- Dynamius de Provence
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Dynamius ou Dinamius (545 c. - + 595 c.) fut recteur[N 1] de Provence. En 575, il succéda à Albinus et fut remplacé par Nicetius, nommé en 587 rector massiliensis Provincia par Chidebert.
Sommaire
Biographie
Origine
Différents indices laissent à penser que Dynamius appartenait à une famille de lettrés de l'aristocratie provençale, probablement arlésienne[N 2], ce qui pourrait expliquer ses connivences avec le roi Gontran. Il n'est pas impossible que Dynamius ait reçu son éducation littéraire de Parthénius. Il épouse Eucheria[1], elle aussi « de très haute origine » à qui peut être attribuée une œuvre poétique[2].
Situation en Provence en 575
Depuis le partage du Royaume entre les fils de Clotaire en 561, la Province d'Arles est dans son ensemble rattachée au royaume de Gontran, c'est-à-dire à la Bourgogne, selon une solidarité naturelle. Mais en raison de l'importance de la fenêtre méditerranéenne, les rois d'Austrasie ont obtenu un corridor appelé corridor austrasien qui partant de leur territoire Auvergnat passe par Avignon et aboutit à Marseille. Ce corridor enclave la cité d'Arles et ses territoires[3].
À la mort de Sigebert, en 575, son fils Childebert II doit céder à Gontran la moitié de Marseille, dans la mesure où il a besoin des armes de son oncle dans sa lutte contre Chilpéric[4] . En réalité, la ville devient une indivision sous l'autorité des deux souverains, représentés par un seul fonctionnaire nommé par le roi Austrasien.
Recteur de Provence
Lorsqu'en 575, Dynamius est nommé recteur de Provence comme représentant du pouvoir austrasien, il mène un jeu personnel le faisant pencher vers le parti du roi de Bourgogne. Dynamius s'allie ainsi avec Gontran afin de limiter les prérogatives de Childebert II et de ses alliés austrasiens soutenus par l'évêque de Marseille Théodorus.
Il intervient en 581 dans l'élection épiscopale d'Uzès en faisant élire initialement Albinus, contre l'ancien recteur de Provence Jovinus le candidat de Childebert qui lui est finalement préféré[N 3]. Dynamius suscite alors un troisième homme, le diacre Marcellus, fils de l'un de ses amis marseillais, le sénateur Félix, qui obtient finalement le siège.
En 582, à sa majorité, Childebert réclame la totalité de la ville de Marseille; il s'ensuit un conflit qui va durer jusqu'en 587. Dans la cité phocéenne, Dynamius s'oppose alors violemment à l'évêque Théodorus, fidèle au parti austrasien de Childebert. Ces désordres donnent l'occasion au roi de Bourgogne Gontran de faire pression sur Childebert en fermant le corridor autrasien pour interrompre l'accès à la ville. Dynamius doit faire face de son côté à Gondulfus[5], personnage de famille sénatoriale[N 4], envoyé par Childebert pour rouvrir la route vers Marseille, avec le titre de duc correspondant à son commandement militaire. Cependant Dynamius doit s'incliner probablement en 585 lorsque Gontran, son soutien, s'engage dans une expédition en Septimanie contre les Wisigoths.
Dynamius est peut-être remplacé à cette date par Leudegisel[N 5] qui porte un titre toutefois différent, ce qui laisse subsister quelques doutes à ce sujet. Quoi qu'il en soit, Nicetius lui succède finalement en 587. La même année, Dynamius se réconcilie avec Childebert le 28 novembre lors du Traité d'Andelot.Un homme de réseaux ?
La singularité de la position de Dynamius, proche du Burgonde Gontran et représentant officiel de l'Austrasien Childebert II, un "adversaire" de Gontran, s'explique probablement par ses relations. En effet, Dynamius entretient des contacts chaleureux avec le camp austrasien ; il fait partie de ce qu’on pourrait appeler aujourd’hui, un réseau, réseau centré autour d’un personnage important : Gogo, maire du palais et régent d’Austrasie entre 576 et 581[6]. Ce réseau des « amis de Gogo » met en œuvre des stratégies concertées, à la fois politiques et sociales, même si ce groupe, en dehors de toute idéologie, sert essentiellement à défendre les intérêts personnels de ses membres. Néanmoins, un haut niveau culturel est requis pour figurer dans le cercle des correspondants composés à la fois d'héritiers et d'une élite de compétence.
Parallèlement Pierre Riché, cité par Édouard Baratier, évoque un cercle littéraire austraso-provençal autour du patrice Dynamius[7] qu'on sait avoir entretenu d'excellents rapports avec le sénateur marseillais Félix, le poète Venantius Fortunatus et le pape Grégoire le Grand.
Retraite
Dynamius vit une retraite pieuse et studieuse. C'est ainsi qu'il reçoit en 591 de Grégoire le Grand à l'occasion de sa conversio et de celle de sa femme, des reliques de saint Pierre et de saint Laurent. Il effectue également des donations au monastère de Saint-Cassien. Grégoire de Tours, avec qui il est en correspondance le traite de pieux et de fondateur de monastères. Il continue à s'occuper du patrimoine de saint Pierre en Provence jusqu'en 595 à la satisfaction du pape Grégoire le Grand qui l'en remercie dans une lettre de 593[8]. En septembre 595, Dynamius tombe malade et le pape envoie le prêtre Candidus pour le remplacer[8]. Mais Dynamius est surtout connu selon le poète Venantius Fortunatus, avec qui il est également en correspondance, comme homme cultivé, poète et auteur. Il s'illustre dans le genre caractéristique de l'époque : la littérature hagiographique régionale avec la rédaction de la Vie de Maxime de Riez.
Dynamius meurt vers 595 à l'âge de 50 ans. Il eut d'après Grégoire de Tours un fils Evantius dit fils de Dynamius d'Arles qui fut membre d'une ambassade envoyée par Childebert auprès de l'empereur Maurice, à Carthage. Un de ses petit-fils qui porta également le nom de Dynamius écrivit après 605 une épitaphe métrique pour son grand-père.
Notes et références
Notes
- Libérius d'Arles comme distinction personnelle au temps des Ostrogoths. ... Toutefois la mention d'un personnage comme patrice, dans l'Histoire des Francs par exemple, ne suffit pas à affirmer qu'il assuma aussi la charge de rector.
P.A. Février (sous la direction de) - La Provence des origines à l'an mil, pages 450,451.
A l'époque franque le rôle de praefectus (préfet) ou rector (recteur) subsista : il était assumé par des personnages qui portaient également le titre honorifique de patrice, titre qui avait été donné à - Grégoire de Tours (Histoire des Francs, X, 2) d'un certain Evantius, membre d'une ambassade envoyée par Childebert auprès de empereur Maurice, à Carthage, qui est dit fils de Dynamius d'Arles. Sur wikisources :
- Les envoyés citaient Bodégésile , fils de Mummolènexii, de Soissons ; Évance, fils de Dynamius, d’Arles, et Grippon, Franc de naissance.
En particulier son amitié avec le sénateur marseillais Félix et la mention de - Jovinus fut rapidement destitué et remplacé comme praefectus par Albinus, ce qui provoqua entre eux une grande inimitié
Grégoire de Tours - Histoire des Francs, IV,43 et VI,7)
Jovinus et Albinus s'étaient déjà opposés dans la ville de Marseille.
- Jovinus fut rapidement destitué et remplacé comme praefectus par Albinus, ce qui provoqua entre eux une grande inimitié
- Grégoire de Tours. Il était également l'oncle de la mère de
- Récarède qui a pris Nîmes et Beaucaire en représailles des menaces de Gontran en Septimanie. Leudegisèle est donc un chef militaire et non un recteur comme Dynamius et son autorité semble plutôt centrée sur le territoire d'Arles et non sur Marseille. Leudigisèle porte le nom de duc de la Provence d'Arles et défend la région d'Arles contre le roi wisigoth
Références
- P.A. Février (sous la direction de) - La Provence des origines à l'an mil, page 458 :
- « Les femmes jouent aussi leur rôle dans ce milieu puisqu'à celle de Dynamius, Eucheria, elle aussi de « de très haute origine » , peut être attribuée une œuvre poétique. »
- P.A. Février (sous la direction de) - La Provence des origines à l'an mil, page 458
- Édouard Baratier - Histoire de la Provence, page 93
- ici :
- Gontran n'avait point de place maritime dans ses états, et sentait la nécessité d'en avoir une pour animer le commerce de ses sujets. En conséquence il demande à Childebert, son neveu, roi d'Austrasie, la moitié de la ville de Marseille. L'ayant obtenue par le besoin que Childebert avait de ses armes pour les opposer à celles de Chilpéric , il y envoie le patrice Dyname, dont l'humeur altière ne tarda pas à le brouiller avec l'évêque Théodore.
David Bailie Warden, Nicolas Viton de Saint-Allais - L'art de vérifier les dates... – 1818 - page 371 - Grégoire de Tours - Histoire des Francs - Livre 6 Sur wikisources
Grégoire de Tours donne quelques détails :- Dynamius ne permit pas qu’il pût entrer dans Marseille, ni que l’évêque qui venait avec Gondulphe fût reçu dans sa cathédrale. D’accord avec le clergé, il avait fait fermer les portes de la ville et de là il insultait avec mépris l’évêque et Gondulphe. Cependant, étant sorti pour conférer avec le duc, il se rendit à la basilique de saint Etienne située près de la ville ; les portiers qui en gardaient l’entrée eurent soin de fermer la porte aussitôt que Dynamius y eut été introduit, en sorte que la troupe de gens armés qui le suivait demeura dehors sans pouvoir entrer. Celui-ci, n’en sachant rien, après avoir conféré de diverses choses sur l’autel avec ceux qu’il était venu trouver, s’en éloigna, ainsi qu’eux, et ils entrèrent dans la sacristie. Lorsqu’ils y furent entrés avec Dynamius, alors dépourvu du secours des siens, ils tombèrent sur lui d’une terrible manière, et ayant mis en fuite les satellites qui, voyant qu’on le retenait, faisaient retentir leurs armes autour de la porte, le duc Gondulphe réunit les principaux citoyens autour de l’évêque, afin qu’il entrât avec eux dans la ville. Dynamius voyant tout ce qui venait de se passer demanda pardon, fit au duc beaucoup de présents et prêta serment d’être à l’avenir fidèle à l’évêque et au roi. Après quoi on lui rendit ses vêtements.
- Bruno Dumézil - Gogo et ses amis : écriture, échanges et ambitions dans un réseau aristocratique de la fin du VIe siècle Article de
- Édouard Baratier - Histoire de la Provence, page 96 :
- « Pierre Riché parle à cette date d'un « cercle littéraire austraso-provençal », autour du patrice Dynamius, ... ».
- Bruno Dumézil – Grégoire le Grand et les élites locales – page 9 ici
Voir aussi
Sources
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Dynamius of Provence » (voir la liste des auteurs)
- Gregory of Tours. The History of the Franks. 2 vol. trans. O. M. Dalton. Oxford: Clarendon Press, 1967.
- Grégoire de Tours - Histoire des Francs (sur wikisources, ici)
- P.A Février (sous la direction de) - La Provence des origines à l'an mil - (ISBN 2737304563), p.450 et suivantes.
- Édouard Baratier - Histoire de la Provence, p.93.
Liens internes
- Libérius d'Arles comme distinction personnelle au temps des Ostrogoths. ... Toutefois la mention d'un personnage comme patrice, dans l'Histoire des Francs par exemple, ne suffit pas à affirmer qu'il assuma aussi la charge de rector.
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