- Fonction étagée
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En mathématiques et en analyse :
- Une fonction simple est une fonction numérique dont l'image est constituée d’un nombre fini de valeurs réelles (ou éventuellement complexes).
- Une fonction étagée est une fonction simple définie sur un espace mesurable et qui est elle-même une fonction mesurable.
- Une fonction en escalier est une fonction étagée définie sur l’ensemble des réels et dont les valeurs (réelles) sont constantes sur des intervalles : ce sont donc des fonctions constantes par morceaux.
Dans les trois acceptations, chacune de ces fonctions peut s’exprimer comme une combinaison linéaire (donc finie) de fonctions caractéristiques.
Ces fonctions jouent un rôle important en théorie de l'intégration :
- les fonctions étagées pour l’intégrale de Lebesgue,
- les fonctions en escalier pour l'intégrale de Riemann et de Kurzweil-Henstock.
Sommaire
Propriété caractéristique commune
Propriété — Une fonction est simple si et seulement si elle est combinaison linéaire de fonctions caractéristiques.
PreuveNécessité :
Soit f une fonction simple et ak les n valeurs qu’elle peut prendre. Notons Ak l'image inverse de ak, soit Ak = f − 1(ak). Puisque les Ak sont 2 à 2 disjoints, alors pour tout x dans le domaine de définition de f :
Pour les fonction étagées, on note que Ak est mesurable puisque f est supposée l’être.
Suffisance :Soient n ensembles Bk et une fonction f définie par la relation
où les n valeurs bk sont données.
Puisque x peut appartenir simultanément à plusieurs Bk (lorsque les intersections sont non vides), le nombre de valeurs distinctes que peut prendre f est limité par 2n. Ainsi f est une fonction simple.
Pour les fonctions simples (respectivement étagée, en escalier), les propriétés suivantes découlent de la définition et de la propriété précédente :
- La somme, le produit de deux fonctions simples, le produit d'une fonction simple par un réel (ou un complexe), sont encore des fonctions simples.
- L'ensemble des fonctions simples constitue une R (ou C)-algèbre commutative, et a fortiori un espace vectoriel.
- Une fonction simple est une combinaison linéaire de fonctions caractéristiques de la forme
- où est une suite finie d'ensembles et est une suite finie de valeurs dans (ou ).
- Parmi les diverses représentations possibles exprimées à l’aide de la relation précédente, il en existe une particulière (qualifiée de canonique) pour laquelle[1]
- les ensembles Ak sont 2 à 2 disjoints,
- les valeurs ak sont distinctes,
- n = 0 si et seulement si f = 0.
- Pour une fonction étagée, donc mesurable et définie sur un espace mesurable , les ensembles Ak de la représentation canonique sont mesurables.
Densité des fonctions étagées
Théorème —
Démonstration1.A Pour les fonctions positives :
Soit f une fonction définie sur un espace mesurable , supposée mesurable et positive. Pour tout , l'intervalle (contenant donc l’image de f) est partagé en sous-intervalles définis par
- pour et
On définit les ensembles mesurables pour .
On remarque alors que la suite croissante de fonctions
converge simplement vers f lorsque n tend vers .
1.B Pour toute fonction mesurable :Une fonction mesurable f se décompose en une différence de deux fonctions mesurables g et h positives satisfaisant f(x) = g(x) − h(x). La suite gn − hn converge simplement vers f si les suites gn et hn convergent respectivement vers g et h.
2. Convergence uniforme :Pour une fonction f positive et bornée par y > 0, la construction élaborée sous 1.A permet d’affirmer que
- dès que 2n > y. La convergence uniforme est donc satisfaite.
Pour une fonction f bornée quelconque, la décomposition présentée sous 1.B permet de conclure.Intégration d'une fonction étagée
En théorie de la mesure, définir l'intégrale d'une fonction étagée est l’une des premières étapes conduisant à la définition de l'intégrale par rapport à une mesure.
Soit une mesure μ définie sur un espace mesurable . Pour tout , on définit
Pour une fonction étagée la linéarité de l'intégrale impose la relation suivante :
Pour accorder à cette relation le statut de définition, il convient de s’assurer de sa consistance en vérifiant que l’intégrale d’une fonction étagée est indépendante de sa représentation sous forme de combinaison linéaire de fonctions caractéristiques[2].
PreuveIl suffit de montrer que l’intégrale évaluée à l’aide d’une représentation quelconque est la même que celle obtenue à l’aide de la représentation canonique (soit celle pour laquelle les ensembles sont 2 à 2 disjoints et les valeurs distinctes).
La principale difficulté vient des recouvrements possibles entre les ensembles dont sont issus les fonctions caractéristiques.
- L’idée consiste à transformer une représentation générale en une représentation basée sur d’autres ensembles caractéristiques 2 à 2 disjoints, puis à montrer que ce procédé n’affecte pas l’intégrale.
- Pour la dernière étape (ensembles 2 à 2 disjoints vs représentation canonique), il suffit de réunir les ensembles disjoints sur lesquels une même valeur a été attribuée : l’intégrale reste évidemment la même.
Soit une représentation générale d’une fonction étagéeavec m > 0 et en supposant que si (il suffit de sommer les bi correspondant à des Bi égaux, le cas échéant).
Définissons la fonction par la relation
puis son image (un ensemble fini) par les avec , et enfin les ensembles correspondant aux images inverses, soit :
où est l’ensemble complémentaire de
Les sont disjoints 2 à 2 et, puisque ψ(x) est mesurable, ils le sont également.
Remarque : est précisément construite de sorte que, pour tout , la valeur permet de déduire exactement quels sont les ensembles contenant . Le seul intérêt de la forme donnée ici est de répondre à cet objectif.
Montrons que les sont des candidats pour la transformation annoncée plus haut.Définissons les ensembles :
- et
puis les valeurs associées aux par
On vérifie successivement :
- si
Il en découle
et il suffit de constater que les deux membres de droite sont égaux pour conclure.
Intégrale d’une fonction en escalier sur un segment
Les fonctions étagées sont à la théorie de l'intégration de Lebesgue ce que les fonctions en escalier sont à l'intégration de Riemann ou de Kurzweil-Henstock.
Par exemple, dans le cas particulier où sont des intervalles contigus de même longueur Δ, et où les sont les évaluations d'une fonction au centre des intervalles , l'expression est appelée somme de Riemann[3].
Généralement présentées sur un intervalle donné, les fonctions en escaliers peuvent être prolongées par 0 sur entier, ce qui permet de s’affranchir de l’intervalle et de considérer un unique ensemble de fonctions.
Notes (et références)
- Ak sont l’union d’un nombre fini d’intervalles. Pour une fonction en escalier, les ensembles
- Certains auteurs définissent les fonction étagées comme étant celles dont les ensembles caractéristiques sont disjoints (comme les fonctions en escalier) : la propriété précédente est plus simple à vérifier, mais plus complexe est la preuve qu’elles forment un espace vectoriel.
- calcul numérique d'une intégrale. est d’ailleurs une approximation (trop) couramment utilisée pour le
Voir aussi
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