- Hautes Fagnes
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Les Hautes Fagnes forment une région qui s'étend, en Belgique dans la Région wallonne (province de Liège) et, en Allemagne, dans la Rhénanie-Palatinat et la Rhénanie-du-Nord-Westphalie). En néerlandais, Hoge Venen, en allemand, Hohes Venn. Bien que constituant un site de grande importance à l'échelle nationale, les Hautes Fagnes, à l'inverse du plateau des Tailles, ne font pas partie du Patrimoine majeur de Wallonie.
En 1957 fut créée la réserve naturelle domaniale des Hautes Fagnes. Depuis 1971, la réserve est englobée dans le Parc naturel Hautes Fagnes - Eifel. Couvrant plus de 4 200 ha, la réserve est une aire où sont protégés intégralement la faune, la flore, le sol et le paysage.
Il ne faut pas confondre les Hautes Fagnes avec la Fagne, une autre région naturelle qui s'étend en Belgique et en France.
Le Signal de Botrange (694 mètres) est le sommet de la Belgique.
Ce sont de vastes étendues (4100 ha en Belgique) de tourbières, de landes et de forêts qui présentent une flore et une faune assez exceptionnelles liées au climat froid et humide. Les contreforts au nord du plateau accueillent essentiellement de vastes plantations de conifères : c'est la forêt du Hertogenwald.
Les tourbières se sont formées il y a 7500 ans, à la fin de la dernière glaciation. La tourbe résulte de la décomposition des végétaux, notamment les sphaignes, en milieu très humide. Son épaisseur peut atteindre sept mètres. Jusqu'au milieu du XXe siècle, la tourbe constitue pour les habitants des villages proches, une source de chauffage appréciable. La surface des tourbières actives ne représente plus qu'une centaine d'hectares.
Le plateau des Hautes Fagnes est le plus important massif tourbeux en Belgique. Les autres massifs importants sont le Plateau des Tailles, le Plateau de Saint-Hubert et la Croix-Scaille.
Sommaire
Histoire
Aux VIIe et VIIIe siècles, la Via Mansuerisca est une voie de liaison entre la chaussée romaine de Trèves à Cologne et la chaussée romaine de Bavay à Cologne. Cette voie est mentionnée pour la première fois en 670, dans un diplôme du roi franc Childéric II. La région devient progressivement un lieu de passage et de commerce important entre les différentes principautés qui vont se constituer (et lieu de perception de droits de douane), comme en témoigne toujours pour partie la toponymie (voie du fer, voie du cuivre, ...).
Des villages, comme Ovifat, Robertville, Elsenborn, Sourbrodt, Jalhay, Solwaster ou Hockai vont progressivement s'établir en bordure du plateau, dont les habitants exploiteront les ressources disponibles pour la pâture du bétail, la récolte de tourbe à brûler ou encore pour l'essartage.
Longtemps, les frontières administratives passent par la Baraque Michel. Au nord-ouest, le marquisat de Franchimont (principauté de Liège), au nord-est, le duché de Limbourg et le duché de Juliers, au sud-est, le comté, puis le duché de Luxembourg, au sud-ouest, la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy.
En 1795, la région devient française (département de l'Ourthe).
Le Congrès de Vienne de 1815 découpe le plateau des Hautes-Fagnes en deux territoires, séparés par une ligne nord-sud passant essentiellement par la Helle et l'Eau Rouge :
- Stavelot et l'ouest du plateau reviennent aux Pays-Bas
- Eupen, de langue allemande, et Malmedy, de langue wallonne, reviennent à la Prusse. Ces territoires deviennent belges en 1920.
Dès le XIXe siècle, le paysage de tourbières est profondément modifié par la plantation massive d'épicéas qui bouleverse l'écologie du lieu.
En 1924, l'Université de Liège installe une station scientifique pour étudier le haut plateau sous tous ses aspects.
Les territoires contestés sont réintégrés au Reich suite à l'invasion de 1940. Cette période de la Seconde guerre mondiale vera notamment l'installation du camp de travail des prisonniers russes de Bosfagne.
En décembre 1944, le plateau limite au nord l'offensive de la bataille des Ardennes. Des unités allemandes attaquent Montjoie au nord-est des Hautes-Fagnes. Initialement, le plan allemand prévoyait une pénétration en profondeur par Losheimergraben, Rocherath et Elsenborn. Cette poussée sera repoussée les troupes américaines qui parviendront à tenir la crète d'Elsenborn. Néanmoins, une colonne allemande, sous les ordres de Joachim Peiper, atteindra notoirement Stavelot dans la région, sans jamais tenter de prendre le plateau. Elle sera arrêtée à La Gleize en tentant de contourner le plateau par le Sud puis l'Ouest via la vallée de l'Amblève. On notera aussi que les Allemands tenteront un parachutage de troupes sur les Hautes-Fagnes en vue d'arrêter aux environs du carrefour de Belle-Croix et de la Baraque Michel les renforts américains dépêchés dans la région d'Elsenborn et de Butgenbach (Opération Stösser). Cette opération se soldera par un échec total. Les troupes allemandes seront par ailleurs arrêtées sur les hauteurs de Spa peu avant la Géronstère[1].
Les territoires annexés par le Reich en mai 1940 réintègrent le territoire belge dès la libération.
En 1957 est créé le parc national des Hautes Fagnes. Sa superficie est de 4 200 ha.
En 1971 est créé le Parc naturel Hautes Fagnes-Eifel qui s'étend sur 2 400 km², dont 700 km² en Belgique.
À la fin du XXe siècle, la pression touristique est telle que des mesures conservatoires sont prises, notamment en interdisant certaines zones, en limitant l'accès à d'autres. Cela n'empêche pas le haut plateau d'être envahi l'été par des amoureux de la nature et l'hiver par des milliers de skieurs de fond venus de Belgique, mais aussi des régions proches d'Allemagne et des Pays-Bas.
Climat
Le climat est anormalement rude par rapport à la faible altitude maximale. Précipitations abondantes (1400 mm d'eau par an à Botrange, 850 mm à Bruxelles), brouillard épais, neige persistante, mais le réchauffement climatique amoindrit la rudesse des hivers depuis quelques années[réf. nécessaire]. Quelques records : 1,15 m de neige le 9 février 1953 ; il neige parfois encore au mois de mai.
Monuments et sites remarquables
- Les lacs artificiels de Robertville et de Bütgenbach sur la Warche, dont les barrages contribuent à la production d'électricité.
- Les barrages de la Gileppe, le second en béton construit en Europe (1867 - 1875) et de la Vesdre (1938-1950) ; les lacs sont une réserve d'eau potable.
- Lacs de l'Olef, de la Kall, du Perlenbach, du Dreilägerbach et de la Rour à l'est du plateau, en Allemagne;
- Le Signal de Botrange, le point culminant de la Belgique avec 694 mètres ; une butte aménagée (Butte Baltia) permet d'atteindre les 700 mètres. Une tour en pierre y est érigée en 1933 (hauteur : 28 m).
- A 500 m de là, en direction de Robertville, Le Centre nature accueille les visiteurs et leur fait connaître la région (panneaux didactiques, promenades guidées). Le centre organise également, en collaboration avec le Gîte d'étape à Ovifat, des classes vertes (à destination des écoles) et des animations ponctuelles (expositions, marché de Noël,...)
- La Baraque Michel : une des auberges fagnardes ; à ses côtés, la Chapelle Fischbach.
- La Croix des Fiancés : souvenir de la mort, le 31 janvier 1871, d'un couple de fiancés partis de Jalhay, dans la neige, chercher les documents nécessaires à leur mariage à Xhoffraix ; on les retrouve à peu de distance l'un de l'autre deux mois plus tard.
- Kreuz im Venn : aux environs de Kalterherberg, un rocher isolé surmonté d'une croix chrétienne.
- De nombreuses autres croix parsèment la fagne, témoins de la mort de téméraires qui ont eu la prétention de vouloir défier le pays des tourbières.
Phénomènes géologiques remarquables
- Les contreforts du plateau accueillent de nombreux pouhons, sources ferrugineuses carbo-gazeuses naturelles.
- Présence de palses, des étangs d'origine glaciaire, en particulier dans les Hautes Fagnes nord-orientales.
- Quelques traces d'une roche volcanique, la tonalite, peuvent être observées dans une carrière au lieu-dit Herzoghügel ( ) dans la vallée de la Helle. Ce sont les seules roches volcaniques de l'est de la Belgique, proche cependant des volcans de l'Eifel.
Géographie
Le plateau des Hautes Fagnes s'étend d'est-nord-est en ouest-sud-ouest, circonscrit au nord par la Vesdre et au sud par la Rour, la Warche puis l'Amblève. Les routes qui le traversent du nord au sud et les rivières qui y creusent de profondes vallées déterminent plusieurs zones de fagnes proprement dites (non boisées). En partant de l'ouest-sud-ouest :
- la fagne de Malchamps, traversée par la route de Spa vers Stavelot. Elle est limitée à l'ouest par la vallée de l'Amblève, à l'est par les vallées de la Hoëgne et l'autoroute E42. La fagne alimente en eau les sources ferrugineuses de Spa. L'aéroport de la ville se situe au nord en bordure, et le Circuit de Spa-Francorchamps au sud. Le Wayai y trouve sa source.
- les Hautes Fagnes sud-occidentales, aux alentours de la Baraque Michel et du Signal de Botrange. La rivière de la Helle les limite par l'est. Une route reliant d'une part Verviers et Eupen (au nord), et d'autre part Malmedy (au sud), les traverse (N.B. la branche de cette route reliant le carrefour de Belle Croix à Verviers n'est pas représentée sur la carte). Les rivières de la Gileppe, de la Statte, de la Hoëgne, de l'Eau Rouge, du Trôt Marets, du Bayehon, de la Rour, du Schwarzbach, de la Helle et de la Soor y prennent leur source.
- les Hautes Fagnes nord-orientales, limitées à l'est par la Vesdre et traversée par la route Eupen - Montjoie (en Allemagne). Y prennent source le Spoorbach, la Ghete et la Vesdre.
- Un autre plateau proche, ne faisant pas à proprement parler partie des Hautes-Fagnes, peut cependant y être associé : le plateau de Rocherath. Il héberge notamment le camp militaire d'Elsenborn, dont l'essentiel de la superficie est constitué de landes et de fagnes. Prennent source sur le plateau la Warche, l'Olef et la Schwalm (ou Perlenbach). La Rour sépare ces deux plateaux, écologiquement, climatologiquement et géologiquement proches.
Faune
- Grands mammifères
- Oiseaux (à compléter)
- Tétras lyre (coq de bruyère): le recensement du printemps 2004 fait état de 27 mâles.
- Caille des blés
- Rouge-gorge
- Locustelle tachetée
- Pie-grièche grise
- Pipit farlouse
- Tarier pâtre
- Traquet motteux
- Vanneau huppé
- Cigogne noire
- Cassenoix moucheté
- Reptiles (à compléter)
Flore
Plantes répandues
- Les sphaignes.
- Les graminées :
- molinie bleue (Molinia coeralea)
- nard (Nardus stricta)
- Les laîches :
- Carex rostrata
- Carex echinata
- Carex canescens
- Les joncs :
- Juncus acutiflorus
- Juncus squarrosus
- Les linaigrettes :
- linaigrette vaginée (Eriophorum vaginatum)
- linaigrette à feuilles étroites (Eriophorum angustifolium)
- Les bruyères :
- bruyère quaternée (Erica tetralix)
- callune (Calluna vulgaris)
- Les airelles et myrtilles :
- airelle (Vaccinium vitis-idaea)
- myrtille (Vaccinium myrtillus)
- myrtille de loup (Vaccinium uliginosum)
- Le fenouil des Alpes (Meum athamanticum) : notamment dans la vallée de la Schwalm et à la Baraque Michel
- Le comaret (Potentilla palustris)
- Le trèfle d'eau (Menyanthes trifoliata)
- L'orchis tacheté (Dactylorhiza maculata)
- Les jonquilles (Narcissus pseudonarcissus), qui faisaient autrefois l'objet d'une cueillette intensive ; elles étaient utilisées dans la région de Malmedy pour teindre les œufs de Pâques en jaune. Aujourd'hui leur cueillette est réglementée (1 bouquet par personne) et strictement contrôlée pour prévenir les dévastations.
Plantes remarquables et peu répandues
- Le rossolis à feuilles rondes (Drosera rotundifolia), plante carnivore
- La canneberge (Vaccinium oxycoccos)
- L’andromède (Andromeda polifolia)
- La camarine (Empetrum nigrum)
- La trientale (Trientalis europaea), symbole de la réserve.
- La gentiane des marais (Gentiana pneumonanthe)
- Les lycopodes :
- La narthécies des marais (Narhecium ossifragum)
- L’orchis des sphaignes (Dactylorhiza sphagnicola)[3]
- L’arnica (Arnica montana)
- Le jonc filiforme (Juncus filiformis)
- Le rhynchospore (Rhynchospora alba)
- La laîche pauciflore (Carex pauciflora)
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La Gentiane des marais dans la vallée de la Helle
Mégalithes
Les Hautes Fagnes abritent plusieurs roches remarquables, tels Kreuz im Venn (près de Kalterherberg), la Bilisse (vallée de la Statte) et le Bidley (vallée de la Schwalm). Certaines pourraient être des créations humaines, tels le dolmen de Solwaster ou le lit de Charlemagne. Dans le premier cas, l'hypothèse paraît cependant très peu probable[4].
Les bornes-frontières et les croix de pierre et de bois sont nombreuses, témoignant du riche passé historique de la région.
Évènements
- 9 et 10 août 2004 : un incendie ravage 150 ha de fagnes près de la Baraque Michel.
- 25 et 26 avril 2011 : un incendie se déclare aux environs de la Croix Mockel ( ), détruisant plus de 1300 ha de végétation[5].
Homonymie
- Une autre région de Belgique porte le nom de Fagne. Elle est située dans le sud de la province de Namur du côté ouest de la vallée de la Meuse.
- D'autres zones de haut-marais existent sur les points culminants de l'Ardenne, généralement également appelés fagnes, en particulier sur le Plateau des Tailles et à la Barrière de Champlon.
Règlementation pour l'accès du public
En tous lieux et tous temps, il est interdit de circuler en fagnes entre le coucher et le lever du soleil.
De jour, les accès dépendent de la protection de la zone :
- Zone A - Libre d'accès
- Zone B - Uniquement sur les chemins balisés
- Zone C - Uniquement avec guides nature reconnus
- Zone D - Interdiction totale
Dans certains endroits sensibles, ces limitations sont encore renforcées en période de nidification, de la mi-mars à fin juillet.
Hormis la promenade didactique de la fagne de la Poleûr, toutes les promenades en fagne sont interdites lorsque les drapeaux rouges (situés en bordure des grands axes) sont hissés : ils signifient qu'il y a risque d'incendie. Même si le temps paraît pluvieux, il se peut que les sous-sols ne soient pas suffisamment humidifiés. Les consignes doivent donc être respectées.
Sources
- L'article est en partie inspiré par Les Hautes Fagnes, Carl Kamp, Eifelverein Düren, 1971
- Guide du Plateau des Hautes Fagnes, Robert Collard et Vladimir Bronowski, Editions de l'Octogone, 1993
- Aperçu climatique des Hautes-Fagnes, Pascal Mormal et Christian Tricot, Institut royal météorologique de Belgique, 2004
- Les oiseaux des Hautes-Fagnes. Histoire et géographie des oiseaux nicheurs, Metzmacher Maxime. Editions Eole, 2004.
- Guillaume Apollinaire qui vécut à Stavelot en 1899 décrivit la région dans un poème Fagnes de Wallonie
Étude et promotion
- L'association Les Amis de la Fagne, née en 1935, réunit les amoureux et défenseurs de la région.
- L'Université de Liège a créé une Station scientifique en fagnes, pour promouvoir des études géologiques, climatologiques, historiques, etc. Elle est sise à côté du Mont Rigi.
- Le Centre nature de Botrange a une vocation de vulgarisation sur ces thèmes.
- Le Fonds régional de la bibliothèque de Stavelot rassemble de nombreux documents (livres, revues, DVD, photographies aériennes, cartes géographiques, cartes de végétation, …) et de nombreux outils pour découvrir et comprendre les multiples facettes des Hautes-Fagnes et de la Haute-Ardenne. Ce Fonds est ouvert les mardi : 13h-16h, mercredi 13h-16h, jeudi : 9h-11h et 14h-16h ou sur rendez-vous au 080 / 88 05 26. Adresse : Cour de l’Abbaye, 1 à 4970 Stavelot.
Galerie de photos
Photos du site
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La colonne du Boulté, située à proximité de la Baraque Michel, elle aurait servi de repère pour les protestants traqués dans la région
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Bornes frontières aux sources de la Schwalm : Juliers-Luxembourg (Ancien Régime) à gauche et Belgique-Prusse à droite
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Pouhon de la source de la Sauvenière à Spa
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Etang de Schwarzbach, vestige de la dernière glaciation
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Exploitation d'une tourbière dans les Hautes Fagnes
Liens externes
- Le Centre nature de Botrange
- Le parc naturel des Hautes Fagnes
- Le site de la Station scientifique du Mont Rigi
- Programme LIFE-Nature Restauration des landes et tourbières du Plateau des Hautes Fagnes
- Visite d'hiver dans les Hautes Fagnes
- Visite du Noir Flohay en hiver
Notes
- Un monument commémoratif se trouve au niveau du croisement avec la route vers Creppe
- Un petit dossier pour mieux connaître la région des Hautes Fagnes(19/08/2007)
- Dactylorhiza sphagnicola
- voir revue "Hautes Fagnes" du 2ème trim. 2010
- Hautes Fagnes : 1.300 hectares détruits - Le Soir - 28 avril 2011
Catégories :- Hautes Fagnes
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