- Région des Sudètes
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La Région des Sudètes (en tchèque : Sudety ou pohraniční území - « régions frontalières de la Tchéquie », en allemand : Sudetenland, en polonais : Kraj Sudetów) est une région historique d'Europe centrale, actuellement l'une des composantes de la République tchèque. Au temps de l'existence de la Tchécoslovaquie, ce terme désignait les zones frontalières de Bohême et la Moravie bordant la Grossdeutschland (« Grande Allemagne » du Troisième Reich).
Le nom de Sudètes venant des montagnes du nord-est du pays, qui étaient, historiquement, habitées d'une population majoritairement allemande qu'on a appelée par métonymie les Allemands des Sudètes (ou tout simplement les « Sudètes »).
Sommaire
Sens historique
Historiquement, le terme désigne, par extension, les régions de Tchécoslovaquie (tout particulièrement en Bohême, Moravie et en Silésie) majoritairement peuplées de germanophones jusqu'à leur expulsion suite aux Décrets Beneš en 1945 et, par métonymie, les populations de nationalité allemande de ces régions, pendant la période de l'entre-deux-guerres. Pour cette raison, au XXIe siècle, les Sudètes sont mentionnés par analogie à des événements récents[1],[2],[3],[4],[5],[6],[7],[8],[9].
Histoire
Installation des allemands en Bohème
Durant le Moyen Âge, les rois de Bohême font appel aux Allemands pour coloniser des terres et peupler des villes, lesquels apportent leur savoir-faire. Ils sont très souvent majoritaires dans les villes, même en dehors de Région des Sudètes proprement dites et quand ils sont minoritaires, il en forment souvent l’élite et sont les édiles des villes et ce, en raison de leur proximité linguistique et culturelle avec le pouvoir impérial de Vienne qui les favorise. Les Allemands des Sudètes représentent, au début du XXe siècle, près de 30 % de la population totale de la Bohême, alors partie de l'Empire austro-hongrois.
Réunion à la Tchécoslovaquie
Période de transition 1918-1920
En 1919, le traité de Saint-Germain-en-Laye qui démantèle l'Empire des Habsbourg après la Première Guerre mondiale stipule, sur la base du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, qu'il est fait droit à la revendication des Tchèques et des Slovaques en vue de se doter d'un pays : la Tchécoslovaquie, qui dans les faits existe depuis octobre 1918, est reconnue. Elle intègre les territoires du royaume de Bohême (jusqu'alors dépendant de la couronne d'Autriche), de la Slovaquie et de la Ruthénie subcarpatique (jusqu'alors dépendantes de la couronne de Hongrie[10]).
Cet état de fait est dénoncé par les minorités allemandes incluses dans le nouvel État et majoritaires dans certaines régions :
- Le Böhmerwaldgau (région des Forêts de Bohême), en Bohême du sud se déclare District (Kreis) du Land de Haute-Autriche ; administré par le Kreishauptmann (chef de district) Friedrich Wichtl (1872 - 1922) depuis le 30 octobre 1918,
- Le Deutschböhmen (la Bohême germanique), au nord-est de la Bohême se déclare partie entière du nouvel État autrichien et est administré par un Landeshauptmann : Rafael Pacher (1857-1936), du 29 octobre au 6 novembre 1918 puis par Rudolf Ritter von Lodgman von Auen (1877 - 1962) du 6 novembre au 16 décembre 1918 (sa capitale, Reichenberg, est la dernière à être conquise par l'armée tchécoslovaque mais son gouvernement continue en exil tout d'abord à Zittau en Saxe puis à Vienne, jusqu'au 24 septembre 1919),
- Le Sudetenland (la Région des Sudètes proprement-dits), au nord de la Moravie et en Silésie se déclarent partie entière du nouvel État autrichien et est administré par le Landeshauptmann Robert Freissler (1877-1950) du 30 octobre au 18 décembre 1918 (date à laquelle les Tchécoslovaques occupent sa capitale, Opava),
- Le Deutschsüdmähren (la Moravie germanique du sud) se proclame District (Kreis) du Länder de Basse-Autriche et est administré par le Kreishauptmann Oskar Teufel (1880 - 1946) du 30 octobre 1918 jusqu'en décembre de la même année quand les troupes tchécoslovaques reprennent la situation et les territoires en main.
Dans la problématique ainsi exposée, il ne faut pas oublier que les terres et territoires de la Région des Sudètes résultent d'un vol caractérisé suite a défaite à la bataille de la Montagne Blanche (1620) qui a vu l'extermination ou l'exil forcé des élites protestantes tchèques et la confiscation de leurs terres par l'Empire qui les redistribue largement aux nobles allemands.
1920-1938
L'opposition entre les Allemands et les Tchèques est latente tout au long des années 1920 et s'intensifie dans les années 1930, après la dissolution de deux partis irrédentistes par le gouvernement tchécoslovaque, puis la création par Konrad Henlein d'un Front patriotique des Allemands des Sudètes en 1933, forcé de changer de nom en 1935 pour devenir Parti allemand des Sudètes. Celui-ci réclame, avec l'appui de l'Allemagne nazie, le rattachement au Troisième Reich et amplifie graduellement ses exigences. La crise éclate suite à l'Anschluss de l'Autriche au Reich en 1938.
Il convient toutefois de préciser que pendant la période 1920-1938 il y avait d'autres partis politiques allemands en Tchécoslovaquie, dont des sociaux-démocrates du Parti ouvrier social-démocrate allemand en République de Tchécoslovaquie (Deutsche sozialdemokratische Arbeiterpartei in der Tschechoslowakischen Republik), des sociaux-chrétiens du Parti populaire chrétien social allemand (Deutsche Christlich-Soziale Volkspartei) et des agrariens de Union des agriculteurs (Bund der Landwirte), et que de nombreux Allemands soutenaient le Parti communiste tchécoslovaque. Ces partis étaient largement majoritaires dans l'électorat allemand jusqu'en 1935.
Les gouvernements de coalition tchécoslovaques de 1926 à 1938 étaient appuyés par des partis allemands modérés, dont certains élus y participèrent en tant que ministres, notamment l'agrarien Franz Spina, à diverses reprises entre 1926 et 1938, le social-démocrate Ludwig Czech, de 1929 à 1938, et le social-chrétien Erwin Zajicek, de 1936 à 1938[11].
Résultats des partis allemands et de la liste magyaro-allemande * aux élections législatives [12],[13]
Parti Sièges en 1920 Sièges en 1925 Sièges en 1929 Sièges en 1935 Voix en 1935 Parti allemand des Sudètes - - - 44 1 256 010 Deutsche Nationalpartei - 10 7 (dissous en 1933) - Deutsche Nationalsozialistische Arbeiterpartei 15 17 8 (dissous en 1933) - Deutsche sozialdemokratische Arbeiterpartei in der Tschechoslowakischen Republik 31 17 21 11 300 406 Deutsche Christlich-Soziale Volkspartei 7 13 14 6 163 666 Bund der Landwirte 11 24 - 5 142 775 Liste magyaro-allemande ** 9 4 9 9 292 847 « Partis allemands réunis » 6 - 16 - - Total 79 85 75 75 - Il y avait également des électeurs et des élus allemands dans d'autres partis, non spécifiquement allemands, comme le Parti communiste tchécoslovaque (848 822 voix et 30 députés).
- ainsi que dans le : Deutsch-demokratische Freiheitspartei, Deutsche Gewerbepartei, Deutschnationale Partei, Sudetendeutsche Landbund, Deutsche Arbeiterpartei, Zipser deutsche Partei, Parti chrétien-social hongrois et Parti national hongrois[14]
De nombreux Allemands des Sudètes, sociaux-démocrates, communistes, juifs ou simplement antinazis, seront déportés après l'annexion par le Troisième Reich, d'autres fuiront dans les autres parties de l'ex-Tchécoslovaquie et participeront à la résistance tchèque et slovaque contre le nazisme. Par ailleurs, parmi les Allemands de Tchécoslovaquie, « des Sudètes » comme « des Carpates » (ces deux catégories ne recoupent pas la totalité des Allemands de Tchécoslovaquie), il y a aussi bien des catholiques et des protestants que des juifs.
La crise des Sudètes et l'annexion de la Tchéquie
Le 29 et 30 septembre 1938, Hitler, poursuivant ses objectifs pangermanistes et se faisant alors le champion du principe des nationalités, déclare vouloir « libérer les Allemands des Sudètes » de l'« oppression » tchécoslovaque. Hitler affirme ses revendications en s'appuyant sur les agitations de l'organisation nazie locale, menée par Konrad Henlein. Le Führer évoque le « droit des nations » pour exiger de Prague l'annexion au Reich de Région des Sudètes. Il annonce aux Français et aux Britanniques qu'une fois ce dernier problème territorial résolu, l'Allemagne se contentera de ces nouvelles frontières en Europe. « L'Europe connaîtra ensuite la paix pour mille ans » : dira-t-il.
Pour Prague, il n'est pas question de laisser tomber le seul secteur défendable d'une zone frontalière stratégique et abritant de plus la principale région industrielle du pays, avec notamment les usines d'armement Škoda qui à l'époque étaient parmi les plus grandes et les plus modernes, les tchécoslovaques venant juste d'y achever une système de fortifications après trois ans de travaux.
Bien qu'alliée à la France et à l'Union soviétique, la Tchécoslovaquie ne peut compter sur leur soutien. Paris veut absolument éviter le conflit militaire, incitée en cela par le refus britannique de participer à une éventuelle intervention. Le souvenir de la Première Guerre mondiale influence également cette attitude : si les Allemands ont développé un désir de revanche, les Français entretiennent quant à eux une ambiance générale résolument pacifiste. Hitler exige alors que les Tchèques habitant la Région des Sudètes évacuent celle-ci en y laissant leurs biens. La guerre paraît imminente…
Le 29 septembre 1938, réunis dans la capitale bavaroise, Adolf Hitler, le président du Conseil français Édouard Daladier, le Premier ministre britannique Neville Chamberlain et le duce italien Benito Mussolini, signent les accords de Munich. La France et le Royaume-Uni acceptent que l'Allemagne annexe la Région des Sudètes, pour éviter la guerre. En échange, Hitler, manipulateur, a assuré que les revendications territoriales du Troisième Reich cesseraient. Le lendemain, la Tchécoslovaquie, qui avait commencé à mobiliser ses troupes, est obligée de s'incliner. Parallèlement, l'Allemagne autorise la Pologne et la Hongrie à s'emparer respectivement de la ville de Český Těšín et du sud de la Slovaquie. Alors que les opinions publiques françaises et britanniques sont enthousiastes, Winston Churchill commente : « Vous avez eu à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la guerre. » De fait, quelques mois plus tard, Hitler rompt sa promesse.
En mars 1939, lors d'une entrevue à Berlin avec le président tchécoslovaque Emil Hácha (remplaçant le président démissionnaire Edvard Beneš), le Führer menace de bombarder Prague si la Bohême et la Moravie ne sont pas incorporées à l'Allemagne. Le 15 mars, Hácha cède, et l'armée allemande entre à Prague le lendemain. La Bohême et la Moravie deviennent un Protectorat du Reich, dirigé par Konstantin von Neurath à partir de novembre 1939. La Slovaquie proclame son indépendance sous la houlette de Mgr Jozef Tiso sans toutefois quitter l'orbite allemande. En mettant la main sur la Bohême-Moravie, l’Allemagne nazie dispose par la même occasion d'une importante industrie sidérurgique et notamment des usines Škoda, qui permettront de construire des chars d'assaut.
La région des Sudètes dans l'Allemagne nazie
La région est un premier temps placée sous administration militaire et dirigée par le général Wilhelm Keitel. Lors de leur annexion, le 21 octobre 1938, la partie méridionale de la région des Sudètes est rattachée aux Gaue limitrophes de Bayreuth, Oberdonau et Niederdonau. Tandis que la partie septentrionale constitua le Gau Sudetenland, avec Reichenberg (aujourd'hui Liberec) pour capitale.
Konrad Henlein, devenu ouvertement membre du parti Nazi, y fut nommé Reichskommissar (« Commissaire du Reich ») le 1er mars 1938, puis Reichsstatthalter (de 1er mai suivant jusqu'au 4 mai 1945).
Le Sudetenland fut alors fut divisé en trois districts :
La mainmise du régime nazi sur la région s'accompagna comme dans tout le reste l'Allemagne, de persécution contre les « ennemis du Reich » : Juifs, communistes, socialistes ou pacifistes.
Le Gleichschaltung fut alors si efficace dans la région, que lors des élections de 1938, 97,32 % des voix revinrent au Parti nazi (NSDAP). Un demi-million d'Allemands des sudètes rejoignirent le NSDAP avec un taux d'adhésion de 17,34 % de la population (la moyenne sur toute l'Allemagne était estimée qu'à seulement 7,85 %), ce qui firent d'eux parmi les plus solides soutiens au régime d'Hitler.
Réintégration à la Tchécoslovaquie
Ce soutien indéfectible scella le sort de la région des Sudètes à la fin de la Seconde Guerre mondiale et fut réintégrée à la Tchécoslovaquie. L'expulsion massive des Sudètes fut décidée par le gouvernement de Prague : les Décrets Beneš furent signés dans ce sens entre mai et octobre 1945 par le président Edvard Beneš.
Voir aussi
- Sudètes, nom de la chaîne de montagne d'Europe centrale à cheval sur l'Allemagne à l'ouest, la Pologne au nord et la République tchèque au sud.
- Škoda Holding, créé en 1899
Notes et références
- http://www.baltimorereporter.com/?p=5636 Dick Morris, Eileen McGann. HITLER INVADED SUDETENLAND; NOW PUTIN INVADES SOUTH OSSETIA. Baltimore reporter, September 20th 2008 , Vol 1. No. 25.
- http://www.guardian.co.uk/world/2008/aug/12/georgia Kate Connolly. Obama adviser compares Putin to Hitler. Guardian, Tuesday August 12 2008;
- http://irzikevicius.wordpress.com/ BBC Monitoring: Lithuania's main daily urges policymakers to boost country's national security. Lituanica, September 1, 2008
- http://virtualcollector.blogspot.com/2008/09/destroying-democracy.html Melik Kaylan. Destroying Democracy. Forbes, September 4, 2008.
- http://grani.ru/Politics/Russia/m.140057.html Михаил Берг. Осетинские Судеты. Грани, 14.08.2008,
- http://www.almendron.com/tribuna/9786/quebeckosovo/ Luis Sanzo. Quebec/Kosovo. Britakula Almendron, 30 de Junio de 2006 ,
- http://www.elpais.com/articulo/internacional/Rusia/tiene/instinto/depredador/quiere/reconquistar/cree/elpepuint/20080609elpepiint_9/Tes PILAR BONET. Rusia tiene un instinto depredador y quiere reconquistar lo que cree suyo. El Pais Internacional, Miércoles, 24/9/2008,
- http://noticias.prodigy.msn.com/landing.aspx?cp-documentid=9410689 PUTIN EN OSETIA DEL SUR, HITLER EN LOS SUDETES: SEMEJANZAS Y DIFERENCIAS. The New York Times Syndicate - 8/15/2008
- http://www.uni-kassel.de/fb5/frieden/regionen/Serbien-Montenegro/status4.html Von Jürgen Elsässer. Verhandlungen nach Rambouillet-Muster. Verhandlungen über den Status der serbischen Provinz Kosovo stehen bevor,
- Horthy faisant main-basse sur les territoires en 1938 suite aux accords de Munich. Notons, bien que ce fait soit beaucoup moins connu, que la situation des minorités hongroises en Slovaquie est l'exact pendant de celles des Allemands en Bohême ; ils se verront réintégrées à leur pays « natal » au même moment : l'amiral
- Czechs and Germans in a Democratic Czechoslovakia, 1918-1938, in: Facing history — The evolution of Czech-German relations in the Czech provinces, 1848–1948
- (de) « Prager Tagblatt », No 116, 18 mai 1935, Tschechoslowakische Parlamentswahl, vol. 19, 5, 1935
- (de) « Alena Mípiková und Dieter Segert », Republik unter Druck.
- (de) « Prager Tagblatt », No 116, 18 mai 1935, Tschechoslowakische Parlamentswahl, vol. 19, 5, 1935
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