- Sarkozysme
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Le sarkozysme est le nom donné à la politique menée par Nicolas Sarkozy. De 2005 à 2007, ce terme est parfois utilisé par opposition au « villepinisme ». Depuis 2007, il désigne la politique présidentielle de Nicolas Sarkozy.
Sommaire
Le fond
Le sarkozysme vu par lui-même
Issu d'un travail débuté en 2002, le projet présidentiel de Nicolas Sarkozy est le résultat d'un travail conduit pendant cinq années par une équipe de plus de 250 intellectuels et experts réunis autour d'Emmanuelle Mignon[1]. C'est d'ailleurs à Emmanuelle Mignon, parfois qualifiée de « cerveau du sarkozysme[2] », que Nicolas Sarkozy a demandé de superviser la conception de son projet présidentiel.
Bien qu'il ait déclaré être libre à l'égard des théories et des idéologies[3], Nicolas Sarkozy prône par exemple début 2008, sous l'impulsion de son conseiller spécial Henri Guaino, « une politique de civilisation », concept développé par le philosophe Edgar Morin. Il se fait également fort d'incarner un gaullisme de rupture : « De Gaulle a été l'homme de toutes les ruptures parce qu'il a toujours refusé la continuité, les conformismes, l'habitude, les situations acquises. […] Je refuse la répétition d'un passé qui ne serait plus accordé avec le monde d'aujourd'hui. Je veux rompre avec une certaine façon de faire de la politique. Je veux créer une nouvelle relation avec les Français »[4],[5].
Selon Brice Hortefeux en 2010, fidèle de Nicolas Sarkozy, le sarkozysme n'a jamais été « en phase avec les élites mais l'est avec la société »[6].
Le sarkozysme vu par des observateurs
Certains observateurs, comme l'économiste libéral Jacques Marseille ou le journaliste Alain Duhamel, considèrent le sarkozysme comme un mélange de bonapartisme moderne et de pragmatisme[7].
Pour Pierre Giacometti, les valeurs clés du sarkozysme sont : le travail, la nation et le volontarisme[7], associés à une forme de culte de la personnalité.
Pour l'ancien député de centre-droit Jean-Louis Bourlanges[7], il s'agirait d'un mélange de libéralisme et de jacobinisme, ce qui n'empêche pas Nicolas Sarkozy, en novembre 2008, de faire intervenir l'État pour sauver les banques en difficulté, ou de créer un fonds souverain de vingt milliards d'euros pour financer le développement d'entreprises ayant du mal à se financer via le système bancaire traditionnel.
Pour le philosophe français Pierre Musso, auteur d'un livre baptisé : Le Sarkoberlusconisme[8], le sarkozysme est comparable sur de nombreux points à la politique menée par Silvio Berlusconi en Italie : le modèle libéral euro-méditerranéen en « rupture » – le mot est également employé en Italie – avec les méthodes du passé, une exaltation commune de la valeur travail, un libéralisme teinté de protectionnisme, et un atlantisme assumé.
Interrogé en septembre 2010 par Mediapart, l'intellectuel socialiste Pierre Rosanvallon estime que « le sarkozysme n'est plus une doctrine, n'est plus une politique : il est une tentative permanente d'adaptation opportuniste aux réalités »[9].
« L'ouverture »
Une spécificité du sarkozysme est ce qui est appelé par Nicolas Sarkozy lui-même « l'ouverture », qui avait cependant été parfois appliquée, mais à moindre ampleur, sous la Ve République.
Nicolas Sarkozy « souhaite effectivement associer des personnes qui, au-delà des clivages classiques et en bousculant ces clivages classiques, partagent une même conviction que notre pays a besoin de réformes »[10] ; il s'agit de chercher « les talents où ils sont », notamment au Parti socialiste (PS). Cette stratégie permettrait de désorganiser les partis adverses en provoquant le départ de certains de leurs éléments. Une liste non exhaustive de ces personnalités :
- Bernard Kouchner, co-fondateur de l'organisation humanitaire Médecins sans frontières, ex-PS, ministre des Affaires étrangères de 2007 à 2010
- Éric Besson, précédemment député PS, ancien secrétaire national à l'économie du PS, actuellement ministre chargé de l'Industrie, de l'Énergie et de l'Économie numérique
- Fadela Amara, ancienne présidente de Ni putes ni soumises, a été conseillère municipale PS, secrétaire d'État chargée de la Politique de la ville de 2007 à 2010
- Frédéric Mitterrand, neveu de l'ancien président de la République socialiste François Mitterrand, actuellement ministre de la Culture et de la Communication
- Jean-Marie Bockel, ancien membre du PS, secrétaire d'État au Commerce sous Mitterrand, secrétaire d'État de 2007 à 2010
- Jean-Pierre Jouyet, directeur-adjoint du cabinet de Lionel Jospin de 1997 à 2000, secrétaire d'État chargé des Affaires européennes de 2007 à 2008, actuellement président de l'Autorité des marchés financiers
- Martin Hirsch, anciennement conseiller chargé de la santé au cabinet de Martine Aubry, a aussi présidé l'association Emmaüs en France, Haut Commissaire aux solidarités actives de 2007 à 2010
- Michel Mercier, trésorier de l'UDF puis du Modem, actuellement garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés
Certaines personnalités de la majorité se sont retrouvées dérangées par la nomination de personnalités politiques de gauche à certains postes-clés du gouvernement[11].
La forme
En termes de manière de gouverner, on assiste à un changement de « style » assez important.
Nicolas Sarkozy est ainsi considéré comme le premier président « people » lors de la première année de son mandat. Divorcé de Cécilia Attias puis remarié avec Carla Bruni, il est l'ami de plusieurs grands patrons (Arnaud Lagardère, Vincent Bolloré, Bernard Arnault) et de stars (Jean-Marie Bigard, Johnny Hallyday, Christian Clavier). Lui est reprochée une attitude superficielle et caractérisée par un luxe ostentatoire, régulièrement qualifiée de "bling bling"[12]
Une fois Nicolas Sarkozy devenu président de la République, ses méthodes de communication politique ont été qualifiées par la presse d'« hyperprésidentialisme », ou Sarkozy lui-même d'« omniprésident »[13]
Selon le constitutionnaliste Guy Carcassonne, cette attitude pourrait être[réf. nécessaire] le revers d'une diminution concrète des pouvoirs de l'Élysée du fait de la décentralisation, de l'intégration européenne, de la censure du Conseil constitutionnel, et de l'affaiblissement de l'État dans l'économie.
L'anti-sarkozysme
Par opposition au sarkozysme, a émergé la notion d'anti-sarkozysme. À l'inverse du sarkozysme, l'anti-sarkozysme ne désigne pas une politique ou un ensemble d'actions, mais se définit de manière négative comme l'opposition au sarkozysme ou aux actions menées par la personne de Nicolas Sarkozy[14],[15]. Il peut cependant être revendiqué[16].
Bibliographie
- Paul Ariès, Misère du Sarkozysme : Cette droite qui n'aime pas la France (éd. Parangon, 2005)
- Yannick Chatelain et Loïck Roche, Les loups : Le sarkozysme expliqué aux enfants (éd. Le Bord de l'Eau, janvier 2007)
- Jean-Pierre Le Goff, La France morcelée (éd. Gallimard, coll. « Folio Actuel », 2008) Textes parus dans Le Débat entre 2003 et 2007
- Serge Portelli, Le sarkozysme sans Sarkozy (éd. Grasset, 2009)
- Daniel Schneidermann[17], Crise au Sarkozistan (éd. Le Publieur, 2010)
Annexes
Notes et références
- La machine à idées de Sarkozy. - Nonfiction.fr - 12/12/07
- « Emmanuelle Mignon, le “cerveau du sarkozysme” », Le Figaro, 7 janvier 2008
- Je ne suis pas un théoricien, je ne suis pas un idéologue, je ne suis pas un intellectuel » - déclaration de Nicolas Sarkozy - Interview télévisée du 20/06/07 - TF1 «
- http://www.lexpress.fr/actualite/politique/sarkozy-gaulliste-sans-famille_461206.html
- http://www.lefigaro.fr/politique/2008/10/13/01002-20081013ARTFIG00290-sarkozy-celebre-le-gaullisme-avec-merkel-.php
- « Le retour au peuple », Le Journal du dimanche, 7 août 2010.
- « Qu'est-ce que le Sarkozysme ? », Le Point, 10 mai 2007.
- Éditions L'Aube
- « Pierre Rosanvallon: “L'échec du sarkozysme, la panne de la gauche” », Mediapart, 17 septembre 2010.
- http://www.liberation.fr/politiques/010118683-l-ouverture-de-sarkozy-seme-la-discorde-a-gauche-et-a-droite
- http://frederic-waringuez.lejdd.fr/2007/07/19/4-ouverture-sarkozy-lache-le-morceau
- http://www.francesoir.fr/divers/un-de-sarkozysme-du-bling-bling-la-represidentialisation , http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/11/11/air-sarko-one-un-avion-devenu-symbole-du-bling-bling-presidentiel_1438521_823448.html
- « Sarkozy se préfère en “omniprésident” qu'en “roi fainéant” », Le Point, 7 janvier 2009.
- http://www.lefigaro.fr/politique/2010/09/26/01002-20100926ARTFIG00190-pour-hollande-l-anti-sarkozysme-est-une-paresse.php
- http://www.rtl.fr/actualites/article/les-derives-de-l-anti-sarkozysme-5953266362
- http://www.lejdd.fr/Politique/Actualite/Besancenot-L-anti-sarkozysme-est-un-acte-de-salubrite-publique-215688/
- http://www.liberation.fr/livres/01012310422-la-crise-au-sarkozistan-succes-pour-un-pamphlet-publie-sur-internet
Liens externes
- Qu'est-ce que le sarkozysme ?, dossier de la revue Esprit
- « Qu'est-ce que le sarkozysme ? », Le Point, 1er mai 2007
- « Le sarkozysme est-il un bonapartisme ? », Le Monde diplomatique, février 2008
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