Francisco Javier de Elío

Francisco Javier de Elío
Le capitaine général Francisco Javier de Elío.

Francisco Javier de Elío (Pampelune, 1767 - Valence, 1822), était un haut militaire espagnol, gouverneur de Montevideo à partir de 1807, puis, par décision de la Junte de Cadix, vice-roi du Río de la Plata. Revenu en Espagne, il devint un héros de la guerre dindépendance de lEspagne contre la France, combattant notamment contre Suchet, mais fut à partir de 1814 lun des principaux protagonistes et responsables de la répression absolutiste qui fit suite à la restauration des Bourbons en Espagne, ce qui lui valut dêtre incarcéré, puis exécuté, dans le sillage de la Révolution libérale de 1820.

Sommaire

Gouverneur à Montevideo

Avant de partir pour les Amériques, il eut en Espagne une brillante carrière militaire : il combattit dans la guerre contre la Convention française de 1793 à 1795, participant notamment aux campagnes d'Afrique du Nord et du Roussillon, et luttant en 1801 au Portugal.

Gouverneur de Montevideo à partir de 1807, Francisco Javier de Elío senhardit en 1809, par le biais dun cabildo ouvert, à proclamer la Junte de Montevideo, comité de gouvernement rebelle, indépendant de lautorité vice-royale, représentée à Buenos Aires par Jacques de Liniers. La Junte de Montevideo exerçait son autorité sur la Bande Orientale, correspondant grosso modo à lactuel Uruguay.

Martín de Álzaga, homme daffaires espagnol établi à Buenos Aires, et ses partisans fomentèrent une rébellion, dite mutinerie dÁlzaga (en esp. Asonada de Álzaga), dans le but de forcer la démission de Liniers. Ainsi, le 1er janvier 1809, un cabildo ouvert convoqué à Buenos Aires exigea la destitution du vice-roi Liniers au motif de ses origines françaises, et désigna, au nom de Ferdinand VII, une Junte destinée à être présidée par Álzaga. Une partie des milices espagnolescelles des Galiciens, des Biscayens et des miñones de Catalogneappuya la rébellion ; les milices criollas en revanche, emmenées par Cornelio Saavedra, et les milices andalouses investirent la Plaza Mayor, contraignant les rebelles à se disperser.

La proscription des meneurs rebelles qui sensuivit, et la dissolution des corps militaires séditieux eurent pour conséquence de mettre le pouvoir militaire aux mains des criollos restés fidèles à Liniers et, par , dexacerber la rivalité entre criollos et espagnols péninsulaires. Les responsables du complot, bannis à Carmen de Patagones, furent cependant délivrés par Elío et emmenés à Montevideo.

Elío reconnut promptement Baltasar Hidalgo de Cisneros pour vice-roi, nommé en remplacement de Liniers par la Junte de séville en 1809 ; dès lors, la Junte de Montevideo fut dissoute. Il devint capitaine général des provinces du Río de la Plata et président de lAudiencia de Buenos Aires.

Vice-roi à Montevideo

José Gervasio Artigas.

Les événements de la révolution de Mai, lesquels séchelonnèrent tout au long de la dénommée semaine de Mai, ― entre le 18 mai 1810, lorsque les groupes révolutionnaires réclamèrent un cabildo ouvert pour débattre de lavenir politique du territoire, jusquau 25, date de linstallation du premier gouvernement rioplatense independant davec lEspagne, ― fournirent à Elío le justificatif de la poursuite de sa propre attitude rebelle, cautionnée cette fois par lacte de sédition de Buenos Aires envers la couronne dEspagne. Accusé de comploter, le vice-roi Cisneros fut destitué, puis explusé vers lEspagne, en compagnie des membres de lAudiencia. Elío cependant gardait la maîtrise de Montevideo et de la Bande Orientale, et, le 19 janvier 1811, déclara Montevideo capitale de la vice-royauté, en se proclamant lui-même vice-roi du Río de la Plata, titre confirmé ensuite par la Junte de Cadix en janvier 1811.

Cependant, deux difficultés se firent jour : dune part, le 22 janvier de cette même année, Miguel Mariano de Villegas, syndic du Cabildo de Buenos Aires, aposa sa signature, à titre de représentant de la Grande Junte des Provinces Unies du Río de la Plata, sur la note par laquelle celle-ci refusait formellement de reconnaître Elío comme vice-roi, et dautre part, il eut à faire face, le 28 février, au soulèvement de la population rurale de la Bande Orientale, laquelle population, dirigée par Pedro José Viera et Venancio Benavides, rejetait également son autorité.

Pour réprimer ce soulèvement populaire, connu sous le nom de grito de Asencio, Francisco Javier de Elío désigna le capitaine de frégate José Posadas chef des forces armées régulières. Posadas installa son quartier général à San Isidro de Las Piedras, avec lintention dy livrer une bataille décisive contre les révolutionnaires. José Gervasio Artigas, pour sa part, était cantonné dans la localité de Nuestra Señora de Guadalupe de los Canelones (lactuelle ville uruguayenne de Canelones). Les révolutionnaires orientales, appuyés par la Grande Junte, étaient parvenus à mettre sur pied une armée de quelque mille hommes, tandis que les milices de Posadas se composaient de 1230 combattants, dont dailleurs deux cents environ sen furent, au plus fort de la bataille, rejoindre le camp adverse. Le 18 mai 1811 eut donc lieu la bataille de Las Piedras, qui vit Artigas remporter la victoire sur le chef royaliste José Posadas ; la bataille de Las Piedras constitua le premier triomphe des forces révolutionnaires face à lEmpire espagnol.

La défaite des royalistes fut décisive, ne laissant sous lautorité dElío que les environs de Colonia del Sacramento et la ville de Montevideo assiégée.

Nonobstant le triomphe révolutionnaire, Elío et le gouvernement de Buenos Aires signèrent le 20 octobre 1811 un armistice aux termes duquel furent restituées à lEspagne toute la Bande Orientale ainsi que les localités dEntre-Ríos de Gualeguaychú, Gualeguay et Concepción del Uruguay, ― prémices de la sécession de Montevideo davec le reste du pays.

Par ordre dElío, les Espagnols désertèrent en 1811 létablissement de Soledad sur les îles Malouines. Elío retourna en Espagne le 18 novembre 1811, et renonça à sa fonction de vice-roi en janvier 1812. Lannée suivante, il prit part à la seconde bataille de Castille, décisive pour en terminer avec la domination napoléonnienne à Valence, et assuma ensuite la capitainerie générale de cette ville.

Le pronunciamiento dElío

Ferdinand VII, par Francisco de Goya.

Le roi dEspagne Ferdinand VII, sen revenant de son exil en France, traversa la frontière le 24 mars 1814. Advint alors le moment de vérité concernant la constitution de 1812 ; selon les décrets des Cortes en effet, le roi ne serait pas reconnu libre, ni, dès lors, ne lui devrait-on obéissance, avant quil neût dabord prêté serment tel que prescrit par larticle 173 de la Constitution.

Ferdinand VII refusa de suivre litinéraire vers Madrid tracé par la Régence ; au lieu de cela, le 16 avril, il fit son entrée à Valence, lattendaient deux personnes : un représentant de la Régence tenant le texte de la constitution, et un député absolutiste portant un manifeste absolutiste signé par 69 députés, et dénommé Manifeste des Perses (en esp. Manifiesto de los Persas). Le 17 avril, le général Elío exhorta le roi à rentrer en possession de ses droits, tenant ses troupes à la disposition du monarque et commettant ce qui fut sans doute le premier pronunciamiento de lhistoire moderne de lEspagne.

Fervent combattant pour la cause absolutiste, il ordonna les persécutions à lencontre de diverses personnalités libérales et constitutionnelles, ce qui lui valut, après la révolution de 1820, dêtre incarcéré dans la citadelle de Valence le 10 mars. Toutefois, loin de subir un régime disolement, il put, dans sa cellule, lire, entretenir une correspondance, conspirer, concevoir des projets de fuite, et même avoir de fréquents entretiens avec le gouverneur de la citadelle et son épouse. Mais en même temps, lui parvenaient du dehors les clameurs de la population exigeant pour lui un châtiment exemplaire, et il devait bien sapercevoir au fil des jours que le roi ne faisait rien pour adoucir son sort, ― prise de conscience qui mettait à mal sa conviction quil pouvait à tout moment être élargi de son cachot pour lui permettre daccomplir la haute mission à laquelle il se sentait appelé. En 1822 fut ordonnée son exécution par le garrot détranglement (garrote vil).

Une des rues principales de la ville de Valence a été nommée en son honneur.

Opinions politiques et personnalité

Elío était un militaire aux convictions absolutistes profondément ancrées. Limage qui se dégage des 231 lettres quil écrivit durant sa détention à Valence est celle dun chef militaire orgueilleux, sinon hautain, doué dune estime de soi immodérée, et qui alla jusquà sidentifier au roi.

Cest peu dire qu'Elío doit être rangé dans la nomenclatura des reactionnaires espagnols de cette époque ; il nétait pas considéré comme un agent parmi dautres de la réaction antilibérale, ni ne se regardait lui-même comme telbien plus, il fut le symbole de la réaction. Il se tenait pour lhomme indispensable, seul capable de diriger la lutte contre le constitutionnalisme, à leffet de libérer la nation espagnole prise en otage par les libéraux, quil qualifie dédaigneusement de « républicains » et d’« anarchistes », comme, au demeurant, avait coutume de le faire le roi Ferdinand VII. Les libéraux, en particulier ceux de Valence, qui eurent à souffrir directement des exactions répressives du capitaine général Elío, voyaient en lui lincarnation même de la haine de la liberté et firent de lui la cible privilégiée de leur vindicte politique. Corollairement, les absolutistes le considéraient comme le parangon de la défense de la monarchie absolue et du catholicisme.

Les lettres quil écrivit de prison laissent entrevoir une personnalité imbue de sa haute destinée, quil faisait une avec celle de la nation. Dans ces lettres se dessinent les traits caractéristiques dun personnage cruel, suspicieux, rigoriste, ambitieux et pugnace, se prétendant le sauveur du pays, et se croyant au-dessus des factions et des partis et par les plus hautes aspirations. Il se voyait comme une victime des ennemis éternels de lEspagne et de la religion catholique, engagé dans un combat solitaire, prêt, du reste, à saffronter à tous, y compris au roi lui-même, de qui il se considère le plus déterminé et le plus vigoureux défenseur. Se dégage aussi limage du réactionnaire invétéré, dun individu poussé par la haine et par le rejet viscéral de toute participation du peuple à la prise de décision politique ― « les élections tourneront toujours en faveur des gueux », nota-t-il dans une de ses lettres.

Liens externes

  • Biographie de Francisco Javier de Elío
  • Emilio La Parra López, «Un héroe cristiano», Revista de Libros, 160, avril 2010 (à propos de la personnalité d'Elío).
  • Encarna García Monerris y Carmen García Monerris, La nación secuestrada. Francisco Javier Elío: correspondencia y manifiesto, Université de Valence, Valence, 2009.

Bibliographie

  • Rafael Gambra. La primera guerra civil de España (1821-1823). Madrid, 1950.



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