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Fonds souverain
Un fonds souverain (sovereign wealth funds), ou fonds d’État, est un fonds de placements financiers (actions, obligations, etc.) détenu par un État. Les fonds souverains gèrent l'épargne nationale et l'investissent dans des placements variés (actions, obligations, immobilier, etc.). Dans une acception restreinte, ils désignent spécifiquement « les avoirs des États en monnaie étrangère »[1]. Dans une acception plus large, ils désignent tous les fonds d'investissement détenus par un État[2].
Sommaire
Historique
Le premier fonds souverain créé a été le fonds du Koweït en 1953[3], suivi, en 1956, du Kiribati Revenue Equalisation Reserve Fund qui gère aujourd'hui 630 millions $[4], soit 7 fois le PIB de l'archipel. Ils se développent fortement depuis quelques années[5].
Ressources
Ils tirent leurs ressources des réserves des banques centrales (Chine), des réserves pour les retraites (Norvège) ou, par exemple, des fonds tirés de l'exploitation de matières premières (Norvège, Russie, Qatar). Les fonds alimentés par le pétrole représentent ainsi deux tiers des montants gérés par ces fonds[3].
Méthodes d'investissement
Les différents fonds utilisent des méthodes d'investissement variables. Certains, tel le fonds norvégien, refusent de prendre des parts importantes du capital des entreprises étrangères. À l'inverse, d'autres sont plus activistes et recherchent surtout des parts importantes, à l'image du fonds de Singapour ou des fonds chinois qui ont envisagé de prendre des parts dans Blackstone ou Bear Stearns. Les degrés de transparence sont, eux aussi, très variables : celui du fonds norvégien ou de Temasek Holdings à Singapour tranchent ainsi avec l'opacité de la gestion de la China Investment Corporation[6].
Réactions à leur essor
La question de l'importance de ces fonds a régulièrement été liée à celle de leur important essor. Pour Martin Wolf, directeur des rubriques économie au Financial Times, ces fonds ne posent pas plus de problèmes que d'autres, à condition de définir des listes de sociétés « interdites »[7]. La définition d'entreprises « stratégiques » face à des investisseurs étrangers a déjà été pratiquée dans le passé. En 1988, Margaret Thatcher avait obligé la KIA à revendre sa participation de 22% dans BP. En 2005, les États-Unis ont essayé d'interdire à l'opérateur portuaire Dubai Ports World d'acquérir 5 terminaux portuaires, qualifiés de « stratégiques » par certains sénateurs républicains[8]. L'opérateur avait renoncé in fine. À Bruxelles, la Commission européenne a décidé d'examiner de près ce « phénomène nouveau ». Le Commissaire au Commerce, Peter Mandelson, a évoqué la possibilité de recourir aux actions préférentielles pour protéger les entreprises « stratégiques »[9].
Des réactions hostiles ont eu lieu lors du rachat, par des fonds souverains, d'entreprises considérées comme sensibles, par exemple en Thaïlande où Temasek Holdings, le fonds singapourien, a racheté à l'ancien premier ministre Thaksin Shinawatra sa société Shin Corp, un acteur important des télécoms[3]. Aux États-Unis, le fonds Blackstone a accepté une prise de participation du fonds souverain China Investment Corporation mais en limitant toutefois les droits des actionnaires chinois. De même, le gouvernement allemand envisage de prendre des mesures pour réduire les rachats potentiels par des fonds souverains en imposant une autorisation délivrée par l'administration fédérale dès lors qu'un fonds dépasse 25 % du capital d'une entreprise locale. Cette mesure protectionniste est cependant fortement critiquée par le FDP, parti d'opposition et la plupart des milieux financiers. Pareillement, Steffen Kern, responsable de la politique des marchés financiers internationaux à la Deutsche Bank, considère que « Le protectionnisme n'est pas un bon outil politique. […]. Trop de responsables occidentaux voient ces fonds occidentaux ou asiatiques comme des menaces alors qu'ils peuvent représenter un afflux important de capitaux frais »[10].
Le manque de transparence de certains de ces fonds souverains est également régulièrement critiqué[9]. Si des mesures obligeant ces fonds à être plus transparents étaient passées, elles devraient également s'appliquer aux fonds d'investissement et aux fonds spéculatifs[11].
Le journal britannique The Economist remarquait, par ailleurs dans son numéro du 19 janvier 2008, que les pays dans lesquels les réactions avaient été les plus virulentes contre ces fonds étaient également les pays dans lesquels ils étaient les moins présents : France et Allemagne. Le journal écrit ainsi : « le président français a déjà promis de protéger les innocents managers français des fonds souverains « extrêmement agressifs », même si aucun n'a manifesté d'intérêt pour l'économie française. »[12]. Le rapport Demarolle prône deux principes vis-à-vis des fonds souverains : ouverture et réciprocité.
Importance
L'importance globale des fonds souverains
Il existe aujourd'hui une quarantaine de fonds souverains, plus communément désignés « SWF » (Sovereign wealth funds). Le dernier en date, après celui du Chili[13], est le Fonds stratégique d'investissement de la France, dont la création a eu lieu fin 2008 [14].
Le montant précis géré par les fonds souverains est difficile à déterminer tant du fait de l'opacité de certains d'entre eux que de la variation des participations qu'ils détiennent.
D'après la Standard Chartered[6], le volume de leurs actifs s'élèverait, à l'automne 2007, à 2 200 milliards $ (soit 1,3 % du total du marché des actions, obligations et dépôts bancaires)alors que la banque Morgan Stanley[15]. évalue ce montant à 2 500 milliards $. Le Fonds monétaire international (FMI) donne une fourchette de 1 900 milliards $ 2 900 milliards $ (courant 2008) alors que la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) table sur 5 900milliards $. Selon Morgan Stanley, ils pourraient atteindre 12 000 milliards en 2015, tandis que Steffen Kern de Deutsche Bank estime qu'ils pourraient gérer 5 000 milliards en 2012.
Ils ont joué en 2007-2008 un grand rôle dans le secteur financier international, en refinançant plusieurs banques de premier plan affaiblies par la crise des subprimes. Government of Singapore Investment Corporation a participé à un apport de 12 milliards $ à UBS en décembre 2007 et, au même moment, China Investment Corporation a pris 9,9% du capital de Morgan Stanley. Avant la crise, le même fonds avait déjà pris une part de 3 milliards $ dans Blackstone, un fond d'acquisition par emprunt (LBO).
Les principaux fonds
- Abu Dhabi Investment Authority (créé en 1976, Émirats arabes unis), gère 875 milliards de dollars.[16]
- Government Pension Fund-Global (1990, Norvège), 397 mds $[16]
- Government of Singapore Investment Corporation (GIC) (1981, Singapour), 330 mds $[16]
- Reserve Fund for Future Generation (1953, Koweït), 213 milliards $[16]
- China Investment Corporation (2007, Chine), 200 mds $[16]
- Fonds de réserve de Russie et Fonds de bien-être national de Russie (anciennement, Fond de stabilisation, 2004, Russie, 173,2 mds $).
- Temasek Holdings (1974, Singapour), 134 mds $)[17]
- Qatar Investment Authority (2005, Qatar, 60 mds $)[16]
Le Fonds stratégique d'investissement de la France, qui a été mis en place fin 2008, va être doté initialement de 20 milliards d'euros (fin 2009) et se placera, ainsi, au 23ème rang mondial.
Notes et références
- ↑ Propos tenus par Rodrigo Rato, directeur du Fonds monétaire international, Le Figaro, 19 octobre 2007, page 34
- ↑ Christine Lagarde considère ainsi la Caisse des dépôts et consignations comme un fonds souverain : « La Caisse des dépôts, ou l'APE dans une certaine mesure aussi, constitue un fonds souverain », leblogfinance.com
- ↑ a , b et c (en)The world's most expensive club, The Economist, 24 mai 2007
- ↑ (en)Strategy for the New Zealand Development Cooperation Programme with Karibati
- ↑ (en)State Capitalism; The Rise of Sovereign Wealth Funds, Standard Chartered, 15 octobre 2007
- ↑ a et b (en)We are living in a brave new world of state capitalism, Financial Times, 17 octobre 2007
- ↑ Il déclare ainsi « It is possible -indeed necessary- to define a negative list of companies that are "off limits" »
- ↑ Indignation contre l'acquisition de ports américains par une compagnie de Dubaï, Le Monde, 17 février 2006
- ↑ a et b Alerte sur les fonds d'État, L'Express, 26 juin 2007
- ↑ L'Allemagne va se protéger des convoitises des fonds d'État étrangers, Les Échos, 17 octobre 2007
- ↑ Les nouveaux sumos de la finance mondiale, Business Week repris dans Les Échos du 12 novembre 2007, page 16
- ↑ The invasion of the sovereign-wealth funds, The Economist, 19 janvier 2008, p.11
- ↑ Financial Times, 10 avril 2008.
- ↑ Le Figaro, 20 novembre 2008.
- ↑ (en)[pdf]How big could sovereign wealth funds be by 2015, Morgan Stanley
- ↑ a , b , c , d , e et f Resource-rich and sharing the wealth, Financial Times (Corporate finance), 24 janvier 2008, p.2
- ↑ Site internet : www.temasekholdings.com.
Voir aussi
Articles connexes
Lien externe
- La question des fonds souverains, Institut Turgot
- Synthèse du rapport Demarolle sur les fonds souverains
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Catégorie : Fonds d'investissement
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