Régime seigneurial de la Nouvelle-France

Régime seigneurial de la Nouvelle-France
Page d'aide sur l'homonymie Cet article concerne le système en vigueur dans la Nouvelle-France. Pour l'Europe, voir Seigneurie.

Le régime seigneurial de la Nouvelle-France décrit le régime semi-féodal en vigueur sur les terres colonisées par la France en Amérique du Nord. Cette organisation sociale a existé en Nouvelle-France de 1627 à 1854.

Sommaire

Organisation territoriale

Sous ce régime, introduit en Nouvelle-France en 1627 par le cardinal Richelieu, le territoire était découpé en longues bandes perpendiculaires aux cours d'eau, les seigneuries. Ces terres étaient concédées (mais pas données) par le roi à des seigneurs, eux-mêmes locataires de terres et responsables de leur mise en valeur (par la construction de routes et moulins pour les habitants, par exemple).

Un seigneurie typique[1]

Subdivision des seigneuries

Le seigneur divisait ses terres entre les colons (ou censitaires, ou même encore habitants), qui pouvaient dès lors les défricher et les exploiter, ainsi qu'y construire des bâtiments. Les habitants devaient au seigneur le paiement de taxes (cens et rentes) ainsi qu'une participation de trois jours par an aux corvées.

Les seigneuries étaient subdivisées en terrains d'importance (et qualité) variable: une zone commune près du rivage, derrière laquelle se trouvait la meilleure terre et très souvent le domaine du seigneur; derrière encore, des terres agricoles données aux habitants.

Devoirs et responsabilités

À la différence du système en vigueur en métropole, le seigneur n'avait pas le pouvoir d'imposer amendes et pénalités, qui restaient du domaine de compétence de l'intendant du roi. De la même manière, autant le système en place en France gardait les marques de pratiques issues du Moyen Âge, autant en Nouvelle-France il s'agissait de favoriser l'établissement de colonies. Les seigneurs n'y étaient pas forcément d'ascendance noble : certains étaient issus de l'armée, d'autres seigneuries appartenaient directement au clergé catholique, quelques-unes même à des groupements d'habitants. En 1663, la moitié des seigneuries de Nouvelle-France étaient gérées par des femmes — celles-ci pouvant hériter des terres de leur époux à son décès.

L'intendant était le représentant du roi ; Jean Talon fut le premier d'entre eux, et imposa aux seigneurs d'habiter sur les terres dont ils avaient la charge, ce qui permettait d'autre part un meilleur contrôle des colons par l'autorité royale.

Après l'occupation militaire britannique

Après la bataille des plaines d'Abraham et la conquête de Québec par les Britanniques pendant la guerre de Sept Ans, ce système devint un obstacle à la colonisation du territoire par les anglophones. L'Acte de Québec de 1774 conserva pourtant le droit civil français, et donc le système seigneurial.

Nombre d'Écossais et Anglais firent l'acquisition de seigneuries pendant le siècle qui suivit, d'autres furent réparties parmi les descendants des premiers seigneurs.

Abolition du régime

Le système fut finalement formellement aboli par l'Assemblée législative de la province du Canada et le gouverneur, Lord Elgin, le 22 juin 1854 (Loi sur l'abolition des droits et devoirs féodaux dans le Bas-Canada, entrée en vigueur le 18 décembre de la même année). Ce mouvement fut accompagné par la mise en place d'une Cour seigneuriale spécialement dédiée au règlement des difficultés économiques et foncières issues de l'abolition (certaines rentes féodales continuèrent à être collectées jusqu'au XXe siècle, avant que les dernières seigneuries ne soient rachetées par le gouvernement provincial québécois).

Régimes comparables

Un système comparable (le patroonat) exista également sur les terres contrôlées par la Compagnie néerlandaise des Indes occidentales dans la vallée de l'Hudson. La Compagnie accordait des droits seigneuriaux aux patroons qui payaient pour le transport de colons en Nouvelle-Néerlande. Ce système ne fut pas non plus aboli par les Anglais lorsqu'ils prirent possession de la colonie néerlandaise, et les descendants de ces premiers patroons (Schuyler, van Rensselaer, Pell, van Cortlandt, Livingston, Morris) continuèrent à dominer la période coloniale. Ils jouèrent même des rôles politiques de première importance dans l'État de New York après la Guerre d'Indépendance.

Importance du régime seigneurial

Selon Dickinson et Young, les historiens qui ont étudié le régime seigneurial en Nouvelle-France ne s'entendent pas sur l'importance à y accorder. Par exemple, Marcel Trudel (1956) le considère comme un « système social d'assistance mutuelle, établi pour faciliter le peuplement. Les travaux de Louise Dechêne ont exploré les implications du régime seigneurial pour les habitants des villes et des campagnes à compter du XVIIe siècle alors que des études plus récentes, comme celles de Greer (1985) et de Dépatie, Lalancette et Dessureault 1987 jugent que cette forme d'organisation de manière beaucoup plus sévère, estimant qu'il s'assignait plutôt d'une source d'inégalité sociale. Ils soulignent aussi « le pouvoir des seigneurs de s'approprier les surplus agricoles[2].

Notes et références

  1. Michael Lee, « Régime seigneurial », L'Encyclopédie canadienne, La Fondation Historica du Canada. Consulté le 2007-10-28
  2. Dickinson et Young 2003, p. 58

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Benoît Grenier, Seigneurs campagnards de la Nouvelle France: présence seigneuriale et sociabilité rurale dans la vallée du Saint-Laurent à l'époque préindustrielle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, 409 p. (ISBN 2753503508) 
  • Colin MacMillan Coates, Les transformations du paysage et de la société au Québec sous le régime seigneurial, Sillery, Septentrion,, 2003, 255 p. [lire en ligne] 
  • Sylvie Dépatie, Mario Lalancette et Christian Dessureault, Contributions à l'étude du régime seigneurial canadien, Ville de LaSalle, Hurtubise HMH, 1987, 290 p. (ISBN 2890457982) 
  • John Alexander Dickinson et Brian Young (trad. Hélène Filion), Brève histoire socio-économique du Québec, Sillery, Septentrion, 2003, 452 p. (ISBN 2894483627) 
  • Louise Dechêne, Habitants et marchands de Montréal au XVIIe siècle, Montréal, Plon, 1974, 588 p. 
  • Marcel Trudel, Les Débuts du régime seigneurial au Canada, Montréal, Fides, 1974, 313 p. .
  • Victor Morin, Seigneurs et censitaires, castes disparues, Montréal, Les Éditions des Dix, 1941, 104 p. 

Lien externe



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