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Nudité
La nudité est l'état d'une partie ou de la totalité d'un corps humain qui n'est pas recouvert d'un vêtement ou qui l'est insuffisamment au regard de ce qui est convenu dans une culture ou une situation données.Sommaire
Les conceptions communes de la nudité
Comme celles de la pudeur, elles ont beaucoup évolué dans le temps et l'espace. La nudité était normale ou parfaitement tolérée chez de nombreux peuples des régions tropicales et équatoriales. Elle a été valorisée dans la Grèce antique notamment chez les guerriers et les sportifs (les jeux olympiques se pratiquaient nus). Elle est souvent valorisée dans l'art (peinture, sculpture…) aux époques classiques, ainsi qu'à l'époque moderne. À d'autres époques, pour des motifs religieux souvent, elle est mal admise voire strictement interdite (ère victorienne au Royaume uni). Ainsi les missionnaires catholiques et protestants ont-ils réussi sur presque toute la planète en zone tropicale à faire reculer la nudité des adultes, puis des enfants.
L'attribut des marginaux
De nombreuses sociétés humaines, ont perçu la nudité comme dangereuse, et notamment les forces conservatrices, et par extension le pouvoir ou certaines religions.
Hormis dans certains contextes (sphère du privé, vestiaires sportifs, plages ou sites naturistes, devant le médecin, etc. parce qu'elle ne cache pas les organes génitaux, la nudité totale est souvent assimilée à une invite à la sexualité. Et elle provoque un trouble d'autant plus intense qu'elle est rare. Or, la sexualité est elle-même très codifiée au sein de tout groupement humain, et la plupart des société semblent avoir édicté des lois et tabous ou des obligations vestimentaires, parfois explicitement en lien avec le contrôle de la reproduction de ses membres. Dans cette perspective, celui qui va nu dans la sphère publique peut donc aisément être assimilé à un insoumis ou comme ne reconnaissant pas les codes en vigueur. Dans les milieux ou sociétés les plus pudiques, sa nudité pourra être interprétée comme une invite à la transgression voire à la fornication, qu'il s'agisse de lois édictées ou de limites tacites. Celui qui se dispense publiquement de vêtement pourrait légitimement être soupçonné de ne pas adhérer au projet sociétal de son groupe : il refuserait ce faisant certains codes du groupe relatifs à l'intime dans sa relation aux autres.
Par ailleurs, le vêtement est porteur de symboles et support de divers marqueurs sociaux. En zone froide et tempérée, il est aussi un élément de protection contre le froid, comme il peut être une protection contre le soleil dans les déserts. En zone tropicale, le vêtement le plus simple, le pagne des tribus dites « primitives » ou peuples premiers, a aussi parfois fonction de protection contre les insectes et plantes piquantes ou urticantes.
Nudité et commerce
En outre, la nudité ne favorisant pas l'activité du secteur textile et du commerce des vêtements, elle ne participerait pas à une part généralement substantielle des échanges au sein de l'ensemble humain considéré, qu'il s'agisse d'échanges rituels ou économiques.
Sur ce point, le vêtement ayant nécessairement un coût, puisque généralement produit par un spécialiste, la nudité est souvent perçue comme liée à la pauvreté ou comme un attribut de l'indigent. En Europe, dans l'Empire romain ou au XIXe siècle, la blancheur de teint, que le port de parures lui permettait, était valorisée par la classe dominante (bourgeoisie), comme signe distinctif la différenciant d'une paysannerie à la peau halée par le soleil.
Arme politique et moyen de communication
Le corps nu est parfois utilisé dans les sociétés occidentales comme le support d'une revendication artistique, sociale ou politique contre l'ordre établi.
Il n'est pas rare en effet de voir des torses nus bariolés de slogans divers durant les manifestations de rue, ou dans certaines manifestations sportives par exemple. Le surgissement inattendu d'un homme ou d'une femme dévêtu au milieu des plus officielles des scénographies quotidiennes demeure toujours un moyen de faire parler de soi, comme l'ont compris les Nu-vites qui, par leur irruption dans le plus simple appareil, perturbent les plus codifiées des compétitions sportives. La nudité affichée peut dans ce cas troubler l'ordre social.
Les publicitaires jouent de la nudité, en utilisant les corps féminins offerts à la vue de tous via l'image publicitaire ou filmée ; d'une manière plus admise, mais qui suscite la contestation de certains groupes jugeant certaines images dégradantes.
Etant donné le caractère éminemment social et protecteur que confère le vêtement, la nudité imposée a souvent utilisée comme instrument de pouvoir et d'avilissement. On sait que la torture ne se conçoit le plus souvent qu'après dénudation partielle ou totale du prisonnier. Et la solution finale ne se comprenait pas sans le dépouillement de ses victimes…
La nudité à travers les âges
La nudité est commune dans l'antiquité. Si elle a souvent été condamnée par l'ordre conservateur, elle a aux mêmes moments parfois pu s'exprimer sans violence même dans la sphère publique.Les Romains ôtaient à titre infâmant tout vêtement aux condamnés à mort par crucifixion. De même, jusqu'à la reconnaissance du christianisme par l'Empereur Constantin, ils jetaient les chrétiens nus aux fauves dans l'arène par sadisme. Norbert Elias souligne qu'au Moyen Âge, en Europe, des familles entières se rendaient aux bains dans le plus simple appareil. Malgré les exhortations du clergé, (en particulier pour l'ordre catholique), la nudité n'a donc pas toujours été circonscrite à l'intimité du foyer.
Aux siècles de la rigueur protestante, ces coutumes ont régressé, mais n'ont pas interdit la perpétuation et même le développement de l'art du nu, en peinture ou dans la sculpture
Article détaillé : Représentation artistique du nu.La nudité est souvent drapée d'une dimension christique qui lui sert pour partie d'alibi, et qui se surajoute à la vision presque exclusivement esthétique de la nudité héritée de la Grèce antique, dont les conceptions de la beauté et de l'Homme sont en vogue à la renaissance puis aux périodes classiques.
Au XVIIIe siècle, des situations sociales particulières n'interdisent pas davantage l'exposition des corps dévêtus à la vue de tous. La nudité du roi devant sa cour était perçue comme normale. Mieux, ceux qui pouvaient assister à la toilette intime du monarque se considéraient comme bénéficiant d'un privilège insigne. De façon assez exceptionnelle, la nudité était alors un marqueur social positif. Mais la morale et la pudeur voulaient que seul une personne socialement d'un rang suppérieur pouvait se montrer nu sans indécence. Ainsi le roi se montrait nu aux nobles, qui se montraient nus aux bourgeois sans gêne. L'inverse ne se faisant pas. Toute la société respectait cette règle.
Un renversement se produit en Europe au XIXe siècle, peut-être encouragé par la mécanisation de l'industrie textile et l'influence croissante du discours hygiéniste qui conduisent les classes aisées, et à leur suite les classes moyennes émergentes, à voir dans la nudité ce signe de l'infamie paysanne évoqué ci-dessus. Ces mêmes classes s'engagent aussi dans de nouvelles pratiques corporelles, aujourd'hui objet d'étude de la sociologie du corps qui vont finalement les conduire à une rapide libération, celui de la femme en particulier, essentiellement à partir de mai 1968, avant que la popularisation du sport accompagne dans la seconde moitié du XXe siècle l'émergence d'un véritable culte du corps valorisant la nudité et son insertion dans un environnement sain, objectif indirect de certains naturismes. Dans les années 1970 à 1990, le culte du bronzage semble avoir à nouveau encouragé la nudité. Le bonzage est un signe que chacun se doit de ramener de vacances comme s'il s'agissait de prouver sa capacité à voyager ou à prendre des vacances. De nombreux auteurs tiennent à ce sujet pour révélatrice de la modification de la perception de la nudité dans l'évolution du maillot de bain, qui devient de plus en plus échancré, moulant et diaphane.
En France, Jusqu'à l'abolition du service militaire obligatoire, les jeunes conscrits devaient passer entièrement nus devant le conseil de révision en mairie afin que l'on juge s'ils étaient de santé et de robustesse convenables à l'exercice des armes. En 2008, dans certaines associations ou sectes secrètes, les candidats à l'admission doivent être nus pour recevoir l'initiation considérée comme une nouvelle naissance.
Dans les sociétés occidentales, le fait de montrer le sein en public y compris devant des enfants pour une femme en allaitement est parfaitement admis même s'il peut provoquer de la gène chez certaines personnes ou chez la mère elle-même. L'allaitement naturel, même s'il est peu pratiqué,est très valorisé. Toutefois en Amérique du Nord, il arrive que cette attitude soit jugée "innapropriate", mais les tribunaux sanctionnent le fait de demander à une femme de s'abstenir d'allaiter dans des lieux publics. Des condamnations de 2000$can et 3500$can ont été prononcées par le Tribunal des droits de la personne du Québec pour le fait de demander à une femme de cesser d'allaiter au sein dans un lieu public (Québec (Commission des droits de la personne) c. Lee, 2005 CanLII 35842 (QC T.D.P.) et (Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville de), 2003 CanLII 33420 (QC T.D.P.).
Parmi les ambassadeurs de la dénudation, l'enfant a toujours historiquement obtenu le premier la licence de la nudité, dont sur les plages[1]. Certains voient dans la nudité une forme de regreso ad uterum, retour symbolique dans l'utérus là où d'autres voient l'expression naïve et/ou jouissive d'une liberté permise par le franchissement d'un interdit. Les travaux du chercheur sont intervenus avant les scandales récents liés à la pédophilie.
Le Code pénal français (art 222-32) punit en 2008 l'exhibition sexuelle en public de 1 an de prison et de 15 000 euros d'amende. Le naturisme pratiqué sur les plages et dans des centres agréés ou tolérés par les Maires ne fait pas l'objet de sanctions pénales s'il a lieu de façon décente et honnête.
Face au marché de l'habit, il existe un marché utilisant la nudité allant de la presse de charme à la pornographie la plus crue, marché que l'on sait inspirer les médias.
Sur le plan religieux
On mentionnera l'existence, à diverses périodes et dans plusieurs pays d'Europe (Pays-Bas,Bohême, Savoie, Pologne, Grande-Bretagne) d' Adamites ou Adamiens qui s'inspirant de la pureté primitive du paradis terrestre pratiquaient la nudité pour l'exercice de leur culte dans leurs temples. Certains d'entre eux allaient même dans les rues pour proclamer l'observation des lois de la nature. Condamnés comme hérétiques par les autorités catholiques un certain nombre périrent sur des bûchers
A citer, aussi , l'exisence actuelle,en Inde,de sadhus hindous nus vivant seuls ou en communautés.Il convient de citer également en Inde les moines jaïns digambara(vêtus de ciel ) pratiquant le détachement complet du monde,l'ascétisme et la non violence absolue. Ils vont nus par les routes avec pour seuls biens un balai pour ôter de leur chemin les petites bêtes qu'ils pourraient écraser en marchant et un seau pour leurs ablutions. Ils recueillent dans leurs mains jointes la boisson et la nourriture que leur donnent pour vivre les laïcs. Pendant la mousson,ils restent dans des locaux mis à leur disposition par ces mêmes laîcs où ils méditent et donnent des sermons sur la non-violence et le détachement du monde.
Les limites à la nudité
Le mouvement décrit plus haut n'autorise pas tout. Comme le signale Jean-Claude Kaufmann dans son ouvrage Corps de femmes, regards d'hommes, la pratique des seins nus sur les plages apparaît inconcevable à ses plus ferventes supportrices quelques mètres en arrière, aux limites de la ville et de la civilisation. La nudité reste ainsi circonscrite à des espaces bien délimités, ce qu'a bien observé Francine Barthe-Deloizy dans sa Géographie de la nudité.
Ainsi, si le vêtement cesse progressivement d'être un indicateur de rang social pour indiquer davantage l'appartenance à un groupe ou à une tranche d'âge, la nudité demeure le fait de lieux où prend place une inversion passagère des règles sociales. On l'aura compris, elle ne s'épanouit plus ou moins qu'à la marge de la vie normale. Par exemple, pendant les carnavals, la nuit ou sur le littoral, à mi-chemin entre terre et mer.
Par ailleurs, certaines zones du corps restent difficiles à montrer. Par exemple, au Japon, l'exposition des poils pubiens était assimilée à un acte pornographique jusqu'à la fin des années 1990.
Plus important, d'une façon générale, le mouvement d'un corps nu demeure encore très stigmatisé, ayant décidément trop de ressemblances avec une parade sexuelle. À l'entrée des parcs naturistes allemands, où la nudité est par ailleurs très bien vécue, il existe des cabines pour se changer à l'abri du regard de tous. Dans les commerces des pays développés, on trouve des cabines d'essayage, dont l'existence peut surprendre au regard de ce qui se fait par ailleurs sur les plages : après tout, l'essayage d'un article ne demande dans le pire des cas que de paraître en sous-vêtements devant quelques clients.
On le voit, si la nudité est tolérée en public, la dénudation ne l'est toujours pas.
Conclusion
Se vêtir ou non, est in fine un acte éminemment social. La nudité n'empêche pas la pudeur. Elle peut être vécue par celui qui est nu ou par l'autre comme un acte de rébellion, voire un attribut de l'anarchiste ou du révolutionnaire, comme elle peut être chez les naturistes un mode en quelque sorte alternatif de vivre ensemble.
Articles connexes
Bibliographie
- Francine Barthe-Deloizy, Géographie de la nudité — ISBN 2-84291-975-0.
- Christophe Colera, Le corps comme enjeu de définition d'une orthodoxie des rapports sociaux : le cas du débat sur la nudité publique en Catalogne, Revue des Sciences Sociales, n°36, décembre 2006, Université de Strasbourg
- Christophe Colera, La nudité, pratiques et significations, Editions du Cygne, 2008 — ISBN : 978-2-84924-103-5
- Hans-Peter Duerr, Nudité et pudeur. Le mythe du processus de civilisation, 1998 Maison des sciences de l'homme,— ISBN: 2735107884
- François Jullien,Le nu impossible, Point Seuil, 2005 — ISBN 978-2-02-079465-7
- Jean-Claude Kaufmann, Corps de femmes, regards d'hommes. Sociologie des seins nus, Éditions Pocket, Paris, 2001 — ISBN 2-26610-980-4.
- Jean-Didier Urbain, Sur la plage — ISBN 2-22889-589-X.
On notera par ailleurs qu'en zoologie, le terme nudité signifie l'absence de fourrure, comme le présente Desmond Morris dans Le Singe nu.
Références
- ↑ Selon le chercheur en sociologie du corps Jean-Didier Urbain in Sur la plage
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