Virginia Hall

Virginia Hall

Virginia Hall (1906 - 1982) fut un agent secret américain qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, œuvra contre l'occupant allemand en France : de 1941 à 1943 dans le cadre du service secret britannique SOE, puis en 1944-1945 dans le cadre du service secret américain OSS. Opératrice radio et chef de réseau, elle soutint la résistance française dans la région lyonnaise et dans le centre, puis contribua à organiser les parachutages au Chambon-sur-Lignon et la libération de la Haute-Loire.

Identités

  • État civil : Virginia Hall.
  • Comme agent du SOE en France :
    • Nom de guerre (field name) : « Marie », puis (septembre 1942) « Philomène »
    • Fausse identité (enregistrement à l'hôtel) : Brigitte Lecontre
    • Pseudos divers : Germaine, Marie Monin, La dame qui boite.
    • Surnoms donnés par les Allemands : Artemis ; La dame qui boite.
  • Comme agent de l'OSS :
    • Nom de guerre : « Diane ».
    • Pour une mission (avortée) en Autriche : Anna Müller « Camille ».
  • Et aussi (emploi à préciser) : Nicolas, Mae, ...

Pour accéder à des photographies de Virginia Hall, se reporter au paragraphe Sources et liens externes en fin d'article.

Famille

  • Son père : Edwin Lee Hall (1871-1931)
  • Sa mère : Barbara Virginia Hammel ( ? -1956)
  • Son mari : Paul Goillot (1914-1987, mariage 1957)

Biographie

Jeunesse

1906. Naissance le 6 avril à Baltimore, Maryland.

1924. High School : Roland Park Country School, Baltimore, MD.

1925. Universités : Radcliffe College, puis Barnard College, où elle développe sa passion pour les langues modernes. Elle veut finir ses études en Europe. Avec l'aide de ses parents, elle voyage à travers le Continent et étudie à l'École Libre de Sciences Politiques en France, et à la Konsularakademie à Vienne (Autriche). Elle parlera couramment français, allemand et italien, et pratiquera également l'espagnol et le russe.

1929. Université George Washington, Washington DC : études de français et d'économie.

Diplomate

1931. Virginia Hall obtient un poste administratif de secrétaire à l'ambassade des États-Unis à Varsovie. .

1933.

  • Elle prend un poste de secrétaire au consulat américain à İzmir (Turquie).
  • 8 décembre. Elle est victime d'un accident de chasse en Turquie : elle se tire une balle dans le pied gauche ; la gangrène s'étant développée, elle doit être amputée à partir du genou et munie d'une prothèse en bois (qu'elle appellera plus tard Cuthbert).
  • Elle retourne se faire soigner aux États-Unis, puis reprend un poste de secrétaire au consulat américain à Venise.

1938. Elle est mutée à Tallinn (Estonie) en mai.

1939. Son handicap l'empêchant de se présenter aux examens d'entrée pour la carrière diplomatique, elle démissionne de son poste à Tallinn et du Département d'État, en mai. À la déclaration de guerre, est toujours en Estonie, avant de rejoindre l'Angleterre en octobre 1939, puis la France en janvier 1940, où elle devient journaliste et cherche à s'engager dans l'armée.

Ambulancière

1940. Alors que l’attaque allemande sur la France semble inévitable, elle se porte volontaire dans l’armée française et devient conductrice d’ambulance, malgré son handicap. Et pendant l'été, elle se retrouve en zone occupée. Elle rejoint Londres, où elle trouve un emploi temporaire de secrétaire à l'ambassade des États-Unis.

Agent des services secrets en France

Agent du SOE britannique en zone non occupée

1941.

  • Elle rencontre Nicolas Bodington, numéro 2 de la section française du Special Operations Executive (SOE) section F, qui la recrute à partir du 1er avril, en vue d'une mission en France. Elle reçoit la formation nécessaire (maniement d'armes, sécurité, ...).
  • Août. Le SOE l'envoie en France comme agent de liaison. Elle est la première femme envoyée en France pour une mission permanente par les Britanniques. Pendant 15 mois, sous la couverture d’une journaliste du New York Post, elle est chef du réseau HECKLER sous le nom de code de « Germaine » : elle collecte et transmet des renseignements et elle aide la résistance française, à Vichy puis à Lyon[1]. Elle accueille des agents de passage, transmet des rapports à Londres émanant des chefs de la résistance française (de Emmanuel d'Astier de la Vigerie à Germaine Tillion), coorganise des évasions spectaculaires, dont celle de onze d'agents de la section F du camp de Mauzac le 16 juillet 1942. Bref, elle joue le rôle d'une plaque-tournante pour la section F en zone non occupée.

1942. En novembre, les Allemands franchissent la ligne de démarcation et occupent soudain toute la France. Son réseau ayant été infiltré par Robert Alesch, un agent double au service des Allemands, et traquée par la Gestapo, Virginia Hall parvient de justesse à s'échapper en Espagne, très difficilement en raison de son handicap[2].

Retour à Londres et mission en Espagne

1942 (suite). Les Espagnols l'incarcèrent quelque temps à San Juan de Las Abadesas, mais elle est rapidement libérée sur intervention du Consul américain à Barcelone.

1943. De retour à Londres en janvier 1943, elle est à nouveau envoyée en Espagne comme agent du SOE de mai à novembre 1943, avec la couverture de « reporter du Chicago Times ». En juillet, elle est nommée MBE (Membre de l'Ordre de l'Empire britannique). Pour reconnaître ses mérites, les Britanniques auraient voulu lui décerner une plus haute distinction, mais redoutent de compromettre son identité, car elle est alors encore active.

Agent de l'OSS américain dans le Centre

1944.

  • Janvier. Virginia Hall suit une formation d'opératrice-radio à Londres.
  • Mars. Elle rejoint le service américain Office of Strategic Services (OSS), dans la branche des opérations spéciales, et demande à retourner en France. N'ayant pas vraiment besoin d'entraînement aux activités clandestines derrière les lignes ennemies, elle voit sa demande acceptée par l'OSS, qui la fait déposer par un bateau (MTB) britannique, le 21 mars, sur les côtes bretonnes. Sa jambe artificielle proscrit tout parachutage. Avec le nom de code « Diane », elle prend contact avec la Résistance dans le Centre de la France (d'abord dans le département de la Creuse, puis dans le Cher et la Nièvre) : elle cartographie les zones de largage pour les matériels et les commandos venant d'Angleterre ; elle trouve des maisons sûres ; elle contribue à entraîner et armer plusieurs groupes de combattants de l’intérieur ;
  • Juillet. Elle s'installe près du Chambon-sur-Lignon, dans la Haute-Loire, comme opératrice-radio pour approvisionner en armes les maquisards FFI qui entament la libération du département. Grâce aux parachutages qu'elle supervise, trois bataillons de FFI sont équipés, engagés dans des missions de sabotage et de guérilla, qui se révéleront cruciales pour retarder les mouvements des Allemands après les débarquements de Normandie et de Provence ; chargée des liaisons radio entre l’Angleterre et le maquis, elle livre un flux de renseignements précieux sur l'ennemi.
  • Après le débarquement en Provence, elle établit fin août la liaison avec une équipe Jedburgh Jeremy, puis avec une équipe franco-américaine d'encadrement militaire, toutes les deux parachutées dans la région.
  • Septembre. Elle organise un petit groupe de maquisards prêts à poursuivre les combats dans l'Est. Son groupe est finalement démobilisé dans l'Ain. Elle rejoint Paris, puis Londres avant d'être affectée près de Naples (Italie) à la préparation d'une mission périlleuse d'infiltration en Autriche, qui sera finalement annulée au dernier moment, le jour de l'armistice, le 8 mai 1945.

1945. Le 27 septembre, le Général William Joseph Donovan, chef de l'OSS, la décore personnellement, à Washington DC, pour ses efforts en France, de la Distinguished Service Cross, la seule à être accordée à une femme civile pour la Deuxième Guerre mondiale.

Agent de la CIA

1946. Virginia Hall travaille comme « agent contractuel » pour la CIA en Italie.

1948. Elle travaille comme « agent contractuel » pour la CIA à New-York au sein du Comité national pour l'Europe Libre (organisme de propagande lié au Département d'Etat et à la CIA créé pour combattre l'influence communiste en Europe).

1951. Elle rejoint officiellement les rangs de la Central Intelligence Agency, où elle travaillera comme officier de renseignements sur les affaires para-militaires et les opérations politiques, au sein de la Direction des Plans, notamment sur la France, l'Europe de l'Ouest, les Balkans et l'Amérique du Sud.

Retraite

1957. Elle épouse Paul Goillot, ex-agent OSS qu'elle avait rencontré en Haute-Loire.

1966. Ayant atteint l'âge de la retraite, elle quitte la CIA et se retire dans une ferme à Barnesville, Maryland.

1982. Le 8 juillet, Virginia Hall Goillot meurt au Shady Grove Adventist Hospital de Rockville, MD. Elle est enterrée au Ridge Cemetery, Pikesville, MD.

Hommages et distinctions

Adresses lyonnaises

À Lyon, les principales adresses utilisées par Virginia Hall sont les suivantes :

  • 11, rue Grolée. Grand Nouvel Hôtel (devenu Grand Hôtel Concorde).
  • 3, place Ollier. Appartement de trois pièces. À partir de février-mars 1942[4].

À Lyon et dans les environs, les principales adresses utilisées par les réseaux que coordonne Virginia Hall sont les suivantes[5] :

  • 53, rue de Marseille. Entrepôt d'André Courvoisier (M. Naude, « Nicot ») et stockage de journaux clandestins.
  • 5, place Gailleton. Domicile de M. Lassère, marchand de cycles, responsable : André Courvoisier
  • Cour des trois passages, quai Jayr.
  • 60, Grande Rue, Oullins. Hôtel de la Croix d'or, tenu par M. Gourdon. PC de Jean Menesson « Henri » (SPRUCE).
  • 90, Grande Rue, Oullins. Le Grand Bazar d'Auguste Bussière. Émissions radio opérées par Jean Menesson « Henri » (réseau SPRUCE)
  • 26, rue Lanterne. Au bon Graton, restaurant tenu par Antoine Raumann. Émissions radio opérées par Jean Menesson « Henri » (réseau SPRUCE) et Edward Zeff « Mathieu ».
  • Angle rue Masaryk-quai Jayr. Émissions radio opérées par Edward Zeff « Mathieu » (réseau SPRUCE)
  • 7, place Antonin-Poncet, domicile et cabinet du docteur Jean Rousset « Pep ». Émissions radio opérées par Edward Zeff « Mathieu » (réseau SPRUCE). Logement provisoire de pilotes et d'agents britanniques.
  • 334, rue Boileau. Domicile de Germaine Guérin « Bohémienne », PC des frères Alfred et Henry Newton (réseau GREENHEART)
  • 11, rue de la République, Saint-Romain-au-Mont-d'Or. Propriété de M. et Mme Naude. Émissions radio opérées par Brian Rafferty « Dominique » (réseau HEADMASTER)
  • 2, quai Perrache. Domicile de Joseph Marchand (réseau NEWSAGENT). PC de Georges Duboudin « Alain » (réseau SPRUCE). Émissions radio opérées par Pierre Le Chêne « Grégoire » (réseau SPRUCE)
  • 6, rue Émile-Zola. Magasin de Mlles Pejot. PC de Robert Boiteux « Nicolas » (réseau NEWSAGENT). Émissions radio opérées par Pierre Le Chêne « Grégoire » (réseau SPRUCE)
  • 9, rue Camille, quartier de Montchat. Domicile d'André Serre. Émissions radio opérées par Pierre Le Chêne « Grégoire » (réseau SPRUCE)
  • 2, rue Sainte-Hélène. Domicile de D. Aron. PC de Tony Brooks « Alphonse » (réseau PIMENTO). Émissions radio opérées par Brian Stonehouse « Célestin » (réseau GREENHEART)
  • 2, rue de la Gare. Domicile provisoire de Brian Stonehouse « Célestin » (réseau GREENHEART). Émissions radio opérées par lui-même.
  • 9, rue de la Méditerranée (devenue rue Étienne-Rognon). Domicile d'André Courvoisier « Nicot ». Émissions radio opérées par « Gregg » (réseau HECKLER)
  • 281, rue de Créqui. Éts Plauchu (ultérieurement Moreau - ex. 1984). Responsable André Courvoisier« Nicot ». Émissions radio opérées par « Gregg » (réseau HECKLER)
  • 6, avenue Henri-Barbusse, Villeurbanne. Domicile de Jules Dreyfus. Émissions radio opérées par « Gregg »
  • rue du Docteur-Crestin, domicile de Monique Herady. Arrestation des frères Newton.

Annexes

Sources et liens externes

  • Photographies de Virginia Hall sur le site Special Forces Roll of Honour : SOE 1942, OSS 1944
  • Michael Richard Daniell Foot, Des Anglais dans la Résistance. Le Service Secret Britannique d'Action (SOE) en France 1940-1944, annot. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Tallandier, 2008, (ISBN 978-2-84734-329-8), (EAN 9782847343298). Traduction en français par Rachel Bouyssou de (en) SOE in France. An account of the Work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944, London, Her Majesty's Stationery Office, 1966, 1968 ; Whitehall History Publishing, in association with Frank Cass, 2004.
    Ce livre présente la version « officielle » britannique de l’histoire du SOE en France. Une référence essentielle sur le sujet du SOE en France.
  • Vincent Nouzille, L'Espionne. Virginia Hall, une Américaine dans la guerre, Paris, Fayard, 2007, (ISBN 978-2-213-62827-1). Présentation du livre,
  • Chronique du livre "L'Espionne, Virginia Hall, une Américaine dans la guerre" par l'historien MRD Foot, dans Studies in Intelligence, N°53, avril 2009[6]
  • Judith L. Pearson, The Wolves at the Door : The True Story of America's Greatest Female Spy, The Lyons Press, 2005, (ISBN 1-59228-762-X).
  • André Courvoisier, Le Réseau HECKLER, - De Lyon à Londres, Éditions France-Empire, 1984.
  • Fabrizio Calvi, OSS. La Guerre secrète en France 1942-1945. Les services spéciaux américains, la Résistance et la Gestapo, Hachette, 1990.
  • (en)Judith L.Pearson, The Wolves at the Door : the True Story of America's Greatest Female Spy, 2005.
  • Article de Wikipédia en anglais.
  • Times Online Article
  • (en) Notice bographique sur Virginia Hall à l'occasion de son inscription au mémorial des célébrités du renseignement militaire américain[7].

Notes

  1. où elle croise bon nombre de résistants. Plusieurs autres agents en mission sur la ville de Lyon ont eu à faire appel à Virginia Hall. L’un d’entre eux, Denis Rake, écrira plus tard : « Virginia Hall, de mon point de vue comme de celui de beaucoup de mes collègues, est considérée comme le plus grand agent de la guerre. »
  2. Étrangement, son pied artificiel avait son propre nom de code, « Cuthbert ». Avant de partir, elle avait signalé au SOE qu'elle espérait que « Cuthbert » ne lui poserait pas de problème en chemin. Le SOE, ne comprenant pas la référence, répondit : « Si Cuthbert est gênant, éliminez-le ».
  3. Military Intelligence (MI) Corps Hall of fame ; Article de Katharine W. Schmidli dans le Military Intelligence Professional Bulletin d'octobre-décembre 2003. Voir notice bographique
  4. Nouzille, p. 155.
  5. Source : Courvoisier.
  6. https://www.cia.gov/library/center-for-the-study-of-intelligence/csi-publications/csi-studies/studies/vol53no1/l2019espionne-virginia-hall-une-americaine-dans-la.html
  7. Military Intelligence (MI) Corps Hall of fame ; Katharine W. Schmidli, article dans le Military Intelligence Professional Bulletin, octobre-décembre 2003.

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Virginia Hall de Wikipédia en français (auteurs)

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