Les Rois maudits

Les Rois maudits
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Les Rois maudits sont une suite romanesque historique de Maurice Druon, écrite entre 1955 et 1977, basée sur la malédiction qu'aurait prononcée sur le bûcher le grand-maître du Temple Jacques de Molay, à l'encontre du roi de France Philippe le Bel, du pape Clément V, de Guillaume de Nogaret, et de leurs héritiers et successeurs pendant treize générations.

Sommaire

Objet de la suite romanesque

Les romans racontent la conclusion de l'affaire du Temple, le destin de Philippe le Bel, de ses successeurs Louis X le Hutin, Philippe V le Long, Charles IV le Bel et les premiers Valois, avec leur entourage de vassaux, de conseillers et de financiers.

Druon bâtit sa trame sur l'histoire réelle, sur les légendes promues réalités historiques et sur les personnalités de l'époque, de 1314 jusqu'aux débuts de la guerre de Cent Ans. Il raconte en filigrane l'épopée de Robert d'Artois qui cherche à récupérer le comté, et la romance de Marie de Cressay avec Guccio Baglioni.

Les sept tomes de la série sont publiés entre 1955 et 1977 par Del Duca :

  1. Le Roi de fer (1955)
  2. La Reine étranglée (1955)
  3. Les Poisons de la Couronne (1956)
  4. La Loi des mâles (1957)
  5. La Louve de France (1959)
  6. Le Lis et le Lion (1960)
  7. Quand un roi perd la France (1977)

Les six premiers volumes font l'objet d'une nouvelle édition, corrigée sur la forme, entre 1965 et 1966. Les sept volumes des Rois maudits ont été traduits en – au moins – neuf langues[1].

Après son succès de librairie, Maurice Druon, devenu académicien en 1966, participe à une première adaptation télévisée, réalisée avant la parution du septième volume et diffusée en 1972 dans une réalisation signée Marcel Jullian et Claude Barma. Une nouvelle adaptation, réalisée par Josée Dayan et scénarisée par Anne-Marie Catois, est diffusée en France sur France 2 en 2005 et au Canada sur Radio-Canada en 2006.

Une version audio, lue par François Berland et Eric Herson-Macarel, est réalisée en 2003[2].

Prétendants au trône de France

Philippe III de France Jeanne Ire de Navarre Philippe IV de France Charles de Valois Louis de France (1276-1319) Louis X de France Philippe V de France Isabelle de France (1292-1358) Édouard II d'Angleterre Charles IV de France Philippe VI de France Jean Ier de France Jeanne II de Navarre Philippe III de Navarre Édouard III d'Angleterre Jean II de France Charles V de FranceGénéalogie de la guerre de Cent Ans
À propos de cette image

La trame de l'œuvre de Maurice Druon

Le Roi de fer (année 1314)

Contexte historique antérieur au début de l'histoire romanesque

Au début du XIVe siècle, le roi Philippe le Bel, réputé glacial et majestueux, règne d’une main de fer sur la France. Sous son règne, « la France est grande et les Français malheureux ». Philippe le Bel a trois fils et une fille :

Ainsi tout semble aller pour le mieux, puisque la descendance est apparemment largement assurée, et que de plus un rapprochement entre la France et l’Angleterre est annoncé grâce au mariage d’Isabelle.

Toutefois, les caisses de l’État sont à sec. Or, à cette époque les Templiers sont très riches et prennent chaque jour un peu plus d’importance. Enguerrand de Marigny, proche conseiller du roi et trésorier royal, indique donc à Philippe le Bel cette source inespérée de revenus que constitue le trésor des Templiers.

Au matin du vendredi 13 octobre 1307, Guillaume de Nogaret, garde des Sceaux, accompagné d’hommes d’armes, pénètre dans l'enceinte du Temple de Paris où réside le grand-maître de l'ordre Jacques de Molay. À la vue de l'ordonnance royale qui justifie cette rafle, les Templiers se laissent emmener sans aucune résistance. À Paris, il sera fait 138 prisonniers, en plus du maître de l'ordre. Un scénario identique se déroule au même moment dans toute la France. La plupart des Templiers présents dans les commanderies sont arrêtés. Ils n'ont fait preuve d'aucune résistance. Tous leurs biens sont inventoriés et confiés à la garde du Trésor royal.

Un gigantesque procès commence, qui durera sept ans, au cours duquel les pires infamies seront perpétrées. Le 12 décembre 1313, les quatre plus hauts dignitaires du Temple parmi lesquels Jacques de Molay, grand maître, sont condamnés à la prison à vie. Le lendemain, le conseil royal condamne Molay et Geoffroy de Charnay à être brûlés sur l’île de la Cité, certains ayant renié leurs aveux (arrachés sous la torture), et donc considérés comme relaps.

Parallèlement à cela, un conflit agite l’Artois. En effet, un fait inhabituel est survenu dans la famille du comte : Philippe d’Artois est mort du vivant de son père, le comte Robert II. Quand ce dernier meurt à son tour, la question de la succession se pose : est-ce le fils de Philippe, Robert III, ou sa tante Mahaut, fille de Robert II, qui doit lui succéder ? L’affaire est portée devant les tribunaux et le roi Philippe le Bel donne raison à Mahaut, mais Robert ne lâche pas prise. Druon le décrit comme un grand géant vorace et obstiné, il lui est donc difficile de s’accorder avec sa tante, possédant elle aussi un fort caractère. Mahaut a par ailleurs marié ses deux filles aux deux fils cadets du roi : Jeanne avec Philippe, Blanche avec Charles, la première apportant à son mari en dot le comté de Bourgogne, l’actuelle Franche-Comté. Sa nièce Marguerite est mariée au fils aîné de Philippe le Bel, Louis. Robert accuse par conséquent le roi de partialité.

De fait, le conseil royal est divisé en deux courants : d’une part, un « clan » réuni autour de Charles de Valois, frère du roi, moyennement intelligent, démesurément ambitieux et passablement avide, parent de quasiment tous les souverains européens mais lui-même sans couronne ; il soutient Robert d’Artois, son futur beau-fils, et influence grandement l’héritier Louis le Hutin, homme fluet et maladif ; d’autre part, un parti réuni autour d’Enguerrand de Marigny et de Philippe de Poitiers, gendre de Mahaut et par conséquent son principal soutien. Enfin, à l’exemple d’Hugues de Bouville, « brave » chancelier, et de Charles, dernier fils du roi, certains font aveuglément confiance à Philippe le Bel. Cependant, ces querelles ne sont pas seulement des batailles de personnes. En effet, le clivage se fait aussi sur le terrain des idées : le parti de Valois est partisan d’un système politique traditionnel et féodal, où les nobles pourraient par exemple battre leur propre monnaie, formant donc le clan des barons, tandis que Marigny et Poitiers sont favorables à des réformes importantes et à un système étatique plus fort, formant ainsi le clan de la haute administration.

Enfin, on peut noter que, selon Druon, Valois et Poitiers furent hostiles à l’exécution des deux hauts dignitaires du Temple.

L'intrigue du livre

C’est dans ce contexte que Jacques de Molay et de Charnay sont mis au bûcher en 1314. Selon Druon, de Molay aurait dit au moment même où le feu l’atteignait : « Roi Philippe, chevalier Guillaume, pape Clément, avant un an je vous appelle à comparaître devant le tribunal de Dieu pour y recevoir votre juste châtiment ! Maudits ! Maudits ! Vous serez tous maudits jusqu’à la treizième génération de votre race ! ». Nogaret est mort, selon diverses sources, en 1313. Sur ce point précis, l’œuvre s'écarte donc de l'Histoire. De plus, Druon attribue la mort à Mahaut par la voie de sa fidèle dame de compagnie, Béatrice d’Hirson, celle-ci ayant voulu se venger à la suite d’un différend avec le garde des sceaux.

En Artois, des révoltes éclatent contre Mahaut, les barons acquis à Robert s’insurgent.

En avril 1314, éclate l’affaire de la tour de Nesle. En effet, Marguerite de Bourgogne, épouse de Louis, et Blanche, femme de Charles, sont dénoncées par Isabelle, fille de Philippe le Bel et reine d’Angleterre. Elles auraient trompé leur mari sans honte avec deux frères : Philippe et Gauthier d'Aunay, tous deux chevaliers de l’hôtel royal. Les deux amants sont jugés et condamnés pour crime de lèse-majesté, et sont exécutés sur-le-champ en place publique à Pontoise (qui depuis porte le nom de « place du Grand Martroy » = martyr en vieux français) : dépecés vivants, leur sexe tranché et jeté aux chiens, ils sont finalement décapités, leurs corps traînés puis pendus par les aisselles au gibet. Les implications politiques sont si graves que le châtiment se doit d’être exemplaire. Marguerite de Bourgogne est condamnée à être tondue et conduite dans un chariot couvert de draps noirs à Château-Gaillard. Blanche est aussi tondue mais bénéficie d’un « traitement de faveur » : elle est emprisonnée pendant sept ans, puis obtient l’autorisation de prendre l’habit de religieuse. Femme du cadet, et non du futur roi de France (du moins, c’est ce que l’on croit, puisque son époux deviendra roi en 1322), Blanche a donc un traitement moins cruel que sa cousine. Quant à la troisième, Jeanne, femme du futur Philippe V, elle est enfermée à Dourdan pour avoir gardé ce secret. Soutenue par sa mère, Mahaut d’Artois, elle se réconciliera peu après avec Philippe le Long.

Maurice Druon, et plus généralement les historiens, imputent la dénonciation des épouses infidèles à Robert d’Artois, qui a pour motif de nuire à Mahaut, et à Isabelle, fille du roi Philippe. Druon va même jusqu’à décrire une rencontre entre les deux personnages. Le 20 avril 1314, la « malédiction » est en marche puisque Clément V meurt.

À côté de ces péripéties historiques, Druon raconte la vie de Guccio Baglioni, neveu de Tolomei, capitaine général des banquiers lombards. Guccio intervient souvent dans l’histoire, servant de messager entre les différents protagonistes. Au cours de ses voyages, il tombe amoureux de Marie de Cressay, la fille de châtelains provinciaux. Cette histoire d'amour aura beaucoup d’importance par la suite.

Le 29 novembre 1314, Philippe le Bel, pourtant réputé robuste, trépasse à l’âge de 46 ans d’une congestion cérébrale.

La Reine étranglée (1314-1315)

Aussitôt, les deux partis du Conseil royal, qui ne s’affrontaient qu’insidieusement jusqu’à présent, se déchirent et se combattent violemment pour la conquête du pouvoir. Il aurait fallu un roi fort pour calmer ce conflit, or le nouveau souverain « n’arrivait que précédé d’une réputation de mari trompé et du piteux surnom de Hutin, c’est-à-dire le Querelleur », manipulable aisément par son oncle Valois. Ce dernier veut donner à son neveu une nouvelle épouse, Clémence de Hongrie, envoyant le « brave » Bouville négocier le mariage à Naples, accompagné de Guccio. Mais Louis est encore marié et un divorce, ardemment souhaité, est pour l’instant impossible car il n’y a plus de pape. Pour remédier à cela, la France avance la candidature de Jacques Duèze, vieillard astrologue étonnamment vif, mais dans l’ombre, Enguerrand de Marigny s’active pour retarder une élection qui verrait le triomphe de son pire ennemi, Charles de Valois.

Ce dernier, justement, souffle une tout autre solution à son neveu : s’il ne peut pas divorcer, alors c’est sa femme, Marguerite, emprisonnée après l’affaire de la tour de Nesle, qui doit mourir. Espérant s’attirer les faveurs du roi et ainsi reconquérir l’Artois, Robert d’Artois se charge de cette mission. Marguerite est retrouvée morte étranglée fin avril 1315.

En France, la guerre entre les deux partis redouble d’intensité. Valois exige du roi la tête de Marigny. Pour obtenir gain de cause, Robert d’Artois et Valois inventent de fausses preuves, comme le témoignage du frère de Marigny qui l’accuse de vol, en échange de l’effacement de dettes chez Tolomei, le banquier lombard. En tout, 41 articles d’accusation sont portés contre lui. Des enquêteurs sont dépêchés, mais les comptes de Marigny sont nets. Louis le Hutin songe donc à une sanction clémente, comme un exil à Chypre. Valois lance alors une accusation de sorcellerie contre le puissant ministre, qui s’avère bien plus efficace. Marigny subit un procès expéditif, au cours duquel on ne l’autorise pas à prendre la parole pour se défendre. Méditant dans sa prison sur la grandeur et la raison d’être des choses, Enguerrand conclut qu’il a toujours bien servi la France et son roi, Philippe le Bel. Le 30 avril 1315, il est pendu au gibet de Montfaucon ; Charles de Valois et le parti féodal triomphent.

Les Poisons de la Couronne (1315-1316)

Bouville et Guccio partent de Naples avec Clémence de Hongrie ; durant la traversée, une tempête manque de couler le navire. Guccio, en débarquant, se blesse grièvement et ne pourra pas assister au mariage royal.

Louis le Hutin, quant à lui, prouve encore une fois sa tragique incompétence en embourbant l’armée française en Flandre lors de « l’ost boueux » près de Bondues.

Le mariage a lieu le 13 août 1315, quelques jours avant le couronnement de Louis.

En Artois, Robert, triomphant, sème la discorde et pousse les barons à la rébellion. Mahaut, elle, reprend l’ascendant sur son gendre Philippe de Poitiers. Ce dernier obtient de Louis, plus enclin à l’indulgence grâce à son mariage prochain avec Clémence, la libération de sa femme emprisonnée à Dourdan, reformant ainsi le second couple du royaume. Mahaut avance ainsi ses pions : si le roi Louis venait à mourir, son gendre Philippe deviendrait roi… Mais plusieurs obstacles viennent contrecarrer ses plans ; le roi, inquiet de ne plus recevoir l’argent de l’Artois à cause de la guerre civile, rend un jugement favorable à Robert. Mahaut ne doit plus quitter Paris et Louis place l’Artois sous l’autorité royale. De plus, la reine est enceinte ; or un héritier viendrait remettre en cause les prétentions au trône de son gendre. Il faut donc agir vite.

Béatrice d’Hirson, fidèle dame de compagnie de Mahaut, prépare une dragée empoisonnée que Mahaut glisse dans le drageoir du roi Louis. Ce dernier tombe malade et agonise.

Marie de Cressay avoue à ses frères son amour pour Guccio. Celui-ci, neveu de Tolomei et amant de Marie, vient à Neauphle. Les deux tourtereaux sont mariés en pleine nuit par un prêtre.

Lorsque les frères de Marie et la mère découvrent qu'elle est enceinte, leur colère est grande. Guccio est pris à partie et doit s'enfuir ; il arrive affolé chez son oncle, qui lui suggère de se cacher. Pendant ce temps, à Paris, Valois et Robert accusent Mahaut de la maladie du roi. Ce dernier meurt le 5 juin 1316, nouvelle victime de la « malédiction » (en fait empoisonné par Mahaut). Lorsque les frères de Marie arrivent au domicile de Toloméi, celui-ci les désarçonne en évoquant la mort du roi.

À la mort de Louis X le Hutin, une course s’engage pour la régence. Le premier concurrent, Charles de Valois, aidé de Robert, est décidé à prendre le pouvoir. Il tente d’empêcher que la nouvelle arrive jusqu’à son rival, Philippe de Poitiers, qui est à Lyon, où se tient le conclave. Hugues de Bouville, le chambellan, envoie son ami Guccio annoncer la nouvelle au comte.

La Loi des mâles (juin 1316 - janvier 1317)

L'intrigue

Philippe de Poitiers se proclame régent dès que la nouvelle de la mort de son frère lui parvient. Pour hâter l’élection d'un pape, il organise une messe et invite tous les cardinaux et leur suite dans l’église des Jacobins puis fait murer l’édifice : les hauts ecclésiastiques n’en sortiront que lorsqu’ils auront élu un pape. Guccio, qui accompagne Jacques Duèze, fait partie du conclave en qualité de secrétaire du cardinal.

De retour à Paris, Philippe arrache la régence à Valois. Pendant ce temps, dans l’église des Jacobins, les cardinaux sont furieux. Leurs perspectives sont limitées, puisque les prélats ne s’entendent pas. Pour se faire élire, Jacques Duèze, favori de la France, fait courir le bruit qu’il est mourant. En réalité, le cardinal se porte comme un charme mais, chez les autres hauts dignitaires du clergé, la rumeur prend. Les prélats font alors le raisonnement suivant : « Élisons-le, sortons ainsi de cet endroit et, puisqu’il ne va pas tarder à mourir, on pourra plus tard voter sérieusement. » C’est ainsi que Duèze est élu le 7 août 1316 ; celui qu’on disait à l’agonie gouvernera l’Église pendant 18 ans.

Mahaut exulte : son gendre est régent, et si l’enfant de la reine n’est pas un garçon, alors sa fille Jeanne sera reine.

Quant à Guccio, il voit une solution à ses problèmes, puisque son ami Bouville obtient un compromis : Marie, la fiancée de Guccio, est placée dans un couvent, ce qui permet d’apaiser ses frères.

La jeune fille accouche en même temps que la reine. Les deux enfants sont des garçons et les deux sont appelés Jean. Bouville propose alors à Marie de devenir la nourrice de l’enfant royal.

Mahaut, elle, est furieuse, car sa fille ne pourra jamais monter sur le trône. Elle décide donc d’assassiner l’enfant roi au cours de la cérémonie de présentation du nouveau-né aux vassaux. Bouville, qui est en charge de la sécurité de l’enfant, est au courant de ces menaces. Il prend une décision lourde de conséquences : il va intervertir l’enfant de Marie avec le jeune roi. Le 19 novembre 1316, Mahaut porte l’enfant à son baptême, essuie ses lèvres avec un mouchoir empoisonné, le faisant rapidement trépasser. Tout le monde pense que c’est le roi qui vient de mourir alors que c'est celui de Marie. Bouville, paniqué, ne sait que faire : tout avouer ou continuer la supercherie ? Le chambellan, surpris par les événements et empêché par sa femme d'agir, finit par faire jurer à Marie de ne rien dire et l’envoie dans sa famille élever celui qui aurait dû monter sur le trône de France. De plus, Marie est obligée d’oublier Guccio, qui n’est pas au courant de l’affaire, faute de quoi le jeune homme sera assassiné.

À Paris, deux personnes s’arrachent la couronne. Il y a tout d’abord Philippe de Poitiers qui, apprenant horrifié le meurtre du roi, est « tenu » par Mahaut et qui applique les volontés de celle-ci en réglant le conflit en Artois par l’arrestation et l’emprisonnement de Robert.

Ensuite, la duchesse Agnès de Bourgogne, premier pair de France, revendique les droits de sa nièce : celle-ci est la fille de Marguerite « l’assassinée », et officiellement du défunt roi Louis le Hutin ; elle peut donc prétendre à la couronne de France. Mais est-elle réellement la fille de Louis, et pas celle de l’amant de sa mère ? Pour contrer cette prétention, Philippe ressort un vieux texte appelé « loi salique », qui interdirait à une femme de monter sur le trône de France. Evinçant le duc de Bourgogne et ayant acheté à prix d'or son rival Charles de Valois en lui promettant une somme de 100 000 livres[3] ,Philippe de Poitiers est par conséquent sacré roi le 6 janvier 1317.

L'histoire finit sur le sacre de Philippe[4] .

Postérieurement à l'intrigue

De tous les fils de Philippe le Bel, Philippe de Poitiers, désormais Philippe V le Long, est celui qui a sans doute le plus hérité du talent de son père à gouverner. Grand stratège et excellent administrateur, il parvint à rétablir pour quelque temps une situation stable, réprimant la révolte des Pastoureaux et tentant d’établir une monnaie unique dans le royaume.

Malheureusement, le sort s’acharne contre les héritiers de Philippe le Bel. Philippe V meurt de dysenterie en 1322. Ironie du sort, ses filles ne peuvent régner à cause de la loi salique, invoquée par leur père autrefois. C’est donc le dernier fils de Philippe le Bel, Charles IV, qui monte sur le trône.

La Louve de France (1324 - 1327)

Avant le début de l'intrigue

Isabelle, fille de Philippe IV le Bel et reine d’Angleterre, vit une situation difficile. Son mari, Édouard, est homosexuel, et le favori de celui-ci, Hugh le Despenser, dilapide le trésor royal. En 1316, les barons se sont révoltés contre Édouard, mais la rébellion a échoué et le chef de la Fronde, Roger Mortimer, a été arrêté et emprisonné à la tour de Londres.

L'intrigue

En 1324, avec le soutien financier de la reine, Mortimer réussit à s’évader et gagne la France, terre de ses ancêtres (il est descendant d’un des compagnons de Guillaume le Conquérant). Robert d’Artois, qui sort lui aussi de prison à la faveur d’un changement de roi, l’y accueille.

Édouard est duc d’Aquitaine et à ce titre vassal direct du roi de France. Il doit donc accepter de se rendre en France pour prêter hommage à son beau-frère Charles IV, le nouveau roi de France. Les deux souverains ne sont pas en bons termes et Édouard n’accepte pas de se soumettre aux volontés de Charles. Une guerre s’annonce entre les deux royaumes. Le pape intervient et convainc le roi d’Angleterre de se plier aux demandes du roi de France. Isabelle se rend en France pour planifier la réconciliation entre les deux hommes et la cérémonie de l’hommage.

Une fois rendue à la cour de France, Isabelle n’est pas pressée de retourner vers son mari homosexuel et les intrigues de Despenser, qui la déteste. Isabelle et Mortimer se rencontrent et se plaisent immédiatement. Ils deviennent rapidement amants et fomentent un complot contre Édouard.

Charles IV se refuse à aider sa sœur, se souvenant que c’est elle qui a lancé le scandale de la tour de Nesle pour lequel sa première épouse a fini en prison. Il voudrait même la renvoyer auprès de son mari.

Avec l’aide de Robert d’Artois, Isabelle et Mortimer gagnent la Flandre où ils lèvent une armée de 1 000 chevaliers. En septembre 1326, ils débarquent en Angleterre. Londres se soulève en leur faveur, Despenser est exécuté, le roi s’enfuit. Édouard est fait prisonnier au Pays de Galles et abdique, laissant son fils monter sur le trône sous le nom d’Édouard III.

La reine gouverne jusqu’à la majorité d’Édouard III, mais c’est en fait Mortimer, avide, ambitieux et cruel, qui tient les commandes du royaume. Druon lui attribue l'assassinat, dans des conditions atroces, de l’ancien roi Édouard II[5].

Guccio revient chercher celui qu’il croit être son fils (mais qui est en réalité le fils de Louis le Hutin) pour le ramener en Italie. Marie, enfermée dans son terrible secret, voit l’amour de sa vie partir avec son fils adoptif sans révéler son secret. Elle ne les reverra jamais…

Le Lis et le Lion (1328-1342 et 1354-61)

Mortimer prend plusieurs décisions malheureuses. Les comtes du royaume, notamment Lancastre et Kent (demi-frère d'Édouard II), excédés par l’ambition, la morgue et la convoitise de Mortimer, organisent un complot pour le renverser. Victime d'une machination organisée par Mortimer, Kent est démasqué et rapidement exécuté.

Isabelle tombe enceinte de Mortimer. Craignant que ce dernier ne le fasse tuer pour devenir régent du royaume ou se fasse proclamer roi à sa place, Édouard III organise un coup d'Etat : malgré les supplications d’Isabelle, Mortimer est arrêté dans la chambre conjugale, condamné sans procès et immédiatement pendu à Tyburn le 29 novembre 1330.

Édouard III exile sa mère et gouverne à présent seul.

En France, Charles IV le Bel, le dernier fils de Philippe IV le Bel, meurt de maladie. Avec lui s’éteint la lignée directe des descendants d’Hugues Capet. Se pose alors le problème de la succession au royaume de France : qui doit monter sur le trône, Édouard III d’Angleterre (petit-fils de Philippe IV le Bel par sa mère Isabelle) ou Philippe de Valois (neveu de Philippe IV le Bel par son père Charles de Valois, décédé trois ans plus tôt, et plus proche parent « mâle » du roi décédé) ?

Les Français ne sont naturellement pas enthousiastes à l’idée d’avoir un Anglais comme roi. Robert d’Artois n’a donc pas trop de difficulté à faire accepter Philippe de Valois comme régent puis comme roi. Le dimanche 29 mai 1328, Philippe de Valois est sacré à Reims ; il est rapidement surnommé « le roi trouvé ».

Robert d’Artois est très proche du nouveau souverain, puisqu’il est son beau-frère et qu’il a joué un rôle important dans sa confirmation comme régent puis comme roi. Il devient rapidement son conseiller principal, se fait élever au rang de pair de France et, le roi n’étant pas particulièrement intelligent, n’a aucune difficulté à gouverner à sa place.

Cependant, Robert n’a toujours pas récupéré l’Artois, qui est aux mains de Mahaut d’Artois, sa tante. Il prétend posséder des documents qui appuient ses revendications mais il tarde à les produire. Mahaut sait très bien que de tels documents ne peuvent être que faux, car c’est elle qui les a détruits.

Robert d’Artois reçoit le soutien d’une alliée inattendue en la personne de Béatrice d’Hirson, dame de compagnie de Mahaut, empoisonneuse à ses heures et qui, humiliée à plusieurs reprises par sa maîtresse, a décidé de se venger. Comme Robert ne veut pas présenter les faux documents qu’il a préparés en remplacement des documents détruits par Mahaut avant la mort de celle-ci, Béatrice, à la demande de Robert, empoisonne sa maîtresse puis sa fille Jeanne pour faire avancer la cause de Robert. Par la suite, Béatrice, qui croyait avoir séduit et manipulé Robert, s’aperçoit que c’est lui qui l’a séduite et manipulée. Alors qu’elle se croyait sa maîtresse et peut-être sa future femme, Robert l’abandonne. De dépit, elle dénonce ses turpitudes ; il la fait alors assassiner.

Cependant, les faux documents de Robert ne résistent pas à l’analyse et une enquête ordonnée par le roi prouve qu'il a agi en faussaire. Le roi Philippe VI, lors d'un tournoi de chevalerie, lui propose de renoncer à ses prétentions concernant l'Artois mais, buté, Robert refuse.

Robert perd son procès pour l’obtention du comté d’Artois. Le roi, qui ne veut pas être associé à un parjure et faussaire, l’abandonne, et Robert est dépossédé de tous ses titres et bien ; il doit s'exiler en 1332. Son épouse, Jeanne de Valois (la sœur du roi), est emprisonnée à Château-Gaillard avec ses trois fils après le bannissement de son époux.

Plein de rancœur contre le roi et la France, Robert erre de ville en ville à la frontière du royaume ; partout on lui signale qu’il n’est pas le bienvenu, car on craint le roi de France. Il trouve finalement refuge en Angleterre où il incite Édouard III à réclamer la couronne de France en tant que petit-fils de Philippe le Bel.

Édouard III se laisse convaincre à l'issue d'un banquet au cours duquel Robert l'a comparé à un héron, oiseau veule et lâche, et après s’être assuré du support des dirigeants de Flandre et d’Allemagne, Édouard envoie ses émissaires à Paris pour réclamer la couronne de France. L’aristocratie française, qui sous-estime la force de l’Angleterre et de ses alliés, considère cette demande avec dérision. Après quelques escarmouches entre les deux pays, la guerre éclate. C’est le début de la guerre de Cent Ans.

Pendant ce temps, en Angleterre, l’étoile de Robert d’Artois brille de plus en plus ; Édouard III en fait un de ses principaux conseillers et le fait comte de Richmond. Servant dans l’armée anglaise, il est mortellement blessé sous les remparts de Vannes au début de la guerre de succession de Bretagne. Il meurt en 1342 et est inhumé en la cathédrale Saint-Paul de Londres.

Épilogue

Un court épilogue conclut l'ouvrage : qu’est donc devenu le vrai héritier de la couronne de France ? Le vrai fils de Louis X et de Clémence de Hongrie ?

1345 : Marie de Cressay s’éteint à Neauphle mais sur son lit de mort se délie de son terrible secret ; elle dicte une confession relatant l’échange des deux nouveau-nés de 1316. Cette lettre est portée par un moine à Cola di Rienzo, tribun influent de Rome qui se met à la recherche de Giannino Baglioni, celui que tout le monde croit être le fils de Guccio, maintenant mort.

2 octobre 1354 : Rienzi a retrouvé la trace de Giannino quelques jours auparavant. Il lui pose quelques questions sur sa vie d’enfant et tout concorde : il est bien le fils du couple royal et le lui apprend. S’il parvenait à se faire reconnaître roi de France, les Italiens pourraient reprendre influence sur la royauté française et… la papauté (car « à faux roi, faux pape ! »). Hélas, Rienzi est menacé par la conspiration tramée par des opposants dirigés par la famille Colonna qui ne le reconnaissent pas comme maître de Rome. Il envoie Giannino chercher de l’aide auprès du cardinal Albornez mais est assassiné, laissant Giannino sans soutien.

Ce dernier choisit la voie du silence puis change d’avis et essaye de trouver du soutien — lettres de Rienzo et confession de sa mère adoptive à la main — pour se faire reconnaître. A part le roi de Hongrie, personne ne le prendra au sérieux. Semant l’agitation partout où il va, il est arrêté, s’évade, est de nouveau arrêté et est emprisonné à Naples au château de l’Œuf « regardant par la fenêtre le château que sa mère, heureuse, avait quitté quarante-six ans plus tôt pour devenir reine de France ». Il meurt en 1361, seul et incompris, partageant lui aussi le terrible destin des rois maudits.

Quand un roi perd la France

C’est avec le tome 6 que s’arrête l’histoire proprement dite des Rois maudits. Dans le dernier tome de son récit « Quand un Roi perd la France », Druon raconte à travers le personnage du cardinal Hélie de Périgord, les débuts catastrophiques de la guerre de Cent Ans avec son cortège de batailles perdues pour la France, les règnes désastreux de Philippe VI de Valois et de Jean II le Bon, les tribulations du roi de Navarre, le règne de Gaston Phoebus

Ce tome est complètement distinct des autres, en particulier par son style, narré à la première personne par le personnage du cardinal, sous forme d’entretiens qu’il a au cours d’un voyage de Périgueux à Metz qui le mène à la cour de l’empereur Charles IV. C’est au cours de ce voyage qu’il raconte les péripéties du début de la guerre de Cent Ans, auxquelles il a fort participé, à son neveu et dans une moindre mesure à son secrétaire, et par leur intermédiaire, au lecteur.

Perspectives historiques des Rois maudits

Les rois légistes

Au cours du XIIIe siècle, le territoire soumis à l’autorité des rois de France s’est agrandi de plusieurs provinces : Champagne, Languedoc, Normandie, Poitou…

Philippe IV le Bel s’entoure de juristes, les légistes, qui réalisent un important travail de mise en forme des prérogatives de la Couronne. Par exemple, le roi a acquis la vicomté du Gévaudan et se trouve à ce titre vassal de son propre vassal, le comte de Gévaudan, évêque de Mende. Il s’ensuit des différends entre les agents du roi et ceux de l’évêque pour délimiter les droits de chacun. Philippe le Bel se rapproche de l’évêque Guillaume II Durand pour conclure l’acte de paréage qui fixera jusqu’à la Révolution le statut du Gévaudan. Le titre de comte est reconnu à l’évêque de Mende, mais les droits attachés au titre sont en fait partagés à parts égales entre le roi et l’évêque.

Par ailleurs, le conseil qui assiste le roi pour gouverner donne naissance à des organes plus spécialisés. Sous Philippe V le Long, sont définitivement mis en place le Parlement (1316), cour souveraine de justice, et la Cour des Comptes (1320), qui est destinée à préserver le domaine royal et à vérifier les opérations des agents du roi.

C’est contre cette évolution que réagit Charles de Valois, le frère de Philippe le Bel (cf. La Reine étranglée). Il reste attaché à une forme plus traditionnelle et médiévale de gouvernement, dans laquelle le roi est assisté par ses pairs, les grands seigneurs. Ceux-ci sont imbus de grandes idées chevaleresques et en fait peu préparés à gérer un domaine qui est en train de devenir un État.

La lutte des papes contre les empereurs : des rois capétiens à Naples

Le rayonnement des rois de France dépasse les frontières du territoire. Le frère de Saint Louis, Charles d’Anjou, connaît un destin européen. Né en 1226, il est doté de l’Anjou en 1246. Il épouse la même année Béatrice, l’héritière de la Provence. C’est alors que le pape Urbain IV le mandate pour conquérir le royaume de Sicile, en comptant sur les moyens que peuvent lui apporter la Provence, aux portes de l’Italie, et derrière lui le puissant roi de France.

Les papes sont en effet à cette époque suzerains du royaume de Sicile. Ils ont favorisé l’émergence de cet État, fondé par les Normands, pour contrebalancer en Italie l’autorité des empereurs germaniques. Le royaume de Sicile comprend l’île proprement dite, avec Palerme, ainsi que, sur le continent, la Calabre, les Pouilles et la Campanie, avec Naples. Les empereurs ont cependant contourné l’obstacle. Frédéric Barberousse a marié son fils avec l’héritière de Sicile, Constance, et son petit-fils Frédéric II est devenu à la fois empereur et roi de Sicile.

Charles d’Anjou bat le fils de Frédéric II, Manfred, et devient roi de Sicile en 1266. Cette victoire de la papauté a de lourdes conséquences puisque l’institution impériale sort considérablement affaiblie du conflit. Le Saint-Empire romain germanique n’a pas de souverain de 1254 à 1273. L’émiettement politique des territoires qui en dépendent, essentiellement l’Allemagne et l’Italie du Nord, durera jusqu’au XIXe siècle. Le succès de la maison d’Anjou ne s’arrête pas là : Charles II parvient à faire élire et reconnaître roi de Hongrie son petit-fils Charles Robert.

Le roi de France Louis X le Hutin épouse en secondes noces Clémence de Hongrie, sœur de Charles-Robert, qui lui donne un fils.

Les trois lignées de la dynastie capétienne

La première lignée par les mâles se termine par les trois fils de Philippe IV le Bel, qui règnent de 1314 à 1328 : Louis X le Hutin, Philippe V le Long et Charles IV le Bel. Le fils de Louis X, Jean Ier, a certes le privilège de naître roi mais connaît le plus court règne de l’histoire de France : quelques jours (cf. Les Poisons de la Couronne).

La deuxième lignée est issue du second fils de Philippe III le Hardi et frère de Philippe le Bel : Charles de Valois. Selon l’expression qui lui reste attachée, il a été « fils, frère et père de roi (Philippe VI), jamais roi », malgré ses titres de roi titulaire d’Aragon et d’empereur titulaire de Constantinople.

  • Les rois de la branche aînée des Valois, en particulier Charles V et Charles VII, se consacrent à affirmer leur autorité et leur légitimité, vivement contestée par les rois d’Angleterre durant la guerre de Cent Ans.
  • Les rois de la branche cadette, issue de Louis d’Orléans, second fils de Charles V, connaissent un destin plus contrasté. Certes, Louis XII et François Ier, sûrs de leur assise en France, entreprennent des projets en Italie, vains et coûteux. Mais la lignée des Valois se termine elle aussi par trois frères, François II, Charles IX et Henri III, qui subissent les affres des guerres de Religion de 1559 à 1589, en compagnie de leur mère Catherine de Médicis.

Comme pour la seconde lignée, il faut remonter d’une génération pour la troisième, c’est-à-dire à Saint Louis, père de Philippe III le Hardi et de Robert de Clermont (cf. La Loi des mâles). Le fils de ce dernier, Louis, est fait duc et pair de Bourbon (cf. La Louve de France). Louis Ier a pour fils cadet Jacques Ier de la Marche, dont le lointain descendant, Henri de Navarre, futur Henri IV, fonde la maison royale des Bourbon, à l’issue d’une guerre civile de 1584 à 1594.

  • Deux rois de la branche aînée des Bourbon, Louis XIII et Louis XIV, fondent un modèle de monarchie absolue qui est pendant un temps une référence en Europe. Encore une fois, cette branche se termine par trois frères : Louis XVI (1774-1792), Louis XVIII (1814-1824) et Charles X (1824-1830).
  • La branche cadette, issue de Philippe d’Orléans frère de Louis XIV, comprend Philippe II, Régent pendant la minorité de Louis XV, et le dernier roi des Français, Louis Philippe (1830-1848).

Du comté d’Artois à l’État bourguignon

Les maisons nobles finissent par s’éteindre pour cause d’extinction des lignées masculines, ce qui aboutit à la concentration des seigneuries entre quelques mains. L’histoire qui débute par la succession d’Artois va aboutir à l’émergence d’une vaste principauté qui prendra la forme d’un État. Mahaut d'Artois a épousé Othon IV, comte de Bourgogne, c’est-à-dire la Franche-Comté, adossée au Jura, avec Besançon et Dole. Elle capte le comté d’Artois en 1302, grâce à la mort précoce de son frère Philippe et au détriment du fils de celui-ci Robert.

Comme la comtesse perd elle-même son fils, Artois et Comté se trouvent transmis par les femmes à l’héritier du duc de Bourgogne. En effet, Philippe V le Long, qui a épousé la fille aînée de Mahaut, marie sa première fille à Eudes IV (cf. La Loi des mâles). On voit comment la sœur d’Eudes IV, Jeanne de Bourgogne, intervient auprès de son mari le roi Philippe VI pour neutraliser les prétentions de Robert d’Artois (cf. Le Lis et le Lion).

30 ans plus tard, la mort prématurée en 1361 de l’héritier du duché de Bourgogne, Philippe de Rouvres, va permettre une concentration encore plus importante. Artois et Comté reviennent en effet à Marguerite, deuxième fille de Philippe V, qui les apporte à son fils Louis de Mâle, comte de Flandre. Or, Louis de Mâle hérite déjà lui-même par les femmes du comté de Nevers, sur la Loire, et du comté de Rethel, dans les Ardennes. C’est donc un superbe héritage qui attend sa fille et héritière, Marguerite.

Pour éviter que cette dernière n’épouse un prince anglais en pleine guerre de Cent Ans, le roi Charles V lui donne pour époux son frère Philippe Le Hardi, qui a déjà été doté du duché de Bourgogne, héritage de leur grand-mère Jeanne de Bourgogne.

Le nouveau duc de Bourgogne est alors le plus puissant seigneur en France. Il entreprend une politique ambitieuse qui, poursuivie par ses successeurs, aboutira à la réunion des provinces qui forment aujourd’hui les États de Belgique et des Pays-Bas. Son fils, Jean Sans Peur, dresse en plein Paris, pour affirmer sa puissance, un donjon qui est toujours debout aujourd’hui, à l’emplacement de l’hôtel de Mahaut. Il assassine le 23 novembre 1407 son cousin Louis d’Orléans et déclenche la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons, qui va durer 25 ans.

La psychologie et le comportement des puissants

Les puissants, qu'ils soient rois, ducs, comtes, barons, papes ou encore évêques, sont souvent décrits comme égoïstes, avides d'argent et d'honneurs, voir cruels. Ils causent des conflits d'honneur et de préséance, mais aussi pour la propriété de titres prestigieux (pair de France) et de fiefs (Artois, Navarre). Charles de Valois est avide de nouveaux titres mais sans avoir de talents politiques. Il est aussi très dépensier et toujours à la recherche d’argent frais. Philippe V l’achète pour obtenir son soutien lors de son couronnement, mais c’est à Mahaut qu’il accorde l’honneur de poser la couronne sur sa tête.

L'auteur montre l'absence d'intérêt (et même le mépris total) des puissants pour le peuple saigné par les impôts, la guerre, les pillages, les viols. Robert d’Artois n’hésite pas à ravager les terres d’Artois, fief de son grand-père dont il revendique la possession. Les meurtres et les viols qu’il commet ne suscite en lui que l’amusement de repeupler la contrée par des roturiers issus de son sang.

Les seigneurs de l’époque sont la plupart du temps indifférents aux questions économiques. Ils mènent grand train de vie, dépensent leurs revenus et s’endettent sans compter auprès d’hommes d’affaires tels Toloméi. Ces derniers en profitent pour leur vendre des marchandises coûteuses et utiliser leurs confidences pour se livrer à des spéculations rémunératrices.

Lorsque certains seigneurs ont le sens de l'intérêt public et font preuve d’honnêteté, l'auteur les mets en valeur, tels Philippe V le Long ou Édouard III. Avant de mourir, Philippe Le Bel rencontre un paysan qui lui est reconnaissant d'avoir pris les mesures qui ont permis son affranchissement. L'auteur met de même en évidence certains fonctionnaires royaux particulièrement honnêtes et compétents, tels Gaucher de Châtillon, connétable de France, Alain de Pareilles, chef des arbalétriers, ou Miles de Noyers, chancelier.

Voir aussi

Liens connexes

Liens externes

Notes

  1. Ils sont traduits en anglais, en espagnol, en portugais, en allemand, en russe, en hongrois, en roumain, en bulgare et en polonais
  2. Diffusée par Livraphone
  3. 1 livre d'or = 10 000 euros, ce qui rend Valois approximativement « milliardaire ».
  4. Le narrateur évoque avec humour le coût de ce sacre pour les bourgeois de Reims, qui ont dû supporter deux sacres en deux ans.
  5. L'auteur imagine que Mortimer veut donner un ordre écrit aux geôliers d'Édouard II : cet ordre doit être compris des destinataires mais pas d'autres lecteurs. Son homme de confiance Adam Orleton lui propose d'envoyer la phrase suivante en latin : « Eduardum occidere nolite timere bonum est ». Si nolite se rapporte à occidere, on peut lire ainsi la phrase : « Ne pas tuer Édouard » (« Eduardum occidere nolite »), « il est bon de ne pas craindre de le faire » (« timere bonum est »). Dans ce premier sens, il ne faut surtout pas tuer le roi. Mais en revanche, si "nolite" se rapporte à "timere", la phrase aura le sens suivant : Tuer Édouard (Eduardum occidere), il est bon (bonum est) de ne pas avoir peur de le faire (nolite timere). Les geôliers, ayant pris connaissance du message, comprennent qu'ils doivent tuer Édouard, d'autant plus qu'un message oral accompagnait la missive ; cette consigne était : « sans traces ».

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Les Rois maudits de Wikipédia en français (auteurs)

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