- Combat de Fouesnant
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Révolte de Fouesnant
Le combat de Fouesnant fut une révolte paysanne menée par Alain Nédellec en 1792. Ce fut un des affrontements qui devait annoncer la Chouannerie.
Sommaire
Prélude
En 1790, Alain Nédellec, laboureur à Fouesnant fut élu juge de paix dans son canton. Cependant il refusa de siéger pour n'avoir pas reçu une nomination signée de la main du roi, comme en avait reçu les juges des districts. Il proclamait par là que toute autorité légitime émanait du roi et entendait ainsi s'opposer aux patriotes de l'administration de Quimper. Nédellec accusa par la suite les autorités de vouloir empêcher sa nomination officielle mais il ne démissionna pas. Le tribunal de Quimper le condamna alors à une amende mais Nédellec refusa de la payer. L'huissier tenta en juin 1791, d'opérer une saisi sur ses biens, mais en fut empêché par des dizaines de paysans, il revint un mois plus tard avec quatre gendarmes mais fut encore repoussé par des paysans au nombre de plusieurs centaines cette fois-là. L'ordre fut alors donné à 250 soldats d'aller arrêter Nedellec, mais celui-ci prit la fuite, seuls son beau-père et quelques paysans furent arrêtés avant d'être finalement libérés suite à l'amnistie de septembre 1791. Un autre juge de paix fut élus mais l'élection fut perturbée à deux reprise. Nédellec acheta alors de la poudre et des armes et fit équiper ses partisans.
Les autorités de Quimper voulurent en finir et le 10 juillet 1792, 150 gardes nationaux et 16 gendarmes accompagnés d'une pièce de canon se mirent en marche pour Fouesnant. Au terme d'un court combat les gardes nationaux s'emparèrent du bourg. 80 révoltés furent tués ou blessés, 23 autres furent capturés et conduits à Quimper. Du côté des gardes nationaux les pertes furent d'un homme tué et de quatre autres blessés. Alain Nédellec parvint à s'enfuir mais fut arrêté cinq mois plus tard. Il s'évada, fut reprit, puis condamné à mort et exécuté en mars 1793, il fut la première personne à être guillotinée à Quimper. Les autres prisonniers furent acquittés pour "n'avoir point agi librement et dans le dessein du crime". Ce verdict refléta l'état d'esprit des patriotes qui croyaient que les paysans étaient manipulés par les prêtres réfractaires et des émigrés. Cependant, Nédellec semblait plutôt être le champion des revendications paysannes.[1]
Récit de Jean-Marie Jézéquel
Le sergent-major Jean-Marie Jézéquel qui commandait les gardes nationaux rapporta les évènements dans ses mémoires:
« Au mois de juillet 1791 ou 1792, il y eut une insurrection de paysans dans le canton de Fouesnant, suscitée disait-on par le juge de paix du canton. Elle devenait sérieuse. On annonçait que sept à huit mille paysans étaient rassemblés dans une plaine et se décidaient à marcher sur Quimper. On prit toutes les dispositions pour parer à pareille menace. Mais Quimper est une ville foraine: on peut y entrer par tous les côtés. Des émissaires furent envoyés dans les campagnes pour s'assurer du lieu de rassemblement. Le 13 juillet (?), sur les derniers avis reçus, on battit la générale tard dans la soirée. La Garde nationale prit les armes, bivouaqua; la troupe fut consignée en permanence ainsi que la Municipalité. Enfin, vers minuit, un de nos émissaires vient nous informer que les insurgés se concentraient sur Fouesnant avec l'intention de nous attaquer à l'improviste au point du jour. »« Ne voulant pas les attendre, de Département fit partir dès deux heures du matin un détachement de cent cinquante hommes de la Garde Nationale, autour de la Ligue (?) avec une pièce de campagne et les canonniers nécessaire à son service. »« La route était incertaine: nous avions un guide mais il nous mena par un chemin de traverse que les insurgés n'avaient point jugés à suivre. Nous entrions dans les villages pour contrôler notre route : partout nous rencontrions, malgré l'heure, des femmes... et de jolies- et pas un homme, ce qui nous parût de mauvaise augure. »« Enfin nous approchions. A deux portées de canon du bourg, je montais sur un fossé pour attraper une branche de guignes noires qui sont communes dans le pays et de cette position élevée je cessais de percevoir le bruit de notre troupe en marche, celui de la pièce de canon, du caisson et du fourgon aux bagages. Par contre, j'entendis fort distinctement la cloche du bourg qui sonnait le tocsin. Je descendis précipitamment et avertis la colonne que nous étions tout près du but. Le détachement fit halte. Monsieur Abgrall, procureur-syndic du district, commissaire chargé de proclamer la loi martiale, fit déployer son drapeau rouge et, accompagné de quatre gendarmes, marcha en tête de la colonne qui ne pouvait avancer qu'à la file indienne, le chemin étant trop étroit. Nous nous trouvions dans un bas-fond. Le bourg nous dominait et si les paysans avaient fait une décharge sur nous, nous étions perdus : la déroute eût été complète. »« Je fis avancer ma pièce, car bien qu'il y eût un lieutenant à la compagnie, comme il n'y entendais rien, il me chargea du commandement. Les paysans étaient rassemblés en haut du chemin, tous armés de fusils de chasse qu'ils tenaient serrés contre leurs genoux, mais sans attitude menaçante. Ils se contentaient de nous dire "Ne avancet ker". Le commissaire Abgrall et ses gendarmes prirent peur et battirent en retraite. Notre pièce d'artillerie avançait très lentement, car la côte était rude et le chemin si étroit qu'il fallait se servir de la pelle et de la pioche pour lui frayer une voie. Les canonniers ne pouvant servir utilement la pièce, franchirent le talus, suivis de grenadiers l'arme chargée à la main. Nous avions l'ordre de désarmer les paysans : nous nous mêlâmes à eux en toute confiance. Plus de cinquante avaient déjà mis bas leurs armes lorsqu'un de nos gardes nationaux eût l'imprudence de reprocher aux paysans d'avoir cédé à l'influence d'un juge de paix qui refusait d'obéir aux lois. Le dit juge de paix qui se trouvait à proximité entendit le propos, ajusta notre pauvre camarade et lui tira trois balles dans la tête : il tomba raide mort. Ce fut le signal du carnage et de la destruction. Nous grimpâmes sur un talus en face d'une chapelle, ajustâmes un groupe important et fîmes feu. Il en tomba beaucoup. Ceux qui n'étaient que blessés se sauvèrent, mais ceux qui n'avaient pas de mal se sauvèrent encore bien plus vite. Une minute plus tard le bourg était à nous. On parvint à monter le canon sur le placître et des patrouilles furent organisées dans les environs. Puis des gardes grimpèrent dans la tour où le tocsin continuait à sonner. Le sonneur paya son zèle de sa vie. Le drapeau noir fut arboré à la tour et ordre fut donné de faire feu sur tous les paysans qui paraîtraient. Puis on s'occupa à relever les morts et les blessés graves dont le nombre s'élevait à quatre vingt. On en trouva dans les champs environnants ; c'était des malheureux qui n'avaient été que blessés, qui s'étaient réfugiés dans les blés et qui y étaient restés jusqu'au bout de leur sang. »« C'était un spectacle bien hideux pour nous qui n'avions pas encore vu de pareille horreurs. »« Pendant les trois jours que nous sommes restés dans ce pays conquis, nous nous y sommes bien amusés. La paroisse de Fouesnant est réputée pour la beauté du sexe ; les femmes y sont belles, grandes, bien faites et point tigresses. Les hommes avaient fui... Je vous laisse à penser quelles orgies il s'y est fait pendant notre séjour. Nous avons traité le pays en vrai pays conquis. Les bœufs, les veaux, la volaille, le beurre, les fruits et les femmes étaient en réquisition et nous en avons usé bien largement. »« Il nous était venu du renfort de Quimperlé et de Brest. Mais nous étant assuré que le noyau du rassemblement de Sainte-Anne de Pludalast (?) dont celui de Fouesnant n'était que l'avant-garde - rassemblement qu'on évaluait à huit ou dix mille hommes - s'était dispersé, nous reçûmes l'ordre de nous retirer. Nous substituâmes le drapeau tricolore au drapeau noir et nous nous retirâmes. »« Le juge de paix, instigateur et cause de tous ces malheurs ne put être arrêté. Il devait l'être par la suite et je l'ai vu guillotiner à Quimper.[2] »Bibliographie
- Roger Dupuy, La Bretagne sous la Révolution et l'Empire (1789-1815), Ouest-France Université, 2004
- Joachim Darsel, L'homme qui croyait en la République, Le bouquiniste Morlaix (Finistère), 2000
Note
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