- Collège Henri-IV de La Flèche
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Le collège Henri-IV (connu également comme collège royal Henri-le-Grand) était un célèbre collège jésuite fondé à La Flèche (Sarthe, France) en 1603 par le roi Henri IV. Après l’expulsion des jésuites de France, en 1762, les bâtiments furent repris pour devenir le prytanée militaire et finalement le Prytanée national militaire qu’ils abritent encore aujourd’hui.
Sommaire
Origine et fondation
Un ami et proche de Henri IV, Fouquet de la Varenne (seigneur de La Flèche) obtient du roi la réhabilitation des jésuites (expulsés en 1594). Par l’édit de Rouen du 3 septembre 1603, les jésuites sont à nouveau autorisés en France et récupèrent leurs 13 établissements d’enseignement. Allant plus loin, et suite à la promesse faite deux ans plus tôt à son ami d’établir dans sa ville un collège, Henri IV cède son château royal (‘Château Neuf’) de La Flèche aux jésuites pour qu’ils y créent un collège.
Un projet royal
Ce collège ne devait pas être comme les autres. Il porterait le nom de collège du roi Henri IV. Outre le programme traditionnel des ‘humanités’, était prévue également la fondation d’une véritable université, avec enseignement du droit et de la médecine, de la philosophie et de la théologie. Le noviciat des jésuites de France devait y être également hébergé. Le collège royal aurait également un internat (le tout premier du genre) avec au moins 24 places de pensionnaires réservées aux fils d’officiers de la maison royale. Des services religieux et prières devaient être organisées pour la famille royale, et les cœurs du roi et de la reine y seraient préservés après leur mort. Henri IV créa un fond substantiel pour assurer la gratuité de l’enseignement, pourvoir en livres la bibliothèque et entretenir un nombreux personnel. L’entreprise était singulière et le roi portait un intérêt particulier à l’établissement qu’il visita plusieurs fois. Tout ne fut pas réalisé cependant: Claudio Acquaviva, supérieur général de la Compagnie de Jésus, n’accepta pas l’idée du noviciat à La Flèche, et par ailleurs l’idée de l’université fut abandonnée. Le collège n’en fut pas moins un grand succès et devint le plus influent et prestigieux collège jésuite de France (après le collège de Clermont, à Paris).
Histoire
Une petite vingtaine de jésuites arrivent à La Flèche avant la fin de l’année 1603. Le collège ouvre ses portes en janvier 1604. C’est un succès immédiat : en fin de la même année il compte 1 000 élèves dont 100 internes. Henri IV suit les progrès de ‘son’ collège : il assure financièrement l’entretien d’un internat de 300 pensionnaires. Sa générosité permet la construction immédiate de nouveaux bâtiments. En 1607, un nouvel édit donne au collège sa forme définitive (cette ‘charte de fondation’ sera confirmée par Louis XIII en 1635). L’idée d’une université est abandonnée et une chapelle est construite qui recevra les cœurs du roi et de la reine. Le maître d’œuvre, le frère jésuite Étienne Martellange en termine la construction en 1614. Des rentes venant de diverses abbayes sont assignées au collège. Durant le premier siècle de son histoire le nombre d’élèves oscillera entre 1 200 et 1 400. Il baissera par la suite - le nombre d’écoles se multipliant dans la région - pour ne compter que 400 élèves en 1760, la moitié d’entre eux étant pensionnaires. Comme un nombre important d’étudiants loge chez l’habitant, le collège est une importante source de revenus pour la ville de la Flèche qui restera toujours fort attachée à son collège (comme plus tard au Prytanée qui lui succédera).
Programme d’études
- Le collège fonctionne comme l’a voulu son fondateur, et cela pratiquement jusqu’à sa suppression (en 1762). Il suit fidèlement le Ratio Studiorum des jésuites : trois années de grammaire, trois années d’humanités et trois années de philosophie. Ensuite, le cycle du ‘séminaire’ avec des cours de théologie et d’écriture sainte. En tout 14 niveaux d’études.
- Les jésuites s’y investissent beaucoup. De 19 fondateurs qu’ils étaient en 1604 le nombre de jésuites présents à La Flèche montera jusqu’à 110 à la fin du XVIIe siècle. En 1762 ils étaient 88 : 34 professeurs, 24 à l’internat et 30 théologiens, sans compter les frères coadjuteurs. Les professeurs jésuites les plus éminents des XVIIe et XVIIIe siècles y ont professé. L’enseignement y était de qualité. Ce qui fera écrire au philosophe Descartes, l’un des premiers et illustres pensionnaires de l’institution (de 1607 à 1615) : « J’étais dans l’une des plus célèbres écoles de l’Europe »[1].
- Représentations théâtrales, ballets, débats, exercices oratoires, distributions des prix, canonisations et anniversaires royaux étaient l’occasion de grandes célébrations qui attiraient un large public et confortaient la renommée du collège. D’autant plus que les visites royales n’étaient pas rares.
Influence religieuse et missionnaire
Ce centre intellectuel cosmopolite de premier ordre, où affluent des élèves venant de toutes les provinces de France et même de pays étrangers[2], eut également une grande influence missionnaire, surtout dans les colonies d’Amérique. Très nombreux étaient les jésuites revenant des missions ou sur le point d’y partir qui séjournèrent quelque temps à La Flèche, entretenant parmi les élèves l’enthousiasme pour les nouveaux pays et suscitant d’autres vocations missionnaires.
- Les trois pères Lalemant (Charles, Gabriel et Jérôme), très actifs en Nouvelle-France étaient des Fléchois.
- Jacques Bouton est le fondateur de la mission des Antilles françaises (1635).
- François Lucas passa 23 ans en Syrie.
- Plusieurs étaient rentrés de Chine : Joachim Bouvet (un Fléchois), et Jean de Fonteney, tout deux mathématiciens envoyé en Chine par le roi Louis XIV (1684) étaient rentré en Europe - et à La Flèche - en 1704.
- François-Xavier de Charlevoix, ancien missionnaire au Québec, écrivit à La Flèche l’histoire des missions du Canada, du Japon, de Saint-Domingue, une œuvre fort appréciée par Chateaubriand[3] tout en étant rédacteur au Journal de Trévoux.
Personnalités liées au collège
- Le philosophe René Descartes est certainement le plus célèbre parmi les anciens élèves de La Flèche. En 1641, il cherche à dissuader un ami qui est sur le point d’envoyer son fils étudier en Hollande : « À cause que la philosophie est la clef des autres sciences, je crois qu’il est utile d’en avoir étudié le cours entier de la manière qu’on enseigne dans les écoles jésuites. Je dois rendre honneur à nos maîtres de dire qu’il n’y a lieu au monde où je juge qu’elle s’enseigne mieux qu’à La Flèche… Comme il y a quantité de jeunes gens de tous les quartiers de la France, ils y font un certain mélange d’humeur par la conversation les uns des autres, qui leur apprend la même chose que s’ils voyageaient. Enfin l’égalité que les jésuites mettent entre eux, en ne traitant d’autres façons les plus élevés que les moindres, est une invention extrêmement bonne pour leur ôter la tendresse et les autres défauts qu’ils peuvent avoir acquis par la coutume d’être chéris dans la maison de leur parents »[4]
- Jérôme Le Royer de la Dauversière, magistrat fléchois, fondateur de Ville-Marie au Québec, (l’actuelle ‘Montréal’), et fondateur de la Congrégation des filles hospitalières de Saint-Joseph (en 1639), destinée aux hôpitaux de la Nouvelle-France.
- Georges Fournier, jésuite, spécialiste des sciences de la Marine.
- Michel Le Tellier, jésuite, théologien et confesseur de Louis XIV.
- Claude Fontenay, jésuite, historien et rédacteur au Journal de Trévoux.
- De nombreux maréchaux de France Nicolas de Neufville de Villeroy, Jacques Fitz-James de Berwick, Jean-Baptiste Budes, comte de Guébriant, François Louis Rousselet de Châteaurenault.
- Louis de Nogaret de La Valette d'Épernon, archevêque de Toulouse et Cardinal.
- Alexandre Angélique de Talleyrand-Périgord, archevêque de Reims puis de Paris, et cardinal.
- L'abbé Jean Picard, astronome et géodésien.
- Jean-Charles de Borda, mathématicien, astronome et lieutenant de marine.
- Antoine-Louis Séguier, magistrat, chancelier et membre de l’académie française.
- Marin Mersenne, religieux Minime, mathématicien et philosophe (ami de René Descartes).
- L’abbé Prévost, historien, journaliste et écrivain de renom.
- François de Montmorency-Laval, premier évêque de Québec, en Nouvelle-France.
- Antoine Girard, arrive du collège de Clermont de Paris en 1674, il est traducteur et écrivain, il y décède en 1680.
Fin du collège jésuite
- Le collège fut fermé en 1762 - comme tous les autres établissements jésuites de France – lorsque la Compagnie de Jésus fut bannie du royaume. C’était l’aboutissement d’une longue campagne de dénigrement des jésuites exacerbée en France par l’affaire ‘Antoine de la Valette’, une banqueroute frauduleuse mal gérée par le supérieur provincial. En 1759 les jésuites avaient déjà dû quitter le Portugal et ses colonies. En 1767 ils sont expulsés d’Espagne, et l’année suivante, de Parme. En 1773, ce sera la suppression ‘universelle’ de l’Ordre par le pape Clément XIV.
- Les Fléchois qui ne voulaient pas voir disparaître leur prestigieux collège confièrent sa direction à un groupe d’abbés. Les résultats furent décevants. Deux tentatives de restaurations furent faites par les Pères de la Doctrine chrétienne. Une première fois en 1776 : la Révolution française mit fin à leurs efforts et en 1793 les bâtiments furent désaffectés. Seconde tentative sous le Directoire, mais sans succès. En 1808, l’empereur réquisitionna les bâtiments pour y transférer le prytanée militaire de Saint-Cyr. Pour la suite voir :
Article détaillé : Prytanée national militaire.
Bibliographie
- P de LA ROCHEMONTEX, Le Collège Henri-IV, de La Flèche, 4 vol.,
- DELATTRE, Pierre (et al.), Les Établissements des jésuites en France depuis quatre siècles, 4 vol., Enghien (Belgique), 1953.
Notes et références
- Discours de la méthode Note dans
- 1803). « On vit arriver au collège des Américains, des Indiens, des Tartares, des Russes et même des Chinois », François-Roger-Fidel Marchant de Burbure (
- Dans le Génie du Christianisme, t. III, 4e partie, liv.4, ch.1, p.74; cité d'après Delattre, vol.2, p. 907
- cfr Delattre, op.cit., p.913
Catégories :- École de tradition jésuite
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