Operation Catapult

Operation Catapult

Opération Catapult

Carte montrant les différents lieux de la présence maritime française en Afrique

L'opération Catapult a été déclenchée le 2 juillet 1940[1],[2], par le Premier ministre britannique Winston Churchill. Elle visait à assurer aux Britanniques que la flotte de haute mer française ne tombe pas aux mains des Allemands ou des Italiens. Son objectif était donc de capturer ou de détruire les navires français où qu’ils soient stationnés.

Sommaire

Les raisons

Pour comprendre le pourquoi de cette opération, il faut se remémorer le mois de juin 1940 et la bataille de France. Celui-ci est marqué par trois évènements majeurs : Dunkerque, la retraite de l'Armée française et l'armistice. Tout au long de la déroute, la France va tenter de rassurer les Britanniques quant à l'avenir de sa marine. Le 11 juin à Briare, Darlan tentera de rassurer Churchill, en lui promettant solennellement qu'il ne permettra jamais aux Allemands de s'emparer de la flotte française. Cependant cinq jours plus tard, deux télégrammes du cabinet britannique adressés au président du Conseil Paul Reynaud, demandent à la France d'envoyer ses navires de guerre dans les ports britanniques, en attendant les négociations concernant l'armistice. Ignorant ainsi les assurances fournies par Darlan et remettant en cause l'honneur français. Paul Reynaud s'en offusqua, ce que Churchill comprit fort bien, puisqu'il ordonna de retirer les télégrammes dont le texte lui semblait gênant. Afin de rassurer les Britanniques, Darlan adresse aussitôt à tous les commandants des navires de guerre français un ordre où il précise :

  • qu'aucun bâtiment français ne doit tomber aux mains des Allemands ou des Italiens si ceux-ci venaient à entrer en guerre ;
  • si ceux-ci tentent de s'en emparer, les navires devront rallier les ports du Royaume-Uni ou des Antilles ou se saborder.

Le 18 juin, à Bordeaux, Pétain et Darlan tombent d'accord sur le fait de refuser l'armistice si les Allemands décidaient à réclamer la flotte française. De plus, la France, pour montrer sa bonne foi, envoient, dans les ports d'outre-mer, Mers el-Kébir, Casablanca et Dakar, quatre-vingts bâtiments dont le Richelieu, le Jean Bart qui n'est même pas terminé, le Strasbourg, le Dunkerque. Tandis qu'à Cherbourg, Brest, Lorient, Saint-Nazaire, tous les ports de guerre de la façade atlantique, une centaine de bâtiments trop vieux ou incapables de prendre la mer se sabordent.

Enfin les 21 et 22 juin, l'armistice est signé dans la clairière de Rethondes. Suite à la non-acceptation de la France d'envoyer ses navires au Royaume-Uni, en cas d'armistice, les relations entre Français et Britanniques se dégradent comme en témoigne le départ de l'ambassadeur britannique dans la nuit du 22 au 23 juin.

À la lecture des conditions d'armistice, les Britanniques comprennent que la flotte française sera sous le contrôle des Allemands, puisque la plupart des ports d'attache se trouvait en zone occupée. Pourtant, contre toute attente, Hitler ne réclame pas la flotte française et demande qu'elle soit seulement immobilisée et démilitarisée dans ses ports. De plus, Darlan garantit aux Britanniques que la flotte se sabordera en cas de changement d'attitude de la part des nazis. Cependant Darlan pense que les Britanniques vont subir le même sort que la France et interdit aux navires français de rejoindre une force étrangère, qu'il s'agisse de l'Allemagne ou du Royaume-Uni. C'est ainsi qu'avec l'amiral Pound, Churchill organise l'opération Catapult. L'ordre est donné de se saisir de la flotte française ou de la neutraliser dans tous les ports de guerre et en particulier à Mers el-Kébir. Ceci dit, au Royaume-Uni, celle-ci ne suscite pas l'adhésion unanime des chefs d'escadre.

Les différentes phases

Dans les ports britanniques

Le 2 juillet 1940, l'opération Catapult est lancée. Dans les ports britanniques de Plymouth et Portsmouth, les officiers britanniques ont tendu un guet-apens aux Français qu'ils côtoient, afin de s'emparer plus facilement de leurs navires de guerre. Dans le but de les éloigner de leurs navires, ils les ont invités à boire du porto sur un bâtiment britannique. Et le lendemain, à 3 h 45 du matin, quelques minutes avant que l'amiral Somerville n'attaque les bâtiments mouillés à Mers el-Kébir, les Britanniques envahissent les navires français et procèdent à leur désarmement. Au total, huit torpilleurs, quatre sous-marins, dix avisos et plus d'une centaine de bâtiments légers sont aux mains des Britanniques.

La bataille de Mers el-Kébir

Le 3 juillet, la flotte britannique de l'amiral Somerville se présente devant Mers el-Kébir, avec pour mission d'obtenir que la flotte de l'amiral Gensoul la suive au Royaume-Uni ou soit détruite.

Après plusieurs heures de négociation, l'ultimatum expire. Vers 17 h, les navires britanniques ouvrent le feu sur les bâtiments français qui ne peuvent riposter. Aussitôt plusieurs navires sont touchés dont le cuirassé Bretagne qui coulera en faisant près d'un milliers de morts. Vingt minutes après le début des hostilités, l'amiral Gensoul demandera un cessez-le-feu. Seul le Strasbourg parvient à s'échapper accompagné de cinq contre-torpilleurs.

Trois jours plus tard, le 6 juillet, des bombardiers torpilleurs Swordfish du porte-avions Ark Royal, reviennent achever les navires restants.

Article détaillé : Bataille de Mers el-Kébir.

L'accord d'Alexandrie

Les choses se passent d'une manière plus élégante à Alexandrie en Égypte. Le 4 juillet, l'amiral britannique Cunningham vint trouver l'amiral français Godfroy commandant la force X pour lui signifier qu'il a reçu l'ordre d'arraisonner la flotte française stationnée à Alexandrie. Il prend sur lui de proposer un gentlemen's agreement afin d'éviter que les deux flottes aient à s'affronter. Selon cet accord, les Français doivent débarquer le mazout, les obturateurs d'artillerie, les pointes percutantes des torpilles et une partie des équipages. Godfroy accepte aussitôt, sauvant ainsi un cuirassé, quatre croiseurs, trois torpilleurs, un sous-marin et surtout épargnant la vie de plusieurs centaines de marins.

L'attaque de Dakar

Le 8 juillet, Dakar est le théâtre d’un nouveau raid britannique. Il est vrai que se trouve là le Richelieu, le plus moderne des croiseurs de la flotte jaugeant 35 000 tonnes. Il est l'orgueil de la marine française. Il se trouve au port quand il est attaqué par des avions torpilleurs Swordfish du porte-avions britannique Hermes. Lors de cette attaque le Richelieu subit des dommages limités, mais reste en état de prendre la mer, bien qu'une torpille ait endommagé l'une de ses lignes d'arbre et ait déformé la coque. En outre, trois de ses huit pièces de 380 mm ont été détruites par l'explosion prématurée des obus lors de ce combat.

Le bilan

Le bilan de l'opération Catapult est accablant :

  • côté navires : trois navires de batailles coulés à Mers el-Kébir, le Richelieu retenu à Dakar, les bâtiments de Portsmouth, de Plymouth et d'Alexandrie mis hors d'état de nuire ;
  • côté humain : un millier de morts pour le Bretagne, plus de 300 du Dunkerque et des dizaines sur d'autres navires.

Les marins britanniques ont tué en une semaine plus de marins français que la flotte allemande pendant toute la Seconde Guerre mondiale, soit plus de 1 300 morts.

Les conséquences

Cette opération eut pour conséquence, de réanimer, en France, le sentiment anti-britannique et on prétend qu'elle ralentit considérablement le faible flux de volontaires qui venaient se joindre à la France libre, après l'appel du général de Gaulle. Cela aurait rendu aussi plus difficile le ralliement des parties africaines de l'Empire colonial français, comme le montrerait le résultat de l'opération Menace, le 23 septembre 1940. Pourtant toute l'Afrique-Équatoriale française à part le Gabon, se rallia à la France libre après cette date et les statistiques montrent que les engagements ne commenceront à décroître qu'en septembre 1940.

Darlan hurla qu'il avait été trahi par ses frères d'armes et refusa longtemps de serrer la main d'un officier de la marine britannique. Paul Baudouin, le ministre des Affaires étrangères eut une réaction moins personnelle mais rompit les relations diplomatiques avec le Royaume-Uni. Quant à Laval, l'attaque lui permit de justifier la politique de collaboration, lors de la rencontre de Montoire.

De fait, et à part les Forces navales françaises libres, la Marine française ne prit pas part au combat contre les forces de l'Axe avant 1943. Au contraire, elle affronta les alliés à plusieurs reprises, notamment en Syrie et lors du débarquement en Afrique du nord.

Notes et références

  1. Robert Aron, Grands dossiers de l'histoire contemporaine, éd. Librairie Académique Perrin, Paris, 1962-1964 ; rééd. CAL, Paris, chap. « Le drame de Mers el-kébir », p. 164
  2. Winston Churchill, The Second World War, Plon, 1948-1954 ; rééd. La Deuxième Guerre mondiale, Le Cercle du Bibliophile, 12 vol. , 1965-1966, Tome troisième, « L'heure tragique – la chute de le France, 1940 », chap. XI : « L'amiral Darlan et la flotte française, Mers-el-Kébir », p. 249

Bibliographie

  • Robert Aron, Grands dossiers de l'histoire contemporaine, éd. Librairie Académique Perrin, Paris, 1962-1964 ; rééd. CAL, Paris, chap. « Le drame de Mers el-kébir », p. 157-172
  • Winston Churchill, The Second World War, Plon, 1948-1954 ; rééd. La Deuxième Guerre mondiale, Le Cercle du Bibliophile, 12 vol. , 1965-1966, Tome troisième, « L'heure tragique – la chute de le France, 1940 », chap. XI : « L'amiral Darlan et la flotte française, Mers-el-Kébir », p. 226-253

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