- Serrès
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Serrès (en grec : Σέρρες), anciennement Sérrai (Σέρραι) ou encore Sírra, Sírai (Σίρρα, ou Σίραι), est une ville grecque de Macédoine Centrale dans la région antique de l’Odomantique, qui a la rare particularité en Macédoine d’avoir eu une existence continue en conservant son nom d'origine. C'est aujourd’hui un chef-lieu du nome homonyme, d'environ 80 000 habitants.
Sommaire
Histoire de la ville
La ville antique
La première mention de Sirra remonte au IVe siècle av. J.‑C. et se trouve chez Théopompe (selon Étienne de Byzance : la mention, antérieure, d’une Siris de Péonie chez Hérodote (VIII, 15), ne doit pas être identifiée comme on le fait généralement avec le même site, car l’ethnie correspondante, les Siriopéoniens, habitaient selon le même auteur au nord du lac Prasias[1]. De surcroît, Étienne de Byzance distingue Sirs de Péonie et Sirra, ville de Thrace.
Cette ville pré-hellénique est d’abord intégrée au royaume de Macédoine avec l’organisation d’une cité grecque. Une cinquantaine d’inscriptions constituent le principal témoignage de cette époque et confirment qu’elle appartient au koinon macédonien. Elles révèlent aussi l’existence de magistrats municipaux, bouleutai et agoranomes.
La ville devient un siège épiscopal dans l’Antiquité tardive : son évêque Maximinos est présent au concile d'Éphèse en 449 ainsi qu'au concile de Chalcédoine.
Le nom moderne de Serrès (Σέρραι) apparaît pour la première fois dans le Synekdèmos d'Hiéroklès (639, 10) au début du VIe siècle.
On ignore presque tout du plan et des monuments de la ville antique, aussi bien que de l’étendue de son territoire.
La ville médiévale
La ville sort de l’obscurité au Moyen Âge et joue un rôle important dans plusieurs conflits avec les Bulgares et les Serbes. Elle est mentionnée par Constantin VII Porphyrogénète comme une polis de l'eparchia de Rhodope[2]. Elle est élevée au rang de métropole avant 997. Deux églises majeures datent de cette période : l’église Saint-Nicolas dont l'architecture rappelle celle de la Panagia tôn Chalkeôn de Thessalonique, et peut-être datée du XIe siècle–XIIe siècle ; l’église métropolite des Saints-Théodores[3], de plan basilical, remarquable pour la mosaïque de la Communion des Apôtres qui en décorait l’abside, avant l’incendie qui la détruisit en 1913[4]. Cette œuvre n'est connue que par des fragments conservés à Thessalonique et la description qu’en ont donné des voyageurs français en 1903, mais la parenté stylistique avec les mosaïques de Daphni indiquent une datation au début du XIIe siècle.
En 1185, le territoire de Serrès est ravagé par les Normands. Vers 1195, les Bulgares y défont le sébastokrator Isaac Comnène. Après une brève occupation latine par Boniface de Montferrat suite à la IVe Croisade, les Bulgares s’en emparent en 1206 et, au témoignage de Georges Acropolite la réduisent à un simple bourg protégé par une citadelle.
Les Byzantins en reprennent le contrôle avec Jean III Vatatzès en 1246, et la ville connaît une nouvelle période de prospérité.
Le 25 septembre 1345, la ville est prise par le roi serbe Stefan Uroš IV Dušan : son territoire est constitué en une principauté indépendante dirigée d’abord par la veuve de Dušan, Helena, puis à partir d’août–septembre 1365 par le despote Jean Uglješa. Dans cette principauté de langue grecque, les sujets grecs ont un rôle important dans l'administration, et les liens restent étroit avec l'empire byzantin aussi bien qu'avec le Mont Athos.
C'est pendant cette période de domination serbe qu’ont lieu des travaux majeurs de restauration des fortifications sur l’acropole, dont témoigne l’inscription sur la tour d'Orestes[5] qui se lit « Tour de l'empereur qu’a construit Orestes » (ΠΥΡΓΟΣ … ON ΕΚΤΙΣΕΝ OPEΣΤΗΣ), l'officier chargé de ces travaux.
La victoire de la Maritsa en 1371 donne brièvement à Manuel II Paléologue le contrôle de la région, mais l’hégémonie ottomane est définitivement établie le 19 septembre 1383.
De cette période date un grand bâtiment muni de six coupoles, au centre de la ville, qui devait faire fonction de marché couvert (bezesteni), et qui abrite aujourd’hui le musée archéologique[5]. C'est, avec celui de Thessalonique, l’un des deux seuls exemplaires conservés de ce type de monument en Grèce.
La ville reste ottomane, connue sous le nom de Siruz jusqu'en 1913. Elle est un centre de négoce florissant, soutenue par un arrière-pays prospère et le commerce par voie de terre qui prend le pas sur le commerce maritime en raison du danger posé par les pirates sur les côtes de l’Égée.
Serrès prend part à la Révolution grecque de 1821 : l'un de ses héros, Emmanuel Pappas, un banquier originaire d’un village voisin, membre de la Société des Amis (Philiki Etairia), prend la tête d'une petite armée de 2 500 hommes et mène la lutte plusieurs mois contre les Turcs avant l'écrasement de la révolte dans la région à la fin de l'année.
Serrès joue encore un rôle important dans le Mouvement macédonien entre 1904 et 1908. En 1913, à la fin de la Deuxième Guerre balkanique, la ville est brûlée par l'armée bulgare en retraite. Les troupes grecques entrent dans la ville le 28 juin 1913.
La ville contemporaine
Aujourd'hui Serrès est une ville moyenne dans une région dont l'activité demeure essentiellement agricole : culture du tabac, du riz, des tomates, et élevage bovin. L’industrie se limite principalement au secteur agro-alimentaire. Le secteur primaire (agricole) occupe ainsi 60 % de la population active du nome. Le taux d’urbanisation du nome de Serrès est de 45 % seulement. Suite à l'incendie de 1913, il ne reste pratiquement plus rien de la ville byzantine et ottomane.
Le monastère de Saint-Jean-le-Précurseur
À 12 km au Nord-Est de Serrès, au fond d’un ravin au pied du mont Ménikion, se trouve le monastère de Saint-Jean-le-Précurseur (Μονή Ιωάννου Προδρόμου, Moni Ioannou Prodromou). Fondé en 1275–1278 par le moine Ioannikos de Serrès, il fut rénové quelques années plus tard par son neveu Ioakeim, évêque de Zichna, qui le dota d’une enceinte.
Le monastère connut un développement important au début du XIVe siècle grâce notamment au soutien impérial des Paléologue : l'empereur Andronic II Paléologue en particulier fit d’importantes donations foncières au monastère dont le souvenir est perpétué par une fresque en façade du catholicon. La riche décoration de cette église remonte en effet à cette époque (entre 1300 et 1333), pour une part, mais également aux années 1630. L’iconostase du catholicon est beaucoup plus tardive (1804).
En 1345, les propriétés du monastère furent ravagées par l'invasion des Serbes et ne durent qu’à l'intervention d'Hélène, l'épouse du roi serbe Stefan Dušan, de ne pas être complètement détruites.
Pendant l’hégémonie ottomane, le monastère accueillit le patriarche de Constantinople Gennadios Scholarios, lorsqu’il se retira volontairement en 1457. Il retourna sur le trône patriarcal en 1462 pour une année, avant de se retirer définitivement à Saint-Jean en 1464, où il mourut en 1472. Sa tombe prit place dans le catholicon, et ses reliques furent exhumées en 1854.
La tour carrée du monastère a été convertie en bibliothèque et possède un fonds de 300 manuscrits, 1 500 volumes divers et quelques chrysobulles et sceaux patriarcaux. Elle fut en partie pillée par les Bulgares lors de l’occupation de la région entre 1913 et 1917.
Aujourd’hui, et après être resté à l'abandon pendant une grande partie du XXe siècle, le monastère est occupé par une communauté de moniales.
Notes et références
- F.Papazoglou, Les villes de Macédoine romaine, BCH Suppl. 16, 1988, p. 377-380
- De Thematibus, 1.52-53
- Ag. Theodoroi, cf. photographie
- voir infra
- cf. photographie
Bibliographie
- Oxford Dictionary of Byzantium, s. v. Serres, vol. III, 1881-1882
- F. Papazoglou, Les villes de Macédoine romaine, BCH Suppl. 16, 1988, p. 377-380
- (collectif) Οι Σέρρες και η περιοχή τους από την αρχαία στη μεταβυζαντινή κοινωνία (Serrès et sa région de la communauté antique à la communauté post-byzantine, en grec), 2 vol., Serrès, 1993
- D. Evgenidou, Κάστρα Μακεδονίας και Θράκης, Βυζαντινή καστροκτισία (Castra de Macédoine et de Thrace, la construction de châteaux byzantine, en grec), Athènes, ADAM, 1998
Liens externes
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