Camp de prisonniers allemands à Mulsanne

Camp de prisonniers allemands à Mulsanne

Le camp de prisonniers était composé de plus de 8000 prisonniers allemands ; officiers supérieurs, SS, soldats allemands, soldats étrangers enrôlés de force. Il se trouvait près de Mulsanne dans la Sarthe avait une superficie de 5 à 6 kilomètres de circonférence. Mais avant d'être un camp de prisonniers de guerre allemands, voici ci dessous son histoire.

Sommaire

Historique

Un cantonnement pour les troupes Britanniques

Mulsanne 1939 est une petite bourgade rurale et tranquille de 500 habitants. L'habitat est regroupé autour de la vieille église et le long de la route nationale Paris-Tours. Quand en mai, des troupes anglaises venues en renfort sur le territoire français s'installent sur des terrains requis par l'armée. sous les ordres du Lieutenant Carr, forte de 851 hommes, 11 officiers, 420 sous-officiers, 360 hommes de troupes et 60 indiens (Inde). Soldats indiens reconnaissables à leurs turban. Ils étaient affectés à l'entretien du camp et avaient avec eux des mulets attelés par deux à des chariots. Ils trouvèrent sans doute le terrain idéal pour y construire leur camp. Sur le bord de la nationale Le Mans-Tours, donc d'accès facile. A cet endroit les Anglais construisent routes et baraquements en forme demi-circulaire, ainsi qu'un château d'eau sur une butte face à la route d'Arnage, seul vestige restant aujourd'hui. Camp d'instruction, cantonnement avancé sur le continent européen. Les états majors des armées alliées avaient, en effet, prévu une guerre longue et difficile. Les troupes britanniques stationnées dans la Sarthe sont commandées par le général Borwig, qui a installé son état-major à la bourse du commerce au Mans. Juin 1940 c'est la débâcle, les soldats anglais et indiens laissent leur cantonnement tel quel des baraquements en tôles ondulées, construits en trois éléments. Nourriture, habillements, couvertures, conserves, cigarettes et bien d'autres choses. Bon nombre de gens prirent possession de tout ce ravitaillement. Parallèlement à ce départ, une vague de réfugiés atteint Mulsanne, l'exode de 1940 débute[1].

Le fronstalag n°203

Le 20 juin 1940 les premiers soldats allemands arrivent à Mulsanne. Le Frontstalag numéro 203 de Mulsanne se monte très vite. Destiné à accueillir les prisonniers de guerre dont près de 4 000 soldats français avec de nombreux Africains, soldats des armées britanniques et Polonaises. Il est clôturé avec des fils barbelés d'une hauteur d'environ 4 mètres, des miradors de 5 mètres sont implantés, tous les 50 mètres une sentinelle avec un fusil mitrailleur. La nuit, des phares tournent en permanence. Les prisonniers restent un an maximum puis sont expédiés en Allemagne. La nourriture est rare, en attendant, les conditions de vie sont très difficiles. Les prisonniers de guerre reçoivent leurs matricules à l'arrivée du camp. Ils sont logés par groupe de cinquante dans des baraques de tôles ondulées, comme lit, trois kilos de paille changée tous les mois. L'appel se fait deux fois au matin et la nuit, où parfois, par surprise au milieu de la journée. Certains prisonniers sont envoyés dans des fermes environnantes pour travailler. Un certain nombre d'entre eux vont réussir à s'échapper grâce à des complicités extérieures. Puis en mai 1941, les soldats partent à pied jusqu'à Arnage, d'où ils sont embarqués par voies ferrées en Allemagne[2].

Un camp d'internement des nomades

Dès lors, le camp devient une zone d'internement pour Tsiganes. Les nomades n'y sont pas seuls (vagabonds, clochards, voleurs et quelques prisonniers de guerre nord-africains). Le 15 avril 1942, 370 nomades internés auparavant au camp de la Pierre, près de Coudrecieux arrivent rapidement suivis de nombreux autres, déplacés d'un camp à l'autre. Les internés sont logés dans des baraques de tôles ondulées de forme semi-cylindrique, avec plancher en bois. Ils sont logés dans 35 baraques sur 186 existantes, elles sont surpeuplées. Les conditions sanitaires sont déplorables, l'eau est une denrée rare et précieuse. Les douches ne fonctionnent pas, l'installation sanitaire ayant éclaté durant l'hiver. Le manque d'eau et d'absence d'hygiène corporelle favorisent la propagation des poux et de la vermine. D'une capacité de 1 100 à 1 200 personnes, ce camp regroupe aussi des nomades internés à Montlhéry et à Moisdon-la-Rivière. Le 3 août 1942, le camp de Mulsanne est évacué. 717 internés encadrés par 50 gendarmes et 20 gardiens civils quittent Mulsanne par train spécial de la gare d'Arnage en direction du camp de Montreuil-Bellay[3].

Un camp d'internement des juifs

En octobre 1942, il sert également de camp de transit pour des familles de Juifs raflées sur Ecommoy. Ils sont gardés dans le camp de Mulsanne (rafle le 9 octobre pour l'essentiel des arrestations) avant de partir au Camp de Drancy pour leur dernier voyage vers les camps de la mort (camp d'extermination d'Auschwitz), d'où ils furent déportés surtout par le convoi n°42 du 6 novembre 1942. Il y a là des hommes, des femmes et des enfants. Ils sont dépouillés de tous leurs biens personnels, mis dans des baraquements. 142 juifs dont 44 enfants furent arrêtés dans le département de la Sarthe. Les 717 prisonniers sont transférés par train à partir de la gare d'Arnage vers le camp de Montreuil-Bellay, dans le Maine-et-Loire. Le 23 mai 1943, Mulsanne est bombardé par les alliés. Juin 1944, après le débarquement, les soldats allemands deviennent plus arrogants, plus dangereux envers la population locale. Puis le camp se vide, il est laissé à la garde de deux soldats Autrichiens qui vont désormais surveiller surtout du matériel[3].

Dépots n°401, n°402 et n°403 P.G.A (prisonniers de guerre de l'Axe)

En janvier 1945, les soldats alliés arrivent en Sarthe. Les rôles s'inversent. Le Front stalag 203 devient un camp de prisonniers allemands, dépôts n°401, n°402 et n°403 P.G.A (prisonniers de guerre de l'Axe) des D.P.G.A de la 4e région. Trois camps sont formés à l'intérieur de cet immense camp. Des soldats, des SS, des officiers supérieurs allemands capturés au cours de la campagne et dans les poche de l’Atlantique. les prisonniers étaient en partie sous des tentes, 24 toiles de tente par compagnie sont distribuées. Les troupes de garde n’étaient pas mieux loties. C’étaient des tirailleurs Marocains (trois compagnies autonomes, une compagnie était forte de 119 hommes). Au départ, la gestion du camp est américaine. Mais face aux batailles qu'ils ont encore à mener dans le Pacifique, la gestion est transférée à l'administration française. En juillet 1946 le camp compte 8 555 prisonniers de la Wehrmacht, 252 de la SS puis quarante six officiers généraux et amiraux. Il devient alors le plus grand camp d'officiers allemands de France. L'hiver 1945-1946 est très rude, peu de nourriture, peu de chauffage, hygiène rudimentaire. Les soldats allemands décédés de maladies (dysenterie pour la plupart) sont enterrés sur un terrain attenant au cimetière de Mulsanne. Plus tard, dans les années 1960, leurs tombes seront relevées pour rejoindre le cimetière militaire du Mont d'Huisnes (il est l'unique mausolée allemand en France. Ici sont inhumés avec 11956 morts de la seconde guerre mondiale. Le mausolée est un bâtiment circulaire de deux étages d'un diamètre de 47 m environ. Il a été érigé sur une colline d’une trentaine de mètres de haut, située à proximité de la baie du Mont-Saint-Michel). En 1947, les Allemands sont libérés où évacués, les officiers de réserve sont libérés tandis que les officiers d'active sont envoyés dans les camps de Baccarat où du Larzac. Le 1er août le camp ouvre ses portes il est démantelé. Le matériel militaire est remis aux domaines. Un ferrailleur local acquiert le reste. Le site est remblayé, les terrains rendus à leur propriétaire. L'automobile Club de l'Ouest dépose un projet de dates pour la 17e édition des 24 heures, les 21 et 22 juin 1948. Mais l'économie encore trop fragile la reporte à l'année suivante en 1949. Les signes de la deuxième guerre mondiale s'effacent bien vite. Aujourd'hui, de ce camp, il subsiste que le château d'eau, les sanitaires en dépôt pour les jardiniers du golf et, proche de la route d'essai de la Drire, les ruines d'un ancien garage où les véhicules de l'encadrement étaient entreposés. Actuellement une stèle commémorative du square Bentley, se trouve à l'emplacement de l'ancien camp, elle a été commémorée le dimanche 18 octobre 2009[4],[5],[3].

  • Les commandants du camp de prisonniers allemands à Mulsanne de 1945 à 1947:

Du 1er février 1946 au 16 juin 1946, commandant du camp Colonel Brébant (ancien du 117e RI). Puis le Colonel Roquet, Colonel Lucas (ancien du 117e RI), Commandant Ferre (ancien chasseur alpin), Lieutenant-Colonel Cadieu.
La 1er compagnie autonome de la Mayenne du capitaine Amédore De Molence, était la première compagnie à prendre la garde dans le camp à compter du 3 janvier 1945, devenu 1er bataillon de marche du Maine dont sa devise "vaincre et mourir" son drapeau est décoré aux armes de la ville du Mans[5].
En 1946 la 438e compagnie de garde du camp devint la 438e compagnie de tirailleurs marocains.
Le sergent Joseph Klupczynski était interprète du camp dépôt n°401 puis 402 du 1er avril 1947 au 1er août 1947[6],[7].

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Notes et références

  1. Témoignage écrit de Monsieur Henri Barrier, né le 14 septembre 1925 à Mulsanne, ses parents étaient agriculteurs au lieu dit "la Besnerie" à Mulsanne (Atelier-Mémoire du Lycée Professionnel Agricole, 72250 Brette-Les-Pins.)
  2. Témoignage de Monsieur Lucien Coeffe né le 3 septembre 1917 dans le Limousin de la classe 1938, il est affecté au 30e R.A (Atelier-Mémoire du Lycée Professionnel Agricole André Provots, 72250 Brette-Les-Pins, tél: 02.43.75.83.01.)
  3. a, b et c Madame Brigitte Brotons professeur d'éducation socioculturelle.(Atelier-Mémoire du lycée professionnel agricole André Provots, 72250 Brette-Les-Pins, tél: 02.43.75.83.01.)
  4. Monsieur Francis Jouet gardien du camp de prisonniers allemands entre 1945 et 1947, 7 rue des Pruniers 72230 Arnage.
  5. a et b Monsieur Vallée Raymond Adjudant-chef d'encadrement en service au camp de prisonniers allemands entre 1945 à 1947, 110 quai Avesnières 53000 Laval.
  6. Il terminera sa carrière au grade de commandant, décédé le 2 janvier 2003.
  7. Monsieur et Madame Jacques Hégniévitzki, 3 rue des Roses 72230 Mulsanne.

Sources et bibliographies

  • Cochet François, « France 1945, le dossier controversé des PGA », L’Histoire, n° 191, septembre 1995, p 44- 48.
  • Cochet François, Soldats sans armes, Bruylant, Bruxelles 1998.
  • Eisterer Klaus, « Les prisonniers de guerre autrichiens sous contrôle français (1943-1947/1948) », Guerres Mondiales et conflits Contemporains, 51(201), 2001, p. 83-104.
  • ERBS Laurent, « Des démarches individuelles. Les évasions de prisonniers de guerre en 1946 », Documents, 5-2008, p. 44-46.
  • Lefèvre Sylvie, Les relations économiques franco-allemandes de 1945 à 1955. De l’occupation à la coopération. Comité pour l’histoire économique et financière de la France, Paris 1998.
  • Rovan, Joseph, Mémoires d’un Français qui se souvient d’avoir été Allemand, Paris, Éditions du Seuil, 1999
  • Théofilakis Fabien, « Les prisonniers de guerre allemands en mains françaises au sortir de la seconde Guerre Mondiale », Revue d’Allemagne, 3-4-2004, p. 383- 397.
  • Veillon, Dominique, Vivre et Survivre en France. 1939-1947. Payot, Paris 1995,
  • Voldman Danièle, La reconstruction des villes françaises de 1940 à 1954. Histoire d’une politique. L’Harmattan, Paris 1997.

Liens externes

Voir aussi


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