Franc-maconnerie au Canada

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Franc-maçonnerie au Canada

Le temple maçonnique de Montréal, rue Sherbrooke

La Franc-maçonnerie est une forme d'organisation associative, qui recrute ses membres par cooptation et pratique des rituels initiatiques faisant référence à un secret maçonnique et à l'art de bâtir. Apparue en Grande-Bretagne au XVIIe siècle puis réorganisée à Londres en 1717, elle se répandit dans de très nombreux autres pays du monde au début du XVIIIe siècle.

Elle s'est structurée au fil des siècles autour d'un grand nombre de rites et de traditions, ce qui a entraîné la création de différentes fédérations, nommées obédiences, qui ne se reconnaissent pas toutes entre elles. Elle se décrit, suivant les époques et les obédiences, comme une « association essentiellement philosophique et philanthropique », comme un « système de morale illustré par des symboles » ou comme un « ordre initiatique ».

Cet article décrit son histoire et son organisation au Canada.

Sommaire

Généralités

Au Canada, ce sont les francs-maçons traditionnels du courant régulier qui ont historiquement prédominé. Au Québec l'obédience régulière est représentée par La Grande Loge du Québec, qui compte plus d'une centaine de loges, dont les plus anciennes au Canada. Une dizaine de loges travaillent uniquement en français, d'autres sont devenues bilingues ; mais la majorité travaillent en anglais.

Le courant libéral a été représenté au début du XXe siècle par deux loges fondées par le Grand Orient de France: la loge Émancipation et la loge Force et Courage. Elles durent fermer leurs travaux en 1928 sous les persécutions religieuses et civiles. Il fallut attendre les années 1970 pour voir la création d'autres loges comme la Grande Loge Mixte du Québec, des loges du Grand Orient de France, de la juridiction canadienne du Droit Humain, du Rite égyptien de Memphis-Misraïm, puis, vers la fin des années 1980, de la Grande Loge féminine de France et de la Grande Loge de France. La maçonnerie libérale dans son ensemble compte aujourd'hui plusieurs centaines de membres.

L'Ordre Maçonnique mixte international Le Droit Humain possède une juridiction canadienne qui regroupe actuellement 6 loges mixtes travaillant en anglais, en espagnol et en français. La première loge du Droit Humain, « Liberté », fut fondée à Montréal en 1976.

La Grande Loge Symbolique du Canada. Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm est de langue française. Bien qu'il y ait des loges féminines et masculines, ces dernières ne travaillent pas dans la mixité.

Le Grand Orient du Canada est né en 1992 suite à un vote tenu à la loge Montcalm Nouveau Monde, qui était affiliée au Grand Orient de France. Une nouvelle loge du nom d'Émancipation a été créée à ce moment-là. La loge Émancipation est mixte, laïque, et travaille au "Rite français".

Histoire

En Nouvelle-France

La franc-maçonnerie existe au Canada depuis l'arrivée des premiers colons. Au Québec, des loges furent constituées dès 1721. La loge "Francs-Maçons Régénérés", placée sous la juridiction de la Grande Loge "Amitié et Fraternité" de Dunkerque, France, existait déjà en 1721 dans la ville de Québec. En 1767, cette loge devint la loge "Les Frères du Canada", sous la juridiction d'une des quatre Grandes Loges existant a cette époque en Grande Bretagne. Ainsi une lettre datée du 31 janvier 1851 et envoyée par le Secrétaire de la Loge La clémente Amitié de Paris, Hyacinthe Leblanc de Marconay, qui séjourna au Canada de 1834 à 1840, au Vénérable et aux membres de la Loge Albion de Québec :

« Vénérable Maître et Frères, vous avez l'avantage de posséder un des plus anciens temples de la Franc-Maçonnerie, puisque son érection date de 1721. »

Deux des plus anciennes loges de la Nouvelle-France qui existent encore aujourd'hui, l'Antiquity Lodge no.1 et la Loge Albion no.2, avaient été créées respectivement à Montréal et à Québec en 1752; mais il faudra attendre 1788 pour que naisse à Québec la St. John's Lodge no. 3, 1792 pour qu'apparaisse la Dorchester Lodge no.4 à Châteauguay, et 1803 pour que se forme la Golden Rule Lodge no. 5 à Stanstead. Auparavant les francs-maçons francophones se seraient réunis en Nouvelle-France dans la Loge des Francs-maçons régénérés, dont la date de fondation nous est inconnue mais qui doit être postérieure à 1743, cette loge ayant été parrainée par la Loge Amitié et Fraternité fondée cette même année à Dunkerque. L'an 1752 marque donc pour nous le début de la franc-maçonnerie au Canada et 1759, la naissance de l'obédience dont est issue la Grande Loge du Québec[1].

Le régime Anglais

Après la conquête, on trouve des maçons au sein des loges militaires parmi les soldats britanniques, mais la première loge maçonnique formée de civils est celle d'Annapolis Royal, en Nouvelle-Écosse, qui reçoit ses patentes de la loge des Maçons modernes de Boston en juin 1738. On délivre par la suite des patentes pour l'établissement de loges à St. John's (1746 et 1766), à Halifax (1750 et 1751) et à Québec (1764). Lorsque le Québec est divisé en 1791 pour former le Haut et le Bas-Canada, seulement quatre loges maçonniques sont en activité dans le Haut-Canada (Cornwall, Brockville et deux à Niagara).

En 1794, le lieutenant-gouverneur du Haut-Canada, John Graves SIMCOE, craint une insurrection des francs-maçons de Montréal à cause des relations étroites de ceux-ci avec des maçons de l'État du Vermont.

La Grande Loge du Canada

Aussi le supérieur des Sulpiciens et seigneur de Montréal, Étienne Montgolfier, s'élève contre l'Ordre en 1771. Il existait à Montréal, à cette époque un important groupe de Maçons francophones, dont plusieurs avaient été initiés en France vers 1760-1763 et que beaucoup de d'hommes de conditions diverses étaient attirés par l'Ordre. Il apparaît que des cérémonies maçonniques avaient même lieu publiquement, que des Maçons francophones se réunissaient déjà en Nouvelle-France et, qu'après la Conquête, des loges civiles et francophones furent créées.

En 1788, la loge "Les Frères du Canada" fut transférée a Montréal, et en 1792 elle se plaça sous la juridiction de la Grande Loge Provinciale du Bas Canada. L'Honorable Claude Dénéchau, qui signa la Charte constituant la loge régulière "Les Frères du Canada", était le premier Canadien à être nommé Grand Maître d'une Grande Loge au Canada.

Des loges maçonniques locales se forment plus tard dans d'autres futures provinces : en Colombie-Britannique (1859), au Manitoba (1864 et 1870), en Alberta (1882) et en Saskatchewan (1883). En 1855, 30 loges de l'Ouest canadien et du Québec se regroupent pour former la Grande Loge du Canada, et les loges maçonniques anciennes forment leur propre grande loge deux ans après.

Après moult tergiversations, le Québec forme sa propre Grande Loge en 1869. En fait la Grande Loge du Canada située en Ontario ne voulut pas reconnaître tout de suite l'autonomie du Québec, appuyée en celà par la Grande Loge d'Angleterre. Les Maçons du Québec reçurent toutefois l'appui des plus importantes Grandes Loges des États-Unis et ce sont les Grands Maîtres des Grandes Loges du Vermont et du Maine qui avaient déjà reconnus la Grande Loge du Québec qui procédèrent à l'installation du Grand Maître de la Loge du Québec. Un peu plus tard, à son convent des 8 et 9 juillet 1874, la Grande Loge du Canada reconnaissait l'autonomie de la Grande Loge du Québec.

En 1887, la Grande Loge du Canada change de nom pour tenir compte de la nature provinciale de la franc-maçonnerie canadienne; elle s'appellera dorénavant « The Grand Lodge of Ancient and Accepted Masons of Canada in the Province of Ontario ».

La franc-maçonnerie au Québec

Historiquement, les loges traditionnelles, déistes du courant dit "régulier" ont toujours prédominées. Cependant, les loges Émancipation fondée le 18 Juillet 1896 et Force et Courage qui étaient anti-cléricales et de tendances libérales fonctionnèrent durant quelques années.

Deux «périls» selon l'expression d'Henri Bernard menacent la vie intellectuelle montréalaise au début du siècle : l'un anglo-protestant et l'autre maçonnique.[2] Ils tendent la toile de fond à deux débats menés simultanément qui touchent les relations Église-État et qui contribuent à camper les positions. Il s'agit de celui des bibliothèques publiques et de celui de l'instruction obligatoire qui refaisait surface.


En février 1910, le Comité des citoyens, qui reçoit l'appui du mouvement nationaliste, porte les réformistes au pouvoir à Montréal . C'est le moment choisi par l'association catholique de la jeunesse canadienne-française pour purger la vie montréalaise de l'infiltration maçonnique. Ses membres, Albert J. Lemieux et V. E. Beaupré, président d'une section du mouvement, bientôt rejoints par Charles Albert Millette,Jean-Baptiste Prince et J. Bourgoinbo, s'adonnent à de l'écoute, après avoir loué l'appartement situé au-dessus du local de la loge dans l'édifice La Patrie situé à l'angle de la rue Sainte-Catherine et Hôtel-de-ville. Dans la foulée de ces événements, le maire J. J. Guérin, un Irlandais catholique ami intime de Monseigneur Bruchési et membre de la faculté de médecine, ouvre une enquête le 28 juillet. Louis Laberge et Adelstan de Martigny sont interrogés, les membres de la loge maçonnique étant soupçonnés d'avoir voulu intervenir à l'occasion du Congrès eucharistique de 1910. Mais l'enquête est jugée ultra vires par la cour supérieure.

Par ailleurs, au terme d'un procès, Lemieux, accusé de vol de documents et d'agression armée sur Ludger Larose, est acquitté. Mais Lemieux publie la liste des membres de la loge l'Émancipation et cette dénonciation entraîne la mise au ban avec pour conséquence directe pour de nombreux francs-maçons la perte de leur emploi. La loge Émancipation dut cesser toute activités. [3]

En ce qui concerne la loge Force et Courage fondée le 16 Mars 1910, elle dût travailler dans un contexte difficile. En effet à cette époque, au Québec, le clergé catholique jouissait d'un influence considérable auprès d'un population en grande partie illettrée et affaiblie par son isolement culturel et linguistique. Malgré tout elle continua ses travaux tant bien que mal jusqu'au milieu des années 1940.

Le clergé catholique a longtemps usé de son influence afin de décourager l'adhésion des francophones dans la franc-maçonnerie. En butte aux attaques de Mgr Ignace Bourget de 1858 à 1870. Dès 1858, Mgr Bourget avait dénoncé la Franc-Maçonnerie dont les initiés fomentaient, selon lui, de « noirs complots » contre la religion et l'État. À ce moment, les loges étaient fréquentées par les citoyens anglophones les plus respectables. Le juge William Badgley, ancien procureur général du Québec, en était Grand Maître. Il avait succédé à Peter McGill et à John Molson, deux anciens présidents de la Banque de Montréal et commerçants éminents. Dans le district de Québec, le Grand Maître était Claude Dénéchau, conseiller législatif, le premier Canadien-français à atteindre cette haute fonction maçonnique. Il y avait en effet deux Grands Maîtres au Québec depuis le début du XIX e siècle : l'un avait juridiction sur la région de Québec et de Trois-Rivières, l'autre sur celle de Montréal et de William-Henry (Sorel).

Francs maçons canadiens

S'il n'y a pas de preuves certaines de l'appartenance à la franc-maçonnerie de certains personnages historiques tels que Louis-Joseph Papineau, on sait que des francophones ont adhéré de différentes façons à des loges. C'est le cas par exemple de Honoré Beaugrand qui fut maire de Montréal de 1885 à 1887, de Joseph-François Perrault 1753-1844 que plusieurs reconnaissent comme le père de l'éducation au Canada et de plusieurs autres.

Aussi, plusieurs premiers ministres et politiciens canadiens ont été franc-maçons:

Situation actuelle

Selon l'encyclopédie canadienne, la Franc-maçonnerie canadienne compterait 200 000 membres au Canada.[4]

Cependant les chiffres provenant des Grandes loges sur les membres actifs sont beaucoup plus faibles.

Tableau du membership actif des Grandes Loges par province [5]
Province 2007 2006 gain/perte
ALBERTA 7,693 7,717 -24
COLOMBIE BRITANNIQUE 10,626 10,972 -346
MANITOBA 2,714 2,899 -185
NOUVEAU-BRUNSWICK 3,789 3,919 -130
TERRE-NEUVE/LABRADOR 2,130 2,112 +18
NOUVELLE-ÉCOSSE 5,664 5,761 -97
ONTARIO 52,130 53,513 -1,383
ÎLE DU PRINCE-EDWARD 821 861 -40
QUEBEC 4,441 4,554 -113
SASKATCHEWAN 3,636 3,714 -78
TOTAL 93,644 96,022 -2,378


Sauf au Québec (a cause de l'influence du clergé catholique), la Franc-maçonnerie à toujours joué d'une bonne réputation au Canada. Les franc-maçons ont participé à la vie communautaire de plusieurs localités et les loges ont souvent eus pignons sur rue.

Ville de Belleville, Ont. Affiche qui présente les organismes caritatifs et maçonniques (Shriners)
Voir l’article annexe : Liste d'obédiences maçonniques#Canada.

Grandes Loges régulières

Au Canada, chaque province dispose de son obédience (Grande Loge) régulière . Il n'y a donc pas d'obédience régulière qui puisse être appelée l'obédience du Canada ou la Grande Loge du Canada.

Loges du Droit Humain

Obédiences diverses

Loges du Rite égyptien de Memphis-Misraïm

Grande Loge du Canada de Memphis-Misraim

Loges du Grand Orient de France

Force et Courage (Montréal)

Articles connexes

Notes et références

  1. Jacques G. Ruelland, La pierre angulaire, Histoire de la franc-maçonnerie régulière au Québec, Point de Fuite, Canada, 2002, page 65.
  2. Henri Bernard, La Ligue de l'enseignement : histoire d'une conspiration maçonnique à Montréal. (Montréal, Notre-Dame-des-Neiges-Ouest, 1903), p. xiii.
  3. Desjardins, Rita (2001) Ces médecins montréalais en marge de l'orthodoxie. Canadian Bulletin of Medical History / Bulletin canadien d'histoire de la médecine, 18 (2). pp. 334. ISSN 08232105
  4. " L'Encyclopédie canadienne. Fondation Historica.
  5. Masonic Service Association of North America


Ressources bibliographiques

  • Jacques G. Ruelland, La pierre angulaire, Histoire de la franc-maçonnerie régulière au Québec, Point de Fuite, Canada, 2002 (ISBN 2-89553-022-X)
  • R.V. Harris, The Beginnings of Freemasonry in Canada (1938);
  • M.C. Jacob, The Radical Enlightenment: Pantheists, Freemasons and Republicans (1981);
  • Special Committee on the History (dir.), (Wallace McLeod, président), Whence Come We? Freemasonry in Ontario 1764-1980 (1980);
  • J. Ross Robertson, The History of Freemasonry in Canada from its Introduction in 1749 (2 vol., 1900).


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