Charles de Sainte-Marthe

Charles de Sainte-Marthe

Charles de Sainte-Marthe, né à l’abbaye de Fontevrault en 1512 et mort à Alençon en 1555 est un théologien, humaniste et poète.

Deuxième des douze enfants du médecin ordinaire de François Ier, Gaucher de Sainte-Marthe, il étudia le droit et la théologie à l’université de Poitiers. En 1533, il commença à enseigner au collège de Guyenne à Bordeaux, où il ne resta qu’une courte période. Après une année d’errance en Guyenne, il retourna à Fontevrault, et obtint peu après son doctorat à Poitiers. Nommé professeur de théologie à l’université de Poitiers en 1537, il y donna des leçons publiques de théologie et fut soupçonné de partager les nouvelles opinions. Son penchant pour la Réforme entraîna son exil de Poitiers. Il erra un an ou deux en Dauphiné, Provence et Languedoc. En 1540, il fut emprisonné à Grenoble en raison de ses opinions religieuses, mais il fut bientôt libéré et accepta, à Lyon, une chaire de langue hébreue, grecque, latine et française, au collège de la Trinité. Au début de 1541, il se rendit à Genève pour un court séjour. À son retour à Grenoble, il fut emprisonné pendant deux ans et demi comme un « suspect de luthéranisme et fauteur de sédition ». Dépouillé de tous ses biens, il n’échappa au bûcher qu’en simulant la folie, et par la protection de deux conseillers au parlement de Grenoble. En 1544, il entra au service de la duchesse Françoise de Beaumont, lorsque Marguerite de Valois, reine de Navarre, l’appela auprès d’elle à Alençon, dont elle était duchesse, et où elle lui attribua la fonction de lieutenant criminel, qu’il y exerçait encore à mort en cette ville, à l’âge de 43 ans. Il était l’oncle de Scévole de Sainte-Marthe.

On doit à Sainte-Marthe La Poésie Françoise (1540), composé d’épigrammes, rondeaux, ballades, épîtres, élégies, et des poèmes, adressés à Sainte-Marthe par ses amis ; des Paraphrases des septième et trente-troisième Psaumes (1543) ; une Oraison funèbre latine en l’honneur de Marguerite de Navarre (1550), in-4° de plus de cent pages, et qu’il donna en français l’année suivante. Elle offre des détails curieux et intéressants relatifs à la reine de Navarre, sur laquelle, admis dans son intimité, l’auteur avait recueilli des particularités qu’on ne trouve pas ailleurs au sujet de de cette princesse, sœur de François Ier et aïeule de Henri IV ; une Méditation latine sur le Psaume quatre-vingt (1550) ; une Oraison funèbre latine en l’honneur de la duchesse de Beaumont (1550), et une douzaine de poèmes latins et français divers.

Poète de l’École marotique, Sainte-Marthe est un précurseur de la Pléiade, à plusieurs titres. Platonicien et pétrarquiste, il a imité, dans sa Poésie Françoise, Martial, Clément Marot, Mellin de Saint-Gelais, Hugues Salel, Rabelais, Marguerite de Navarre, quoique sa versification ait été décrite comme « se caractérisant généralement par une absence totale de sentiment poétique[1]. » Sa passion pour les poètes antiques se discerne clairement dans ses deux Oraisons funèbres, où Platon joue le rôle d’oracle. les vérités du christianisme n’en constituent que la forme d’un fond tout entier peuplé par les formes de l’antiquité tout entière. Il faut toutefois se garder de conclure trop hâtivement que l’engouement pour l’Antiquité s’est substitué, dans l’esprit de Sainte-Marthe, à la religion. Suivant, en cela, l’exemple déjà donné par Marguerite de Navarre, Sainte-Marthe a délibérément tenté d’harmoniser, dans l’esprit de ses lecteurs, la doctrine chrétienne et la philosophie classique, afin de réinterpréter, à travers cette dernière, la religion grevée par les hommes de fausses ou d’inutiles traditions. Dans ses Oraisons, qui représentent sans doute ses meilleures œuvres, Sainte-Marthe rend hommage aux deux princesses qui l’ont traité en ami, il s’en prend aux vices contemporains, discute de la position de la femme et de l’éducation. C’est surtout dans ses œuvres en latin qu’on peut se former une idée de la théologie, provenant, de toute évidence, du moins dans une certaine mesure, de Calvin, que professait Sainte-Marthe. Pourtant, comme nombre d’intellectuels de son époque, Sainte-Marthe reconnaissait l’autorité du pape et, tout en désirant sincèrement une réforme au sein de l’Église, était opposé au schisme.

Homme polyvalent, mais banal, Sainte-Marthe s’est montré extraordinairement réceptif aux courants intellectuels de son temps. Tout en subissant l’influence intellectuelle des idées nouvelles de la Renaissance, il en avait conservé certaines des anciennes. Cet humaniste adversaire du paganisme de la Renaissance, légèrement réformateur en matière religieuse, bon prosateur mais médiocre poète, ami des gens en place de son époque, est très intéressant car emblématique de l’homme moyen typique de la Renaissance.

Notes

  1. Caroline Ruutz-Rees, Charles de Sainte-Marthe (1512-1555).

Source

  • (en) Caroline Ruutz-Rees, Charles de Sainte-Marthe (1512-1555), New York, The Columbia University Press, 1910. xiv + 664 p.

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