Philippe Viannay

Philippe Viannay

Philippe Viannay, né le 15 août 1917 et décédé le 27 novembre 1986, était un résistant et journaliste français.

Il fut le dirigeant principal de Défense de la France, mouvement clandestin dont le journal éponyme est à l'origine directe de France-Soir. Puis, toujours avec sa compagne, Hélène Viannay, il fonda le Centre de formation des journalistes et l'école de voile Les Glénans.

Sommaire

Biographie

Un étudiant du séminaire à la Résistance

Né le 15 août 1917 à Saint-Jean-de-Bournay dans l’Isère, Philippe Viannay achève ses études secondaires au collège Sainte-Croix-de-Neuilly. Il garde de son éducation catholique un grand attachement à la religion au point d’effectuer un passage au séminaire d’Issy-les-Moulineaux. Catholique très pratiquant, il se situe « aux berges de l’Action française »[1] lorsqu’il s’inscrit en philosophie à la Sorbonne. Mais s’il y obtient son DES, il est happé par la guerre lorsqu’il prépare l’agrégation.

Officier de tirailleurs marocains jusqu’à l’armistice (22 juin 1940), il retourne à la Sorbonne où il lance, en avril 1941, le journal Défense de la France sur le modèle de La Libre Belgique durant la Première Guerre mondiale. S’imposant à la tête du mouvement de résistance du même nom – qui regroupe des réseaux non-communistes –, il affiche dans un premier temps un soutien indéniable au maréchal Pétain, personne qu’il croit capable d’assurer la libération du pays, notamment par l’intervention des États-Unis d'Amérique. En 1942, il se marie avec une étudiante en géographie d’origine russe qui collabore au journal, Hélène Mordkovitch, athée et de gauche.

Optant pour le général de Gaulle après avoir hésité entre lui et le général Giraud[2], il s’impose sous le nom d’Indomnitus comme un des principaux animateurs de la presse clandestine. Son journal tire à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires (450 000 en janvier 1944) et il crée en 1944 avec Claude Bourdet le Mouvement de Libération nationale.

A partir du printemps 1944, Philippe Viannay infléchit son action de la résistance civile vers la lutte armée. Il assume des fonctions dirigeantes à la tête des maquis de la Seine-et-Oise. Des frictions l'opposent à cette occasion au futur colonel Henri Rol-Tanguy, chef des FFI d'Ile-de-France. Blessé de sept balles en juillet 1944, il reçoit la Croix de la Libération (au nom du mouvement) et publie la même année un livre réunissant ses écrits (Nous sommes tous des rebelles). En octobre 1944, il est nommé à l’assemblée consultative, mais il donne sa démission au bout de quelques mois faute d’avoir pu y mener une action politique et sociale.

Parcours politique après la Libération

En 1945, il fonde avec Jacques Richet le Centre de formation internationale avant de le transformer l’année suivante en Centre de formation des journalistes (CFJ). En 1947, il perd le contrôle de France-Soir, qui venait d’une transformation de Défense de la France. Il fonde alors le Centre nautique des Glénans. À partir des années 1950, il soutient le journal de son ami Claude Bourdet, France Observateur, dont il est, comme nombre de ses animateurs, membre de la Nouvelle gauche (1956) puis de l’Union de la gauche socialiste (UGS). Élu au conseil politique de cette dernière dès sa fondation (décembre 1957), il y est reconduit en septembre 1958.

Mais il n’est pas intéressé par le PSU, préférant le Club Jean Moulin où il s’active dans ses dernières années. C'est alors qu’en 1960, Claude Bourdet et Gilles Martinet lui demandent de reprendre en main les finances de France Observateur.

Un rôle-clé au Nouvel Observateur

Remplaçant Maurice Laval comme administrateur début 1961, il « remet un peu d’ordre, régularise les difficultés criantes, met en place une trésorerie digne de ce nom »[3] et ouvre encore plus le journal à la publicité. Ensuite, il obtient d’un de ses amis, René Seydoux, un don de 100 000 francs pour renflouer le journal. Enfin, devant les difficultés financières qui s’accroissent, il crée en 1963 une société des Amis de l’Observateur qui, dotée d’un capital de 150 000 francs (répartis entre souscripteurs), est chargée d’alléger le poids de sa dette et de renforcer les liens avec le lectorat.

Parallèlement à ses fonctions administratives et financières, il devient en 1962 secrétaire de rédaction et écrit principalement des articles de société. Favorable, avec Hector de Galard, Walter Lewino, Olivier Todd ou François Furet, à un affranchissement du journal par rapport au PSU, il soutient l’idée que l’amélioration de son image passe par sa présentation comme « autorité morale » devant offrir à ses lecteurs une « vision du monde, politique morale et poétique »[4]. Ainsi, malgré sa longue amitié avec Claude Bourdet, il n’hésite pas à critiquer son attitude dans la querelle qui l’oppose à Gilles Martinet en 1963.

Après le départ de ce dernier et devant l’aggravation de la situation financière, il se tourne avec bienveillance vers les propositions de nouvelle formule émises par Claude Perdriel et Jean Daniel. Il juge alors que la dépolitisation de L'Express crée un espace au développement d’un Observateur toujours engagé mais transformé dans sa forme. Participant aux négociations avec l’équipe Perdriel-Daniel durant l’été 1964, il est de ceux qui, comme François Furet, poussent Gilles Martinet à accepter les conditions de la nouvelle formule puis qui l’aident à convaincre les autres journalistes.

Il siège alors aux conseils d'administration et de direction du Nouvel Observateur même si la marginalisation rapide du second limite par là même son influence.

Par contre, il joue un rôle non négligeable aux côtés de Claude Perdriel dans sa quête de financement. Il le suit dans sa politique d’emprunts, n’hésitant pas à les cautionner sur des biens personnels comme son appartement. Mais il devient inquiet devant ses méthodes audacieuses de promotion et de gestion. En 1966, il souhaite même une intervention des principaux actionnaires à ce sujet mais le « complot »[5] tourne court. Cela ne l’empêche pas de maintenir des rapports amicaux avec le directeur du journal qui prend parfois en compte ses avis. Il en est ainsi de son soutien au lancement du magazine Le Sauvage en 1973. Mais ses rapports sont plus orageux avec Jean Daniel qui ne cache pas son désir de le tenir à l’écart de la rédaction.

Ne ce serait-ce pour publier des articles, il doit au préalable « faire comprendre à des personnes de sensibilité différente »[6] de la sienne l’intérêt de ses idées. Ainsi, s’il publie quelques papiers sur la voile, la politique et la religion – notamment un document sur « Les secrets du concile » le 4 février 1965 –, il cesse quasiment d’y écrire après 1968. Il tient alors surtout un rôle comme vice-président du CFJ, un accord (officieux) ayant établi que le journal proposerait tous les deux ans un stage aux deux majors de promotion, stages qui seraient susceptibles de déboucher sur une contrat d’embauche.

À côté, il lance les Foyers internationaux d’éducation et échanges avec Michel Debré, Paul Delouvrier et René Seydoux, ce dernier étant un proche comme nombre de patrons de gauche (Seydoux, Fauroux…). Loin de tout carcan idéologique, il soutient la candidature de Chaban-Delmas en 1974, avant d’appeler à voter Mitterrand au second tour. Anticommuniste s’inscrivant dans cette gauche social-démocrate acceptant parfaitement le capitalisme, il ne cache pas ses critiques envers le Programme commun et préfère plutôt s’activer au sein du club deloriste Échange et Progrès. Il participe même à la création du très giscardien Institut Auguste-Comte.

En 1975, il est l'un des initiateurs du Conservatoire du littoral. En 1976, il s’enthousiasme pour le lancement du Matin. Acceptant de siéger à son conseil d'administration, il a aussi une grande facilité de communication avec son rédacteur en chef. Mais, après 1981, il est de plus en plus en désaccord sur « la gestion comme sur une rédaction de plus en plus irresponsable » [7]. En 1984, il donne donc sa démission des conseils d'administration des journaux avant de se retirer, l’année suivante, de ses fonctions de vice-président du CFJ. Il décède le 27 novembre 1986.

Notes

  1. D’après Philippe Tétart, France Observateur : 1950-1964. Histoire d’un courant de pensée intellectuel, IEP. de Paris, thèse d’histoire, 1995, p. 86.
  2. Emmanuel Ratier, Encyclopédie politique française, Paris, Faits & Documents, 1992, p. 729
  3. Entretien de Jean Daniel avec Cathy Pas, le 27 mars 1990, in Cathy Pas, De France Observateur au Nouvel Observateur : changement de formule ou véritable naissance en 1964 ?, Lille III, maîtrise d’histoire, 1990, p. 50.
  4. Propos de Viannay rapportés dans une lettre de Galard du 4 janvier 1963 in Philippe Tétart, op. cit., p. 916.
  5. Philippe Viannay, Du bon usage de la France, Paris, Ramsay, 1988, p. 351.
  6. Philippe Viannay, Du bon usage de la France, Paris, Ramsay, 1988, p. 363.
  7. Philippe Viannay, Du bon usage de la France, Paris, Ramsay, 1988, p. 364.

Voir aussi

Bibliographie

  • Philippe Viannay, Du bon usage de la France : Résistance, Journalisme, Glénans (pour mémoire), Paris, Ramsay, 1988, 24cm, 441 p. (ISBN 2859566899) 
  • Olivier Wieviorka, Une certaine idée de la Résistance. Le mouvement Défense de la France, Gallimard, 1995 

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Philippe Viannay de Wikipédia en français (auteurs)

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