Groupe fortifié du Saint-Quentin

Groupe fortifié du Saint-Quentin
Groupe fortifié du Saint-Quentin
Feste Prinz Friedrich Karl
Defaut.svg
Description
Ceinture fortifiée première ceinture fortifiée de Metz
Type d'ouvrage Séré de Rivières (Ostfort)
et Von Biehler (Von Manstein)
Dates de construction 1867-1870 (Ostfort)
Dates de modernisation 1871-1898 (Plateau Kaserne et Feste Manstein)
Garnison 600 hommes
Armement 119 pièces d’artillerie
Usage actuel désaffecté
Protection  Inscrit MH (1989)
Coordonnées 49° 07′ 16″ N 6° 07′ 09″ E / 49.121, 6.119349° 07′ 16″ Nord
       6° 07′ 09″ Est
/ 49.121, 6.1193
  

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Le groupe fortifié du Saint-Quentin ou Feste Prinz Friedrich Karl est un ouvrage militaire de la commune de Scy-Chazelles situé au nord-ouest de Metz sur le mont Saint-Quentin. Il fait partie de la première ceinture fortifiée des forts de Metz.

Sommaire

Contexte historique

Le groupe fortifié du Saint-Quentin appartient à la première ceinture fortifiée de Metz conçue pendant le Second Empire par Napoléon III. Le fort est conçu dans l’esprit des « forts détachés », concept mis au point par le lieutenant-colonel du génie Raymond Adolphe Séré de Rivières en France et par Hans Alexis von Biehler en Allemagne. Le but était de former une enceinte discontinue autour de Metz faite de forts d’artillerie espacés d’une portée de canons. La première ceinture fortifiée de Metz se compose des forts de Saint-Privat (1870), de Queuleu (1867), des Bordes (1870), de Saint-Julien (1867), Gambetta, Déroulède, Decaen, de Plapeville (1867) et du Saint-Quentin (1867), la plupart inachevés ou à l’état de projet en 1870, lorsque la Guerre Franco-prussienne éclate.

Construction et aménagements

Le groupe fortifié du Saint-Quentin s’étend sur 77 hectares, sur un plateau orienté d’ouest en est. C’est l’un des plus vastes ensembles fortifiés de la première ceinture des forts de Metz. Le groupe fortifié du Saint-Quentin n’a pas été conçu comme un « groupe fortifié », mais résulte de la réunion de deux forts de type classique, le fort Diou et le fort Girardin. Il fut partiellement construit par les Français entre 1868 et 1871 et largement développé par les Allemands entre 1872 et 1892. Sa position topographique sur le mont Saint-Quentin, dominant la ville de Metz, en faisait une position stratégique majeure pour les états-majors français et allemand. Il est séparé du fort de Plappeville par le col de Lessy.

Le groupe fortifié du Saint-Quentin se compose de trois parties, le Feste von Manstein, ou fort Girardin, à l’ouest, le fort Saint-Quentin au centre, et l’Ostfort à l’est, rebaptisé fort Diou en 1919[1]. Cette partie, en forme de trapèze, fut construite par les Français de 1868 à 1870 et achevée par les Prussiens après 1872. Parmi les forts de Metz, c’est le seul ouvrage français conçu par le lieutenant-colonel Séré de Rivières. Le fort pouvait accueillir un contingent de 617 hommes et une quarantaine de pièces d’artillerie. Ses angles sont bastionnés et de profondes douves sèches en interdisent l’accès.

Sur le plateau proprement-dit, le Plateau Kaserne, ou fort Saint-Quentin, assure la jonction entre l’Ostfort et le fort von Manstein. Construit entre 1872 et 1874, il est entouré de fossés au nord et au sud. Le Plateau Kaserne se compose d’une caserne principale enterrée sur trois côtés, d’une poudrière et de plusieurs fortins. Ces édifices sont reliés entre eux par des chemins couverts, où court une voie ferrée de 60 cm de large permettant à des wagonnets de transporter matériel et munitions. Derrière les parapets, de nombreuses rampes d’artillerie permettaient le positionnement de pièces d’artillerie en plein air.

À l’ouest du plateau, les allemands construisent le fort von Manstein[2] de 1872 à 1874, afin de contrôler la vallée de la Moselle vers le sud et le col de Lessy vers le nord. De forme pentagonale, le fort von Manstein est doté de douves sèches sur trois de ses côtés. Il pouvait accueillir un contingent de plus de 600 hommes et de nombreuses pièces d’artillerie derrière ses parapets. Il possède en outre plusieurs tourelles d’observation. Les travaux se poursuivent jusqu’en 1898.

Affectations successives

Durant l’annexion, le fort est un camp d’entraînement pour les troupes prussiennes. À partir de 1890, la relève dans les forts est assurée par les troupes du XVIe Corps d'Armée stationnées à Metz et à Thionville. De 1914 à 1918, le fort est épargné par les combats. Il sert de relais pour les soldats allemands montant au front. Du fait de sa proximité avec la ville de Metz, le fort, repris par l’armée française en 1919, est en partie désaffecté avant la Seconde Guerre mondiale. En 1939, il sert de P.C. à la Défense aérienne du Territoire. Repris par les Allemands en juin 1940, il sert d’entrepôts et de terrain d’entraînement pendant la Seconde Guerre mondiale. Début septembre 1944, pendant la bataille de Metz, les troupes allemandes réorganisent sa défense, et l’intègre au dispositif défensif mis en place autour de Metz. De nouveau désaffecté après 1945, le fort reste pourtant en zone militaire interdite. Le fort Diou sert aujourd’hui de relais hertzien. Le groupe fortifié du Saint-Quentin est inscrit par arrêté depuis le 15 décembre 1989[3]

Aujourd'hui, si l’accès aux anciens sites militaires est toujours interdit, car en cours de dépollution pyrotechnique, la Communauté d'agglomération de Metz-Métropole a débuté un chantier de restauration de longue haleine[4] visant à mettre en valeur le patrimoine architectural et le patrimoine naturel de ce site emblématique[5]

Seconde Guerre mondiale

Sévèrement bombardé en 1944, le groupe fortifié du mont-Saint-Quentin n’est pourtant pas détruit. Hormis un bastion du fort Diou, et des constructions annexes dispersées sur le plateau, la plupart des casernes résistent plutôt bien aux bombes américaines. Comme le fort de Plappeville, le groupe fortifié Driant ou le groupe fortifié Jeanne d’Arc, le groupe fortifié du mont-Saint-Quentin connaîtra son baptême du feu entre septembre et décembre 1944, au moment de la libération de Metz. Des archives messines, stockées au fort Saint-Quentin, sont censées avoir été détruites par le feu, avec des stocks appartenant à l’intendance allemande, au cours de l’année 1944.

Le 3 septembre 1944, le Generalleutnant Krause, alors commandant de la place forte de Metz, établit son poste de commandement de combat au fort de Plappeville[6]. Ce fort est en effet situé au centre du dispositif défensif de Metz, bien défendu au sud par le fort von Manstein, tenu à ce moment par le colonel SS von Siegroth[7]. Durant ces trois mois de combats, le fort de Plappeville, placé sous le commandement du colonel d’artillerie Vogel, et celui du Saint-Quentin, commandé successivement par les colonels Von Siegroth, Richter et Von Stössel, se couvriront mutuellement, verrouillant l’accès des troupes américaines dans la vallée de la Moselle, à l’ouest de Metz. L’offensive américaine, lancée le 7 septembre 1944 sur la ligne ouest des forts de Metz tourne court. Les troupes américaines s’arrêtent finalement sur la Moselle, malgré la prise de deux têtes de ponts au sud de Metz. Buttant contre des forts mieux défendus qu’elles ne le pensaient, les troupes américaines sont maintenant à bout de souffle. Le général McLain, en accord avec le général Walker, décide de suspendre les attaques, en attendant de nouveaux plans de l’état-major de la 90e Infantry Division[8]. Lorsque les hostilités reprennent, après un mois pluvieux, les soldats de la 462e Volks-Grenadier-Division tiennent toujours solidement les forts de Metz, même si les ravitaillements se font plus difficilement à cause des tirs d’artillerie et des bombardements fréquents[9].

Le 9 novembre 1944, en guise de prélude à l’offensive sur Metz, pas moins de 1 299 bombardiers lourds B-17 et B-24 déversent 3 753 tonnes de bombes, de 1 000 à 2 000 livres, sur les ouvrages fortifiés et les points stratégiques situés dans la zone de combat de la IIIe armée[10]. La plupart des bombardiers ayant largué leurs bombes sans visibilité, à plus de 20 000 pieds, les objectifs ont souvent été manquées. A Metz, les 689 chargements de bombes destinés à frapper sept des forts de Metz désignés comme des cibles prioritaires, ne firent que des dégâts collatéraux[11]. Les fortifications enterrées, comme celles du mont Saint-Quentin, résistent bien aux assauts des bombardiers américains et en particulier aux bombes incendiaires. Malgré la combativité des troupes de la 462e division d’infanterie, les forts tombent cependant les uns après les autres, à la suite de combats ou plus simplement à court de vivres et de munitions[7].

L'assaut final sur Metz est donné à l'aube du 14 novembre 1944. Les obusiers de 105-mm du 359e Field Artillery Battalion ouvrent le feu sur le secteur situé de part et d'autre du Groupe fortifié Jeanne-d’Arc, entre le fort François-de-Guise et le fort fort Driant, afin d'ouvrir la voie au 379e Infantry regiment dont l’objectif est d’atteindre la Moselle. L’attaque se concentre sur le fort Jeanne-d’Arc, qui finit par être encerclé par les troupes américaines. Après deux contre-attaques meurtrières, les hommes du Major Voss appartenant à la 462e ID se replient bientôt sur le groupe fortifié Jeanne-d’Arc. Dans l'après-midi du 15 novembre 1944, les hommes du 1217e Grenadier-Regiment "Richter", formé par le Régiment de sécurité 1010, et ceux du 1515e Grenadier-Regiment "Stössel" de la 462e Volksgrenadier division font plusieurs tentatives infructueuses pour repousser les Américains derrière la ligne canrobert. Sous la pression, ils finissent par décrocher, laissant derrière-eux de nombreux morts et blessés[12]. Les grenadiers allemands, qui devait se retirer sur une ligne entre le point d’appui Leipzig et le fort de Plappeville se replient finalement en désordre vers Metz, ne laissant que des détachements dans les forts. Le 16 novembre 1944, l'attaque américaine se poursuit entre les forts Jeanne-d’Arc et François-de-Guise[12].

Au soir du 17 novembre, la situation est critique pour le commandant de la place forte de Metz, le général Kittel. Les hommes encore valides du Grenadier-Regiment 1215 "Stössel" sont maintenant cernés dans le groupe fortifié du Saint-Quentin. Le 18 novembre 1944, le 378e Infantry Regiment lance une première attaque sur le fort du du Saint-Quentin et fort de Plappeville. Sur le plateau et dans le fort, les hommes de la 462e Volks-Grenadier-Division sont harassés par 4 jours de combat continus. Ils se défendent pourtant pied à pied sur le plateau, de casemates en casemates. Après un court répit, une seconde attaque américaine, plus meurtrière que la première, permet de prendre les abords du fort, contraignant les défenseurs à se terrer dans l'enceinte du fort, pour se protéger des tirs de l'artillerie de campagne américaine disposée maintenant sur le plateau.

Le 378e Infantry regiment de la 95e division d’infanterie attaque de nouveau frontalement le fort de Plappeville et le fort du Saint-Quentin le 19 novembre 1944. L’attaque échoue malgré la fougue des troupes américaines. Le 378e Infantry regiment est aussitôt relevé et remplacé le lendemain par le 379e Infantry regiment Malgré l’appui d’un tir d’artillerie continu, les forts résistent encore face au 379e Infantry regiment. Le 21 novembre 1944, les deux batteries avancées situées entre le groupe fortifié du mont-Saint-Quentin et le fort de Plappeville sont finalement prises, mais les forts résistent toujours. Une attaque aérienne sur les deux forts est alors envisagée, mais elle est annulée le jour même, faute d’escadrilles disponibles. L’objectif principal de la 95e division d’infanterie étant maintenant la ville de Metz, les forts sont simplement encerclés et neutralisés par des tirs de couverture.

Metz est libérée depuis le 22 novembre 1944, mais les forts de Plappeville et du Saint-Quentin résistent encore deux longues semaines, conformément aux ordres du Führer. Le fort du Saint-Quentin, qui compte encore 21 officiers, 124 sous-officiers et 458 hommes de troupe, se rend finalement le 6 décembre 1944 à la 5e division d’infanterie du général Irwin. Alors que la nuit tombe sur cette froide journée d’hivers, l’Oberst von Stossel remet symboliquement son Lüger au commandant du IIe bataillon du 11e Infantry regiment, le lieutenant-colonel Dewey B. Gill[13], avant de partir en captivité avec ses hommes. Le fort de Plappeville, qui comptait plus de 200 hommes, se rendra à son tour le lendemain, le 7 décembre 1944.

Le fort Jeanne d'Arc fut le dernier des forts de Metz à se rendre. La résistance ennemie, déterminée, les intempéries et les inondations, inopportunes, ainsi qu'une tendance générale à mésestimer la puissance des fortifications de Metz, ont contribué à ralentir l'offensive américaine, en donnant l'occasion à l'armée allemande de se retirer en bon ordre vers la Sarre[14]. L’objectif de l’État-major allemand, qui était de gagner du temps en fixant le plus longtemps possible les troupes américaines en avant de la ligne Siegfried, sera donc largement atteint.

Notes et références

  1. Paul Emile Diou (1855-1914) est un général de brigade français né à Metz. Il est mort au champ d’honneur lors de l’offensive française en Lorraine.
  2. Durant la guerre franco-prussienne de 1870, le général "von Manstein a participé à la bataille de Saint-Privat.
  3. "Ouvrages maçonnés ou bétonnés, y compris les organes métalliques d'observation et de défense directement liés à ceux-ci": Base Mérimée : Immeubles protégés au titre des Monuments Historiques français
  4. Le 12 décembre 2005, Metz Métropole a approuvé un projet de mise en valeur du site, dont les travaux doivent durer 15 ans, pour un coût s'élevant à 24 Millions d'euros.
  5. Le site du Mont Saint-Quentin sur metzmetropole.fr
  6. L’état-major de la 462e division d’infanterie se repliera plus tard dans le groupe fortifié Jeanne d’Arc.
  7. a et b René Caboz, La bataille de Metz, Éditions Pierron, Sarreguemines, 1984, p. 133.
  8. Hugh M. Cole : The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950 (p 176-183)
  9. Hugh M. Cole : The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950 (p 256)
  10. Général Jean Colin, Contribution à l’histoire de la libération de la ville de Metz ; Les combats du fort Driant (septembre-décembre 1944), Académie nationale de Metz, 1963, p. 13.
  11. Hugh M. Cole, The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950, p. 424.
  12. a et b Hugh M. Cole : The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950 (p. 435-436)
  13. Anthony Kemp, Lorraine - Album mémorial - Journal pictorial : 31 août 1944 - 15 mars 1945, Heimdal, 1994, p. 416-417.
  14. Hugh M. Cole : The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950 (p. 448)

Voir aussi

Liens internes

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