- Discrimination et déportation des homosexuels sous l'Allemagne nazie
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Pendant l'entre-deux-guerres, les homosexuels, en Allemagne, particulièrement à Berlin, bénéficiaient d'une plus grande liberté et acceptation qu'ailleurs dans le monde. Toutefois, après l'accession au pouvoir d'Hitler, les homosexuels masculins, et dans une moindre mesure, les lesbiennes, constituèrent deux des groupes persécutés par les Nazis et comptèrent finalement parmi les victimes de la politique d'extermination du régime nazi. À partir de 1933, les organisations homosexuelles furent interdites. Les livres portant sur l'homosexualité, et sur la sexualité en général, furent brûlés. Les homosexuels au sein du parti Nazi furent eux-mêmes exécutés. La Gestapo constitua des listes d'homosexuels, et les contraignit de respecter la « normalité sexuelle allemande ».
Entre 1933 et 1945, on estime que 100 000 hommes ont été arrêtés comme homosexuels, et que, parmi ceux-ci, 50 000 ont été officiellement condamnés comme tels. (Les études estiment le nombre de victimes à 75 000 environ. 10 à 15 000 homosexuels ont été envoyés dans les camps de concentration nazis, tandis que 50 000 à 63 000 autres étaient internés en prison[1].) La plupart accomplirent leur peine dans des prisons habituelles, mais 5 000 à 15 000 d'entre eux furent incarcérés dans des camps de concentration. Il est difficile d'établir combien parmi ces derniers y périrent. Ruediger Lautman pense, toutefois, que le taux de mortalité des homosexuels dans les camps de concentration était d'approximativement 60 %. Les homosexuels étaient traités, en effet, de manière particulièrement cruelle par leurs gardiens, tout en étant soumis aux persécutions de leurs co-détenus. Cela explique le taux de mortalité particulièrement élevé des homosexuels dans les camps de concentration, comparativement aux autres « groupes anti-sociaux ».
Sommaire
Histoire
Dans l'Allemagne nazie, le 8 mars 1933, le premier camp de concentration à Dachau enferme les tout premiers internés. Berlin, qui était considéré comme la capitale de la liberté homosexuelle, devient le théâtre d'une active répression : les boîtes de nuit, les lieux de rencontre, les cafés et les bars homosexuels sont fermés, et les hommes qui les fréquentaient sont arrêtés, incarcérés ou déportés. Dans les camps nazis, les déportés homosexuels doivent porter un triangle rose, pointe tournée vers le bas, qui les identifie comme tels. Les nazis ont entrepris de purifier l'Allemagne de ce qu'ils considèrent comme une gangrène sociale, une « peste »[2].
Lors de la Nuit des Longs Couteaux, en 1934, le chef des SA, Ernst Röhm est assassiné et son meurtre est présenté par les nazis comme commis en raison de son homosexualité[3]. Il est à noter que déjà avant l'arrivée des nazis au pouvoir, les sociaux-démocrates et les communistes avaient régulièrement essayé d'atteindre Adolf Hitler en révélant et critiquant par voie de presse la vie sexuelle du chef des SA, allant parfois jusqu'à parler de relations orgiaques avec des jeunes membres des SA ou des Jeunesses hitlériennes.
La persécution des homosexuels n'est pas tant l'héritière d'une morale publique ou d'une pudibonderie qui était de rigueur sous l'Empire allemand mais se justifie désormais par des raisons d'hygiène publique et de préservation de la race, l'homosexualité étant généralement présentée comme un risque pour la fécondité allemande et donc de son devenir démographique.
Paragraphe 175
Article détaillé : Paragraphe 175.Les homosexuels arrêtés pour infraction au paragraphe 175 du Code pénal allemand qui réprime les relations « contre nature » entre hommes sont soit incarcérés soit transférés vers des camps de concentration.
Citations
- « Si j'admets qu'il y a 1 à 2 millions d'homosexuels, cela signifie que 7 à 8 % ou 10 % des hommes sont homosexuels. Et si la situation ne change pas, cela signifie que notre peuple sera anéanti par cette maladie contagieuse. À long terme, aucun peuple ne pourrait résister à une telle perturbation de sa vie et de son équilibre sexuel... Un peuple de race noble qui a très peu d'enfants possède un billet pour l'au-delà : il n'aura plus aucune importance dans cinquante ou cent ans, et dans deux cents ou cinq cents ans, il sera mort... L'homosexualité fait échouer tout rendement, tout système fondé sur le rendement; elle détruit l'État dans ses fondements. À cela s'ajoute le fait que l'homosexuel est un homme radicalement malade sur le plan psychique. Il est faible et se montre lâche dans tous les cas décisifs... Nous devons comprendre que si ce vice continue à se répandre en Allemagne sans que nous puissions le combattre, ce sera la fin de l'Allemagne, la fin du monde germanique. »
Bibliographie
- [1] Régis Schlagdenhauffen, Triangle rose, la persécution nazie des homosexuels et sa mémoire, Éditions Autrement, 310 pages, 2011 (ISBN 9782746714854)
- La déportation pour motif d’homosexualité en France, publication sous la direction de Mickaël Bernard Editions Mémoire Active, 2011
Articles connexes
- Homophobie
- Nazisme
- Camps de concentration
- Triangle rose
- Triangle noir
- Pierre Seel
- Struthof
- Bent
- Un amour à taire
- L'Arbre et la Forêt
- Les Damnés
Liens externes
- Amants des hommes, documentaire d'Isabelle Darmengeat sur la déportation des homosexuels en France et sur l'homophobie
- Devoir et Mémoire: les Oubliés de la mémoire
- L'ancien camp de Natzwiller-Struthof, en Alsace
Notes et références
- Mémorial de la Déportation Homosexuelle.
- 18 février 1937. Discours du chef nazi Himmler sur l'homosexualité prononcé le
- jeunesses hitlériennes, selon Harry Oosterhuis, Medecine, Male Bonding and Homosexuality in Nazi Germany, Journal of Contemporary History, Vol. 32, N°2 (avril 1997), p.187-205 Mais Hitler cache au peuple allemand que ces pratiques étaient répandues chez les hauts dignitaires nazis et dans les
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- Répression politique et extermination sous le Troisième Reich
- Déportation
- Homophobie
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