américaine avec laquelle il a cinq enfants. À lâge de onze ans, le père de Henri, enfant cadet, est renvoyé de son école, incapable dapprendre lorthographe et donc inapte à poursuivre des études plus avancées. Apprenti mécanicien dans la nouvelle industrie de la bicyclette, il participe à des courses cyclistes. Un début de tuberculose lempêche de poursuivre sa carrière de cycliste, mais il commence à écrire des nouvelles durant les années passées dans lOuest américain. De retour dans lEst, il se marie avec celle qui sera la mère de Henri Goetz.

L'enfance

Henri Goetz voit le jour à New York, son père dirige une entreprise de matériel électrique. Fils unique, le jeune Henri reçoit une éducation stricte de sa mère, pour qui les principes éducatifs remplacent laffection. À lâge de sept ans, sa famille quitte New York pour sinstaller en banlieue, à Far Rockaway, dans le Queens. Goetz y termine lécole primaire et secondaire, et ensuite le lycée.

Son rêve de quitter le foyer familial se réalise à lâge de dix-huit ans lorsquil part étudier à Boston en 1927, au Massachusetts Institute of Technology, en vue de préparer une carrière dingénieur électricien. Cest à cette époque quil commence à sintéresser à lart, et il suit des cours de dessin. Il sinscrit en 1929 à luniversité Harvard, il suit des cours dhistoire de lart. Il quitte luniversité la même année pour suivre des cours de peinture au Grand Central Art School de New York.

Un jour, une étudiante en peinture lui raconte son expérience personnelle de Paris et de ses ateliers. Cela est suffisant pour déclencher en Goetz lenvie de partir pour la France.

Les années d'apprentissage

Arrivé à Paris en 1930, il travaille dans les académies de Montparnasse (Académie Julian et Académie de la Grande Chaumière) et quelque temps chez Ozenfant. Goetz est intéressé par le portrait et létude du nu. Son but était dexprimer le caractère de ses modèles par une ressemblance extérieure et intérieure au moyen dune facture expressionniste et très colorée. Il mélange ardemment le procédé cubiste et le coloris expressionniste.

« Au début je me suis consacré uniquement au portrait, car la figure humaine me paraissait contenir une chaleur que je navais pas trouvée dans mes études je me préparais à une carrière dingénieur électricien. Durant ces six années, la peinture apprise dans les académies me servait à créer des ressemblances et à approfondir lintimité du regard des autres[1]. »

Goetz se retrouve plongé dans le milieu artistique de Montparnasse. Jusqu'alors, sa connaissance de la peinture n'allait pas au-delà de l'impressionnisme. Son ami Victor Bauer, peintre, lui ouvre lesprit à la peinture vivante. « Je lui dois le déclenchement du deuxième stade de mon évolution », dit Goetz[2].

Il découvre les œuvres de Picasso, Braque, Matisse, Rouault, Klee et Kandinsky. Grâce à Bauer, Goetz se familiarise aussi avec le freudisme, la politique de gauche, la sculpture primitive, la poésie et la musique davant-garde. Il poursuit alors létude du portrait et commence à peindre en 1933 ses premiers paysages de construction simpliste et laborieuse, dans une matière violente, sombre, très empâtée se retrouve à la fois linfluence conjuguée du fauvisme et du cubisme. Son autoportrait de 1935 est construit avec des formes fortement marquées par le cubisme, mais dans un coloris vif et pur, emprunté au fauvisme[3]. De 1932 à 1934, Goetz habite 16 rue Bardinet.

En 1935, Goetz considère que la période de lapprentissage est finie et se sent prêt à se lancer dans laventure de linvention de sa propre peinture. La même année, il emménage au 19 rue Daguerre. En septembre il fait connaissance à l'académie de la Grande Chaumière de Christine Boumeester, qu'il épousera la même année. Le couple se lie avec Hans Hartung, qui était leur voisin de palier rue Daguerre : tous trois exposent la même année au Salon des surindépendants.

La période « surréaliste »

Dès janvier 1936, Goetz commence à peindre des tableaux non-figuratifs[4]. Une « peinture non-figurative de pure invention » pour exprimer son univers intérieur, mais sans se servir des objets du monde réel. « Si je choisis le monde non-figuratif, cest que je crois quil est plus vaste que lautre. Je crois quil y a plus à découvrir dans linconnu que dans le connu. Si la limite du connu est linconnu, linverse ne me semble pas vrai[5]. » Ce changement restera la seule fraction dans son œuvre, qui se développera plus lentement. La décision de rompre avec le monde visible marque également la fin de sa période dapprentissage et plonge Goetz au cœur des courants actuels en engageant sa peinture dans la modernité. Voulant peindre abstrait, Goetz se lance dans lexploration de ses visions intérieures. Cependant, tout en revendiquent lindépendance de sa peinture du monde réel, son discours pictural ne correspond pas à la pratique de lart abstrait développée dans les années 1930-1940. Le sujet de ses tableaux dépend en grande partie de son imagination et pas seulement de lagencement de composants formels. Ce changement dorientation le rapproche du monde surréaliste. Son œuvre se développe dans cette dialectique de courants opposés et cest que réside son originalité.

Un événement important de cette période est lamitié avec le poète Juan Bréa et sa femme, Mary Low, qui font partie du groupe surréaliste dAndré Breton. Cest la découverte du surréalisme pour Goetz. En 1936, Goetz ignore à peu près tout du mouvement surréaliste. Son ami, le peintre allemand Oelze Richard, lui parle pour la première fois de Dali. À partir de ce moment, Goetz fréquente les surréalistes Raoul Ubac, Benjamin Péret et Óscar Domínguez. André Breton s'y intéresse d'ailleurs (il rencontre Goetz en 1938), sans toutefois proposer à l'artiste de participer aux manifestations du mouvement.

Lesprit surréaliste qui imprègne désormais sa peinture va engendrer des pièces comme les Chefs-dœuvre corrigés en 1938-1939, que Goetz appelle une « collaboration collective posthume ». Sur les fonds des reproductions, Goetz va laisser libre cours aux images associatives que lui suggèrent des œuvres célèbres. En les voyant, André Breton les nomme en 1939 les « chefs-d'œuvre corrigés ». Elles seront exposées dans leur ensemble pour la première fois en 1975 par la Galerie Jean-Claude Bellier à Paris, dans le cadre de lexposition rétrospective Henri Goetz.

La peinture de Goetz nest cependant jamais dirigée que par le symbolisme des rêves : la spontanéité et limagination lemportent toujours sur linterprétation du subconscient. Pour les surréalistes, le tableau est le théâtre dopérations mentales ; pour Goetz, il est principalement le lieu de construction dun monde inventé, limagination règne et le tableau se nourrit de ses propres sources. La différence est capitale : pour Goetz, tout repose sur lactivité imaginative et inventive et non sur la psychologie.

« Je croyais pouvoir créer des formes mon inconscient rejoindrait ceux des autres. Cette démarche nétait pas étrangère à celle des surréalistes mais sa réalisation sopérait dans un univers des formes pour moi abstraites, mais évocatrices dobjets connus, parfois organiques. Cette ressemblance ne mintéressait guère, ce qui méloignait des surréalistes. Lespace de mes tableaux ressemblait à celui des œuvres classiques. Je nétais pas considéré comme artiste abstrait et pourtant je me sentais plus près deux[1]. »

La Guerre

Le début de la guerre trouve Goetz et Christine en Dordogne. Grâce à sa nationalité américaine, Goetz nest pas mobilisable. À larrivée des Allemands à Paris, en juin 1940, ils décident dy rester, puisque lAmérique nest pas encore entrée dans le conflit. Mais Paris se vide rapidement, et ils partent alors pour Carcassonne rejoindre le groupe surréaliste belge de Magritte et Raoul Ubac. Deux mois plus tard, ils reviennent à Paris, dans leur nouvel atelier 72, rue Notre-Dame-des-Champs, ils fondent, avec Christian Dotremont et Raoul Uba La Main à plume, première revue surréaliste parue sous lOccupation.

Cest à cette époque que Goetz sengage dans la Résistance. Sa véritable activité est la fabrication de faux papiers, son habileté de peintre et sa connaissance des techniques dimpression étant mises au service de la lutte contre loccupant. Il imprime également des tracts et des affiches quil parvient à coller aux murs grâce à une technique spéciale, en jouant aux amoureux avec sa femme Christine.

En 1942, lAmérique entre en guerre et Christine et Goetz sont obligés de se cacher, en habitant des petits hôtels de Paris. Dénoncés par un poète surréaliste tchèque pour leur activité clandestine et comme « membres importants de la Résistance », ils sont contraints de quitter Paris.

Il illustre, en collaboration avec Christine, La Femme facile de Georges Hugnet. Il illustra également de dix lithographies les Explorations de Francis Picabia. Ils se réfugient à Nice et louent une chambre chez des habitants de la vieille ville. Retirés à Nice, les Goetz fréquentent Francis Picabia, Alberto Magnelli, Jean Arp, Nicolas de Staël. Décidés de partir pour lAmérique, ils en sont empêchés par loccupation allemande de la zone libre et la fermeture du consulat des États-Unis. Dénoncés de nouveau à Nice, ils doivent partir pour Cannes. De nombreux petits emplois exercés à Cannes leur permettent de survivre.

Après lexplosion dune bombe à retardement chez eux, les Picabia les hébergent le temps de trouver un nouveau logement. Pour Goetz, lamitié avec Picabia « était stimulante, plein détincelles de génie ». Marie Lluisa Borras, auteur dune monographie de référence sur Picabia en 1985, considère que « le retour à labstraction de Picabia est aux conversations avec ce jeune couple de peintres, Christine Boumeester et Henri Goetz […]. Ouverts et cordiaux, ils étaient amis avec de nombreux artistes de leur génération, Hartung, Vieira da Silva, Domela, Atlan ou Raoul Ubac, avec qui ils avaient fondé La Main à plume, considérée comme lorgane de la seconde vague surréaliste[6]. »

Un emploi trouvé à la mairie du Cannet permet à Goetz de ne pas partir en Allemagne pour le travail obligatoire. Son activités dans la résistance étant terminées, il reste au Cannet jusquà la fin des hostilités.

La Libération

À la Libération, Goetz rentre à Paris, il retrouve son atelier de la rue Notre-Dame-des-Champs. En 1945, René Guilly, que Goetz connait par Ubac, linvite faire des reportages pour la rubrique « peinture » de son émission hebdomadaire radio Le Domaine de Paris à la Radio diffusion française.

En 1947, Alain Resnais, futur cinéaste, tourne Portrait d'Henri Goetz, son premier film et en même temps le premier film sur un artiste vivant. Portrait d'Henri Goetz est un court-métrage muet, filmé avec une camera de 16 mm et dune durée de 21 minutes.

En 1949, Henri Goetz reçoit la nationalité française.

L'abstraction

Avant 1947, un changement sopère dans les dessins de Goetz. Il se détache progressivement de limprégnation surréaliste. Il soriente vers un graphisme, les images et les constructions sépurent, se simplifient, il donne de plus en plus dimportance à la ligne et au trait qui deviendront la matière même de la composition. Il faudra attendre 1947 pour que cette tendance se généralise dans tout son art.

Il n'y a plus de visions chargées par linconscient et les formes allusives : la primauté est donnée à la construction par la ligne, la technique picturale est dune touche plus libre et on ne trouve plus trace des glacis ni du clair-obscur. Une plus grande importance est donnée à la couleur et a sa puissance expressive. Goetz est en train de libérer et dexplorer sa palette.

L'abstraction de Goetz, au cours des années 1950, est voisine de celle de Hartung, de Soulages et de Schneider par la vivacité des tracés graphiques et le rôle des fonds colorés[7]. Dès 1960, le monde extérieur reprend place dans l'élaboration des œuvres, à partir des suggestions offertes par le paysage ou les objets (Bord de rivière en Corse, 1965, pastel à l'huile, coll. part.).

La période abstraite de 1947 à 1960 est une période de transition quil faut distinguer de labstraction comme constante de son esthétique. Dans cette période, lartiste fait le point sur tous les moyens dexpression, il expérimente, les choisit, les essaye, jusquà trouver ceux qui vont renouveler son style. Lespace de la peinture de Goetz change, il reçoit une nouvelle lumière. Lespace nest plus le rideau de scène, cest une réalité sensible. De 1950 à 1960, une géométrisation de plus en plus poussée saffirme. Les formes se dépouillent et se séparent finalement les unes des autres, sur un espace richement coloré.

Goetz ne renonce cependant pas à la profondeur au profit de la surface. Le traitement par volumes disparaît mais les fonds se diversifient : les couleurs séclaircirent et de nouvelles gammes apparaissent. Labstraction détourne Goetz de la technique traditionnelle et lui permet de découvrir la peinture dans son fonctionnement.

Au début de lannée 1959, Goetz et Christine quittent leur atelier Notre-Dame-des-Champs, trop petit pour deux artistes. Leur nouvel atelier se situe rue de Grenelle, au numéro 174, dans un grand pavillon avec un grand jardin. Ils y installent deux ateliers, un pour Goetz au rez-de-chaussée et un pour Christine à létage. Il a suffisamment de place pour y installer également un atelier de gravure.

Le couple passe beaucoup de temps, pendant les mois dété, dans leur cabanon au Cannet, sans aucun confort mais avec une vue magnifique sur la baie de Cannes. Goetz peint partout il se trouve. Pendant lune de ces sorties, sa démarche connaîtra un nouveau changement. Il saperçoit que sa peinture reçoit des influences de lextérieur, une lumière qui irrigue ses tableaux et des couleurs qui imprègnent celles quil utilise. Il va renouveler cette expérience en choisissant à chaque fois un lieu de travail différent. Le paysage dans lequel il se trouve sinfiltre à son insu dans sa peinture. Il réalise des tableaux abstraits daprès nature. Cest ainsi que débute sa période lyrique. Presque involontairement, Goetz trouve la réponse aux polémiques et aux querelles qui radicalisent les positions des artistes abstraits, une réponse qui convient à son œuvre, et il échappe ainsi aux dangers du formalisme. Ce changement bascule tout : la composition, les couleurs, la technique.

Durant cette période se situant entre 1960 et 1974, que lon pourrait qualifier de lyrique à cause de la technique picturale spécifique par des touches sensibles, le vocabulaire de Goetz sélabore et se constitue. Toutes les influences des courants des époques précédentes sont absorbées et intégrées dans son œuvre.

À partir de 1974, Goetz revient à une peinture datelier. « Je nai plus besoin de regarder la nature : elle est en moi maintenant. » Après la mort de Christine an 1971, lœuvre de Goetz se confond encore plus avec sa vie. Son art représente désormais une fusion entre lextérieur et son univers intérieur. Il séloigne du monde concret et sa sémantique picturale atteint une dimension cosmétique et planétaire. Jean-Pierre Geay, son ami et poète, appelle ce nouveau mode de représentation de lespace chez Goetz le « figuralisme ».

Le suicide

Tombe de Henri Goetz et Christine Boumeester au cimetière du Montparnasse.

Terriblement affaibli, Goetz est hospitalisé à Nice en août 1989. Il se suicide dans les dernières heures du 12 août 1989, en se jetant du cinquième étage de lhôpital Santa-Maria de Nice. Il est enterré le 23 août dans la 12e division du cimetière du Montparnasse à Paris, aux côtés de sa femme Christine Boumeester, morte dix-huit ans plut tôt.

Dans la lettre qu'il a laissée pour ses proches, Goetz écrit :

« Je crois que mes 80 ans nétaient pas inutiles[8]. »

L'œuvre gravé

Son œuvre gravé, important, entrepris en 1940, suit l'évolution de sa peinture. On estime sa production totale à quelque 650 estampes[9]. Le plus grand ensemble de ses estampes se trouve au Département des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque nationale de France. Y sont conservées 425 estampes[9] de toutes les périodes de sa production graphique : des burins, des eaux-fortes, des lithographies et quelques rares sérigraphies. Virtuose dans le maniement des techniques traditionnelles, Goetz enrichit la gravure de procédés nouveaux, tel la gravure au carborundum, technique aussi connue sous le nom du « procédé Goetz » (La Gravure au carborundum, 1969, Paris, Maeght éd.). À partir de l'année 1969, Goetz grave en utilisant exclusivement le procédé dont il est le créateur.

La gravure au carborundum

Goetz explique sa technique de manière très détaillée dans La Gravure au carborundum, publié en 1969 aux éditions Maeght. Dans cet ouvrage postfacé par Joan Miró, lun des premiers à bénéficier de la découverte de Goetz, lauteur explique la gravure au carborundum en utilisant des termes habituellement employés dans la gravure en taille douce classiqueaquatinte, vernis mou, burin, eau-forte. De fait, les effets que peut produire cette nouvelle technique sont parfois très semblables aux procédés de la taille douce classique. Mais Goetz est clair, son intention nest pas de remplacer les techniques existantes : la gravure au carborundum doit sajouter aux procédés connus et les compléter. Ce nouveau procédé a une qualité picturale toute autre : il révèle une spontanéité et une manière directe de créer. La technique permet des textures intéressantes et diverses, une grande richesse de matière plastique, ce qui est très bien exploité par ceux qui embrassèrent ce nouveau procédé et en profitèrent pour se lancer dans laventure de lestampe. Certains ont reçu cet apprentissage directement de Goetz, il sagit damis comme Coignard ou Clavé, ou encore Masson et Papart. Dautres, ses élèves, apprirent cette technique à latelier de gravure de son académie.

La naissance de cette technique remonte à ladolescence de Goetz. Cest en samusant avec son ami Bernard Wager, à fabriquer un four qui existe déjà depuis de nombreuses décennies mais quil croit avoir inventé, que Goetz découvre ce matériau résistant à la chaleur et à la pression, ce produit qui sert surtout dabrasif. Beaucoup plus tard, grâce à laide de ses amis Erich Schaeffer et Marc Havel, il utilise les caractéristiques du carborundum pour le mettre au service de lart : la gravure au carborundum est née.

Divers vernis et colles durcissant au séchage peuvent être utilisés pour fixer le carborundum sur la plaque. Le mélange s'applique à la brosse et donne en séchant une matière très dure. La plaque est ensuite encrée, essuyée et imprimée comme une gravure en taille-douce. L'utilisation du métal comme support n'est pas obligatoire. Tous les matériaux résistants et stables peuvent être utilisés. L'encre est la même que pour la taille-douce. Elle doit être rendue plus fluide pour permettre un encrage au pinceau. L'essuyage se fait à la tarlatane. L'impression se fait sur une presse taille-douce. La pression est réglée moins forte que pour la taille-douce classique. L'habillage est plus souple, et il consiste en un ou deux caoutchoucs mousses et de deux feutres. La technique au carborundum peut être combinée à dautres techniques de gravure. Elle permet la meilleure utilisation de la couleur et donne une plus grande richesse de matières.

Le pastel

Le pastel à huile Sennelier

En 1949, Henri Goetz demande à Henri Sennelier de développer un nouveau matériau pour son ami Pablo Picasso. Picasso est en recherche d'une technique qui lui permettrait de s'exprimer sans aucune contrainte, une sorte de nouveau matériau alliant la peinture à l'huile, pour sa richesse picturale, et le pastel tendre, pour sa facilité d'application. De cette collaboration va naître le pastel à lhuile Sennelier.

Les pastels chauffés

En 1979, Goetz exécute ses premiers pastels chauffés sur papier. En chauffant le support, le bâton du pastel fond au contact du papier. Goetz parvient ainsi à peindre avec la matière même, une matière colorée, de manière directe et sans aucun intermédiaire. Pendant un de ses nombreux voyages, Goetz apprend la technique de fabrication du papyrus. À son retour à Paris, il maîtrise la technique et fabrique ses propres papyrus. Il sen sert comme support pour ses pastels et ses dessins.

L'enseignement

En 1949, débute sa carrière denseignant. Dabord au sein de son atelier, qui devient rapidement insuffisant pour accueillir de nombreux élèves. Goetz transfère alors son cours à lacadémie Ranson. Cinq ans plus tard, à partir de 1955, il enseigne à lacadémie de la Grande Chaumière, il était lui-même élève vingt ans plus tôt. Très rapidement, il est contraint douvrir deux ateliers à la place d'un, en raison du nombre croissant de ses élèves. En 1963, il commence à enseigner pendant l'été au Conservatoire américain de Fontainebleau, cette école réservée aux étudiants américains.

Après avoir enseigné dans plusieurs académies, il sinstalle dans les anciens locaux d'André Lhote, au 18 rue dOdessa (passage du Départ), il fonde sa propre académie, lacadémie Goetz. C'est dans sa propre académie que Goetz organise pour la première fois l'enseignement de la gravure. En revanche, Goetz n'enseignera jamais directement la gravure ni ses procédés aux élèves de son académie. D'autres s'en chargent, principalement ses anciens élèves, comme Lorainne Bénic, graveur canadien, Denise Zayan, peintre et graveur parisien, Dikran Dadérian, peintre d'origine libanaise, ou plus tard encore Anne-Marie et Claude Bourguignon, tous les deux graveurs[9].

En 1974-1975, la démolition du passage du Départ oblige Goetz à transférer l'académie au 17 rue des Lyonnais, dans le 5e arrondissement. Une atelier de gravure y fonctionne aussi. Goetz n'est pas payé pour son travail denseignant. Il y voit une expérience humaine qui sajoute à celle de la peinture.

« Cet enseignement mapporte au moins autant quil apporte aux autres et jaime dire que je suis parmi les meilleurs élèves de mes ateliers, car plus on sait, plus lon est à même dapprendre[10]. »

Il continue à enseigner jusqu'à 1984.

Les musées et les collections privées

L'œuvre de Goetz est représenté dans les musées français (musée national d'Art moderne, Grenoble, Strasbourg, Tourcoing, Saint-Étienne, Lyon), européens (Fondation Miró à Barcelone, Budapest, Bruxelles, Sarrebruck, Rome), américains (New York, Palm-Beach, Cincinnati, San Francisco, Oklahoma City) et d'ailleurs (Rio de Janeiro, Kyoto, Jérusalem).

Un musée Goetz-Boumeester a été créé en 1983 à Villefranche-sur-Mer.

Centenaire de la naissance

À l'occasion du centenaire de la naissance d'Henri Goetz, trois expositions sont présentées à Montpellier :

  • Du 4 mars au 11 avril 2009, Années 1935-1960, galerie Hélène Trintignan
  • Du 4 mars au 11 avril 2009, Années 1960-1989, galerie Hambursin-Boisanté
  • Du 4 mars au 4 avril 2009, Œuvre gravé d'Henri Goetz, 24 rue Alexandre-Cabanel

Du 15 mai au 12 septembre 2009, une exposition rétrospective, Hommage à Henri Goetz, est également organisée à la galerie Rémy Bucciali à Colmar.

Bibliographie

  • Jean-Roger Lorsky, Henri Goetz, Paris, Presses littéraires de France, 1952
  • Jean Bruller, alias Vercors, Goetz, Paris, Le Musée de poche Jacques Goldschmidt, 1958
  • Alexandre Galpérine, Goetz, Paris, Le Musée de poche Jacques Goldschmidt, 1972
  • Gunnar Bergström, L'Œuvre gravé de Henri Goetz, texte de Christian Tisari, Stockholm, Sonet, 1973
  • Henri Goetz, Gravure au carborundum. Nouvelle technique de l'estampe en taille douce, postface de Joan Miró, édition corrigée et augmentée de nouveaux procédés, Paris, Maeght éd., 1974 (première édition en 1969, Paris, Maeght éditeur)
  • Karl Masrour, Henri Goetz, catalogue raisonné de lœuvre gravé, textes d'Oscar Reutersvärd et de Michel Melot (en collaboration avec Denise Zayan), Paris, Art moderne, 1977
  • Maurice Rousseau-Leurent, Gravure au carborundum / Carborundum engraving, préface de Henri Goetz, édité à compte d'auteur, Monte-Carlo, 1985
  • Jean-Pierre Geay, Goetz, Paris, Cercle d'Art, 1989 (ISBN 2-7022-0249-7)
  • Henri Goetz, Ma vie, mes amis, Paris, Climats, 2001 (ISBN 2-8415-8192-6)
  • Henri Goetz, Catalogue raisonné[11], Peintures - œuvres sur papier, tome I, 1930-1960, Frédéric Nocera, 2001 (ISBN 2-909779-25-4)
  • Henri Goetz, catalogue d'exposition, texte de Numa Hambursin, Montpellier, galerie Hélène Trintignan, 2009
  • Stanko Josimov, « L'œuvre gravé de Henri Goetz », mémoire[12] de recherche sous la direction de Mme Marianne Grivel, université Paris-IV-Sorbonne, septembre 2009 (comporte aussi le supplément au catalogue raisonné de Karl Masrour)

Références

  1. a et b Mes démarches, lettre manuscrite par Goetz datée de 10 juin 1975, reproduite dans la plaquette de la Galerie La Pochade, à loccasion dune exposition itinéraire dans les centres culturels.
  2. Goetz, Ma vie, mes amis, Paris, Climats, 2001.
  3. Autoportrait, pastel et fusain sur papier, 60 x 47 cm, 1935, Musée Goetz-Boumeester, Villefranche-sur- Mer.
  4. Archives Goetz, MNAM.
  5. Galpérine, Goetz, Paris, Musée de Poche, 1972.
  6. Francis Picabia, singulier idéal, Musée dart moderne de la ville de Paris, 2002.
  7. Peinture, 1956, Paris, MNAM
  8. À lheure du pop, émission diffusée le 11 décembre 1989 sur France Inter, et entièrement consacrée à Goetz.
  9. a, b et c Josimov, Stanko, L'Œuvre gravé de Goetz, mémoire de recherche, Paris IV-Sorbonne, septembre 2009, p. 15.
  10. Ariel n° 1, à loccasion de lexposition Goetz, 13 ans de peinture 1952-1965, galerie Ariel, 1966.
  11. Voir sur le site officiel.
  12. Voir sur issuu.com.

Liens externes


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Henri Goetz de Wikipédia en français (auteurs)

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