- Unités de Planck
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En physique, les unités de Planck sont un système d'unités de mesure, en référence à Max Planck, système qui est une définition préliminaire d’unités naturelles. Le système est uniquement défini à l’aide des constantes physiques fondamentales qui suivent, et est « naturel » au sens où les valeurs de ces constantes deviennent 1 lorsqu’elles sont exprimées dans ce système. (Dans le système CGS, c’est la constante de la force de Coulomb de la loi de Coulomb qui est normalisée à 1, plutôt que la permittivité du vide. Ceci est analogue à la normalisation de la constante gravitationnelle de la loi de Newton comme l’est le projet originel de Planck de définir les unités de Planck).
Constantes fondamentales Constante Symbole Dimension constante gravitationnelle G M-1L3T-2 constante de Planck réduite (= h/2π, où h est la constante de Planck) ML2T-1 vitesse de la lumière dans le vide c L1T-1 constante de Boltzmann k ML2T-2Θ-1 permittivité du vide ε0 Q2 M -1 L-3 T2 Description sommaire
Les unités de Planck sont souvent considérées pour plaisanter par les physiciens comme les « unités de Dieu ». Elles éliminent l’arbitraire anthropocentrique du système d’unités : certains physiciens pensent qu’une intelligence extra-terrestre pourrait utiliser un tel système.
Les unités naturelles peuvent aider les physiciens à recadrer certaines questions. Frank Wilczek l’explique sans doute mieux[1] :
« Nous voyons que la question [posée] n’est pas « Pourquoi la gravité est-elle si faible ? » mais plutôt « Pourquoi la masse du proton est-elle si petite ? » En effet, en unités naturelles (de Planck), la force de la gravité est simplement ce qu’elle est, une grandeur fondamentale, alors que la masse du proton est le nombre minuscule de 1 divisé par 13 milliards de milliards. »
La force de la gravité est simplement ce qu’elle est et la force électromagnétique est simplement ce qu’elle est. La force électromagnétique agit sur une quantité (la charge électrique) différente de la gravité (qui agit sur la masse), et ainsi on ne peut pas la comparer directement à la gravité. Considérer la gravité comme une force extrêmement faible est, du point de vue des unités naturelles, comme comparer des pommes et des oranges. S’il est vrai que la force électrostatique répulsive entre deux protons (seuls dans le vide) est très largement plus grande que l’attraction gravitationnelle entre les deux mêmes protons, c’est parce que la charge des protons est à peu de chose près une unité naturelle de charge, alors que la masse des protons est très inférieure à l’unité naturelle de masse.
Ces unités ont l’avantage de simplifier de nombreuses équations en physique, en supprimant des facteurs de conversion. Pour cette raison, elles sont très populaires dans les recherches en gravité quantique. Par exemple, la célèbre équation d’Einstein E = m.c2 devient uniquement E = m, c’est-à-dire qu’un corps de masse 5000 unités de masse de Planck aura une énergie intrinsèque de 5000 unités d’énergie de Planck.
Cependant, les unités sont trop petites ou trop grandes pour être d’un usage courant, tant qu’elles ne sont pas ajustées à de grandes puissances de 10. Elles souffrent également d’incertitudes de mesure de certaines des constantes sur lesquelles elles sont basées, essentiellement la constante gravitationnelle G.
Les principales équations de la physique avec les unités de Planck
Equations de la physique exprimées en unités de Planck Nom Forme usuelle Forme en unité sans dimension Loi universelle de la gravitation de Newton Équation du champ gravitationnel d’Einstein (Relativité générale) Formule Masse-Énergie d’Einstein Formule de l'entropie de Bolzmann Énergie d’un photon ou d’une particule de pulsation ω Loi de Planck Constante de Stefan-Boltzmann Formule de Bekenstein-Hawking de l'entropie des trous noirs Équation de Schrödinger Loi de Coulomb Équations de Maxwell
Unités de Planck : unités de base
Nom Dimension Formule Valeur approchée, en système SI Longueur de Planck longueur (L) 1.616 × 10-35 m Masse de Planck masse (M) 2.177 × 10-8 kg Temps de Planck temps (T) 5.391 × 10-44 s Température de Planck température (Θ) 1.415 × 1032 K Charge de Planck charge électrique (Q) 1.875 × 10-18 C Les trois constantes de la physique sont ainsi exprimées simplement en utilisant les unités de base de Planck :
Unités de Planck : unités dérivées
Nom Dimension Formule Valeur approchée, en système SI Force de Planck force (MLT-2) 1.210 × 1044 N Énergie de Planck énergie (ML2T-2) 1019 GeV = 1.956 × 109 J Puissance de Planck puissance (ML2T-3) 3.629 × 1052 W Densité de Planck masse volumique (ML-3) 5.1 × 1096 kg/m3 Fréquence angulaire de Planck fréquence (T-1) 1.855 × 1043 rad/s Pression de Planck pression (ML-1T-2) 4.635 × 10113 Pa Courant de Planck courant électrique (QT-1) 3.479 × 1025 A Tension de Planck tension (ML2T-2Q-1) 1.0432 × 1027 V Impédance de Planck résistance électrique (ML2T-1Q-2) 2.9986 × 101 Ω Discussion
À l’échelle des constantes de Planck (en durée, longueur, densité ou température), il faut considérer à la fois les effets de la mécanique quantique et ceux de la relativité générale. Mais cela nécessite une théorie de la gravité quantique, qui n’existe pas encore.
La plupart des unités de Planck sont soit trop petites, soit trop grandes pour être utilisables en pratique, à moins de transporter des puissances de 10 dans les calculs. Elles souffrent aussi des incertitudes dans la mesure de certaines constantes sur lesquelles elles sont basées, notamment la constante de gravitation G qui a une incertitude de 1 sur 7000.
La charge de Planck n’a pas été définie ni proposée à l’origine par Planck. C’est une unité de charge qui a été définie de la même manière que les autres unités de Planck et qui est utilisée par les physiciens dans certaines publications. La charge élémentaire est ainsi définie par la charge de Planck de cette manière :
où est la constante de la structure fine :
La valeur de la constante sans dimension de structure fine est définie par la quantité de charge, mesurée en unités naturelles (charge de Planck), que les électrons, protons, et autres particules chargée ont effectivement. Parce que la force électromagnétique entre deux particules est proportionnelle au produit des charges des deux particules (qui sont chacune, en unités de Planck, proportionnelles à ), l’intensité de la force électromagnétique par rapport aux autres forces est proportionnelle à .
L’impédance de Planck est égale à l’impédance caractéristique du vide divisée par 4π : on a donc, en termes d’unités de Planck, . Le coefficient 4π vient du fait que c’est le coefficient de la loi de Coulomb qui est normalisé à 1, et non la permittivité du vide . C’est donc une définition arbitraire, qui n’est peut-être pas optimale dans la perspective de définir le système d’unité physique le plus naturel possible comme le vise le système de Planck.
Les unités de Planck et l’invariance d’échelle de la nature
D’après Duff 2002[2] et Duff, Okun et Veneziano 2002[3], si toutes les quantités physiques (la masse et les autres propriétés des particules) étaient exprimées en unités de Planck, ces quantités seraient des nombres sans dimension (une masse divisée par la masse de Planck, une longueur divisée par la longueur de Planck, etc.). Les seules quantités que nous mesurons finalement dans les expériences en physique ou par notre perception de la réalité sont des nombres sans dimension. En effet, lorsqu’on mesure habituellement une longueur avec une règle ou un mètre-ruban, on compte en fait les marques faites d’après un étalon ; autrement dit, on mesure la longueur relative à cette longueur de référence. Il en va de même pour les expériences en physique, où toutes les quantités physiques sont mesurées relativement à d’autres grandeurs physiques dimensionnées. Nous pourrions constater des changements si certaines quantités sans dimension comme ou le rapport des masses proton/électron étaient modifiées (la structure atomique changerait), mais si toutes les quantités physiques sans dimension restaient constantes, nous ne pourrions pas dire si une quantité dimensionnée, comme la vitesse de la lumière, c, a changé. Et, en effet, le concept de Tompkins devient insignifiant dans notre existence si une quantité dimensionnée comme c change, même énormément.
Si la vitesse de la lumière c était soudainement divisée par deux et changée en c/2, mais en gardant inchangées toutes les constantes adimensionnelles, alors la Longueur de Planck serait augmentée d’un rapport de √8 du point de vue de certains observateurs extérieurs non touchés par le changement. Mais comme la taille des atomes (approximativement le rayon de Bohr) est liée à la longueur de Planck par une constante sans dimension :
alors les atomes seraient plus gros (dans chaque dimension) par √8, chacun de nous serait plus grand de √8, et ainsi nos règles à mesurer seraient plus grandes (et plus épaisses, et plus larges) d’un rapport √8, et nous ne saurions rien de ce changement.
Le tic-tac de nos montres serait plus lent d’un rapport √32 (du point de vue de l’observateur extérieur non concerné par les changements), parce que le temps de Planck aurait augmenté de √32, mais nous ne verrions pas la différence. Cet observateur extérieur hypothétique pourrait constater que la lumière se déplace à la moitié de son ancienne vitesse (de même que toutes les vitesses), elle parcourrait toujours 299 792 458 de nos nouveaux mètres par une de nos nouvelles secondes. Nous ne verrions aucune différence.
Ceci contredit conceptuellement George Gamow dans Monsieur Tompkins qui suppose que si une constante universelle comme c changeait, nous remarquerions facilement la différence. Nous devons maintenant lui demander : Comment mesurerions-nous la différence si nos références de mesure changeaient de la même manière ?
La découverte des unités naturelles de Planck
Max Planck a fait pour la première fois la liste de ses unités naturelles (et en a donné des valeurs remarquablement proches de celles que nous utilisons aujourd’hui) en mai 1899 dans un papier présenté à l’Académie des sciences de Prusse[4].
Au moment où il présenta ses unités, la mécanique quantique n’avait pas encore été découverte. Il n’avait pas encore découvert la théorie du rayonnement du corps noir (publiée pour la première fois en décembre 1900) dans laquelle la constante de Planck fit sa première apparition et pour laquelle Planck obtint plus tard le prix Nobel. Les parties importantes du papier de 1899 comportaient quelques confusions sur la manière dont il a réussi à trouver les unités de temps, longueur, masse, température, etc., que nous définissons aujourd’hui en utilisant la constante de Dirac et à les motiver par des considérations de physique quantique avant que et la physique quantique ne soient connus. Voici une citation du papier de 1899 qui donne une idée sur la manière dont Planck a considéré son ensemble d’unités :
« …ihre Bedeutung für alle Zeiten und für alle, auch außerirdische und außermenschliche Kulturen notwendig behalten und welche daher als »natürliche Maßeinheiten« bezeichnet werden können… »
« …Elle gardent nécessairement leur signification pour tous les temps et toutes les civilisations, mêmes extraterrestres et non humaines, et peuvent donc être désignées « unités naturelles »… »
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Planck units » (voir la liste des auteurs)
- (en) Frank Wilczek, « Scaling Mount Planck I: A View from the Bottom », dans Physics Today, American Institute of Physics, vol. 54, no 6, juin 2001, p. 12-13 [texte intégral, lien DOI].
- (en) Michael Duff, Comment on time-variation of fundamental constants, Ann Arbor, Université du Michigan, 13 août 2002 [lire en ligne]
- (en) Michael Duff, Lev Okun et Gabriele Veneziano, « Trialogue on the number of fundamental constants », dans Journal of High Energy Physics, Institute of Physics, 9 mars 2002, p. 25-26 [texte intégral], section III.5 intitulée The operationally indistinguishable world of Mr. Tompkins.
- (de) Max Planck, « Über irreversible Strahlungsvorgänge », dans Sitzungsberichte der Preußischen Akademie der Wissenschaften, Académie de Berlin, vol. 5, mai 1899, p. 479 [texte intégral].
Voir aussi
Liens externes
- (de) « Über irreversible Strahlungsvorgänge », de Max Planck dans Sitzungsberichte der Preußischen Akademie der Wissenschaften, 5e partie, 1899
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