- Forts de Metz
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Les forts de Metz constituent deux ceintures fortifiées autour de la ville de Metz en Lorraine. Construits selon les théories de Hans von Biehler pendant l’annexion allemande, ils valurent à la ville la réputation d’être la première place forte du Reich allemand[1]. Ces fortifications sont particulièrement soignées en raison de la position stratégique de cette ville entre la France et l’Allemagne.
Sommaire
Contexte historique
Avant l'invention de l'artillerie rayée, la place de Metz était considérée comme imprenable[2]. Au cours du XIXe siècle, les progrès de l’artillerie obligèrent les ingénieurs français à concevoir un nouveau système défensif autour de la place forte de Metz, la première ceinture fortifiée. Pour ces travaux exeptionnels, le maréchal Niel affecte spécialement une somme de douze millions de francs or[2]. Le dispositif est à l’origine composé de quatre forts avancés et détachés, les forts du Saint-Quentin et de Plappeville à l’ouest, et les fort de Saint-Julien et de Queuleu à l’est. Ce dispositif, conçu notamment par le colonel Séré de Rivières, était inachevé en 1870.
Après le traité de Francfort, le système défensif de Metz fut complété par les ingénieurs militaires allemands, par la construction de sept autres forts, entre 1871 et 1898. Ces forts, construits selon les théories de Hans von Biehler constituent la première ceinture fortifiée de Metz. L’objectif de cette première ceinture était de tenir à distance l’assaillant, l’obligeant à s’établir à une distance telle, que la ville au cœur du dispositif ne pouvait plus être directement bombardée. Les forts pouvaient en outre appuyer de leurs feux, les mouvements des troupes, lors des manœuvres à l’extérieur du camp retranché.
Afin de tenir compte des progrès de l’artillerie, la première couronne de forts fut doublée par une seconde ceinture fortifiée, composée de neuf groupes fortifiés, entre 1899 et 1916. Basés sur de nouveaux concepts défensifs, tels que la dispersion et la dissimulation, les groupes fortifiés devaient constituer, en cas d’attaque, un barrage infranchissable pour les forces françaises. Les fortifications de Metz faisaient partie d’un programme de fortifications plus vaste, appelé « Moselstellung », et englobant des forteresses disséminées entre Thionville et Metz, dans la vallée de la Moselle. L’objectif de l’Allemagne était, d’une part, de se protéger contre une attaque française visant à reprendre l’Alsace et la Moselle à l’Empire allemand. D’autre part, de former un poste avancé dans les défenses françaises, capable de servir de base arrière à une offensive allemande.
L’empereur Guillaume II, qui venait régulièrement à Metz pour inspecter les travaux d’urbanisme et ceux des fortifications, déclara à ce propos : « Metz et son corps d’armée constituent une pierre angulaire dans la puissance militaire de l’Allemagne, destinée à protéger la paix de l’Allemagne, voire de toute l’Europe[3]. En 1914, Metz était devenue la première place forte au monde[4]. Paradoxalement, la ville fortifiée sera épargnée par les combats de la Première Guerre mondiale.
Ces fortifications prouvèrent cependant tout leur potentiel défensif à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Au cours de la bataille de Metz, les forts, malgré les outrages du temps, des troupes en sous-effectif, et un manque flagrant en armements, en blindages et en équipements optiques, bloquèrent une puissante armée, bien supérieure à l’armée française de 1914[5].
Conception d'ensemble
Les forts sont généralement composés de plusieurs grandes casernes entourées de blockhaus plus petits. Les casernes, enterrées sur trois côtés, tournent le dos aux tirs ennemis, n’offrant aux regards qu’une façade appareillée pour les plus anciennes, ou bétonnée pour les plus récentes. Les casernes ont généralement des murs de plus de deux mètres d’épaisseur et une couverture de plusieurs mètres de terre compactée, souvent renforcée après 1900 par une chape de béton d’un à deux mètres d’épaisseur. Des tunnels souterrains relient parfois les structures entre elles. Les forts les plus anciens sont entourés de larges fossés, véritables douves sèches dont la profondeur atteint par endroits une dizaine de mètres. Ces forts ont souvent été entourés d’un réseau dense de fils de fer barbelés et de pieux antichars après 1914.
Forts de la première ceinture fortifiée
- Fort Saint-Privat (1870) / Fort Prinz August von Württemberg (1872-1875)
- Fort de Queuleu (1867-1870) / Fort Goeben (1871-1890) : au sud-est
- Fort des Bordes (1870) / Fort von Zastrow (1874-1875) : à l’est, complètement enterré entre les quartiers de Borny et Vallières-Les Bordes
- Fort de Saint-Julien (1867-1870) / Fort Manteuffel (1871-1891)
- Fort Gambetta / Fort Hindersin (1879-1881)
- Fort Déroulède / Fort Kameke (1876-1879)
- Fort Decaen / Fort Schwerin (1878-1880)
- Fort de Plappeville (1867-1870) / Fort Alvensleben (1871-1891) : au sud-ouest
- Groupe fortifié du Saint-Quentin (1867-1870) / Feste Prinz Friedrich-Karl (1872-1892)
- Fort Diou (1867-1870) / Ostfort (1872-1892)
- Fort Girardin / Fort Mannstein (1872-1892)
Forts de la seconde ceinture fortifiée
- Groupe fortifié l’Aisne / Feste Wagner (1904-1912)
- Groupe fortifié Driant / Feste Kronprinz (1899-1905)
- Groupe fortifié François de Guise / Feste Leipzig (1907-1912)
- Groupe fortifié Jeanne-d’Arc / Feste Kaiserin (1899-1905)
- Groupe fortifié Lorraine / Feste Lothringen (1899-1905)
- Groupe fortifié La Marne/ Feste Freiherr von der Goltz (1907-1916)
- Groupe fortifié Verdun / Feste Graf Haeseler (1899-1905)
- Groupe fortifié l’Yser / Feste Prinz Regent Luitpold (1907-1914)
- Groupe fortifié Malroy (projet non réalisé)
Ouvrages d'infanterie
À partir de 1905, pas moins de onze ouvrages secondaires virent le jour pour renforcer le rideau défensif au nord-ouest de Metz. L’ouvrage Sainte-Anne, l’ouvrage du Wolfsberg (Kellermann), ainsi que les ouvrages de Moscou, Leipzig et Saint-Vincent sont construits entre les groupes fortifiés Lothringen et Kaiserin. Devant la Feste Lothringen, plusieurs autres ouvrages d’infanterie sont construit, l’ouvrage de Fèves, d’Horimont I, II, III (Canrobert), d’Amanvillers et de Vémont (Richepanse). Tous ces ouvrages comportent des casemates d’infanterie, et sont entourés de fossés, et de fils barbelés[6]. Au sud-ouest, où l’on attend l’attaque française, pas moins de sept ouvrages secondaires sont construits entre 1912 et 1916, entre les Feste Kaiserin et Kronprinz. En raison de leur vulnérabilité par rapport aux groupes fortifiés de la seconde ceinture fortifiée, ce groupe d’ouvrages fut surnommé « The seven Dwarves » par les GIs de la IIIe armée américaine, au cours de la bataille de Metz, qui se déroula entre septembre et décembre 1944.
- Ouvrage d'infanterie de Fèves / Infanterie-Werk Fèves au nord-ouest de Metz.
- Ouvrage d'infanterie Champagne / Infanterie-Werk Mey (1907-1912) à l’est des forts Saint-Julien et Des Bordes.
- Ouvrage d'infanterie Lauvallière / Infanterie-Werk Belle-Croix (1908-1914) à l’est des forts Saint-julien et Des Bordes.
- Ouvrage d'infanterie de Chesny-nord / Infanterie-Werk Chesny (1907-1911), entre les forts de la Marne et de l’Yser.
- Ouvrage d'infanterie de Chesny-sud / Infanterie-Werk Chesny (1907-1911) entre les forts de la Marne et de l’Yser.
- Ouvrage d’infanterie de Bois-la-Dame / Infanterie-Werk Bois-la-Dame (1913-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Ouvrage d’infanterie de Marival / Infanterie-Werk Marival (1912-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Point d’appui Vaux Sud (1912-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Point d’appui Vaux Nord (1912-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Point d’appui Jussy Sud (1912-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Point d’appui Jussy Nord (1912-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Point d’appui Saint-Hubert (1912-1916), entre Driant et Jeanne-d’Arc ( Seven Dwarfs ).
- Point d’appui Kellermann / Wolfsberg-Stellung (1904-1906), à l’est du groupe fortifié Lorraine.
- Point d’appui des Carrières d'Amanvillers / Steinbruch-Stellung (1912-1916), au nord-ouest du groupe fortifié Lorraine.
- Point d’appui Canrobert / Horimont-Stellung (1912-1916), au nord du groupe fortifié Lorraine.
- Point d’appui Richepance / Batterie Vemont, au nord du groupe fortifié Lorraine.
- Point d’appui de Moscou, entre les groupes fortifiés Lorraine et Jeanne-d’Arc.
- Point d’appui St-Vincent, entre les groupes fortifiés Lorraine et Jeanne-d’Arc.
- Point d’appui Leipzig, entre les groupes fortifiés Lorraine et Jeanne-d’Arc.
Ouvrages d'artillerie
Des batteries de canons sur affûts cuirassés sont construites entres les forts des première et seconde ceintures fortifiées et à l’est de la seconde ceinture :
- batteries à l’intérieur de la première ceinture fortifiée :
- batterie du Canal (1875-1877), à Montigny-lès-Metz ;
- batterie du chêne, au sud du fort Déroulède ;
- batteries de Plappeville, entre fort de Plappeville et le groupe fortifié du Saint-Quentin ;
- batterie du Sablon, entre fort Saint-Privat et fort de Queuleu ;
- batterie de Queuleu, à l’arrière du fort de Queuleu ;
- batteries à l’intérieur de la seconde ceinture fortifiée ;
- batterie Sainte-Agathe, au nord des fort Déroulède et Gambetta ;
- batterie de Montvaux, à l’est du groupe fortifié François de Guise ;
- batterie de Châtel, au nord est du groupe fortifié Jeanne-d’Arc ;
- batterie d’Ars, à l’est du groupe fortifié Driant ;
- batterie de Crépy, au sud du fort de Queuleu ;
- batterie des Veaux, au nord du groupe fortifié l’Yser ;
- batterie du trou du lièvre, à l’est des forts Saint-Julien et Des Bordes.
Pour protéger le front à l’est de la seconde ceinture fortifiée, quatre ouvrages d’artillerie furent construits entre 1905 et 1909. Du nord au sud, la batterie de Sainte-Barbe (1907-1909) contrôle la route de Bouzonville, la batterie de Silly (1905-1908) et la batterie de Mont (1905-1907) contrôlent la route de Sarrebruck, et la batterie de Sorbey (1905-1908) contrôle la route de Morhange.
- batteries à l’est de la seconde ceinture fortifiée :
- batterie de Sainte-Barbes / Batterie lemmersberg (1907-1909) ;
- batterie de Silly / Batterie lemmersberg (1905-1908) ;
- batterie de Mont /Batterie Mont (1905-1907) ;
- batterie de Sorbey /Batterie Sorbey (1905-1908).
- batterie de Landremont.
Outre ces forts avancés, de nombreuses casernes (Steinmetz, Séré-de-Rivière, Ney ou du Génie) ainsi que de nombreux terrains militaires dans l’agglomération messine et les communes avoisinantes rappellent encore le passé militaire de la ville de Metz.
Notes et références
- L’Express, no 2937, du 18 au 24 octobre 2007, dossier « Metz en 1900 »
- Dick de Lonlay :Français et allemands, histoire anecdotique de la guerre de 1870-1871, Neiderbronn, Wissembourg, Froeschwiller, Chalons, Reims, Buzancy, Beaumont, Mouzon, Bazeilles, Sedan, Sarrebrück, Spickeren, La retraite sur Metz, Pont-à-Mousson, Borny, 4 tomes, Garnier, Paris, 1889-1888.
- Structurae.de, article « Poste principale », année 1893.
- Dossier « Metz en 1900 », dans L’Express, no 2937, 18-24 octobre 2007.
- Clayton Donnell, The German Fortress of Metz 1870-1944, Osprey Publishing, 2008.
- Clayton Donnell, The German Fortress of Metz 1870-1944, Osprey Publishing, 2008, p. 13.
Bibliographie
- Christian Dropsy, Les fortifications de Metz et Thionville, Bruxelles, 1995.
- Alain Hohnadel, La bataille des Forts - Verdun face à Metz, 1995, (ISBN 2-84048-087-5).
- Inge et Dieter Wernet, Die Feste Wagner, A.D.F.M., Helios-Verlag, Aachen, 2010.
Voir aussi
Liens externes
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