- Carnaval de Paris en 1831
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L’originalité du Carnaval de Paris en 1831 réside dans le fait que, cette année-là, la fête et l’émeute se juxtaposèrent sans se déranger mutuellement. Cette originalité a été soulignée par la presse contemporaine de l'événement, ainsi que par nombre d'auteurs, qui citent généralement l’Histoire de dix ans de Louis Blanc.
Sommaire
Mardi Gras 1831 vu par un quotidien parisien[1]
Paris, 15 février[2]
Bulletin de la journée
Ce sera une journée de féerie, ajoutée à des journées d'héroïsme que cette journée du 15 février, donnant le spectacle inconnu aux autres siècles, aux autres nations, d'un peuple se livrant à la fois à la joie et à la colère, punissant d'un côté, se réjouissant de l'autre; abattant des croix de mission, souillées par l'alliance adulatrice et sacrilége des armes de la dynastie déchue avec le symbole de la foi des chrétiens; et de l'autre, promenant dans les rues ses masques et ses travestissements grotesques; des bataillons de gardes nationales sous les armes; des masses d'ouvriers sans armes, sans démonstration hostile, mais exprimant avec énergie ce qu'il y a de plus profond, de plus général dans le cœur de tout Français, l'horreur du fanatisme et de la domination sacerdotale, et des femmes élégantes, une jeunesse vive et folâtre circulant gaiement au milieu de ce tumulte héroï-comique.
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Dans plusieurs quartiers, un grand nombre de maisons ont été illuminées; les fenêtres du Louvre sont couvertes de lampions; la grande cour du Palais-Royal est occupée par un bataillon de troupes de ligne et de forts détachements de la garde nationale; des patrouilles parcourent la ville.
Nous avons, vers quatre heures, rencontré près du Palais-de-Justice une troupe assez nombreuse de personnes du peuple, portant en forme de bannière un portrait de prêtre, et criant : À bas la calotte ! M. le préfet de police, en uniforme et à cheval, précédait d'environ cinquante pas cet attroupement.
M. le ministre de l'intérieur a fait publier la proclamation suivante :
CITOYENS DE PARIS,
Respect aux monumens publics !
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... À midi des bateaux de pêcheurs retiraient des eaux (de la Seine) les débris de ce naufrage (le saccage de l'archevêché de Paris). Ces bateaux étaient remplis de livres; on arrêtait même au passage la plume éparse de ces lits superbes; le parapet du Pont-Neuf servait de premières loges à cet étrange spectacle. Le spectacle était partout, sur le bord de l'eau, avec les pêcheurs d'abord, et ensuite, si vous leviez les yeux, vous aperceviez dans le lointain la croix de l’église Saint Gervais s’ébranler sous les efforts des ouvriers. Cependant le soleil était beau comme un soleil de printemps, les rues étaient encombrées de curieux, et tour à tour, sur ce pont, passaient tour à tour ou à la fois, les masques fêtant le joyeux mardi-gras, la garde nationale au son du tambour, le bœuf gras entouré de fleurs,[3] les jeunes gens de la ville portant le drapeau tricolore et chantant La Parisienne. À cette heure toute la ville était calme, on aurait cherché vainement la foule qui s'était attaquée à des murailles et à des livres d'église, cette foule n'était plus : à présent elle était toute à la joie du carnaval qui s'en va.
Le témoignage de Louis Blanc[4]
... On était en plein carnaval : aux émotions de l'émeute se mêlaient toutes les extravagances du mardi-gras; le pavé des quartiers opulents résonnait sous la roue des équipages; les masques couraient tumultueusement par la ville. Le soir, tout Paris fut illuminé. Sur le point où l'archevêché s'élevait la veille, il n'y avait plus que des ruines.
Notes
- Le Constitutionnel, mercredi des Cendres 16 février 1831, page 1 et 2.
- Mardi Gras.
- musée Carnavalet, un tableau peint en 1830 par Guillaume Fréderic Ronmy, figurant le passage du bœuf gras sur le Pont Neuf. Il exposé salle 127 sous le nom de : Mascarade sur le Pont-Neuf (Inv. P 1080). Il existe, au
- 1830-1840, 10ème édition, tome 2, Pagnerre, Libraire-Éditeur, Paris 1867, page 275. Louis Blanc Révolution Français, Histoire de dix ans
Article connexe
- Carnaval de Paris
- 1831 en France#Février
- Square de l’Archevêché (ouvert à l’emplacement de l’archevêché saccagé en 1831)
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