Bataille du cap Beveziers

Bataille du cap Beveziers

Bataille du cap Béveziers

Bataille du cap Béveziers
Battle of Beachy Head 10, July 1690.jpg
Bataille du cap Bévésiers
Gravure de Jean Antoine Theodore Gudin
Informations générales
Date 10 juillet 1690
Lieu Cap Bévéziers (Manche)
Issue Victoire française
Belligérants
Royaume de France Royaume de France Provinces-Unies Provinces-Unies
Flag of England.svg Royaume d'Angleterre
Commandants
Anne de Tourville
François de Châteaurenault
Victor Marie d'Estrées
• Arthur Herbert Torrington
Cornelis Evertsen
• Ralph Delaval
Forces en présence
75 vaisseaux de ligne 59 vaisseaux de ligne
Pertes
6 vaisseaux de ligne
Guerre de la ligue d'Augsbourg
Batailles
Philippsburg — Sac du Palatinat — Baie de Bantry — Mayence — Walcourt — Fleurus — Cap Béveziers — Boyne  — Staffarda — Cuneo — Mons — Leuze — Aughrim -La Hougue — Namur (1692) — Steinkerque — Lagos — Neerwinden — La Marsaille — Charleroi — Rivière Ter — Texel — Camaret — Bruxelles — Namur (1695) — Dogger Bank — Carthagène — Barcelone — Baie d'Hudson

La bataille du cap Béveziers ou Beachy Head (pour les Anglais) oppose une flotte française à une flotte anglo-hollandaise le 10 juillet 1690. C'est un épisode de la guerre de la ligue d'Augsbourg.

Sommaire

Contexte

En mars 1689 Jacques II d'Angleterre, accompagné des troupes françaises, navigue pour l'Irlande, espérant rallier les catholiques à sa cause, et regagner son trône. Louis XIV de France, a bien volontiers apporté son soutien au roi déchu, car les perspectives d'une guerre en Irlande, détournerait une partie de armées de Guillaume d'Orange du théâtre de la guerre qui fait, à ce moment, rage dans les Flandres.

Le 6 mai 1689, une flotte française de 24 vaisseaux de guerre et de navires de transports, commandée par Châteaurenault quitte Brest pour convoyer l'aide de la France à Jacques II. Cependant, la présence de l'amiral anglais, Arthur Herbert (bientôt connu comme seigneur de Torrington), rend le débarquement impossible à Kinsale, et force l'amiral français à ancrer sa flotte dans la baie de Bantry, le 10 mai. Le matin suivant, l'escadre d'Herbert, composée de 19 navires de ligne approche des Français. Appréhendant parfaitement la situation, Châteaurenault ne se laisse pas encercler dans la baie, et conduit les Anglais en haute mer, où il les affronte pendant quatre heures. La bataille de la baie de Bantry n'est pas décisive. Les deux flottes subissent peu de dégâts, mais la manœuvre à permis le débarquement des troupes et de leurs approvisionnements. La flotte française rentre à Brest le 18 mai

La coalition anglo-néerlandaise a également remporté un certain succès. Le 10 août 1689, l'amiral George Rooke transporte des troupes d'Angleterre en Irlande du Nord pour casser le siège de Londonderry. Plus tard, il débarque les forces du maréchal Schomberg près de Carrickfergus et parvient à garder des communications ouvertes entre l'Angleterre et l'Irlande. Cependant, quand le secrétaire d'état Daniel Finch de Nottingham et l'amiral Édouard Russell élaborent les plans de l'année suivante, la puissance des forces navales est toujours en faveur de la France.

Le gros de la flotte anglaise est postée dans la Manche, sous les ordres de Torrington, mais une partie non négligeable de cette flotte sous les ordres du Vice-Admiral Henry Killigrew est en Méditerranée occupée, comme l'espère Nottingham à tenter de neutraliser l'escadre française de Toulon. Les alliés ont également une petite escadre sous les ordres du vice-amiral Cloudesley Shovell en mer d'Irlande, mais bien trop petite pour arrêter les Français, s'ils décident de prendre le commandement de la région. Au lieu de cela le Louis XIV dirige sa marine contre Torrington dans la Manche.

Le mois suivant, la flotte française du comte de Tourville, est rejointe à Brest, par l'escadre de Toulon qui est parvenue à se débarrasser de Killigrew au large de Cadix.

Tandis que la flotte française est inactive à Brest, les Anglais rassemblent une armée sur la côte occidentale de l'Angleterre. Le 21 juin, Guillaume d'Orange embarque ses forces à Chester à bord de 280 navires de transports. Le 24 juin, il débarque à Carrickfergus avec 15 000 hommes.

Prélude

Tourville, qui commande maintenant les flottes combinées du flotte du Ponant et du flotte du Levant quitte Brest le 23 juin. Le 30 juin, il est au large du Cap Lizard. Pendant que la flotte anglaise quitte l'île de Wight où, les dix jours dernier jours, elle a reçu des renforts d'autres navires anglais, et d'une escadre hollandaise commandée par Cornelis Evertsen. Mais une grande partie de la marine royale a été détournée pour protéger leur commerce maritime contre les corsaires, la flotte alliée ne compte finalement que 57 navires de ligne, totalisant 4 153 canons, tandis que la flotte de Tourville en compte 4 600.

Le 5 juillet Torrington aperçoit les Français, et évalue leurs forces à presque 80 navires de ligne. Marie II, et son Conseil des neufs, s'empressent de prendre des mesures pour la défense du pays. Carmarthen recommande le combat, de même que Nottingham et Russell, qui sont persuadés que les Français ne sont pas aussi forts que le pessimiste amiral Torrington ne l'a rapporté, et que seul, le défaitisme ou la trahison peuvent expliquer ce rapport. Devonshire, cependant, est encore plus mécontent: « C'est mon devoir, Madame, de dire à votre majesté exactement ce que je pense sur une question de cette importance ; et je pense que Lord Torrington n'est pas un homme en qui faire confiance pour le destin de trois royaumes. »

Torrington annonce son intention de faire retraite devant la supériorité de la flotte française, mais l'ordre de combattre atteint l'amiral le 9 juillet, tandis qu'il est au large du cap Bévéziers. Il n'a d'autre option que d'obéir.

Les forces en présence

La carte des évênements

Chaque camp aligne une armée navale. Par tradition, et imitation d'une armée sur terre, elle est divisée en 3 corps. Ces corps sont désignés avant-garde, corps de bataille (ou centre) et arrière-garde. Chaque corps correspond à une escadre. Pour les reconnaître, chacune arbore un pavillon à sa couleur. Chez les Français, on trouve blanc pour le centre, bleu pour l'arrière-garde, blanc et bleu pour l'avant-garde. Chez les Anglais, on trouve rouge pour le centre, bleu pour l'arrière-garde et blanc pour l'avant-garde.

Chaque escadre est ensuite répartie en divisions, de 3 vaisseaux au minimum. Une armée navale doit donc, en théorie, regrouper 27 vaisseaux de ligne ou plus.

Les Français, sous le commandement du vice-amiral Anne Hilarion de Tourville. alignent 75 vaisseaux de ligne, 6 frégates[1] et 5 brûlots[2]. Soit 4 600 canons et 28 000 marins. L'arrière-garde, sous les ordres du vice-amiral d'Estrées, est de 23 vaisseaux; le centre, sous les ordres de Tourville, 25 vaisseaux, et l'avant-garde, de Châteaurenault, 22 vaisseaux. Tourville est sur le Soleil Royal, au milieu du corps de bataille. Ce navire est un trois-ponts, percé à 120 canons. Mais pour des raisons de stabilité, il n'en porte, pour cette campagne, que 98.

Les Anglais, sous les ordres du vice-amiral Arthur Herbert de Torrington, alignent une soixantaine de vaisseaux dont 22 hollandais [3]. Soit 4 153 canons et 19 000 marins. L'avant-garde est composée des Hollandais, sous les ordres de Cornelis Evertsen, soit 22 vaisseaux de ligne mais seulement 6 de 70 canons ou plus. Le centre, sous Herbert, 21 vaisseaux dont 15 de 70 canons ou plus. Enfin, l'arrière-garde, sous les ordres de Ralph Delaval, comprend 13 vaisseaux dont 9 de 70 canons ou plus. Herbert est aussi au milieu de l'escadre du centre, sur le Royal-Sovereign, 100 canons.

Si l'on compare les deux armées, les forces semblent assez équilibrées. Ainsi, les avant-gardes ont chacune 22 vaisseaux et d'environ 1 312 à 1 374 canons. Les corps de bataille, 25 vaisseaux contre 21 et 1 568 contre 1 510 canons. La différence la plus marquée est dans les escadres bleues, l'arrière-garde. Les Français alignent 23 vaisseaux contre 13 et 1390 canons contre 912.

Pour avoir une idée de ce que représentent ces armées, en ligne de bataille, et en admettant que les navires soient espacés d'une encablure chacun[4], c'est une ligne de plus de 10 milles nautiques[5] qui est couverte... et qui doit être commandée.

La bataille

La bataille du cap Béveziers

Le jour suivant, 10 juillet, les deux flottes avancent en ligne. Les Hollandais, qui constituent l'avant-garde, se font encercler par l'avant-garde française[6]. Les Anglais ne les soutiennent que mollement[7].

Pendant plusieurs heures les Hollandais soutiennent un combat inégal avec l'aide minime du reste de la flotte alliée. À la longue, Evertsen, qui a perdu beaucoup d'officiers, dont son second, est forcé de se retirer. Deux navires hollandais coulèrent, une autre brisé et démâté, réduit à l'état de coque, est capturé, beaucoup sont gravement endommagés.

Dans la mi journée, lors du renversement de la marée, les Français sont entraînés par les courants, tandis que leurs adversaires ayant pris la précaution de mouiller leurs ancres, sont hors de portée des canons.

Les Anglo-Hollandais ont perdu 17 vaisseaux. Les Français dont la flotte est quasiment intacte, sont victorieux. Mais la victoire est loin d'être décisive. Quand la marée s'inverse de nouveau vers 21h00, les alliés remontent leurs ancres. Tourville les poursuit mais au lieu de commander la chasse, il a maintenu la ligne de bataille, ramenant la vitesse de la flotte à celle des navires les plus lents. Beaucoup et en particulier Seignelay, estiment alors, que la flotte alliée pouvait être détruite si Tourville avait été plus entreprenant.

Torrington parvient à gagner le refuge de la Tamise. Dès qu'il est en sûreté dans le fleuve, il commande d'enlever toutes les bouées de navigation, rendant sa poursuite trop dangereuse.

Les conséquences

La défaite du cap Bévéziers cause la panique en Angleterre. Tourville a provisoirement pris le contrôle de la Manche. Dès lors, on ne comprend pas qu'il n'ait pas cherché à empêcher Guillaume d'Orange de rentrer d'Irlande et de débarquer son armée en Angleterre, pour s'opposer aux 6 000 hommes de troupes régulières et à la milice rassemblée en hâte par Marlborough.

En Angleterre, dans l'atmosphère de paranoïa qui règne alors, personne n'attribue la défaite aux ordres donnés. Nottingham accuse Torrington de trahison, [8] et personne ne conteste son interprétation :« je ne peux pas vous exprimer,  » écrit Guillaume d'Orange au Grand-pensionnaire Anthonie Heinsius, « comme je suis affligé suite au désastre de la flotte. J'en suis d'autant plus profondément affecté que j'ai été informé que mes bateaux n'ont pas correctement soutenu ceux de vos domaines, et les ont laissés dans l'embarras. </ref>. Torrington fut envoyé à la tour de Londres pour attendre d'être traduit au conseil de guerre de Chatham, mais à l'étonnement de Guillaume et de ses ministres - et le soulagement des marins anglais qui le considéraient comme un sacrifié politique - la cour l'acquitta. Il n'eut cependant plus jamais de commandement, et lorsqu'il tenta de regagner son siège à la Chambre des Lords, Guillaume refusa de le voir et l'écarta.

Cette bataille est considérée comme étant la plus belle victoire de la marine du Roi-Soleil. Mais au même moment, les troupes envoyées en Irlande sont battues à la bataille de la Boyne.

Bibliographie

Les sources suivantes ont été utilisées :

  • Philippe de Villette-Mursay, Mes campagnes de mer sous Louis XIV, Tallandier, 1991, avec une introduction & notes de Michel Vergé-Franceschi.Villette-Mursay est vice-amiral de l'escadre bleue française, c’est-à-dire l'arrière-garde dirigée par Chateaurenault.

Bibliographie :

  • Meyer, Jean, Béveziers, 1690, La France prend la maîtrise de la Manche, Paris, Economica, 1993.
  • Jean-claude Castex, Dictionnaire des batailles navales franco-anglaises, Presses de l'Université Laval, 2004.
  • B&T Tunstall, Nicholas (ed.), Naval Warfare in the Age of Sail. The Evolution of Fighting Tactics, 1650-1815. Londres, 1990, ISBN 0785814264.Pages 53 & suivantes. On y trouvera en particulier des reproductions montrant les dispositifs adoptés par les deux flottes.

Béveziers dans la littérature :

  • L'enseigne du Soleil Royal. roman / Bruno Robert ; ill., Daniel Lordey. - Paris : P. Téqui, 2007 - (collection Défi ; 25). ISBN 978-2-7403-1386-2

Notes et références

  1. dont l'Alcyon, de Jean Bart.
  2. Ce sont Le Boutefeu, Le fâcheux, l'Impertinent, l'Imprudent, et l'Insensé.
  3. Selon les sources, le nombre varie de 53 à 62 bâtiments.
  4. Une encablure, ou longueur de câble, vaut environ 180 mètres.
  5. Soit plus de 18 kilomètres !
  6. Par suite des évolutions, c'est l'escadre bleue, normalement arrière-garde, qui se trouve alors en tête.
  7. Le Royal Sovereign, navire amiral anglais, 100 canons, se fera repousser par le feu du Fougueux, 58 canons...
  8. Interpelant ainsi Guillaume d'Orange le 13 juillet : « en termes plats. Torrington a abandonné les néerlandais tellement honteusement que l'escadre entière aurait été perdue, si certains de nos bateaux ne les avaient pas sauvés. »

Sources partilelles

  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Battle of Beachy Head (1690) ». dans sa version du 7 mai 2007
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