- Origine du mot Jésuite
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Un jésuite est aujourd'hui généralement un membre de la Compagnie de Jésus, qu’il soit prêtre jésuite, frère jésuite ou étudiant jésuite (appelé également Scolastique), ou comme adjectif, à ce qui a rapport avec la Compagnie de Jésus. Mais il a eu un sens plus ancien.
Sommaire
Origine et évolution du mot
À la fin du Moyen Âge, en Europe du nord, on rencontre le mot latin jesuita dans le sens de « bon chrétien », disciple de Jésus.
Au XIVe siècle, Ludolphe de Saxe (dit le Chartreux), dans sa Vita Christi, écrit : « Au ciel, nous serons appelés jésuites par Jésus lui-même, c'est-à-dire ‘sauvés par le Seigneur’ ».
Par dérision et glissement sémantique, ceux qui exagéraient et se posaient trop visiblement comme « bons chrétiens » étaient qualifiés de « jésuites ». Dans ce sens devenu péjoratif, le mot fut si commun qu’il se trouve dans des manuels de préparation au sacrement de pénitence de l'époque : Je m’accuse d’avoir été pharisien, jésuite et hypocrite.
Les Jésuates
Quelque deux siècles avant la Compagnie de Jésus, une fraternité évangélique fondée par Jean Colombini (1304-1367) devint un ordre religieux, en 1367, sous le nom populaire de Pauvres Jésuates.
Article connexe : Jésuates.Les premiers compagnons d'Ignace de Loyola
Ignace de Loyola, lorsqu’il fait référence au groupe d’étudiants qui avec lui prononcèrent leurs vœux à Montmartre (Paris) en 1534, parle de ses "amis dans le Seigneur"[1].
Après la fondation officielle de la Compagnie de Jésus, en 1540, lorsque les Amis commencèrent à circuler en Italie et ailleurs, la voix populaire leur donna des noms différents. On parlait de Prêtres réformés en Italie du nord, d’Apôtres au Portugal (ce qui déplut au commentateur officiel des Constitutions, Jérome Nadal, qui rappela qu’il n’y avait que douze Apôtres), d’Ignaciens en Espagne (Ignace s’y opposa), de Paulistes à Goa en Inde (par association au collège Saint-Paul fondé par saint François Xavier), etc.
Dans une lettre de janvier 1545[2], le père Pierre Canisius écrit : "À Cologne (Allemagne), c’est par le terme de « Jésuites » que les membres de la Compagnie sont généralement connus". Il semble bien que les luthériens, ironisant sur le nom officiel de Compagnie de Jésus aient cherché à réhabiliter le sens péjoratif du mot. Bien qu'il en perçoive la moquerie, et qu'il soit lui-même appelé "le chien" dans les pamphlets luthériens[3], Canisius ne s'opposait pas à cette appellation qui les "associait à la croix du Christ".
Saint Ignace et les Jésuites
Le mot "jésuite" ne se retrouve pas dans les textes fondateurs de la Compagnie de Jésus, et Ignace de Loyola ne l’emploie pas dans ses écrits. Autant il tenait beaucoup au nom officiel de Compagnie de Jésus, car lié à son expérience religieuse de La Storta[4], autant il est silencieux sur le terme jésuite. Il ne s’y oppose pas et ne l’encourage pas non plus.
Le terme s’est rapidement répandu. Au concile de Trente, les procès-verbaux désignent déjà comme jésuites les membres de la Compagnie qui prenaient part aux délibérations. En 1562, référence est faite au père Jacques Lainez comme Generalis Jesuitarum.
Même s’il est largement utilisé à l’intérieur comme à l’extérieur de la Compagnie de Jésus, le terme de jésuite n’est pas officiel. Il n’a jamais été défini comme tel.
Jésuites célèbres
Les fondateurs
- François Xavier, missionnaire en Inde et au Japon.
- Pierre Favre, premier prêtre du groupe, apôtre en Allemagne.
- Jacques Lainez, théologien espagnol et deuxième général de la société de Jésus.
- Nicolás Bobadilla
- Simón Rodríguez de Azevedo
- Alonso Salmerón
- Claude Le Jay
En philosophie et théologie
- Francisco Suárez (1548-1617), théologien, considéré comme l'un des plus grands scolasticiens après Thomas d'Aquin, il inspira les réductions au Paraguay et les Méditations métaphysiques via ses Disputationes Metaphysicae.
- Pierre Canisius, (1521-1597), théologien, Docteur de l'Église
- Juan de Mariana (1536-1624), théologien, économiste et historien espagnol, défenseur du droit de résistance à l'oppression et du droit au tyranicide.
- Robert Bellarmin, (1542-1621), théologien, cardinal, Docteur de l'Église, protagoniste de l'affaire Galilée.
- Baltasar Gracián (1601-1658), écrivain et philosophe espagnol
- Louis Bourdaloue (1632-1704), théologien et prédicateur célèbre à la cour de Louis XIV
- François d'Aix de La Chaise, confesseur de Louis XIV pendant 34 ans.
- Le cardinal Henri de Lubac (1896-1991), théologien, auteur du Drame de l'humanisme athée, a joué un très grand rôle dans la préparation du concile Vatican II.
- Karl Rahner, (1904-1984), théologien allemand, influença beaucoup le concile Vatican II.
- Pierre Teilhard de Chardin, anthropologue et théologien français.
- Le cardinal Jean Daniélou, membre de l'Académie française
- François Varillon, (1905-1978) écrivain, auteur de nombreux ouvrages qui sont devenus de grands succès spirituels.
- Gotzon Garate, (1934-2008), théologien, docteur en philosophie, philologue, linguiste et écrivain basque, célèbre professeur en langue basque dans l'Université commerciale jésuite de Deusto et défenseur de la langue basque.
En sciences
De nombreux jésuites ont joué un rôle important dans les sciences, notamment en histoire naturelle, à l'image du plus prolifique d'entre eux, l’anthropologue Pierre Teilhard de Chardin et :
- François d'Aguilon (1567-1617), mathématicien, physicien, maître en optique et architecte
- Athanasius Kircher (1601 ou 1602-1680), esprit encyclopédique
- Gilles-François de Gottignies (1630-1689), mathématicien.
- Philippo Buonanni (1638-1725)
- Pierre-Noël Mayaud (1923-2006), géophysicien et historien des sciences
De nombreux jésuites sont partis dans des contrées lointaines où ils ont étudié la faune et la flore locale. C'est le cas de :
- Antonio de Andrada (1580-1634) au Tibet
- Jiří Josef Camel (1661-1706), botaniste morave, auquel est dédié le genre Camellia
- Juan Ignacio Molina (1740-1829), naturaliste chilien.
- Armand David (1826-1900), naturaliste ayant effectué plusieurs missions en Chine
- Ethelbert Blatter (1877-1934) en Inde.
En économie
En Espagne, l'École de Salamanque, à partir de la théorie des droits naturels, proposa une théorie de la valeur, et justifia la propriété privée et la liberté des échanges. Ses auteurs principaux étaient des dominicains et des jésuites :
- Francisco de Vitoria (1483–1546)
- Martín de Azpilcueta (1493–1586)
- Domingo de Soto (1494–1560)
- Luis de Molina (1535–1600)
Cette tradition fut reprise par les économistes classiques français et l'École autrichienne.
- Leonardus Lessius (1554-1623), premier théologien à s'intéresser à l'éthique des affaires commerciales et bancaires.
Missions et anthropologie
Dans le domaine de l'inculturation des Églises locales et la missiologie, il convient de citer :
- Les huit martyrs canadiens (le Québec de la Nouvelle-France)
- Matteo Ricci, missionnaire et scientifique, auteur de l'Histoire de l'expédition chrétienne au Royaume de la Chine.
- Antonio Ruiz de Montoya, missionnaire, linguiste et mystique, fondateur des "Reductions du Paraguay".
- Ferdinand Verbiest (1623-1688), astronome-missionnaire en Chine, réformateur du calendrier chinois.
- Antoine Thomas (1644-1709), astronome-missionnaire en Chine.
- Joseph-Marie Amiot, missionnaire et scientifique, partit en Chine et en ramena un traité.
- Michel-Joseph Bourguignon d'Herbigny (1880-1957), envoyé du pape en URSS
- Pierre Charles (1883-1954), philosophe, théologien et missiologue.
- Emmanuel de Breuvery (1903-1970), géographe, missionnaire en Chine, puis Chef de la section de l'Energie et des Ressources au Secrétariat de l'Organisation des Nations unies (ONU) (de 1955 à 1960).
- Eric de Rosny (1930), spécialiste de la médecine traditionnelle africaine et écrivain.
Beaux-Arts et Architecture
- Pierre Huyssens (1577-1637), frère, architecte du baroque religieux des Pays-Bas.
- Daniel Seghers (1590-1661), frère, artiste-peintre spécialiste des compositions florales.
- Andrea Pozzo (1642-1709), frère, peintre, auteur des grandes fresques de l'église Saint-Ignace à Rome.
- Jacques Courtois (1621-1676), frère, peintre.
- Jean-Denis Attiret (1702-1768), peintre à la cour de l'empereur chinois Qianlong, portraitiste.
Poésie et Musique
- Domenico Zipoli (1688-1726), musicien baroque italien, premier à s'installer sur le Nouveau Continent.
- Gerard Manley Hopkins (1844-1889), grand poète anglais.
- Aimé Père Duval, chanteur (auteur-compositeur) à succès dans les années 1950-1960, surnommé le « Brassens en soutane ».
Littérature chrétienne pour la jeunesse
- Francis Finn (1859-1928), écrivain américain à succès, spécialisé dans les ouvrages dédiés à la jeunesse.
- Jón Sveinsson (1857-1944), écrivain islandais, créateur de 'Nonni'.
Annexes
Bibliographie
- Alain Guillermou, Les Jésuites, éd. PUF, coll. « Que sais-je ? », Paris, 1963, rééd. 1999 ISBN 2130443346
- Jean Lacouture, Jésuites, éd. du Seuil, Paris, 1991 ISBN 2-02-014407-7 (édition complète)
Articles connexes
Notes et références
- MHSI, Vol.22, p.119. Lettre du 24 juillet 1537, de Venise, dans
- Lettre à l'empereur Oswald II, de Cologne, dans Epistulae, Fribourg, 1896, p.134.
- En fait il n'est pas certain qu'il s'agisse d'une moquerie. Canisius est un nom latinisé, qui rappelle le nom néerlandais de ce saint, 'D'Hondt', qui veut dire 'le chien' (canis en latin). Canisius est originaire de la ville de Nijmegen (Pays-Bas)
- vision de Dieu s'adressant à lui après l'avoir placé aux côtés du Christ, lui aurait affirmé : « Je vous serai propice à Rome », in Jean Lacouture, Jésuites, éd. du Seuil, 1991, p. 93, témoignage de Diego Lainez En 1537, Ignace de Loyola aurait éprouvé une expérience mystique dans cette commune sur le chemin de Rome : une
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