- Le Vieux Cordelier numero 5
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Le Vieux Cordelier numéro 5
Le Vieux Cordelier, numéro 5, du 16 nivôse an II.
Le numéro 5 du Vieux Cordelier parut le 15 janvier 1794, ce jour-là une commission d’enquête sur les accusations portées contre Camille Desmoulins, Pierre Philippeaux et Léonard Bourdon devait déposer ses conclusions au Club des Jacobins. Inquiet, Camille Desmoulins accentua sa reculade et son journal se présenta comme un plaidoyer avant l’ouverture de la séance.
Le Vieux Cordelier, numéro 5
Conspirateur ? Il l’était en effet et bien avant 1789, écrivait-il. Conspirateur de qui et contre quoi ? De la liberté contre l’aristocratie. Il l’avait été en 1788 comme poète - Maximilien de Robespierre ne venait-il pas de le rappeler lors de la séance du 16 décembre 1793 au Club des Jacobins ? Conspirateur, il l’avait été encore au 12 juillet 1789, lorsqu’il avait ameuté le peuple au Palais-Royal. Conspirateur encore, et avec Georges Jacques Danton comme avec Maximilien de Robespierre en 1790 : les huit volumes que formaient sa France libre, la Lanterne aux Parisiens, Les Révolutions de France et de Brabant et La Tribune de patriotes étaient là pour prouver ses « conspirations contre les aristocrates de toute espèce, les royalistes, les Feuillants, les Brissotins et les « Fédéralistes ».
On n’avait qu’à mettre les scellés chez lui, l’investigateur y saisirait une multitude de suffrages, les plus honorables qu’un homme puisse recevoir, et qui venaient des quatre parties du monde ! De Jacques Necker à Jacques Pierre Brissot, jamais il n’avait varié de la ligne de la Déclaration de l’Homme et il avait toujours eu six mois, parfois dix-huit mois d’avance, sur l’opinion publique.
Il avait pu commettre certaines erreurs d’appréciation sur le patriotisme véritable de tel ou tel homme politique, il s’était finalement toujours ressaisi et il avait su les dénoncer alors même qu’on cherchait à le corrompre. À tous les avantages qu’on lui offrait pour qu’il se tût, il avait sans cesse préféré l’éventualité de l’emprisonnement. Quels patriotes de fraîche date, de ces républicains du 10 août (1792), qui le poursuivaient de leur haine pouvaient mieux que lui être l’ami du peuple ?
On montait toujours contre lui des affaires comme celle de Dillon (Arthur de Dillon) pour le discréditer. Non, il n’avait pas défendu ce général, il avait seulement demandé qu’il fut jugé pour prouver sa bonne foi. Oubliait-on les généraux aristocrates ou non que lui, Camillle Desmoulins, avait eu le courage de dénoncer alors que tous se taisaient.
Collot d’Herbois ironisait aux Jacobins sur Camille Desmoulins « tout entier livré à l’impulsion de son esprit » passant son temps « à retourner en arrière de cinq-cents ans pour offrir le tableau du temps où l’on vit patriote » et donc inapte à se placer au niveau de la Révolution. Ce membre du Comité de salut public, rétorquait Camille Desmoulins, ferait mieux de se souvenir de ses erreurs passées, lui qui n’avait pas toujours su distinguer les ennemis de la République et qui se laissait aller encore à écouter d’une oreille complaisante les flagorneries du « Père Duchesne ».
Jacques-René Hébert appelait Camille Desmoulins comme Louis-Marie Stanislas Fréron un « ci-devant patriote », « un muscadin », « un sardanapale », « un viédase ». Quel crédit pouvait-on accorder à ce calomniateur, à ce rédacteur de lettres anonymes, à cet ancien distributeur de billets à la porte des théâtres de Paris qui, aujourd’hui vivait dans le luxe, touchant de l’argent de Bouchotte), du banquier Kock et d’un agent des émigrés. Pourtant cet « effronté ambitieux » cet « avilisseur du peuple français et de la Convention », en un mot ce « scélérat » parvenait à circonvenir des hommes comme Barère et Collot d’Herbois et à les dresser contre lui en déformant les propos du « Vieux Cordelier ».
Jacques-René Hébert prétendait que Camille Desmoulins restait favorable au maintien des « maisons de suspicion » mais réclamait une clarification de la définition de suspect.
Reprenant habilement des expressions de Maximilien de Robespierre, il affirmait « J’aurai eu le mérite d’avoir fait luire le premier rayon d’espoir aux « patriotes » détenus ». » Il poursuivit « les maisons de suspicion ne ressembleront plus jusqu’à la paix à l’enfer du Dante où « il n’y a point d’espérance ». »
On l’accusait d’être le patron des aristocrates, des modérés ? Plagiant le discours de Maximilien de Robespierre sur le gouvernement révolutionnaire, il prévenait « :Que le vaisseau de la République, qui court entre les deux écueils dont j’ai parlé, s’approche trop de celui du modérantisme, on verra si j’aiderai à la manœuvre on verra si je suis un modéré ! J’ai été révolutionnaire, avant vous tous. J’ai été un brigand, et je m’en fais gloire, lorsque, dans la nuit du 12 au 13 juillet 1789, moi et le général Danican nous faisions ouvrir les boutiques d’arquebuses, pour armer les bataillons de sans-culottes. Alors j’avais l’audace de la révolution. Aujourd’hui député à l' Assemblée nationale, l’audace qui me convient et celle de la raison, celle de dire mon opinion avec franchise. Je la conserverai jusqu’à la mort, cette audace républicaine contre tous les despotes et quoique que j’ignore pas la maxime de Machiavel, « Qu’il n’y a point de tyrannie plus effrénée que celle des petits tyrans ». »
L’anarchie menaçait la République depuis que n’importe quel petit comité local, n’importe quel agent subalterne de l’État faisaient les lois. Lui, Camille Desmoulins avait eu le courage de le dire. Il avait été entendu.
Dans un retournement brusque, voici qu’il louangeait le Comité de salut public. Le Comité de salut public, ce Comité sauveur a porté remède « au démembrement de la République. Il y avait bien encore des points de friction entre lui et certains membres du Comité, mais ce n’était là que dispute domestique, « querelle de ménage ». »
Il restait attaché à la politique de Maximilien de Robespierre qui avait su « jeter l’ancre lui-même aux maximes fondamentales de notre Révolution et sur lesquelles seules la liberté peut-être affermie, et braver les efforts des tyrans et du temps ».
Dans ce numéro 5, Camille Desmoulins insinue que Jacques-René Hébert a trempé moyennant finances, dans l’ultime projet d’évasion de la Marie-Antoinette d'Autriche (complot de l'Œillet). Il dénonce les 120 000 livres de subventions que lui a accordées le général Jean-Baptiste Bouchotte pour son journal, le Père Duchesne. Il accuse Jacques-René Hébert par son extrémisme d’avoir voulu préparer la contre-révolution avec l’aide sans toutefois le mentionne Jean de Batz.
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