Base de plein air et de loisirs

Base de plein air et de loisirs

Une base de plein air et de loisirs est un complexe réunissant dans un site naturel proche de la population à desservir, les éléments nécessaires à favoriser la pratique des sports et activités de plein air et détude culturelle ainsi que la détente et loxygénation[1]. Une B.P.A.L est un espace libre, animé, ouvert à lensemble de la population. Cest un équipement qui offre à ses usagers les possibilités dexpression les plus variées, permettant la détente et la pratique dactivités sportives, culturelles, de plein air et de loisirs dans un cadre naturel préservé du bruit[2].

Sommaire

Lidée du Plein air : Le scoutisme, les Auberges de Jeunesse et les Congés payés

La naissance du "Plein air" avant la seconde guerre mondiale

Si le scoutisme et les Auberges de Jeunesse se développent dans lentre deux guerres, au départ surtout dans des catégories sociales relativement aisées, la réduction de la durée de la semaine de travail et la création des congés payés en 1936 vont obliger à penser un tourisme de masse et lorganisation des loisirs pour le grand nombre. Comme le dira en 1936 Léo Lagrange, Sous Secrétaire d'État aux sports et à l'organisation des Loisirs : « Notre but simple et humain, est de permettre aux masses de la jeunesse française de trouver dans la pratique des sports, la joie et la santé et de construire une organisation des loisirs telle que les travailleurs puissent trouver une détente et une récompense à leur dur labeur ».

Cette réflexion sur les loisirs de masse, repoussée par la guerre, va être essentiellement menée par les mouvements déducation populaire lon retrouve la gauche politique et laile démocrate et sociale du christianisme (Marc Sangnier). C'est Hitler, lors de l'occupation allemande en 1940 qui a instauré ces aires de détente qui étaient interdites aux juifs.

La théorisation du Plein air dans l'après guerre

Le problème fera lobjet des réflexions de laprès guerre sur la réforme de la France dont celle du Conseil national de la Résistance qui en en juin 1946 organise la réunion à Paris du Congrès national du Sport et du Plein air.

Dans son rapport consacré au « Plein air », la 25e commission de ce congrès définissait les activités de Plein air comme:

  • seffectuant dans un cadre naturel, les activités sportives y résultant dune action de lhomme qui pouvait saccompagner dadjuvants mécaniques comme une bicyclette mais sans usage de moteurs (mais les « sports aériens » sont néanmoins cités: randonnée pédestre ou cycliste, alpinisme, ski, spéléologie, nautisme, sports aériens, jeux de plein air,
  • nayant pas pour objet la compétition et la performance,
  • reposant sur des techniques de séjour comme le camping, les Auberges de Jeunesse, à la rigueur lhôtel

Les activités de plein air présentées comme de création récente y étaient expressément reliées pour leurs origines à lintroduction en France du scoutisme et à la mise en place des Auberges de jeunesse.

Le développement du Plein air tel quil y est théorisé est dans la continuité du courant de léducation populaire dont après la seconde guerre mondiale une part importante des acteurs, notamment la frange laïque, considère que la scolarité pour tous est désormais bien assise et quil faut travailler à tout ce qui entoure lécole y compris les loisirs. Le Plein air est donc présenté dans le rapport comme un instrument déducation au travers des activités sportives et culturelles quil permet, le modèle du scoutisme et des activités développées autour des Auberges de Jeunesse est palpable de même quun certain hygiénisme. On peut ainsi lire dans le rapport : «  Au plein air de redonner à tous même au moins doué le goût de leffort, de développer la résistance à la fatigue, déduquer les facultés dadaptation, de procurer une heureuse occasion de détente psychique, délever grâce à sa souplesse dadaptation le niveau général de la population » et « Les activités de Plein air ont un prolongement culturel important sous la forme du chant choral, des jeux dramatiques. Elles incitent les pratiquants à se pencher sur le modèle des sciences naturelles, à acquérir une éducation artistique, à laquelle la contemplation des spectacles naturels fournit un fond des plus sains ».

N'est plus en revanche évoqué le besoin d'une dune jeunesse saine, courant avant la seconde guerre mondiale, c'est désormais un vocabulaire qui rappelle les camps de jeunesse des régimes fascistes et nazi ou les Chantiers de jeunesse de Vichy. L'idéal reste celui de Léo Lagrange qui tout en semployant à développer les loisirs sportifs comme ministre du Front populaire prévenait quil ne pouvait sagir « dans un pays démocratique de caporaliser les distractions et les plaisirs des masses populaires et de transformer la joie habilement distribuée en moyen de penser ».

Le développement du Plein air dans les années 1945-1970

Les activités de Plein air dans les années 50 sont rentrées dans le vocabulaire de lEducation nationale et sont partie intégrante de la politique menée par le Ministère de la Jeunesse et des Sports[3]. Dans le même temps des activités jusqualors réservées à une minorité comme la randonnée de montagne, le ski, lalpinisme, la voile, touchent un public plus large grâce des associations comme Les Glénans ou LUnion Nationale des Camps de Montagne » (UNCM) qui deviendra LUnion Nationale des Centres de Montagnes avant de fusionner en 1965 avec LUnion Nautique Française (UNF) pour former LUnion nationale des Centres sportifs de Plein Air (UCPA). Ces activités restent néanmoins guère accessibles à lensemble des familles et sont cantonnées aux périodes de vacances dans la cadre du « Plein air lointain », selon la distinction opérée par la directive sur léducation physique et sportive de la jeunesse de 1958 qui distinguait

  • le plein air immédiat : pratiqué sur le lieu dactivité habituel,
  • le plein air proche : accessible pendant les week-ends dans des lieux adaptés,
  • le plein air lointain des grandes ou petites vacances dété et dhiver.

Aux origines des Bases de Plein air et de Loisir : le rapport de la commission Paul-Émile Victor

Les bases de Plein air et de Loisirs vues comme adaptation aux évolutions de la société

Lidée des bases pour « le plein air proche : accessible pendant les week-ends dans des lieux adaptés », sur le modèle de ce qui existe déjà dans la Ruhr et aux Pays-Bas, apparaît dans un rapport du groupe de travail 3 « Prospective » de la Commission des Loisirs de Plein air créé en 1963 par le Haut-Comité des Sports, commission présidée par Paul-Émile Victor.

Comme le notera Maurice Herzog dans sa circulaire de 1964, il sagit de sadapter au nouvelles conditions de vie des Français daprès guerre dues à la poursuite de lexode rural, de la réduction de la durée du travail et à laugmentation des foyers propriétaire dune automobile : « laccroissement de lurbanisation, la réduction progressive des heures de travail et leur blocage, soit en journée continue, soit 5 jours par semaine, et le développement des moyens de transport individuels amènent à rechercher des formules propres à satisfaire les logiques aspirations des citadins pendant leur loisir et notamment pendant leurs week-end ».

Les Bases de Plein air et de Loisirs vues comme réponse collective aux besoins des familles

Le rapport constatait que laspiration des Français à une résidence secondaire nétait pas universalisable pour tous les citoyens. Quand il faudrait diviser le territoire entre 10 à 15 millions de foyers il ne resterait à chacun qu’ « un peu plus de 4 hectares, soit un carré de 200 mètres sur 200 mètres il lui faudrait placer son appartement, sa maison de week-end, son coin de vacances, sa part de routes et de parkings, de champs, de prés, de chemin de fer et de gare, dusines et de bureaux, despaces invioléset dans 30 ans tout devra tenir dans 2 hectares. Ramené à lindividu et non plus aux ménages cela représente moins de 5000 m² par personne ».

A lopposé, il sinquiétait aussi dune forme de privatisation possible des loisirs et des espaces naturels : « On peut encore moins admettre les spéculations sur le Plein air qui risquent de pervertir à jamais une économie distributive des moyens de loisirs : achats massifs de kilomètres de cotes en Méditerranée par les sociétés dinvestissement, colonisation des sites par les banques daffaire, flambée des prix à lachat du sol rendant impossible même par lEtat ou ses organismes des acquisitions de quelque envergure ».

En conséquence la commission estimait que « Devant cette contradiction fondamentale : désir grandissant dun nombre de gens sans cesse accru dun espace de plus en plus rare, on est donc contraint de chercher des solutions collectives et les mesures immédiates qui en conditionnent la réalisation » et elle proposait une forme de maison de campagne collective sinspirant de la création de la base de Draveil : « La seule solution réside dans les parcs de week-end regroupant un ensemble de possibilités de repos et de sport, interdits aux voitures, comportant des terrains de camping, des maisons à louer, traversés par une rivière ou baignés de lac, dune superficie minimum de 70 à 100 hectares, permettant daccueillir 2000 usagers environ »

La solution proposée : les Bases de Plein air et de Loisirs

Pour permettre à chacun un accès au Plein air la commission préconisait donc la création de Parcs, éloignés de 50 kilomètres des villes au maximum, permettant à la fois des séjours de week-end et la mise à disposition des écoliers des équipements pour la pratique quotidienne des activités de plein air dans le cadre de la « généralisation du mi-temps pédagogique » dont on est encore très loin près de 50 ans après.

Pour la Région parisienne la commission proposait la création dun à deux mille parcs « 100 à 150 000 hectares, soit environ 10 % de la surface du district c'est-à-dire probablement moins que la surface globale des résidences secondaires de la région parisienne ». Elle réfléchissait aux régions « industrielle en se penchant sur le cas du Nord elle pensait quil faudrait « Créer de toute pièce des zones vertes en une reconquête sur lindustrie et lhabitat ». Dans un paragraphe précurseur elle posait aussi le problème des déplacements, du coût des infrastructures et des options sociales que leur choix trahit : « Il peut-être plus raisonnable dans une optique de civilisation industrielle de dépenser des centaines de millions pour équiper la baie de Somme ou des parcs autour de Lille-Roubaix-Tourcoing que daménager pour quelques dizaines de millions des lieux merveilleux autour de la Méditerranée pour faciliter des évasions annuelles. Cest les gens habitent, c'est-à-dire dans des régions économiquement fortes quils faut oser des solutions même très coûteuses ; quand on nhésite pas à dépenser des milliards pour des autoroutes ou des tunnels routiers on peut investir des sommes équivalentes pour donner à des familles la possibilité de retrouver un rythme de vie équilibrée ».

La création des bases de Loisir

En 1964 le Secrétaire dÉtat à la Jeunesse et au Sport, Maurice Herzog, sinscrivant dans le cadre de la préparation du Ve plan de modernisation et déquipement (1966-70), à lépoque selon le mot de De Gaulle « une ardente obligation » reprenait largement les idées du rapport du Haut Comité des Sports de lannée précédente et définissait une politique daménagement de Bases de Plein air et de Loisirs[4], en donnant une définition et précisant les conditions de réalisation en notant « Il est certain quune part non négligeable de leffort de lÉtat devra être affecté au titre du prochain plan à des opérations de cette nature. Leur envergure nécessite que les études soient lancées avec un recul suffisant »

Dans le même temps lÉtat mettait en place la politique des villes nouvelles et il va, sous limpulsion du préfet Paul Delouvrier, simpliquer, en Île-de-France plus quailleurs, dans la création des bases dont certaines seront pensées en même temps que la création des villes nouvelles (St Quentin en Yvelines, Cergy-Pontoise). Ainsi, dès le 16 juin 1967 une convention était signée entre lÉtat, le district de la région parisienne, et lAgence Foncière et Technique de la Région Parisienne pour procéder aux réserves foncières qui permettront la création des bases.

Cette politique est maintenue sous la présidence de Georges Pompidou, Joseph Comiti, Secrétaire dEtat à la Jeunesse et aux Sports, demande aux préfets de régions, après avoir fait référence à la circulaire de aurice Herzog de « de jeter les bases du recensement des sites favorables à limplantation des bases de Plein air et de Loisir et plus particulièrement des plans deau existants ou à créer dont lutilisation à ce titre paraîtrait intéressante. A noter une évolution par rapport à la période gaullienne puisque quune partie de la circulaire est consacrée à lintervention des capitaux privés et au « légitimes aspirations du secteur privé commercial »[5].

Au fil des circulaires et des années le ton et les préoccupations changent, ainsi celle de Pierre Mazeaud de 1975, qui vient après la création du secrétariat dÉtat à lEnvironnement et la candidature de René Dumont à la présidentielle de 1974, met laccent la diminution du contact dans les villes avec une nature qui ne peut être remplacé par des espaces verts urbains. La circulaire élargie donc la définition des bases de Plein air donnée par ses prédécesseurs, la base de loisir se situe désormais « dans un cadre naturel préservé du bruit » et aux trois types de base jusquici évoqués, les bases urbaines permettant des activités quotidiennes, les bases péri-urbaines directement liées aux besoins de week-end des citadins, les stations de vacances plus ou moins axées sur un type dactivité (nautisme ou montagne), sajoutent « les bases de nature liées à un site naturel exceptionnel ».

Dès 1978 on compte 140 bases de nature diverses en activités.

Cette relative rapidité dans la mise en œuvre dun programme dune telle ampleur serait sans doute plus difficile aujourdhui. La force de la puissance publique dalors a en effet été mise en œuvre de manière coordonnée, sur fonds publics, pour une politique daménagement du territoire au service des populations dans leur globalité sans que la rentabilité de ces opérations soit garantie ni ne soit un des objectifs de celles-ci[6].

Les Bases de Plein air et de Loisirs aujourd'hui

Annexes

Notes et références

  1. Définition de la circulaire du 20 janvier 1964 de Maurice Herzog, secrétaire dÉtat à la Jeunesse et aux Sports
  2. Définition de la Circulaire du 21 mars 1975 de Pierre Mazeaud, Secrétaire dÉtat à la Jeunesse et aux Sports
  3. Confer circulaire du 14 mars 1950
  4. Circulaire du 20 janvier 1964
  5. Circulaire du Secrétaire d'État à la Jeunesse et au Sport du 20 mai 1970
  6. Voir : Les Bases de plein air et de loisir, histoire d'un rêve inachevé, Jean Pierre Bouchout et Jacques Lastenet, article, CNESI 10 octobre 2007

Bibliographie et Sources

  • Les Bases de plein air et de loisir, histoire d'un rêve inachevé, Jean Pierre Bouchout et Jacques Lastenet, article, CNESI 10 octobre 2007
  • Les Bases de Plein Air et de Loisir d'Île de France : "Etat des lieux 2001-2002", Institut d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région Île de France, septembre 2002
  • Les bases régionales de plein air et de loisirs au regard du SDRIF, avril 2003, Note rapide de l'IAURIF n° 328
  • Les bases régionales de plein air et de loisirs et leur usage en 2002, juin 2003, Note rapide de l'IAURIF n° 338
  • L'amélioration de la desserte des bases de Loisir, Institut d'Aménagement et d'urbanisme de la Région Île de France, 2008
  • Urbanisme et Sports de nature, Rapport au Parlement et au Gouvernement du Comité national des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature, décembre 2007
  • Les bases de plein-air et de loisir : un exemple d'ingénierie du développement durable, Bernard de Korsak, Jean-Paul Robert et Pierre-Louis Soldani, article in revue des Ponts et Chaussées PCM le Point, mars 1996
  • L'espace se recycle aussi, Entretien avec Bernard de Korsak, in revue Décision Environnement, octobre 1996
  • Bases de Plein Air et de Loisir en Île de France : Diagnostic et Orientations, Commission Sport, Tourisme, Loisirs du Conseil régional d'Île de France, septembre 2006
  • Les bases de plein air en Île de France: politique et perspectives, Marie Richard et Luc de Bezenac
  • Rapport de Monsieur Perrillat au Président du Conseil régional d'Île-de-France relatif aux bases de plein air et de loisirs, janvier 1996

Article connexe


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