- Convergence uniforme
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La convergence uniforme d'une suite de fonctions est une forme de convergence plus exigeante que la convergence simple. Cette dernière demande en effet seulement que, pour chaque point x, la suite ait une limite. La convergence devient uniforme quand toutes les suites avancent vers leur limite respective avec une sorte de « mouvement d'ensemble ».
Dans le cas de fonctions numériques d'une variable, la notion prend une forme d'évidence géométrique : le graphe de la fonction fn se « rapproche » de celui de la limite.
Sommaire
Définition
Convergence uniforme
Soient X un espace quelconque[1], (Y,d) un espace métrique et A un sous-ensemble de X. Soient une suite de fonctions définies sur X et à valeurs dans Y et f une fonction définie sur X à valeurs dans Y. On dit que la suite (fn)n converge uniformément vers f sur A si :
Remarque : en introduisant la notation
(dans laquelle le sup peut a priori être infini), la propriété (1) est équivalente à :
Autrement dit, (fn)n converge uniformément vers f sur A si et seulement si
n'est en général pas une distance[2] sur l'ensemble des fonctions de X dans Y.
Quelques explications
On peut se demander a posteriori quelle est la différence entre la convergence simple d'une suite de fonctions et la convergence uniforme. En effet, la suite de fonctions (fn)n converge simplement vers f sur A si :
Ici, l'indice Nε,x dépend de alors que dans la proposition (1), l'indice Nε n'en dépend pas. Cette différence peut paraître anodine mais elle est pourtant essentielle :
- Dans le cas de la convergence simple, pour tout élément , on peut trouver un rang à partir duquel la distance d(fn(x),f(x)) devient très petite. A priori, si on choisit un autre que x alors le rang à partir duquel la distance d(fn(y),f(y)) devient très petite peut être différent.
- Dans le cas de la convergence uniforme, on peut trouver un rang à partir duquel la distance d(fn(x),f(x)) devient très petite pour n'importe quel à la fois. Cette condition est donc beaucoup plus forte. En particulier, une suite de fonctions qui converge uniformément sur un ensemble converge simplement sur celui-ci. La réciproque est en général fausse sauf dans des cas très particuliers (voir Théorèmes de Dini).
Critère de Cauchy uniforme
Supposons que l'espace métrique (Y,d) est complet.
(C'est le cas de bon nombre d'espaces métriques usuels, comme par exemple de la droite réelle munie de sa valeur absolue ou plus généralement de tout espace de Banach.)
Sous cette hypothèse, une suite de fonctions (fn)n converge uniformément sur A si et seulement si elle vérifie le critère de Cauchy uniforme, à savoir :
Comme dans le cas des suites de Cauchy, il n'est pas nécessaire d'exhiber la fonction vers laquelle tend une suite de fonctions pour montrer que la convergence est uniforme.
DémonstrationToute suite uniformément convergente vérifie clairement ce critère. Réciproquement, supposons le critère vérifié. Pour tout , la suite fn(x) converge car elle est de Cauchy dans un espace complet. Notons f(x) sa limite. On choisit une valeur ε strictement positive. Il existe un entier N tel que
Pour et fixés on a donc
d'où (par passage à la limite quand q tend vers l'infini)
Ceci montre la convergence uniforme et termine la démonstration.
Convergence uniforme de fonctions continues
On a le résultat fondamental suivant :
Si (fn)n est une suite de fonctions continues convergeant uniformément sur X vers une fonction f alors f est continue sur X.
DémonstrationMontrons la continuité en un point a fixé. Soit donné. Il existe un entier N tel que
La fonction fN étant continue en a, il existe un ouvert U contenant a tel que
Alors,
Quand X n'est pas compact, la convergence uniforme est un phénomène rare. Par exemple, converge uniformément vers ez sur tout compact de ℂ quand l'entier n tend vers l'infini, mais pas sur ℂ ; une série entière de rayon de convergence R converge uniformément sur tout compact contenu dans le disque ouvert de centre 0 et de rayon R, mais on ne peut pas dire mieux en général.
En fait, la continuité étant une propriété locale, la convergence uniforme sur "suffisamment" de parties de X suffit à assurer la continuité de la fonction limite.
Exemples
- Lorsque X est localement compact, si une suite (fn)n de fonctions continues converge vers une fonction f uniformément sur tout compact de X alors f est continue.
- On a la même conclusion lorsque X est un espace métrique et a un point arbitraire fixé de X, si la convergence uniforme a lieu sur toute boule fermée de centre a. C'est ainsi que l'on démontre par exemple la continuité de la fonction exponentielle dans une algèbre de Banach.
Le résultat suivant, moins fort que le théorème de convergence dominée, est aussi beaucoup moins difficile à montrer.
Si X = [a,b] est un intervalle de ℝ, si Y = ℝ ou Y = ℂ, et si une suite de fonctions (fn)n intégrables converge uniformément vers une fonction f, alors f est intégrable et
- .
Son utilisation est à la base du résultat suivant d'analyse complexe :
Soit (fn)n une suite de fonctions holomorphes sur un ouvert U de ℂ, convergeant uniformément sur tout compact de U vers une fonction f. Alors f est holomorphe.
Distance uniforme
Dans le cas général, on munit l'ensemble YX des applications de X dans Y de la distance uniforme sur X, définie par
où, rappelons-le,
On peut alors reformuler l'essentiel de ce qui précède :
- Définition de la convergence uniforme : (fn)n converge uniformément vers f sur X si et seulement si dans l'espace métrique .
- Critère de Cauchy uniforme : si (Y,d) est complet alors l'est aussi.
- Convergence uniforme de fonctions continues : si X est muni d'une topologie, le sous-ensemble des applications continues est fermé dans (donc est complet si Y l'est).
Diverses hypothèses sur les espaces X et Y peuvent simplifier ou enrichir cette situation :
- Si X est un espace compact alors sur , l'application est déjà une distance (sur ce sous-espace, elle ne prend que des valeurs finies), et est uniformément équivalente à .
- Si de plus Y est un espace vectoriel normé (dont la distance d est celle associée à la norme par : d(y,y') = | | y − y' | | ), alors est un espace vectoriel, sur lequel la distance est, elle aussi, associée à une norme, définie par :
- En particulier si Y est un espace de Banach alors aussi.
Critères de convergence uniforme pour les séries
Dans cette section, il n'est envisagé que le cas des fonctions réelles d'une variable réelle.
On trouve dans la littérature[3] la mention de nombreux tests de convergence uniforme portant les noms d'Abel, de Dedekind, de du Bois-Reymond, de Dirichlet, de Weierstrass... Ces critères sont des critères pratiques, cas particuliers de la formule de sommation partielle d'une série, plus faciles à appliquer.
Critère de Weierstrass
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si les fonctions an(x) sont chacune majorées en valeur absolue sur l'intervalle I par un nombre αn et que la série est convergente. »
On dit dans ce cas que l'on a une série normalement convergente.
Critère d'Abel
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si la série converge uniformément dans I, si de plus, pour toute valeur fixée de x, la suite bn(x) est monotone et enfin s'il existe un nombre K indépendant de x qui majore | bn(x) | pour tout x de I et tout n. »
On exprime cette dernière condition en disant que les fonctions bn(x) sont uniformément bornées dans I.
Critère de Dirichlet
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si les sommes partielles de la série sont uniformément bornées dans I et si les fonctions bn(x) convergent uniformément dans I vers 0, la convergence étant monotone pour tout x fixé. »
Critère de Dedekind
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si la série admet des sommes partielles uniformément bornées, les fonctions bn(x) tendent vers 0 uniformément dans I et que la série converge uniformément dans I. »
Critère de du Bois-Reymond
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si les séries et convergent uniformément dans I, les fonctions bn(x) étant de plus uniformément bornées dans I. »
Un autre critère
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si les séries et convergent uniformément dans I, les fonctions bn(x) étant de plus uniformément bornées dans I. »
dont un corollaire immédiat est
« La série converge uniformément dans l'intervalle I si la série converge uniformément dans I, les fonctions an(x) étant positives et les fonctions bn(x) étant uniformément bornées dans I. »
Espace des fonctions numériques continues sur [a,b]
On choisit dans cette section X = [a,b] un intervalle compact de ℝ et Y = ℝ. Puisque ℝ muni de la valeur absolue est complet, il en résulte que l'espace vectoriel normé muni de la norme est complet.
Théorème de Weierstrass
Le théorème d'approximation de Weierstrass affirme qu'on peut approcher de manière uniforme n'importe quelle fonction numérique continue sur [a,b] par une suite de fonctions très régulières à savoir par des polynômes. Plus précisément, si f est une fonction continue sur [a,b] alors :
- .
où ℝ[X] désigne l'ensemble des polynômes à coefficients réels.
Notes et références
- topologique. Cependant certaines propriétés phares de la convergence uniforme concernent des situations où l'espace de départ est nécessairement muni d'une topologie, par exemple la conservation de la continuité par passage à la limite. en particulier, la définition de la convergence uniforme fait sens même si l'espace de départ n'est pas muni d'une structure
- que cette fonction peut prendre des valeurs infinies (on y remédiera facilement en la remplaçant par exemple par ), et
- qu'elle peut s'annuler sans que les deux fonctions soient égales sur X tout entier ( est donc seulement un écart ; ce n'est une distance que si A = X).
Les deux obstacles sont :
- Voir par exemple Knopp, Theorie und Andwendung der unendlichen Reihen, 1922, (ou sa traduction, Knopp, Theorie and applications of infinite series, 1954)
Voir aussi
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