Codification juridique

Codification juridique

Codification (droit)

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Cet article contient des données générales sur la codification. Voir aussi Liste de codes juridiques.


En droit la codification consiste à regrouper des textes normatifs de natures diverses dans des recueils concernant une matière donnée. Chacun de ces groupes devient un code.

Sommaire

Formes et types de codification

La notion de « codification » recouvre en fait des pratiques différentes à bien des égards, dont les juristes et les historiens ont noté la variété, tant dans l'élaboration que dans le contenu.

Variations de forme

Il convient ainsi de distinguer :

  • la codification officielle ou codification proprement dit, par laquelle l'autorité (et notamment le pouvoir législatif) publie un texte auquel elle donne le nom de « code », ce qui est largement le cas en France actuellement ;
  • la codification officieuse, réalisée également par l'autorité qui promulgue un texte regroupant et unifiant des dispositions d'un même domaine, mais sans leur donner officiellement le nom de « code », alors même que le terme est utilisé couramment, même parfois dans des textes officiels : les codifications de l'Ancien Régime sont de celles-là (Code Michau, Code Louis et d'autres ordonnances royales) ;
  • la codification privée ou regroupement non officiel de textes autour d'un domaine, réalisés par des juristes et / ou des éditeurs pour faciliter le travail des professionnels du droit et des justiciables. Cette pratique a commencé à croître en France au XVIIIe siècle avec par exemple un Code pénal (1752) ou même un Code Corse en 1788, imprimé par l'Imprimerie royale, ce qui lui donnait un statut officieux assez marqué. De nos jours, la pratique continue avec par exemple le Code de droit international privé publié par Bruylant en Belgique.

Toutefois, employé sans précision, le terme de « codification » renvoie essentiellement à la première forme, parfois à la deuxième : on n'hésite pas à parler de l'« œuvre de codification de Louis XIV ».

Variations d'ampleur

Une codification implique une forme de rupture, dans la mesure où le code se substitue totalement ou partiellement à des textes antérieurs. Mais cette rupture est plus ou moins importante :

  • La codification-collection (ou codification-compilation) ne constitue pas de vraie rupture, se contentant de regrouper des textes qui subsistent. La codification privée se fait toujours de cette manière. La codification officielle ne laisse généralement pas subsister les textes précédents. Cependant, en France, certains codes (par exemple le code des communes) regroupaient des textes législatifs par commodité, mais n'avaient pas de force législative ; seuls les textes antérieurs, comme la loi de 1884 sur les conseils municipaux, étaient contraignants.
  • La codification à droit constant constitue une rupture dans les textes, mais pas dans le droit positif. Les textes antérieurs sont expressément abrogés mais leur contenu est repris dans le code, à l'exception des textes obsolètes (qui n'avaient été abrogés qu'implicitement) de sorte que le droit positif demeure : c'est la pratique française actuelle.
  • La codification au sens plein du terme tend à rompre non seulement avec les textes, mais avec le fond. La rupture n'est jamais complète : même les codes napoléoniens ont repris des portions significatives de l'ancien droit. Un exemple récent de codification avec rupture est le code pénal français de 1994 qui a introduit plusieurs nouveautés (abandon des peines plancher, suppression des peines d'emprisonnement contraventionnelles, etc.).

Certains historiens du droit, comme l'Italien Mario Viora, emploient le mot de « consolidation » pour les deux premières formes, réservant le mot de codification à la troisième.

Codification et recodification

La codification consiste à créer un code dans un domaine où il n'en existait pas. Dans certains cas, on peut parler de recodification :

  • soit lorsque l'on refond complètement un code préexistant, avec le même titre ou un titre légèrement différent, comme en France le code de commerce en 2000 ;
  • soit lorsqu'un nouveau code intègre le contenu d'un code antérieur dans un ensemble plus vaste, tel le code de justice administrative refondant le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, mais ajoutant les dispositions relatives au Conseil d'État ;
  • soit lorsque des dispositions incluses dans un code sont transférées dans un code qui vient d'être promulgué, comme les dispositions concernant la chasse et la pêche, passées du code rural au code de l'environnement.

Contenu d'un code

Un code peut contenir des dispositions normatives de natures diverses, dont les principales sont les lois et les règlements. Les codes officiels français ne contiennent d'ailleurs que cela, mais il serait possible, dans d'autres systèmes juridiques, d'intégrer des éléments de jurisprudence ou de doctrine.

En France, quelques-uns des codes actuellement en vigueur sont des codes de déontologie. Ce n'est toutefois pas une règle générale que les règles déontologiques soient incluses dans la codification du droit.

Aux États-Unis, il existe des « federal sentencing guidelines » qui servent de base aux codes de déontologie et aux chartes professionnelles.

La codification moderne en France

Révolution française et Premier Empire

La Révolution française souhaitait mettre les lois et règlements à la portée de tous. Elle a donc lancé plusieurs chantiers de codification, qui ont surtout abouti pour le droit pénal avec la publication d'un code pénal en 1791. En revanche, le grand projet d'un « Code de lois civiles communes à tout le royaume », affirmé par la Constitution de 1791 (Titre préliminaire, dernier alinéa) n'aboutit pas avant la fin de la période révolutionnaire.

C'est donc Napoléon Bonaparte qui lance un mouvement de codification de grande ampleur et crée le code civil français en 1804, puis les codes impériaux : code de procédure civile (1806), code de commerce (1807), code d'instruction criminelle (1808) et code pénal (1810).

L'affaiblissement de la codification de la fin de l'Empire à la Troisième République

Une fois publiés les cinq codes, le mouvement lancé par Napoléon Ier s'essouffle. Un projet de code rural est écarté par l'Empereur et n'est pas repris par la Restauration, malgré les demandes exprimées, y compris par certains députés. Louis XVIII fait promulguer par ordonnance une nouvelle version de chacun des cinq codes impériaux, mais il ne s'agit que de changer les références à l'Empire par des références au Royaume. La seule création de la Restauration est un code forestier établi par la loi du 1er août 1827. Sous la Monarchie de Juillet, le code pénal fait l'objet d'une republication prévue par la loi du 28 avril 1832 et opérée par ordonnance, mais les modifications ne sont que des ajouts et modifications d'articles, l'essentiel du code subsistant.

Par la suite, la codification n'apparaît plus comme une préoccupation. Il faut attendre 1857 et 1858 pour voir promulgués respectivement le code de justice militaire de l'armée de terre et le code de justice militaire de la marine.

La Troisième République s'intéresse de nouveau à la codification et s'engage dans la création du code rural tant attendu. Cependant, le travail des bureaux ministériels prenant du retard, le Gouvernement se résout à faire voter le texte en plusieurs fois, conduisant à une série de courtes lois destinées à former ultérieurement le code rural, et dont l'adoption s'étend de 1881 à 1890. L'adoption du code du travail et de la prévoyance sociale, votée en général livre par livre, commencée en 1910, ne s'achève qu'en 1927. Pour pallier ces retards, le Gouvernement a recours à deux méthodes :

  • la première consiste à diviser les projets de codes en plusieurs : au lieu du code du blé qui avait été promis, sont promulgués un code de l'organisation et de la défense du marché du blé et un code de l'office national interprofessionnel du blé, et quatre codes fiscaux voient le jour au lieu d'un unique code général des impôts (qui sera finalement créé par recompilation en 1950) ;
  • l'autre consiste à passer à la codifiation par décret, après que le Parlement l'y a autorisé par une loi.

Cela n'empêche toutefois pas la promulgation de codes dont quelques-uns sont toujours en vigueur, le code du travail maritime et le code disciplinaire et pénal de la marine marchande (1926).

La relance de la codification à l'époque contemporaine

La IVe République relance le processus de codification en créant une commission supérieure chargée d'étudier la codification et la simplification des textes législatifs et réglementaires (décret no 48-800 du 10 mai 1948). Une quarantaine de codes sont publiés, mais ils sont adoptés par décrets en Conseil d'État, sans validation par le Parlement. À partir de la IVe République, certains codes comportent une partie législative et une ou plusieurs partie(s) règlementaire(s) (règlements d'administation publique et décrets en Conseil d'État, décrets simples, arrêtés). À la fin de la IVe République, la loi no 58-346 du 3 avril 1958 confère une force de loi aux parties règlementaires d'une quinzaine de codes et abroge les anciennes lois correspondantes, ce qui est une forme de codification différée.

La Constitution de la Ve République établit, dans son article 34, une distinction plus nette entre le domaine de la loi et le domaine règlementaire, ce qui entraîne des conséquences dans la volonté de maintenir une distinction rigoureuse entre les deux, avec la constitution systématique de parties législatives et de parties réglementaires. Cela conduit par exemple à la création de parties règlementaires pour des codes qui n'en comportaient pas, comme le code pénal (décrets nos 58-1303 du 23 décembre 1958 et 60-896 du 24 août 1960). La pratique de la codification par décret se poursuit, les codes n'ayant valeur législative que si une loi ultérieure la leur confère expressément.

Afin de relancer le mouvement de codification qui se ralentit, le Gouvernement crée en 1989[1] une commission supérieure de codification, chargée de codifier à droit constant le droit relatif à un certain nombre de domaines. La codification à droit constant consiste à changer la forme, la structure des codes, la numérotation des lois et réglements, sans modifier le contenu global du droit. Elle vise à harmoniser les codes entre eux et par rapport à la hiérarchie des normes. Elle utilise des outils informatiques. Ainsi, le code du commerce français, rédigé en 1807 (à partir d'une version de 1673), a été recodifié à droit constant en 2000. Il ne restait plus que 150 articles en vigueur du code initial.

Les travaux de la commission supérieure de codification ont abouti à la création de plusieurs dizaines de nouveaux codes. Dans un premier temps, ces codes entrent en vigueur par l'intermédiaire d'un projet de loi adopté par le Parlement afin d'ôter toute incertitude sur leur force juridique. Cinq codes ont ainsi été promulgués entre 1989 et 1996. Les lois antérieures sont abrogées au fur et à mesure que leurs dispositions sont reprises dans des codes, ce qui n'était pas le cas lorsque les codes étaient adoptés par l'exécutif. Toutefois, face à un nouveau ralentissement de la codification, le Gouvernement a eu recours à des ordonnances de codification à partir de 1999 [2]. Ces ordonnances permettent la promulgation rapide de nombreaux nouveaux codes.

Calendrier d'adoption des codes (partie législative sauf mention contraire) :

  • de 1989 à 1996 : code de la propriété intellectuelle, code de la consommation, code général des collectivités territoriales, code des juridictions financières, code rural (partiel)
  • 2000 : code de l'éducation (15 juin 2000), code de la santé publique (15 juin 2000), code de commerce (18 septembre 2000), code de l'environnement (18 septembre 2000), code de justice administrative, code de la route (23 décembre 2000), code de l'action sociale et des familles (23 décembre 2000), code monétaire et financier (14 décembre 2000), code rural (15 juin 2000).
  • après 2000 : de nouveaux codes ont été adoptés, parmi lesquels le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (2004), le code de la défense, , le code des juridictions financières, le code de justice administrative, le code des marchés publics (purement réglementaire, trois versions entre 2001 et 2006), le code du patrimoine (20 février 2004), le code de la recherche et le code du tourisme.

Le gouvernement français a déposé le 13 juillet 2006 sur le bureau du Sénat un projet de loi de simplification du droit [3] qui devrait poursuivre le processus de codification. Il prévoit en effet d'habiliter le Gouvernement à utiliser les ordonnances pour modifier plusieurs codes existants et créer de nouveaux codes :

  • code des métiers et de l'artisanat
  • code des transports (qui fait déjà l'objet d'une habilitation)

Place dans la hiérarchie des normes

Les codes contiennent soit des lois, soit des réglements, qui sont notés :

  • dans la partie législative :
  • dans la partie réglementaire :
    • R-ppp pour les décrets en Conseil d'État ;
    • D-ppp pour les décrets simples.

Les lois d'un même code peuvent être placées, dans la hiérarchie des normes, dans le bloc de la légalité .Les réglements sont placé en dessous dans le bloc réglementaire.

Les codes en vigueur

En France

La législation française comprend (en fin 2007) 61 codes. Sauf exception, les codes contiennent une partie législative (codée L-) et une partie réglementaire (codée R-). À titre d'exemple, le code du travail comprend 2000 pages, et le code général des impôts en comprend 2500. Pour la liste, voir Liste de codes juridiques.

Voir aussi

Références

  1. Décret no 89-647 du 12 septembre 1989 relatif à la composition et au fonctionnement de la Commission supérieure de codification (version consolidée sur Legifrance).
  2. Suite à la loi d'habilitation n° 99-1071 du 16 décembre 1999.
  3. Voir le dossier législatif sur le site du Sénat.

Articles connexes

Liens externes

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