- Harmoniques sphériques
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Harmonique sphérique
En mathématiques, les harmoniques sphériques sont des fonctions harmoniques particulières. À titre de rappel, une fonction est dite harmonique lorsque son laplacien est nul. Les harmoniques sphériques sont particulièrement utiles pour résoudre des problèmes invariants par rotation, car elles sont les vecteurs propres de certains opérateurs liés aux rotations.
Les polynômes harmoniques P(x,y,z) de degré l forment un espace vectoriel de dimension 2l + 1, et peuvent s'exprimer en coordonnées sphériques à l'aide de 2l + 1 combinaisons :
, avec .
Les coordonnées sphériques sont, respectivement, la distance au centre de la sphère, la colatitude et la longitude.
Tout polynôme homogène est entièrement déterminé par sa restriction à la sphère unité S2.
Définition — Les fonctions sur la sphère obtenues par restriction de polynômes homogènes harmoniques sont des harmoniques sphériques.
C'est pourquoi la partie radiale de l'équation de Laplace, différente selon le problème étudié n'apparaît pas ici.
Les harmoniques sphériques sont utilisées en physique mathématique, dès qu'intervient la notion d'orientation (anisotropie) et donc de rotation (groupe de symétrie orthogonal SO(3)) et que le laplacien entre en jeu :
- en acoustique (reconstitution de l'effet d'espace par plusieurs haut-parleurs)
- en théorie du potentiel newtonien (électrostatique, mécanique), gravimétrie ...
- en géophysique (représentation du globe terrestre, en météorologie)
- en cristallographie pour la texture,
- en physique quantique (développement d'une fonction d'onde, densité du nuage électronique, description des orbitales atomiques de l'atome d'hydrogène)
- etc.
Sommaire
Résolution de l'équation de Laplace
On cherche les fonctions sous la forme d'un produit de deux fonctions d'une seule variable :
où k est une constante, qui sera fixée ultérieurement par la normalisation. L'équation aux valeurs propres devient une équation différentielle linéaire d'ordre deux pour la fonction Pl,m(cosθ) :
On fait le changement de variable : qui conduit à l'équation différentielle généralisée de Legendre :
Les valeurs propres de cette équation sont indépendantes de m :
Les fonctions propres Pl,m(x) se construisent à partir des polynômes de Legendre Pl(x) qui sont les fonctions propres de l'équation différentielle ordinaire de Legendre, correspondant au cas m = 0 :
On a la formule génératrice d'Olinde Rodrigues :
On construit alors les fonctions propres Pl,m(x) par la formule :
soit explicitement :
Remarque : il suffit en pratique de calculer les fonctions Pl,m(x) pour , car il existe une relation simple entre Pl,m(x) et Pl, − m(x) :
Expression des harmoniques sphériques
On obtient alors l'expression inscrite plus bas. Une manière simple de retenir cette expression est la suivante :
, où Pl(x) est le polynôme de Legendre de degré l.
On obtient ensuite :
où
est l'opérateur « d'échelle montante ».
Pour m négatif,
Note : on pourra soi-même intuiter l'existence d'un opérateur d'échelle descendante, et vérifier la cohérence des résultats obtenus.
Souvent cette base se note :
toute fonction sur la sphère S2 pourra donc s'écrire :
(en convention de sommation d'Einstein), les coefficients complexes f(l,m) jouant le rôle de composantes de f dans la base des (on dit parfois coefficients de fourier généralisés).
En chimie ou en géophysique, il arrive qu'on préfère utiliser les harmoniques sphériques « réelles » et des coefficients de fourier réels.
Expression mathématique
Les harmoniques sphériques formant une base orthogonale sur la sphère unité, toute fonction continue se décompose en une série d'harmoniques sphériques :
où l et m sont des indices entiers, Clm est un coefficient constant et souvent en mathématiques prend le nom de coefficient de Fourier généralisé relativement à cette base.
Le développement en harmoniques sphériques est l'équivalent, appliqué aux fonctions angulaires, du développement en séries de Fourier pour les fonctions périodiques.
Ylm est la partie réelle d'une fonction complexe Ylm
Ylm est appelée « fonction associée de Legendre » et est définie par
où i est l'imaginaire et Plm est le polynôme de Legendre :
On a donc
On a par exemple :
- (Y00 est isotrope) ;
- ;
- ;
- ;
Les fonctions Ylm(θ, φ) présentent de plus en plus de symétries au fur et à mesure que l croît (sauf lorsque l = 0, puisque Y00 est une fonction constante et décrit donc une sphère).
Polynômes de Legendre
Pour les harmoniques circulaires, on utilise des polynômes Pl de la fonction cosinus :
Yl(θ) = Pl(cosθ) Les polynômes Pl utilisés sont les polynômes de Legendre1 :
(formule de Rodrigues, mathématicien suisse) On obtient :
- (fonction isotrope) ;
- ;
- ;
- ;
Harmoniques sphériques normalisées
Base orthonormale des harmoniques sphériques
Parmi les (2l + 1) fonctions, l'habitude a été prise de sélectionner une base orthomormale sur la sphère S2 munie de la mesure
, soit le produit scalaire (hermitien en fait) :
Les harmoniques sphériques sont les solutions de l'équation aux valeurs propres [1] :
où l'opérateur laplacien s'écrit en coordonnées sphériques sur la sphère de rayon unité, J2 :
Elles sont fonctions propres de l'opérateur :
Celles-ci, une fois normées sur la sphère sont alors notées usuellement , où les angles sont les coordonnées sphériques sur la sphère de rayon unité, et l et m sont deux nombres entiers tels que :
Normalisation
Les harmoniques sphériques constituent une base orthonormale de fonctions propres de l'opérateur laplacien sur la sphère de rayon unité S2 au sens où :
Elles sont orthogonales pour le produit scalaire suivant :
Dans cette formule, représente l'angle solide élémentaire :
Toute fonction suffisamment régulière admet un développement en série :
où les coefficients complexes al,m se calculent par :
Expression des harmoniques sphériques normalisées
Les harmoniques sphériques généralisées sont définies sur la sphère S3. La normalisation des harmoniques sphériques conduit à l'expression finale :
Représentations graphiques
Représentation sphérique
Si l'on utilise la représentation sphérique
alors la surface représentatrice est une sphère bosselée ; les bosses correspondent aux parties où Ylm est positif, les creux aux parties où Ylm est négatif. Lorsque θ et décrivent l'intervalle [0;2π[, Ylm(θ, φ) s'annule selon l cercles :
- m cercles suivant un méridien, une iso-longitude (intersection entre un plan contenant Oz et la sphère) ;
- l − m cercles suivant un parallèle, une iso-latitude (intersection entre un plan parallèle à Oxy et la sphère).
Le paramètre l est appelé le « degré », m est appelé l'« ordre azimutal ». Entre les cercles d'annulation, la fonction est alternativement positive ou négative.
Nous représentons ci-dessous quatre coupes de l'harmonique sphérique Y32 :
Comme précédemment, on peut représenter la fonction par la courbe en coordonnées sphériques :
les parties en blanc sont positives, en bleu négativesReprésentation en coupe
Les harmoniques sphériques peuvent être représentées de façon plus simple sans les ventres de vibration, en ne gardant que les noeuds, comme le montre le tableau suivant[2]. Ce sont les sphères de la figure du haut, projetées sur un plan vertical. On retrouve sur la dernière ligne les quatre sphères de la première figure ci-dessus où l = 3. Les quatre valeurs de m y varient de 0 à 3 en valeur absolue. Sur la figure ci-après, on distingue les valeurs négatives pour tenir compte de ce que la rotation peut se faire dans un sens ou dans l'autre pour m > 0. Pour montrer la concordance avec les harmoniques, leur plus simple expression est donnée sous chaque sphère.
On reconnaît les nombres quantiques secondaire l, correspondant aux sous-couches s, p, d, f et m, magnétique, de l'atome d'hydrogène. Le nombre quantique principal n n'apparaît pas car les modes radiaux sont différents selon le problème étudié, résonance acoustique, atome d'hydrogène ou autre.
Pour montrer la concordance avec la littérature, l’expression des harmoniques sphériques est donnée sous chaque sphère. Le nombre et la valeur des zéros des polynômes de Legendre associés, non normalisés, donne le nombre de parallèles et leur position sur l’axe vertical. L’exponentielle imaginaire exp(imφ), de module unité, utilisée habituellement au lieu des sinus et cosinus, donne le nombre de méridiens. Les valeurs de ne s’observent que dans les états excités ou les atomes de Rydberg où la valeur habituelle de l est 50 et dont l'orbitale est représentée non par une sphère mais par par un anneau[3].
Représentation cartésienne et polaire
On peut représenter les harmoniques circulaires de trois manières :
- en coordonnées cartésiennes : y = Yl(θ) ;
- en coordonnées polaires : r = r0 + r1.Yl(θ)
avec r1 < r0, utilisé par exemple pour un objet circulaire ; la courbe coupe le cercle de centre O et de rayon r0 lorsque la fonction s'annule ; - en coordonnées polaires : r = | Yl(θ) | 2
utilisé par exemple pour les fonctions d'onde en physique quantique.
Trois premières harmoniques circulaires Représentation cartésienne Représentations polaires (tracé manuel) Représentations polaires (tracé exact) Y1 Y2 Y3 Autres harmoniques
Harmoniques circulaires
Dans le plan, la décomposition s'écrit :
Y0 est une fonction constante, la courbe représentatrice en coordonnées polaires r = Y0(θ) est donc un cercle de rayon r0.
Yl est une fonction invariante par une rotation d'un angle de 1 / (l + 1) tour, c'est-à-dire que
on dit que Yl admet une symétrie d'ordre l + 1.
Harmoniques sphériques généralisées
Lorsque l'on considère l'orientation d'un objet dans l'espace, il faut faire appel à trois angles ; on utilise en général les angles d'Euler (ψ, θ, φ).
Considérons une fonction continue de l'orientation ƒ(ψ, θ, φ) ; comme précédemment, cette fonction peut être décomposée en harmoniques sphériques généralisées
où Clmn est une constante. La fonction Ylmn s'écrit :
Le polynôme Plmn est le polynôme de Legendre généralisé
Quand X décrit l'intervalle [ − 1;1], cette fonction Plmn est soit réelle, soit imaginaire pure. Y000(ψ, θ, φ) est la fonction isotrope (symétrie sphérique).
D'après la loi de composition des rotations, on a :
et en particulier
On a de manière générale :
Par exemple pour l = 1 :
m n -1 0 +1 -1 0 cosθ 1 Pour l = 2 :
m n -2 -1 0 +1 +2 -2 -1 0 1 2 Voir aussi
Liens internes
- Atome
- Mécanique quantique
- Atome d'hydrogène
- Orbitale atomique, orbitale moléculaire
- Opérateur laplacien
- Polynôme de Legendre
- Géoïde
- Ambisonie
Liens externes
- Champs géophysiques, C. Vigny, cours de l'École normale supérieure
- La prévision numérique avec le modèle ARPEGE sur le site de Météo-France rubrique Comprendre la météo > Dossiers thématiques > La prévision numérique
- Simulateur d'harmoniques sphériques (programme JavaScript), site de l'École polytechnique (X), Palaiseau, France
- Spherical Harmonic, du site [http ://mathworld.wolfram.com/ Eric Weisstein's World of Mathematics]
- Oscillations propres de la Terre lors d'un séisme, une des applications des harmoniques sphériques (images gif animées) ;
- Représentations 3D de fonctions d'orientation
Bibliographie
- I.S. Gradshteyn & I.M. Ryzhik ; Table of Integrals, Series, and Products, Alan Jeffrey and Daniel Zwillinger (eds.), Academic Press (6e édition — 2000), ISBN 0-12-294757-6. Errata sur le site web des éditeurs : [http ://www.mathtable.com/gr/ www.mathtable.com]
- John D. Jackson ; Électrodynamique classique — Cours et exercices d'électromagnétisme, Dunod (2001), ISBN 2-10-004411-7. Traduction française de la 3e édition du grand classique américain.
- J. L. Basdevant, J. Dalibard, Mécanique quantique [détail des éditions]
- C. Cohen-Tannoudji, B. Diu et F. Laloë, Mécanique quantique [détail des éditions]
- Albert Messiah, Mécanique quantique [détail des éditions]
- H.-J. Bunge, Texture analysis in materials science — Mathematical methods, éd. Butterworths, 1969 (1982 pour la trad. en anglais) : pour les harmoniques sphériques généralisées.
- Yvette Kosmann-Schwarzbach, Groupes et symétries : Groupes finis, groupes et algèbres de Lie, représentations, Les Éditions de l'École Polytechnique, Juillet 2006 ; chapitre 7, Les harmoniques sphériques ; ISBN 273021257-4.
Notes et références
- ↑ On a introduit un signe moins pour avoir des valeurs propres positives. En effet, l'opérateur lapalacien est un opérateur négatif au sens où, pour toute fonction lisse à support compact, on a :
Cette égalité se démontre en utilisant la relation Δ = div grad et en intégrant par parties. - ↑ Bernard Schaeffer, Relativités et quanta clarifiés, Publibook, 2007
- ↑ Atomes circulaires : propriétés et préparation
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