- Hanns Eisler
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Hanns Eisler, né le 6 juillet 1898 à Leipzig, mort le 6 septembre 1962 à Berlin-Est, est un théoricien musical et compositeur autrichien. Il est notamment connu pour être l'auteur de la musique de l'hymne national de l'ancienne République démocratique allemande, Auferstanden aus Ruinen.
Sommaire
Années de jeunesse et formation musicale
Hanns Eisler est le troisième enfant du philosophe athée et savant indépendant (Privatgelehrter) Rudolf Eisler (1873-1926) et d'Ida Maria, née Fuchs (1876-1929), tous deux d'origine juive. Son frère, Gerhart Eisler, était un homme politique communiste stalinien. Sa sœur Elfriede joua un rôle éminent dans la création du parti communiste autrichien puis du parti communiste allemand (KPD) sous le pseudonyme militant de Ruth Fischer. Elle s'opposa toutefois au stalinisme, dès 1925.
En 1901, la carrière de Rudolf Eisler amena la famille Eisler à quitter Leipzig pour Vienne. Hanns Eisler grandit dans un environnement petit-bourgeois où la musique et la littérature jouaient un rôle central. Il fut éduqué au lycée d'État et c'est à cette époque qu'il fit connaissance du marxisme.
En 1916, Hanns Eisler fut enrôlé dans l'armée austro-hongroise. Comme son frère Gerhard avait publié des articles pacifistes en 1914, la famille était surveillée par la police secrète impériale. Il servit d'abord dans un régiment d'infanterie hongrois, puis dans une école d'officiers de réserve près de Prague, jusqu'en 1918, où il fut arrêté deux fois pour indiscipline, sans doute pour agitation politique. Plusieurs compositions musicales datent de cette période (comme l'oratorio Gegen den Krieg[1]). Il accueillit avec joie la révolution d'octobre, ce qui outre la victoire du communisme en Russie, signifiait aussi la fin de la guerre, car l'ennemi russe étant de ce fait devenu neutre, les soldats pensaient qu'un seul front désormais assurerait la victoire aux Empires centraux et pour Eisler leur basculement vers la révolution.
Revenu à Vienne après la défaite, il étudia de 1919 à 1923 avec Arnold Schönberg en cours privés, tout en dirigeant des chorales d'ouvriers. Eisler fut un des premiers élèves de Schönberg à adopter la technique des douze sons (musique dodécaphonique). Il dédia à Schönberg sa Sonate pour piano op.1. Il épousa sa première femme en 1920, la chanteuse communiste Lotte Demant.Berlin. Art engagé
Hanns Eisler était attiré depuis l'enfance par les idéaux communistes (en partie sous l'influence de sa sœur et son frère) et cet élan marqua sa création musicale. C'est à partir de son installation à Berlin en 1925 que cette tendance vers une musique résolument politique se confirma. Berlin traversait alors un âge d'or pour les arts et les lettres et devenait un creuset d'expérimentation dans tous les domaines artistiques et politiques, tandis que les années 1925-1929 marquaient aussi le retour à la prospérité et à une stabilité relative en Allemagne. Hanns Eisler s'éloigna de la vision musicale sacralisée d'Arnold Schönberg et du post-romantisme qu'il jugeait « embourgeoisés ». Il s'orienta vers des formes musicales plus populaires, influencées par le jazz et le cabaret.
Eisler se rapprocha du parti communiste allemand KPD, mais ne sera jamais formellement membre du parti. Son appartenance au communisme provoqua sa rupture avec Schönberg. Il écrivit à partir de 1927 des articles politiques dans le journal communiste Die Rote Fahne[2] et enseignait dans des écoles du soir du parti communiste. C'est dans ce contexte qu'il fit la connaissance de Bertolt Brecht en 1929 et que débuta leur collaboration. Bertolt Brecht était lui-même marxiste et « compagnon de route », leur collaboration ne cessa qu'à la mort de ce dernier en 1956.
Hanns Eisler écrivit la musique de plusieurs pièces de Brecht : Die Massname, Die Mutter (d'après un roman de Maxime Gorki de 1907), Galileo, Furcht und Elend des Dritten Reiches, "Die heilige Johanna", Têtes rondes et têtes pointues, Schweyk dans la Seconde Guerre mondiale.Eisler et Brecht ont aussi produit des chants politiques qui ont joué leur rôle dans les années agitées de la République de Weimar au début des années 1930, comme par exemple la Solidaritätslied (1932) du premier film parlant « prolétarien » Kuhle Wampe. Eisler dirigea aussi le cercle prolétarien intitulé « Matérialisme dialectique en musique ». Il rencontra en 1933 à Paris les comédiens du groupe "Octobre", et mit en musique deux poèmes de Jacques Prévert: "Histoire du cheval" et "Vie de famille". Eisler fait aussi le voyage à Moscou à cette époque.
Exil aux États-Unis, 1933-1948
La musique d'Eisler, qui était communiste et juif, et la poésie de Brecht, qui était communiste, furent bannies par le parti nazi en 1933, et les deux auteurs trouvèrent refuge aux États-Unis. Eisler voyagea en 1935 en Tchécoslovaquie, à Paris, à Londres, et au Danemark, où il retrouva Brecht. Il donna une série de concerts aux États-Unis entre février et mai 1935, puis se rendit à Londres. Il épousa à Prague, le 7 décembre 1937, sa seconde femme Louise Anna Gosztony, qui était sa maîtresse depuis 1933[3]. Ils firent ensuite le voyage fin 1937 début 1938 à Madrid pour soutenir les communistes espagnols. C'est dans le courant de l'année 1938 qu'il s'installa aux États-Unis.
Eisler enseigna à la New School University à New York et composa de la musique de chambre expérimentale. Peu avant le début de la Seconde Guerre mondiale, il déménagea à Hollywood et composa la musique de nombreux films (Hangmen Also Die de Fritz Lang, None but the Lonely Heart, The Woman of the Beach de Jean Renoir).
Il écrivit en 1947 l'ouvrage Composing for the Films en collaboration avec Theodor Adorno. Eisler reprit la technique dodécaphonique (un exemple en est sa composition Fourteen ways of describing the Rain en l'honneur du 70e anniversaire d'Arnold Schönberg).
Ses deux œuvres essentielles de ces années sont la monumentale Deutsche Sinfonie (symphonie chorale en 11 mouvements reposant sur des poèmes de Brecht et d'Ignazio Silone, commencée en 1935, et qui ne sera terminée qu'en 1958) et un cycle de mélodies Hollywooder Liederbuch (1942-43).
Berlin Est (1950-1962)
Depuis la mort de Roosevelt (avril 1945), les États-Unis sont sous l'emprise de tendances anti-soviétiques encouragées par Truman et indirectement par la notion « de rideau de fer » de Churchill.
Hanns Eisler (dont le frère Gerhart, qui était communiste, était accusé par J. Edgar Hoover, chef du FBI, d'être une figure centrale de l'espionnage soviétique) fut inquiété par la Commission des activités non-américaines. Après deux auditions, Eisler fut accusé d'être « le Karl Marx de la musique » et un agent soviétique à Hollywood et il fut donc inscrit sur la liste noire du cinéma. Il fut, comme de nombreux artistes compagnons de route comme Brecht ou Chaplin, contraint de quitter les États-Unis en 1948. Son frère Gerhart fut condamné à trois ans de prison, mais fut libéré sous caution, s'échappa des États-Unis et rejoignit l'Allemagne de l'Est.
Hanns Eisler s'installa à Vienne, puis à Berlin Est. Il épousa sa troisième femme, Stephanie Peschl, en 1958. Il continua à composer, à enseigner au conservatoire Hochschule für Musik Hanns Eisler. Il composa la musique de l'hymne national Auferstanden aus Ruinen de la République démocratique allemande (RDA), Johannes R. Becher composant quant à lui les paroles. Il fut délégué du congrès international pour la paix à Vienne, dans les rangs de la RDA, en 1952, ce qui lui inspira son premier recueil des « Chants et cantates ». Il composa la musique du film Nuit et brouillard d'Alain Resnais en 1956 et en 1959 : La Rabouilleuse de Louis Daquin d'après le roman de Balzac. Son projet le plus ambitieux, un opéra moderne sur le thème de Faust, fut attaqué par la censure communiste. Sa loyauté politique vis-à-vis du communisme fut mise en cause lors d'une série d'auditions. Ce climat politique et la mort de Brecht en 1956 assombrirent ses dernières années. En 1959, création de sa Symphonie allemande. Il achève son œuvre ultime Ernste Gesänge (Chants graves), pour baryton et orchestre à cordes avant de mourir en 1962.
Œuvres principales
- Quatuor à cordes
- Premier septuor
- Deuxième Septuor
- Divertimento pour quintette à vents
- Sonates pour piano d'Eisler
- Huit pièces
- Suite pour orchestre opus 23
- Die Maßmahne opus 20
Arrangement
Avec Karl Rankl et Rudolf Kolisch, Hanns Eisler a réalisé un arrangement pour orchestre de chambre de la symphonie n° 7 d'Anton Bruckner dans le cadre des activités de l'Association pour les exécutions musicales privées fondée par Arnold Schoenberg en 1919.
Notes
- Ce qui signifie contre la guerre. Cette œuvre s'est perdue
- Ce qui signifie le Drapeau rouge
- Il fait sa connaissance alors qu'elle est l'épouse d'un industriel du nom de Jolesch, et qu'elle est animée d'idéaux communistes
Bibliographie
- Hanns Eisler, Johann Faustus, éditions Théâtrales, 2003 (traduction: I. Bonnaud , J. Stickan).
- (en) Gerard Friedlandler, Vienna, Berlin, Paris, London. Growing up in Interesting Times, manuscrit, 1995.
- François Furet, Le passé d'une illusion, Robert Laffont/Calmann-Lévy, 1995
- (de) J. Schebera: Eisler. Eine Biographie in Texten, Bildern und Dokumenten. Schott. Mainz 1998.
- (de) Ruth Fischer - Arkadij Maslow : Abtrünnig wider Willen. Aus Reden und Manuskripten des Exils. Hg. von Pete Lübbe. Vorw. Hermann Weber. München 1990. (Nachlassausgabe des Exilschaffens, mit Einleitung)
Voir aussi
Liens internes
Liens externes
- The International Hanns Eisler Society
- EislerMusic.com
- [1]
- Extraits d’archives sonores d’œuvres de Hanns Eisler, sur ContemporaryMusicOnline (portail de la musique contemporaine).
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