- Caftan
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Le caftan est un vêtement porté dans diverses régions à travers le monde : Asie centrale, Perse (qui englobait l'actuel Iran ainsi que d'autres États), Inde sous la dynastie moghole fondée par Bâbur, certains États indépendants de l'actuelle Italie comme la République de Venise, l'empire omeyyade, l'Algérie, le Maroc et Empire ottoman. Le terme recouvre en effet une grande variété de tuniques longues existant ou ayant existé à différentes époques.
D'autres graphies existent, telles que cafetan ou plus anciennement kaftan, khaftan voire qaftan[1]. Le mot français est une translittération d'un nom turc lui-même emprunté au persan.
Sommaire
Définition et variantes
Les caftans sont définis par un certain nombre de points communs : ils sont longs et souvent amples, droits ou légèrement croisés, à manches longues ou mi-longues, sans col ou capuche et ouverts en leur milieu, sur toute leur longueur (avec ou sans boutons). Toutefois, chaque nation ou peuple ayant intégré le caftan dans son patrimoine vestimentaire a donné à celui-ci sa touche propre au niveau de la coupe, des tissus, des couleurs, des broderies, des ornementations et des motifs, d'où l'apparition de caftans perses, moghols, vénitiens, ottomans, slaves ou andalous.
Ces tuniques auraient été portées initialement par les hommes puis adoptées par les femmes ; ils ne sont pas au départ des vêtements destinés aux cérémonies de mariage.
Historique
L'expansion géographique de l'islam a contribué à sa propagation et à ses transformations progressives au cours des siècles et en fonction des pays et cultures. L'actuel monde arabo-musulman a ainsi toujours été traversé par des caravanes commerciales ramenant avec elles des produits variés ; le pèlerinage à La Mecque, cité qui était déjà avant l'arrivée de l'islam une ville d'échanges commerciaux et de pèlerinages, intensifie encore les rencontres et échanges entre des peuples venant d'Asie, d'Orient, d'Afrique ou d'Europe. Cependant, l'islamisation n'implique pas que tous les peuples convertis ont adopté d'office le caftan, dont les compositions diffèrent selon les positions hiérarchiques et sociales ; des populations ou certaines ethnies berbères ont ainsi conservé leurs habits traditionnels.
Peu à peu, les anciennes nations productrices de caftans les ont délaissé au profit d'autres tenues à la mode, souvent sont celles de la puissance culturelle dominante. En revanche, les caftans hérités des Andalous installés au Maroc perdurent dans ce pays où des artisans de Meknès, Fès, Tétouan et Rabat gardent le savoir-faire nécessaire à leur fabrication ; les premiers écrits marocains mentionnant le caftan dateraient du XVIe siècle. De nos jours, le terme est utilisé pour qualifier un long vêtement d'apparat traditionnellement porté par les femmes marocaines et revisité par des stylistes permettant à cette tunique de revivre sous de nouvelles formes.
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Mohammad Shah Qajar, chah d'Iran (1808-1848), originaire d'Azerbaïdjan
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Alim Khan, dernier émir de Boukhara, en caftan ouzbek (photo de 1911)
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Méhémet Ali, vice-roi d'Égypte, en caftan ottoman (1840)
Maroc
Article détaillé : Caftan marocain.Contexte
Les caftans marocains sont originaires de l'Andalousie mauresque où les élites arabo-musulmanes de l'empire omeyyade ont apporté à partir du IXe siècle des caftans empruntés aux Perses. Entre le IXe et le XVe siècle.
De la tradition à la modernité
Le caftan, nommé aussi takchita dans sa version légère et moderne, est l'un des divers composants du patrimoine vestimentaire marocain. Contrairement au takchita, le terme de caftan demeure l'appellation utilisée pour désigner l'habit traditionnel. Dans les années 1980, reprenant des caftans hérités de l'Andalousie mauresque, des stylistes participent à la création de nouveaux modèles dans un contexte de transformations des choix vestimentaires des marocaines en faveur de vêtements de type occidental ou de tenues considérées comme rigoristes (en provenance du Moyen-Orient).
Empire ottoman
Les caftans portés par les sultans ottomans constituent l'une des collections principales du Palais de Topkapı à Istanbul. Certains d'entre eux, extrêmement précieux, étaient employés comme récompenses pour les services rendus par les plus importants notables et par les généraux victorieux à l'occasion de festivals religieux.
Les caftans ottomans sont fréquemment brodés sur l'avant et sur les manches. Une codification stricte, par certains aspects semblable à l'héraldique, existe concernant les décorations, motifs, rubans et couleurs qui correspondent au rang du porteur. Au XIVe siècle, les motifs sont étendus et les couleurs sobres mais ces caractéristiques évoluent pour devenir respectivement plus fins et plus brillantes. L'art des caftans culmine vers la seconde moitié du XVIIe siècle avec les tissus de type Selimiye aux larges bandes verticales et aux minutieuses broderies.
Les tissus sont principalement produits à Istanbul et Bursa quand ils ne sont pas importés de Venise, Gênes, la Perse, l'Inde ou la Chine. Chaque tissu possède des propriétés particulières et un nom différent : velours, taffetas mais aussi bürümcük, aba, canfes, gatma, gezi, diba, kutnu, kemha, seraser, serenk, zerbaft et bien d'autres. Certaines couleurs sont plus utilisées que d'autres comme le bleu de Chine, le rouge de Turquie, le violet, le pişmis aya, le coing cuit ou le jaune safran.
Lorsque en 1922, Mustafa Kemal Atatürk, père de la Turquie moderne, renverse le sultan ottoman, il souhaite rompre de façon radicale avec un pouvoir jugé archaïque et décadent. Sa volonté de rupture et de modernisation se traduit aussi par l'interdiction des attributs vestimentaires ottomans, tels que le caftan ou le fez, au profit de tenues occidentales.
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Peinture par Ismail Acar d'un caftan offert par les Vénitiens à Soliman le Magnifique
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Mamelouk ottoman du Moyen-Orient en habit ordinaire (1779)
Régences ottomanes
La quasi-totalité des pays arabes, à l'exception du Maroc, ont été des territoires sous domination de l'Empire ottoman durant plusieurs siècles. Avec le départ progressif des Andalous vers le Maghreb, dont les actuelles Algérie et Tunisie, ceux-ci ramènent avec eux des caftans mauresques qui ne connaîtront cependant pas les mêmes évolutions et influences qu'au Maroc.
En effet, à l'exception des dignitaires turcs et de quelques notables algériens ou tunisiens participant à l'administration de la ville, la très majorité des hommes ne portent pas de caftan, la tenue masculine se composaient d'une chemise, d'un gilet, d'un fez, d'un pantalon bouffon (zeroual) entouré à la taille par une pièce d'étoffe servant de poches appelée foutah ou d'une soutane entourée à la taille par une foutah. C'est pourquoi le caftan ne peut être considéré comme une tenue traditionnelle. À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, avec le début de la colonisation européenne, les élites masculines adoptent le costume européen agrémenté du fez.
De nos jours, tout comme au Maroc, des stylistes algériens et tunisiens se sont lancés dans la modernisation et la transformation de leurs habits traditionnels. Cette modernisation apporte à nombre de tenues de nouveaux attributs initialement non présents dans les formes traditionnelles.
Algérie
Le caftan à été depuis des siècle l'emblème de l'Algérie.
A Tlemcen, la tenue traditionnelle(Chedda) est composé sous la garniture le caftan.
À Alger, où la présence ottomane a été forte, seules certaines autochtones mariées à un Ottoman et les femmes turques fortunées portent en saison froide un caftan orné de broderies réalisées en fil d'or ou d'argent. Plus tard, elles revêtent durant l'hiver un gilet (jaleco) porté au-dessus de la ghelila, une sorte de longue et large veste aux manches suffisamment larges pour laisser paraître celles de la chemise.
L'arrivée massive des Andalous en Algérie, en 1429, puis celle des Morisques renforce la présence et le port du caftan dans ce pays. Au cours des siècles, au contact des diverses populations et cultures ainsi qu'en l'absence d'influence vestimentaire ottomane ou européenne, le caftan andalou s'ancre dans le territoire et acquiert certaines spécificités.
Par ailleurs, il semblerait que le pouvoir plus ou moins important des beys ottomans, à la tête de pouvoir régional au nom du sultan d'Istanbul, explique en partie les différences et ressemblances vestimentaires entre les différents territoires : prégnante dans les régions où leur influence est forte (Tlemcen, Alger, Constantine ou Tunis) et inexistante dans les zones éloignées ou difficiles d'accès, avec un fort attachement aux traditions locales.
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Hussein Ier Bey en caftan et zeroual (XVIIIe siècle)
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Khayr ad-Din Barberousse, bey d'Alger au XVIe siècle, en caftan ottoman
Tunisie
En Tunisie, le terme, bien que connu, n'est plus utilisé car cette tunique était essentiellement portée par les Ottomans avant l'émancipation du pays. En comparant certaines tenues traditionnelles tunisiennes et algériennes, les points communs de l'héritage ottoman sont perceptibles, au contraire du Maroc.
Russie
Fichier:Kremlin Armoury 001.jpgÀ l'est de l'Europe et à l'ouest de l'Asie septentrionale, le mot kaftan (кафтан en russe) est employé pour désigner un autre type d'habillement, un long costume d'homme très large mais aux manches serrées. Au XIXe siècle, le caftan est de très loin l'habit d'extérieur le plus courant pour les marchands et paysans. Ils sont actuellement portés comme signes religieux par la secte très conservatrice des Orthodoxes vieux-croyants.
Durant la politique de réformes voulue par le tsar Pierre Ier et destinée à occidentaliser le pays, celui-ci interdit le port du caftan au profit du costume à l'occidentale. Ainsi, des ukases obligent ceux qui peuvent s'en permettre la dépense, de s'acheter un habit français, hongrois ou allemand. Le tsar lui-même expliquait qu'« avec vos manches larges, il vous arrive toujours des malheurs : tantôt elles trempent dans la soupe, tantôt elles fracassent les verres ».
Notes et références
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